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04/03/2013 | FRANCE | N°12/00060

France | France, Cour d'appel de Limoges, Chambre speciale des mineurs, 04 mars 2013, 12/00060


COUR D'APPEL DE LIMOGES CHAMBRE SPECIALE DES MINEURS

ARRET DU 04 MARS 2013 ARRET N. RG N : 12/ 00060
AFFAIRE :
Mme Evelyne Aimée X...
M. Jean Paul Alphonse Y...
DEPARTEMENT DE LA CORREZE-SERVICE DE L'AIDE SOCIALE A L'ENFANCE
ER/ MCM ASSISTANCE EDUCATIVE

A l'audience de la CHAMBRE SPECIALE DES MINEURS de la COUR D'APPEL de LIMOGES du QUATRE MARS DEUX MILLE TREIZE, l'arrêt suivant a été prononcé, en CHAMBRE DU CONSEIL, sur l'appel d'une décision rendue le 13 SEPTEMBRE 2012, par le JUGE DES ENFANTS DE BRIVE LA GAILLARDE.
COMPOSITION DE LA COUR PRESIDE

NT : Eliane RENON, Conseiller, délégué à la Protection de l'enfance ; CONSEILLERS :...

COUR D'APPEL DE LIMOGES CHAMBRE SPECIALE DES MINEURS

ARRET DU 04 MARS 2013 ARRET N. RG N : 12/ 00060
AFFAIRE :
Mme Evelyne Aimée X...
M. Jean Paul Alphonse Y...
DEPARTEMENT DE LA CORREZE-SERVICE DE L'AIDE SOCIALE A L'ENFANCE
ER/ MCM ASSISTANCE EDUCATIVE

A l'audience de la CHAMBRE SPECIALE DES MINEURS de la COUR D'APPEL de LIMOGES du QUATRE MARS DEUX MILLE TREIZE, l'arrêt suivant a été prononcé, en CHAMBRE DU CONSEIL, sur l'appel d'une décision rendue le 13 SEPTEMBRE 2012, par le JUGE DES ENFANTS DE BRIVE LA GAILLARDE.
COMPOSITION DE LA COUR PRESIDENT : Eliane RENON, Conseiller, délégué à la Protection de l'enfance ; CONSEILLERS : Christine MISSOUX-SARTRAND et Gérard SOURY, MINISTERE PUBLIC : Jean-Michel DESSET, Avocat Général, GREFFIER : Marie-Christine MANAUD,
Le Président et les Conseillers sus-désignés en ayant seuls délibérés conformément à la Loi ;
PARTIES DEVANT LA COUR
ENTRE :
Madame Evelyne Aimée X..., demeurant ... COMPARANTE-assistée de Me Michel LABROUSSE, avocat au barreau de BRIVE-LA-GAILLARDE (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2012/ 5995 du 15/ 11/ 2012 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Limoges)
APPELANTE
ET :
Monsieur Jean Paul Alphonse Y..., demeurant... NON COMPARANT
DEPARTEMENT DE LA CORREZE-SERVICE DE L'AIDE SOCIALE A L'ENFANCE, demeurant Hôtel du Département Marbot-B. P. 199-19055 TULLE CEDEX représenté par Monsieur RIOUX ;
EN PRESENCE DE :
Monsieur le PROCUREUR GENERAL,

DEROULEMENT DES DEBATS
A l'audience du 11 Février 2013, en Chambre du Conseil ;
Madame le Président a été entendue en son rapport ;
Monsieur RIOUX a été entendu en ses explications ;
Madame X... a été entendue en ses explications ;
Maître LABROUSSE, avocat, a présenté les moyens d'appel de Mme X... ;
Le Ministère Public a été entendu en ses réquisitions ;
Puis, l'affaire a été mise en délibéré à l'audience du 04 Mars 2013, Madame le Président en ayant avisé les parties.

