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13/09/2001 | FRANCE | N°1999/02820

France | France, Cour d'appel de Lyon, 13 septembre 2001, 1999/02820


COUR D'APPEL DE LYON 1ère Chambre ARRET du 13 SEPTEMBRE 2001 Décision déférée : JUGEMENT du TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE de LYON en date du 08 Mars 1999

(RG : 199712075 - Ch )

N° RG Cour : 1999/02820

Nature du recours : DECL. D'APPEL Code affaire : 399 Avoués :

Parties : - SCP JUNILLON-WICKY . SA CONSTRUCTION D APPAREILS DE REEDUCATION ET D ENTRAINEMENT (CARE) dont le siège social est : 18-22 rue Bernard, ZI 93000 BOBIGNY Représentée par ses dirigeants légaux Avocat : Maître COMBEAU

APPELANTE

---------------- - SCP AGUIRAUD-NOUVELLET

. SARL CARE CONCEPT dont le siège social est : 40 avenue Guy Collongue 69130 ECULLY Représentée...

COUR D'APPEL DE LYON 1ère Chambre ARRET du 13 SEPTEMBRE 2001 Décision déférée : JUGEMENT du TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE de LYON en date du 08 Mars 1999

(RG : 199712075 - Ch )

N° RG Cour : 1999/02820

Nature du recours : DECL. D'APPEL Code affaire : 399 Avoués :

Parties : - SCP JUNILLON-WICKY . SA CONSTRUCTION D APPAREILS DE REEDUCATION ET D ENTRAINEMENT (CARE) dont le siège social est : 18-22 rue Bernard, ZI 93000 BOBIGNY Représentée par ses dirigeants légaux Avocat : Maître COMBEAU

APPELANTE

---------------- - SCP AGUIRAUD-NOUVELLET . SARL CARE CONCEPT dont le siège social est : 40 avenue Guy Collongue 69130 ECULLY Représentée par ses dirigeants légaux Avocat : Maître GODARD

INTIMEE

---------------- INSTRUCTION CLOTUREE le 26 Juin 2000 DEBATS : en audience publique du 22 Mai 2001 COMPOSITION DE LA COUR, lors des débats et du délibéré : - monsieur CHAUVIRE, président, - monsieur DURAND, conseiller, - monsieur GOURD, conseiller, assistés pendant les débats de madame KROLAK, greffier, ARRET : contradictoire prononcé à l'audience publique du 13 SEPTEMBRE 2001 par monsieur GOURD, conseiller, remplaçant le président empêché, qui a signé la minute avec le greffier. EXPOSÉ DU LITIGE

La société anonyme Construction d'appareils de rééducation et d'entraînement a déposé à l'Institut national de la propriété industrielle, le 21 mars 1979, sous le numéro 117215 la marque CARE qui a été enregistrée sous le numéro 1519396 et renouvelée les 15 mars 1989 et 2 octobre 1998, pour désigner des produits ou services des classes 10, 12 et 28 de la nomenclature internationale des marques, et, le 31 juillet 1980, sous le numéro 227753 la marque C.A.R.E., qui a été enregistrée sous le numéro 1660925 et renouvelée les 24 juillet 1990 et 23 février 2000, pour désigner des produits ou services des classes 10, 12 et 28 de la nomenclature internationale des marques.

Le 29 septembre 1994, Monsieur Pierre X..., agissant pour le compte de la société à responsabilité limitée Care concept en cours de création, a déposé à l'Institut national de la propriété industrielle sous le numéro 35330 la marque CARE ( ) CONCEPT qui a été enregistrée sous le numéro 94538726 pour désigner des produits ou services des classes 9, 10 et 42 de la nomenclature internationale des marques.

Saisi par la société Construction d'appareils de rééducation et d'entraînement d'une demande principale tendant à ce que soit prononcée la nullité de la marque CARE ( ) CONCEPT, à ce qu'il soit fait interdiction à la société Care concept de faire usage de la dénomination CARE et à la condamnation de ladite société à modifier sa dénomination sociale ainsi que par la société Care concept d'une demande reconventionnelle en déchéance des marques CARE et C.A.R.E., le tribunal de grande instance de Lyon a, par jugement du 8 mars 1999, débouté la société Construction d'appareils de rééducation et d'entraînement et la société Care concept de leurs prétentions respectives et dit n'y a voir lieu à faire application des

dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Ayant interjeté appel de cette sentence par une déclaration faite le 23 avril 1999, la société Construction d'appareils de rééducation et d'entraînement fait valoir au soutien de son recours que le jugement encourt la critique en ce que, pour rejeter sa demande de nullité de la marque CARE ( ) CONCEPT, il énonce que le terme CARE, qui signifie soin en anglais, serait actuellement largement compris du public français, que son usage serait très répandu pour des produits liés aux soins médicaux et de santé et qu'en conséquence l'adjonction du mot CONCEPT au mot CARE serait suffisante pour créer un nouvel ensemble dans lequel le mot CARE perdrait son individualité, alors, d'une part, qu'il n'est pas démontré que le sens du terme CARE ait été compris des consommateurs français aux dates de dépôt des marques C.A.R.E. et CARE, auxquelles il faut se placer pour apprécier son caractère distinctif pour des appareils médicaux, ni même qu'il le soit actuellement, en sorte que les marques C.A.R.E. et CARE sont valables, d'autre part, que l'adjonction du terme CONCEPT au mot CARE ne saurait lui faire perdre son individualité ni exclure la contrefaçon dans la mesure où l'expression CARE CONCEPT ne peut être considérée comme un tout indivisible, le mot CONCEPT évoquant une idée abstraite et générale et ayant pour unique effet de mettre en relief le terme CARE. Elle estime, dans ces conditions, que la marque CARE ( ) CONCEPT dont est titulaire la société Care concept constitue la contrefaçon des marques CARE et C.A.R.E. dont elle est titulaire. Elle considère ensuite que le jugement a relevé à tort que les domaines d'activités des parties en présence apparaissaient distincts alors que cela est inopérant en matière de contrefaçon de marque et

qu'au surplus cela est inexact non seulement parce que les marques concernées désignent des produits identiques ou, à tout le moins, similaires, mais aussi parce que les deux sociétés ont des activités concernant notamment le matériel médical et paramédical, si bien qu'il existe un risque de confusion entre les marques en présence.

Elle indique ensuite que c'est à juste titre que le tribunal a décidé que la demande de déchéance des marques CARE et C.A.R.E. formée par la société Care concept n'était pas fondée puisqu'il est établi par de nombreux documents ayant date certaine qu'elle a fait un usage régulier de ces marques tant pour des cycles d'appartement que pour des appareils médicaux professionnels.

Elle considère que dès l'instant où les marques CARE et C.A.R.E. sont valables et où leur déchéance ne peut être prononcée, la marque CARE ( ) CONCEPT numéro 94538726 qui porte atteinte aux droits antérieurs que constituent les marques CARE et C.A.R.E. doit être annulée, cette annulation devant porter sur l'ensemble des produits ou services visés au dépôt.

Elle estime aussi que la raison sociale de la société Care concept porte atteinte aux marques qu'elle a déposées dès lors qu'elle a un domaine d'activité similaire au sien ainsi que cela ressort de l'extrait du registre du commerce et des sociétés produit et que dans ces conditions il doit lui être imposé d'en changer.

Elle demande en conséquence que le jugement déféré soit infirmé, qu'il soit dit et jugé que la marque CARE ( ) CONCEPT constitue la contrefaçon des marques CARE numéro 1519396 et C.A.R.E. numéro 1660925 pour les produits et services des classes 9, 10 et 42 de la

nomenclature internationale des marques, qu'il soit fait défense à la société Care concept de faire usage du terme CARE sous quelque forme que ce soit et à quelque titre que ce soit et, notamment, à titre de marque, de dénomination sociale, de nom commercial ou d'enseigne pour les produits ou services des classes 9, 10 et 42 de la nomenclature internationale et ce sous astreinte définitive et non comminatoire de 10.000 francs par infraction caractérisée à compter du jour de la signification de l'arrêt, que soit prononcée la nullité de la marque CARE ( ) CONCEPT numéro 94538726 par application de l'article L.714-3 du Code de la propriété intellectuelle et qu'en soit ordonnée la radiation, qu'il soit dit que le greffe de la cour d'appel transmettra directement l'arrêt à l'Institut national de la propriété industrielle en vue de la radiation de l'enregistrement CARE ( ) CONCEPT numéro 94538726, qu'il soit dit et jugé que la société Care concept devra justifier de ce qu'elle a fait procéder à une inscription modificative de sa dénomination sociale au registre du commerce et des sociétés de manière que soit exclu de sa dénomination sociale le terme CARE, et ce dans les quinze jours suivant la signification de l'arrêt, et ce sous une astreinte définitive et non comminatoire de 5.000 francs par jour de retard, que la société Care concept soit condamnée à lui payer la somme de 80.000 francs à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice que lui a causé la contrefaçon de ses marques, que soit ordonnée la publication de l'arrêt dans trois journaux ou périodiques de son choix, que la société Care concept soit condamnée à lui payer la somme de 20.000 francs en vertu de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. La société Care concept réplique que les marques numéros 1519396 et 1660925 de la société Construction d'appareils de rééducation et

