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13/10/2008 | FRANCE | N°08/402

France | France, Cour d'appel de Limoges, 13 octobre 2008, 08/402


RG N : 08/00402






AFFAIRE :


S.A INNODEC,
C/
Alain X...







LICENCIEMENT






COUR D'APPEL DE LIMOGES


CHAMBRE SOCIALE




ARRÊT DU 13 OCTOBRE 2008






A l'audience publique de la Chambre sociale de la Cour d'Appel de LIMOGES, le treize Octobre deux mille huit a été rendu l'arrêt dont la teneur suit ;


ENTRE :


S.A INNODEC, inscrit au RCS de LIMOGES sous le no 408 894 244, 90, Route du Palais - Boîte postale 240 - 87006 LIMOGES CEDE

X


APPELANTE d'un jugement rendu le 04 Mars 2008 par le Conseil de Prud'hommes de LIMOGES


Représentée par Maître Marie-Alice JOURDE, avocat au barreau de PARIS


ET :


Alain X..., demeurant .....

RG N : 08/00402

AFFAIRE :

S.A INNODEC,
C/
Alain X...

LICENCIEMENT

COUR D'APPEL DE LIMOGES

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 13 OCTOBRE 2008

A l'audience publique de la Chambre sociale de la Cour d'Appel de LIMOGES, le treize Octobre deux mille huit a été rendu l'arrêt dont la teneur suit ;

ENTRE :

S.A INNODEC, inscrit au RCS de LIMOGES sous le no 408 894 244, 90, Route du Palais - Boîte postale 240 - 87006 LIMOGES CEDEX

APPELANTE d'un jugement rendu le 04 Mars 2008 par le Conseil de Prud'hommes de LIMOGES

Représentée par Maître Marie-Alice JOURDE, avocat au barreau de PARIS

ET :

Alain X..., demeurant ...

INTIMÉ, représenté par Maître Alain CHARTIER-PREVOST, avocat au barreau de LIMOGES

---==oO§Oo==---

A l'audience publique du 16 Septembre 2008, la Cour étant composée de Monsieur Jacques LEFLAIVE, Président de chambre, de Monsieur Philippe NERVE et de Madame Anne-Marie DUBILLOT-BAILLY, Conseillers, assistés de Madame Geneviève BOYER, Greffier, Maître Marie-Alice JOURDE et Maître Alain CHARTIER-PREVOST, avocats, ont été entendus en leur plaidoirie.

Puis, Monsieur Jacques LEFLAIVE, Président de chambre a renvoyé le prononcé de l'arrêt, pour plus ample délibéré, à l'audience du 13 Octobre 2008;

A l'audience ainsi fixée, l'arrêt qui suit a été prononcé, ces mêmes magistrats en ayant délibéré.

LA COUR

Monsieur Alain X... a été engagé le 6 mai 1985 par la SOCIETE SANDVIK devenue SA INNODEC, suivant contrat à durée indéterminée , en qualité d'agent technique commercial, niveau 5, échelon 2, coefficient 335. Cette société a pour activité principale la fabrication d'outils de découpe appelés "formes" , destinés à la transformation du papier et du carton. Elle exerce son activité sur 9 sites industriels répartis sur le territoire national. A compter du 17 mars 1987, M. X... s'est vu confier la responsabilité générale du site de CHOLET. L'avenant signé à cette occasion prévoyait qu'en plus de ses fonctions commerciales, il assurerait la coordination de la production et le contrôle des tâches administratives de deux ateliers. Un autre avenant, signé le 17 septembre 1996 prévoyait que le salarié exerçait désormais les fonctions de directeur d'établissement, cadre position III A indice 135. Par avenant du 31 mars 2004, M. X... a été affecté sur le site de LIMOGES, en qualité de directeur du département formes et découpes, du suivi et du développement de la clientèle. Un nouvel avenant lui sera proposé le 1er janvier 2007, en vue de la modification de sa rémunération, les autres dispositions contractuelles antérieures étant maintenues. Un délai de réflexion a été laissé à M. X..., au cours duquel le 19 janvier 2007, le Président Directeur Général l'a informé de ce qu'il ne donnait pas suite à cette proposition et, toujours pendant ce délai de réflexion, le 24 janvier 2007, M. X... a reçu une convocation à un entretien préalable à un éventuel licenciement, fixé au 2 février suivant. Des propositions de reclassement à un poste de monteur ou d'ingénieur commercial lui avaient été adressées le 31 janvier 2007. Par lettre recommandée avec AR du 22 février 2007, Alain X... s'est vu notifier son licenciement pour motif économique.