En juin 2006 l'aide sociale à l'enfance de la Corrèze a signalé la situation du mineur Damien Y... né le 19 décembre 2000 dont les parents sont séparés, la mère Mme X... s'opposant au droit de visite médiatisé accordé au père et ayant à l'égard de l'enfant un discours négatif tout en ayant des difficultés à se séparer de lui ; une mesure d'assistance éducative en milieu ouvert (AEMO) avait été levée en 2003 après un an de mise en oeuvre ; le signalement faisait suite à un appel anonyme dénonçant des mauvais traitements commis par un voisin gardant ponctuellement Damien ;
Il était noté que Mme X... avait des difficultés à répondre aux besoins éducatifs de son fils qui présentait des troubles du comportement et un retard dans les acquisitions mais refusait toute aide, persuadée que Damien étant comme son père, ne pourrait évoluer ;
La mesure d'AEMO qui était préconisée a été instaurée pour deux ans par jugement du 7 septembre 2006 et le 28 février 2007 l'ASEAC a alerté le juge des enfants sur la situation de Damien :
une mère engluée dans le conflit conjugal, ne supportant pas que M. Y... ait refait sa vie, se plaignant d'être harcelée alors même qu'après une reprise de contact positive entre le père et le fils, elle a elle-même adressé une dizaine de messages contenant des propos d'une grande violence et des menaces de tout ordre ;
Le 15 mars 2007 le juge des enfants a donc ordonné un examen psychologique de Mme X... dont les conclusions ont été les suivantes :
* l'ensemble de l'examen pose l'hypothèse d'une fragilité psychique, de troubles de la personnalité qu'un examen psychiatrique pourrait objectiver, * le sujet ne présente pas de déficience mentale mais un jugement et un raisonnement rigides et parfois altérés avec peu de capacités d'analyse, d'autocritique et une rigidité de la pensée parfois à la limite de la dissociation, * il s'agit d'un sujet dépendant chez lequel existe une instabilité de l'humeur et une forte réactivité et qui a besoin d'une aide médico-psychologique, * les dispositions de sa personnalité peuvent constituer une entrave dans son lien à l'autre dans la mesure où il lui est difficile de se décentrer d'elle-même, de sa propre pensée pour envisager le vécu de l'autre, percevoir le désir de l'autre bien différencié du sien et en cela elle a besoin d'une aide dans l'accompagnement de son enfant ;
La mesure d'AEMO a donc été renouvelée pour un an le 5 septembre 2008 et un examen psychologique de Damien mis en oeuvre ;
Mme Z... qui a procédé à cet examen a relevé que :
- Damien avait une personnalité fragile, présentant une insécurité intérieure massive, une estime de soi effondrée dans le cadre d'éprouvés très dépressifs et était confronté à des angoisses extrêmement envahissantes paralysant sa pensée et sans doute à l'origine de ses difficultés d'apprentissage,
- il était aux prises avec une relation très complexe à sa mère, se sentant investi d'un devoir de protection ce qui entrave sa relation à son père et le place dans une situation douloureuse, tout lien avec un tiers constituant un acte déloyal envers la mère,
- cette situation compromet gravement son développement psychoaffectif et nécessite un suivi thérapeutique, un suivi orthophonique et une mesure éducative à long terme ;
Le 30 janvier 2009 le juge aux affaires familiales a fixé au profit de M. Y... un droit de visite devant s'exercer, à défaut d'accord, de manière progressive et a mis à la charge de celui-ci une contribution alimentaire, décision qui a été confirmée en appel ;
Le 9 juin 2009 Mme X... a été condamnée à 2 mois d'emprisonnement avec sursis et mise à l'épreuve pour non représentation d'enfant et la mesure d'AEMO a été renouvelée pour 6 mois par jugement du 3 septembre 2009 qui a, en application des dispositions de l'article 375-2 al 2 du code civil, fait obligation à la mère de mettre en place des suivis thérapeutique et orthophoniste au profit de Damien ;
Un examen psychiatrique de Mme X... a également été ordonné et a mis en évidence, en l'absence d'anomalie mentale ou psychique, une personnalité fruste, des capacités d'investissement affectif et des possibilités d'adaptation relationnelle modestes, une possibilité limitée de prendre conscience de ses défaillances et d'y remédier et a conclu que sa capacité à exercer ses fonctions parentales était limitée et nécessitait d'être soutenue et accompagnée par des mesures de guidance ;
Le mesure d'AEMO a ainsi été renouvelée pour un an par jugement du 8 mars 2010, Damien étant scolarisé en CLISS et bénéficiant d'une rééducation orthophonique ;
Constatant que les objectifs de l'AEMO n'avaient pas été atteints, Mme X... se complaisant dans une victimisation et faisant porter la responsabilité de la situation sur la violence de M. Y... tout en lui reprochant de ne pas se manifester auprès de l'enfant, le juge des enfants a, par ordonnance du 8 mars 2011, mis en oeuvre une mesure d'investigation et d'orientation éducative (IOE) tout en maintenant l'AEMO pour six mois ;
Le travail interdisciplinaire effectué dans le cadre de l'IOE a permis de mettre à jour les éléments suivants :
* la problématique se situe dans la relation mère/ fils qui est exclusive, Damien n'étant pas perçu par sa mère comme un sujet différencié et Mme X... n'étant pas dans une perspective d'autonomisation pour son fils ce qui compromet gravement le développement psychoaffectif et social du mineur * l'AEMO seule n'est plus en mesure de protéger Damien car Mme X... n'a pas montré la possibilité de remise en question nécessaire à l'investissement d'un travail à la parentalité * M. Y... semble vouloir reprendre sa place de père mais ne peut envisager d'accueillir Damien à plein temps compte tenu de ses relations avec son ex compagne