d'entraînement désignent, entre autres produits ou services, les appareils médicaux et en particulier les cycles de rééducation, seul domaine commun avec la marque CARE ( ) CONCEPT qu'elle a déposée pour désigner notamment des appareils et instruments chirurgicaux, médicaux, dentaires et vétérinaires, des appareils de diagnostic clinique et de traitement par rééducation des pathologies articulaires, osseuses et neuro-musculaires et des appareils médicaux et chirurgicaux destinés à l'orthopédie ; que, contrairement à ce qu'ont retenu le premiers juges en se fondant sur les catalogues produits par la société Construction d'appareils de rééducation et d'entraînement qui, pourtant, ne prouvent nullement un usage personnel par cette société des marques litigieuses, la société Construction d'appareils de rééducation et d'entraînement ne justifie pas d'une exploitation effective de ses marques pour les appareils médicaux, à l'exception de la marque numéro 1660925 (C.A.R.E.), qui semble avoir été apposée avec régularité sur des cycles d'appartement ou d'autres articles proches.

Elle estime donc que sa demande de déchéance doit être accueillie pour les appareils médicaux, à l'exception des cycles de rééducation. Elle répond encore que la demande d'annulation formée par la société Construction d'appareils de rééducation et d'entraînement ne saurait prospérer dans la mesure où l'ensemble semi-figuratif CARE ( ) CONCEPT constitue un tout indivisible dans lequel le mot CARE s'est fondu et a perdu toute individualité, où le mot CARE n'a aucun pouvoir distinctif, comme le confirme le fait qu'il est exclusivement employé dans des dénominations complexes et où à l'inverse le mot CONCEPT, qui a été utilisé soit isolément, soit comme un élément de

marque dénominative, a un sens propre qui concourt à lui conférer un caractère distinctif, ce dont il suit qu'il n'est pas assimilable aux mots formule, façon, etc... visés à l'article L.713-2 du Code de la propriété intellectuelle.

Elle rétorque aussi que dès l'instant où il a été démontré que la marque numéro 94538726 CARE ( ) CONCEPT ne portait pas atteinte aux droits que la société Construction d'appareils de rééducation et d'entraînement tient de ses propres marques, l'utilisation de cette marque ne peut constituer un acte de contrefaçon au sens des articles L.713-2 ou L.713-3 du Code de la propriété intellectuelle.

Elle indique enfin que la demande en modification de dénomination sociale ne peut davantage être accueillie qu'elle soit fondée sur les droits que la société Construction d'appareils de rééducation et d'entraînement tire de ses marques ou sur ceux qu'elle tire de la protection de sa propre dénomination sociale.

Elle fait en effet valoir à cet égard, d'une part, qu'il a été démontré précédemment que le signe CARE ( ) CONCEPT pris comme marque ne porte pas atteinte aux droits que l'appelante tient de ses marques, en sorte que cela est également vrai de l'utilisation comme dénomination sociale des termes CARE CONCEPT, d'autre part, que la société Construction d'appareils de rééducation et d'entraînement n'est pas recevable à revendiquer une protection particulière du signe C.A.R.E. qui ne constitue pas sa dénomination sociale et qu'en tout état de cause, une telle revendication n'est pas fondée puisqu'il n'existe de risque de confusion ni entre les parties ni entre leurs produits respectifs.

Elle conclut donc à la réformation du jugement attaqué en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de déchéance des marques françaises numéros 1519396 et 1660925 pour les appareils médicaux, à l'exception des cycles de rééducation, à sa confirmation en ce qu'il a débouté la société Construction d'appareils de rééducation et d'entraînement de ses prétentions et à la condamnation de ladite société à lui payer la somme de 30.000 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la déchéance des marques CARE et C.A.R.E.