Le 15 mars 2007, M. X... a saisi le Conseil de prud'hommes de LIMOGES des demandes suivantes :

- dire que son licenciement pour motif économique est abusif

- condamner la SA INNODEC à lui verser :

* 378 071 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

* 50 000 euros en réparation de son préjudice moral

* 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile

La SA INNODEC a conclu au débouté de M. X... de l'intégralité de ses demandes.

Par jugement du 4 mars 2008, le Conseil de prud'hommes de LIMOGES a requalifié le licenciement pour motif économique d'Alain X... en licenciement sans cause réelle et sérieuse , a condamné la société INNODEC à lui verser les sommes de 80 000 euros au titre de l'indemnité de licenciement et de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile et a débouté M. X... de sa demande de dommages-intérêts pour préjudice moral.

Par déclaration du 19 mars 2008, la SA INNODEC a relevé appel de ce jugement, dont elle sollicite l'infirmation, demandant à la Cour de constater que le licenciement de M. X... repose sur une cause réelle et sérieuse, qu'elle a effectué loyalement des recherches de reclassement , que le poste de M. X... a été supprimé et de débouter celui-ci de l'intégralité de ses demandes.

L'appelante soutient que la lettre de licenciement énonce précisément le motif économique à l'origine de la rupture du contrat de travail de l'intimé, dans le cadre d'une réorganisation de l'activité Formes de Découpe(FDD)destinée à assurer la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise, son résultat d'exploitation n'ayant cessé de diminuer depuis 2002 , le salarié , dont le poste a été supprimé, ne pouvant ignorer la réalité du caractère préoccupant de cette situation, décrite par le rapport de gestion du Conseil d'administration et par l'expert comptable. La société ajoute que dès 2005, elle avait tenté en vain de redresser la situation en recrutant une force de vente autonome des directeurs de production des différents sites FDD de la société, à l'exception de celui de Limoges. L'appelante affirme avoir fait à l'intimé, qui n'a jamais exprimé son souhait d'être reclassé ni réembauché par la suite, des propositions sérieuses de reclassement, avec reprise d'ancienneté, faisant observer qu'il n'y avait pas lieu d'établir de critères d'ordre des licenciements , l'intéressé étant le seul à occuper cet emploi et que s'agissant d'un licenciement individuel, aucune procédure devant le Comité d'entreprise n'est prévue. L'appelante allègue que l'intimé a très rapidement retrouvé un emploi, ce qui diminue d'autant son prétendu préjudice et que la rupture n'a eu aucun caractère vexatoire.

Monsieur Alain X... conclut à la confirmation de la décision critiquée en ce qu'elle a dit son licenciement pour motif économique dépourvu de cause réelle et sérieuse et relève appel incident quant aux condamnations prononcées. Il réclame les sommes de :

- 387.071 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

-50.000 euros en réparation de son préjudice moral

- 4.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

L'intimé soutient que les deux seules propositions de reclassement qui lui ont été faites concernaient des emplois subalternes et peu rémunérés et qu'aucune démarche dans ce sens n'a été faite au sein des autres établissements de l'entreprise, que par conséquent, l'employeur n'a pas satisfait à son obligation de reclassement. Le salarié ajoute que les éléments invoqués par l'appelant dans la lettre de licenciement sont insuffisants à caractériser une situation économique justifiant un licenciement et rien n'explicite ce qui a conduit à supprimer son poste
Il fait observer que la prétendue "constante érosion" depuis 2002 n'a pas modifié l'organisation de l'entreprise puisqu'il a changé d'affectation et de fonctions en 2004, ce qui ne permet pas d'évoquer de tels chiffres à l'appui du licenciement dans un délai aussi bref après cette mesure, alors que ses propres résultats , la productivité de son secteur et sa marge contributive étaient meilleurs que ceux de l'entreprise prise dans son ensemble et que son licenciement est d'autant moins justifié. Le salarié allègue que la rupture lui a causé un préjudice financier et moral important , ayant dû accepter de vendre sa maison à 53 ans et étant actuellement sans emploi.