Il a conclu à la nécessité d'un placement en famille d'accueil avec une orientation thérapeutique et un accompagnement des retrouvailles père/ fils
Par jugement rendu le 15 septembre 2011 le juge des enfants a :- confié pour un an Damien au département de la Corrèze,- accordé aux parents, après une rupture totale de liens pendant un mois, un droit de visite médiatisé à minima une fois par mois et, sur l'appel formé par Mme X..., la cour a, par arrêt rendu le 20 février 2012, confirmé la décision en accordant à la mère un droit de visite et d'hébergement une fin de semaine sur deux ;
Le rapport de fin de mesure du 3 septembre 2012 relève :
* que Damien a trouvé des appuis étayants et structurants qui lui ont permis de s'autonomiser et d'exprimer ses propres choix, la disparition de la problématique d'énurésie démontrant qu'il a trouvé une sécurité affective mais il a besoin du soutien de l'adulte pour s'inscrire dans une dynamique d'apprentissage ; * que Mme X... a changé de discours, se centrant davantage sur les besoins de son fils que sur ses griefs à l'encontre de M. Y... mais est toujours dans la victimisation, ne parvient pas à accéder à une remise en cause et n'a pas conscience des effets de son fonctionnement sur le développement psychique de Damien, *que M. Y... se protège en refusant tout contact avec son fils sans mesurer l'impact de son désinvestissement ;
Il conclut que la mainlevée de la mesure permettrait à Mme X... de prendre le rôle de bonne mère qu'elle revendique mais suppose qu'elle autorise son fils à grandir et être bien sans elle sur du long terme.
Par jugement rendu le 13 septembre 2012 le juge des enfants a renouvelé le placement de Damien jusqu'au 30 septembre 2012 en accordant à la mère un droit de visite et d'hébergement tous les week end et a, pour la suite, instauré une mesure d'AEMO confiée pour un an au département de la Corrèze en subordonnant cette mesure à une obligation d'internat pour le mineur et à la poursuite par la mère de son suivi thérapeutique et a prévu la possibilité d'un hébergement exceptionnel ou périodique en application des dispositions de l'article 375-2 al 2 du code civil.
Appelante de cette décision Mme X... en sollicite la réformation exclusivement et contrairement à son mémoire écrit en ce qu'elle a subordonné la mesure d'AEMO à l'obligation pour Damien d'être scolarisé en internat ; elle rappelle qu'elle s'est toujours occupée seule de son fils dont le père ne s'est manifesté que de manière sporadique et qu'elle a tout mis en oeuvre pour récupérer ses droits et mettre fin à une séparation génératrice de souffrance pour les deux ; elle fait valoir que le juge des enfants a commis un détournement de pouvoir en imposant une autre forme de placement alors que le mineur n'est pas en danger du fait du trop plein d'amour qu'elle lui donne ;
Le service de l'aide sociale à l'enfance de la Corrèze souligne que le travail éducatif est délicat mais que Damien évolue favorablement et essaie de ne plus être l'otage du conflit parental alors que le père est en retrait et que la mère poursuit son suivi médical ;
Le Ministère Public requiert la confirmation du jugement entrepris ;
M. Y... est non comparant bien que régulièrement convoqué ;
SUR CE
En l'absence d'appel sur l'instauration d'une mesure d'AEMO accompagnant la main levée d'un placement, Mme X... admet la persistance d'une situation de danger justifiant l'intervention du juge des enfants ;
Elle n'est pas fondée à se prévaloir d'un détournement de pouvoir alors que l'article 375-2 du code civil dans sa rédaction issue de la loi du 5 mars 2007 a expressément prévu que le juge des enfants pouvait subordonner le maintien du mineur dan son milieu familial à des obligations particulières telles que fréquenter régulièrement un établissement scolaire le cas échéant sous le régime de l'internat dès lors qu'il est établi que cette orientation est conforme à l'intérêt de l'enfant ;
En l'espèce il est constant que la problématique familiale tient à l'absence du père et à l'exclusivité de la relation existant entre Damien et sa mère qui ne l'autorise pas à grandir et n'a pas conscience des conséquences de ce comportement sur le développement du mineur ;
Le placement a permis à Damien d'évoluer et d'exprimer ses propres choix et à Mme X... de faire un travail positif et la conjonction des deux a favorisé la mainlevée du placement mais il est noté que la mère ne parvient pas à accéder à une remise en cause indispensable pour que l'autonomisation de Damien s'inscrive dans la durée et le prépare à la vie d'adulte et c'est donc à bon droit que le juge des enfants a prévu une obligation d'internat laquelle sera, en conséquence, maintenue pour éviter une régression qui serait éminemment préjudiciable au mineur ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Statuant après débats en Chambre du Conseil, après accomplissement des formalités de convocation prévues par l'article 1195 du nouveau code de procédure civile ;
REÇOIT Mme X... en son appel et statuant dans les limites de celui-ci,
CONFIRME le jugement entrepris dans l'intégralité de ses dispositions.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT, Marie-Christine MANAUD. Eliane RENON.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Limoges
Formation : Chambre speciale des mineurs
Numéro d'arrêt : 12/00060
Date de la décision : 04/03/2013
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.limoges;arret;2013-03-04;12.00060 ?
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