Attendu que l'article L.714-5 du Code de la propriété intellectuelle dispose :

"Encourt la déchéance de ses droits le propriétaire de la marque qui, sans motifs, n'en a pas fait un usage sérieux, pour les produits ou services visés dans l'enregistrement, pendant une période ininterrompue de cinq ans.

Est assimilé à un tel usage :

a) l'usage fait avec le consentement du propriétaire de la marque ou, pour les marques collectives, dans les conditions du règlement ;

b) l'usage de la marque sous une forme modifiée n'en altérant pas le caractère distinctif ;

c) l'apposition de la marque sur des produits ou leur conditionnement exclusivement en vue de l'exportation.

La déchéance peut être demandée en justice par toute personne intéressée. Si la demande ne porte que sur une partie des produits ou des services visés dans l'enregistrement, la déchéance ne s'étend qu'aux produits et services concernés..." ;

Attendu, en l'espèce, que la société Care concept a un intérêt à demander la déchéance des droits de la société Construction d'appareils de rééducation et d'entraînement, propriétaire des marques CARE et C.A.R.E., dès lors que cette dernière forme contre elle une demande en contrefaçon de marque ; qu'il convient donc d'examiner si cette demande est fondée ;

Attendu que les marques CARE et C.A.R.E. dont est propriétaire la société Construction d'appareils de rééducation et d'entraînement couvrent les produits suivants : appareils médicaux et en particulier cycles de rééducation, bicyclettes, tricycles, articles de gymnastique et de sport, en particulier cycles d'entraînement, lesquels relèvent des classes 10,12 et 28 de la nomenclature internationale des marques ;

Attendu que la société Construction d'appareils de rééducation et d'entraînement verse aux débats : - un catalogue de vente par correspondance destiné aux seuls kinésithérapeutes intitulé "Promo kiné", édition 1989, proposant en particulier à la vente en pages 43 et 44, cinq modèles de bicyclette de rééducation portant la marque C.A.R.E. et en pages 45 et 46 trois rameurs, un modèle de planche destinée au travail des abdominaux et un modèle de banc de musculation portant tous la marque CARE, - un catalogue Promo kiné", édition 1990, valable jusqu'en 1991, offrant à la vente notamment

deux modèles de bicyclette de rééducation de marque C.A.R.E., - un catalogue dénommé "Matériel médical à domicile" sur lequel apparaît la date du 22 janvier 1991 proposant en particulier à la vente un modèle de bicyclette d'appartement et un modèle de rameur portant l'un la marque C.A.R.E. et l'autre la marque CARE, - un catalogue "Promo kiné", édition 1991/1992, offrant notamment à la vente six modèles de bicyclette de rééducation ou d'entraînement portant pour quatre d'entre eux la marque C.A.R.E. et pour les deux autres la marque CARE, ainsi qu'un modèle de tapis de marche portant la marque CARE, - un catalogue "Promo kiné", édition 1993/1994, proposant notamment à la vente deux modèles de bicyclette de rééducation de marque C.A.R.E., - un modèle de bon de commande portant la mention "Nouvelle gamme professionnelle cardio-fitness disponible en novembre 1994", au verso duquel est en particulier offert à la vente des bicyclettes de rééducation ou d'entraînement de marque C.A.R.E., - un catalogue "Promo kiné", édition 1994/1995, proposant notamment à la vente sept modèles de bicyclette de rééducation portant la marque C.A.R.E. et cinq modèles de rameur portant cette même marque, - un catalogue "Fournitures générales pour centres de kinésithérapie et de médecine physique F.G.C.K. Couverchel" proposant à la vente notamment des bicyclettes de rééducation de marque C.A.R.E., portant un numéro de téléphone à huit chiffres, ce dont il résulte que le document est antérieur à octobre 1996, - un catalogue "Distri club médical" 1996 offrant à la vente en page 176 un modèle de bicyclette de rééducation, un modèle de bicyclette d'entraînement et un modèle de tapis de marche portant tous les trois la marque C.A.R.E., en page 196 un appareil combinant la bicyclette d'appartement avec le rameur et deux modèles de bicyclette d'appartement portant les unes et les autres la marque C.A.R.E., ainsi qu'en page 197 un rameur, une planche destinée au travail des abdominaux, un banc de musculation

portant les deux premiers la marque C.A.R.E. et le dernier la marque CARE, - un catalogue intitulé "Le médical au BHV" comportant un bon de commande type daté de mai 1996 et offrant à la vente en page 80 des "vélos de santé" de marque C.A.R.E., - un catalogue "NM médical option kiné", édition hiver 1997/1998, proposant à la vente trois modèles de bicyclette de rééducation ou d'entraînement portant pour d'eux d'entre eux la marque C.A.R.E. et pour le dernier la marque CARE ;

Attendu qu'il apparaît ainsi qu'en offrant à la vente, fût-ce par le truchement de distributeurs qu'elle avait autorisés à user des marques dont elle était propriétaire, la société Construction d'appareils de rééducation et d'entraînement a fait un usage sérieux des dites marques pour les produits visés dans l'enregistrement, sans interruption pendant une période de cinq ans ;

Que, dès lors, le jugement mérite confirmation en ce qu'il a rejeté la demande de déchéance formée par la société Care concept ; Sur l'annulation de la marque CARE ( ) CONCEPT

Attendu, aux termes de l'article L.713-3 du Code de la propriété intellectuelle, que sont interdits, sauf autorisation du propriétaire, s'il peut en résulter un risque de confusion dans l'esprit du public : a) la reproduction, l'usage ou l'apposition d'une marque, ainsi que l'usage d'une marque reproduite, pour des produits ou services similaires à ceux désignés dans l'enregistrement, b) l'imitation d'une marque et l'usage d'une marque imitée pour des produits ou services identiques ou similaires à ceux désignés dans l'enregistrement ;

Attendu, en l'espèce, que l'ensemble CARE ( ) CONCEPT ne peut être considéré comme ayant en soi sa signification et comme se distinguant des marques antérieures CARE et C.A.R.E. dès lors que si terme CARE présente un caractère distinctif, s'agissant d'un vocable anglo-saxon qui, n'étant pas entré dans l'usage courant en France, n'est pas immédiatement compréhensible pour le consommateur moyen, tel n'est pas le cas en revanche du terme CONCEPT qui, ayant un sens très général puisqu'il se définit comme la représentation intellectuelle d'un objet conçu par l'esprit ou, dans un sens dérivé, comme la manière de concevoir un produit ou un service, est assimilable aux termes de formule, façon, système, imitation, genre, méthode auxquels l'article L.713-2 exclut expressément tout caractère distinctif ;

Qu'ainsi la marque CARE ( ) CONCEPT constitue-t-elle la reproduction des marques CARE et C.A.R.E. ;

Attendu que la société Care concept a fait enregistrer la marque CARE ( ) CONCEPT pour couvrir les produits ou services suivants de la classe 9 de la nomenclature internationale des marques : appareils et instruments scientifiques, électriques, électroniques, notamment ordinateurs, installations de traitement, de stockage et d'échange de données, logiciels, progiciels systèmes experts notamment à usage médical, les produits ou services de la classe 10 suivants :

appareils et instruments chirurgicaux, médicaux, dentaires et vétérinaires, appareils de diagnostic clinique, appareils de traitement par rééducation des pathologies articulaires, osseuses et neuro-musculaires, appareils médicaux et chirurgicaux destinés à l'orthopédie, matériel de suture, et les produits ou services de la classe 42 suivants : conseil en ingénierie technique, ingénierie relative aux logiciels, progiciels, systèmes experts à usage médical,

exploitation d'établissements paramédicaux de soins, de repos et de remise en forme, services de soins et de conseils en matière de soins et de progiciels, notamment destinés aux établissements de soins, de repos, de centres de remise en forme, aux professionnels de la santé, aux soins à domicile ;

Attendu que ces produits ou services sont soit, comme les produits de la classe 10 ou les ordinateurs et installations de traitement, de stockage et d'échange de données équipant certains des appareils que la société Construction d'appareils de rééducation et d'entraînement offre à la vente, identiques à ceux désignés par l'enregistrement des marques CARE et C.A.R.E., soit similaires ou complémentaires de ces produits, dont il convient de souligner qu'ils sont pour une partie destinées à des professionnels de la santé ou à des établissements de soins médicaux ou paramédicaux ;

Attendu, par suite, qu'il existe un risque de confusion dans l'esprit du public ;

Attendu qu'il convient en conséquence de faire droit à la demande de la société Construction d'appareils de rééducation et d'entraînement en annulation de la marque CARE ( ) CONCEPT pour l'ensemble des produits ou services visés au dépôt et de faire défense à la société Care concept de l'utiliser, y compris à titre de dénomination sociale ;

Attendu, de même, qu'il doit être fait droit à la demande de cette société en dommages-intérêts en réparation du préjudice que lui a causé la contrefaçon des marques dont elle est propriétaire, sauf à limiter le montant de l'indemnité réclamée à la somme de 20.000

francs, somme suffisante pour réparer le préjudice subi ;

Attendu, en revanche, qu'il y a lieu de débouter la société Construction d'appareils de rééducation et d'entraînement de sa demande de publication de l'arrêt ;

Attendu qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de la société Construction d'appareils de rééducation et d'entraînement l'intégralité des frais non compris dans les dépens par elle exposés pour les besoins du procès ; qu'il convient de condamner la société Care concept à lui payer à ce titre la somme de 15.000 francs ;

Attendu que la société Care concept, qui succombe, doit être condamnée aux dépens et déboutée de sa demande fondée sur l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; PAR CES MOTIFS,

La COUR,

Confirme le jugement rendu le 8 mars 1999, entre les parties, par le tribunal de grande instance de Lyon en ce qu'il a débouté la société Care concept de sa demande de déchéance des marques CARE et C.A.R.E, Le réformant pour le surplus de ses dispositions,

Prononce la nullité, pour l'ensemble des produits et services désignés, de la marque CARE ( ) CONCEPT enregistrée sous le numéro 94538726,

Fait défense à la société Care concept de faire usage du terme CARE sous quelque forme que ce soit et à quelque titre que ce soit, notamment à titre de marque, de dénomination sociale, de nom commercial ou d'enseigne pour les produits ou services des classes 9, 10 et 42 de la nomenclature internationale des marques et ce sous astreinte de 10.000 francs par infraction constatée passé le délai d'un mois à compter de la signification du présent arrêt,

Condamne la société Care concept à payer à la société Construction d'appareils de rééducation et d'entraînement la somme de 20.000 francs à titre de dommages-intérêts,

Déboute la société Construction d'appareils de rééducation et d'entraînement de sa demande de publication de l'arrêt dans des journaux ou périodiques aux frais de la société Care concept,

Déboute la société Construction d'appareils de rééducation et d'entraînement de sa demande tendant à ce que la société Care concept justifie sous astreinte de son changement de dénomination sociale,

Condamne la société Care concept à payer à la société Construction d'appareils de rééducation et d'entraînement la somme de 15.000 francs par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

Déboute la société Care concept de sa demande fondée sur l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

Dit que le greffe transmettra une expédition du présent arrêt à l'Institut national de la propriété industrielle,

Condamne la société Care concept aux dépens de première instance et d'appel,

Dit que la société civile professionnelle JUNILLON et WICKY, titulaire d'un office d'avoué, pourra recouvrer directement contre la société Care concept ceux des dépens dont elle a fait l'avance sans avoir reçu provision. LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Numéro d'arrêt : 1999/02820
Date de la décision : 13/09/2001

Analyses

MARQUE DE FABRIQUE - Protection - Contrefaçon - Contrefaçon par imitation - Risque de confusion

Si l'ensemble "CARE CONCEPT" ne peut être considéré comme ayant en soi sa signification et comme se distinguant des marques antérieures Care et C.A.R.E dès lors que le terme care présente un caractère distinctif, s'agissant d'un vocable anglais qui n'est pas immédiatement compréhensible pour le consommateur moyen, tel n'est pas le cas pour le terme concept qui ayant un sens très général est assimilable aux termes de formule, façon, système, imi- tation, genre, méthode auxquels l'article L.713-2 du Code de la propriété intel- lectuelle exclut expressément tout caractère distinctif. Ainsi, en application de l'article L.713-3 du Code de la propriété intellectuelle, la marque "CARE CONCEPT" constitue la reproduction des marques CARE et C.A.R.E, la société intimée ayant fait enregistrer des produits ou services identiques à ceux désignés par l'enregistrement des deux autres marques, dont il convient de souligner qu'ils sont pour une partie destinés à des professionnels de la santé ou à des établis- sements de soins médicaux ou paramédicaux. Il s'ensuit qu'il existe un risque de confusion dans l'esprit du public et qu'il convient de faire droit à la demande en annulation de la marque pour l'ensemble de ses produits et services, et de faire défense à la société de l'utiliser , y compris à titre de dénomination sociale


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.lyon;arret;2001-09-13;1999.02820 ?
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