SUR QUOI

La lettre de licenciement, qui fixe les limites du débat, fait état d'un résultat déficitaire pour l'exercice 2006, dû à la faiblesse de la progression du chiffre d'affaires , qui n'est pas suffisante pour absorber l'évolution des charges fixes dont les frais de personnel constituent le poste le plus important. Est ensuite évoquée la constante érosion de la rentabilité d'exploitation de la société (803 K euros en 2002, 479 K euros en 2003, 483 K euros en 2004, 94 K euros en 2005 et moins 290 K euros en 2006) ce qui a pour conséquence d'obérer fortement sa capacité d'auto-financement et constitue un obstacle majeur à ses indispensables besoins d'investissements productifs, malgré la mise en place d'une nouvelle stratégie commerciale avec recrutement d'une force de vente spécifique et dissociation des fonctions commerciales et techniques, ce qui n'a pas eu les résultats escomptés et, pour assurer la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise, il a été décidé de réorganiser le département formes de découpe (FDD) de LIMOGES et d'envisager la suppression du poste de directeur du département FDD qu'Alain X... occupe depuis le 1er septembre 2004. La lettre de rupture mentionne ensuite de manière très détaillée deux propositions de reclassement à un poste d'ouvrier monteur et l'autre d'ingénieur d'affaires, vocable flatteur qui recouvre en réalité un salaire amputé de moitié. La Cour constate donc, comme l'a fait le Conseil, que l'employeur , qui n'a pas recherché un poste sur les autres sites de l'entreprise à part le poste d'ouvrier à CHOLET, n'a pas satisfait à son obligation de reclassement. . Par ailleurs, aux termes mêmes de la lettre de rupture, il apparaît que la dégradation des résultats remonte à l'exercice 2002 , qu'elle est donc bien antérieure à la nomination de l'intéressé, le 1er septembre 2004, au poste de directeur du département FDD, ces chiffres ne pouvaient être évoqués à l'appui d'un licenciement intervenu dans un délai aussi bref, alors que M. X..., seul salarié à être licencié alors qu'il n'était pas le seul directeur FDD dans l'entreprise et que les critères d'ordre des licenciements n'ont pas été précisés, a eu de meilleurs résultats dans son département que dans les autres sites de la société et que la suppression du département qu'il dirigeait n'est même pas démontrée. Il ressort de ce qui précède que le licenciement est dépourvu de motif économique réel et sérieux et il y a lieu de confirmer le jugement déféré , qui a ainsi statué et a alloué à Alain X... une indemnisation à ce titre, dont il convient de porter le montant à 150 000 euros en fonction du préjudice important subi par le salarié. La décision critiquée sera donc réformée sur ce quantum.

Le Conseil de prud'hommes a débouté M. X... de sa demande au titre du préjudice moral en observant que le licenciement n'a pas eu de caractère vexatoire et que l'employeur a levé la clause de non concurrence afin de permettre à l'intimé de retrouver plus facilement un emploi.

Cette disposition du jugement sera confirmée.

La SA INNODEC succombe en ses prétentions et doit être condamnée aux dépens.

Il apparait équitable d'allouer la somme de 650 € à Monsieur Alain X... au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant en audience publique et par arrêt contradictoire, en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Confirme le jugement rendu le 4 mars 2008 par le Conseil de prud'hommes de LIMOGES sauf en ce qui concerne la somme allouée à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Le réforme de ce chef et statuant à nouveau,

Condamne la SA INNODEC à verser à ce titre à Alain X... la somme de 150 000 euros,

La condamne à verser la somme de 650 € à Alain X... au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

La condamne aux dépens d'appel.

Cet arrêt a été prononcé à l'audience publique de la Chambre sociale de la cour d'appel de LIMOGES en date du treize Octobre deux mille huit par Monsieur Jacques LEFLAIVE, président de chambre.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

Geneviève BOYER. Jacques LEFLAIVE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Limoges
Numéro d'arrêt : 08/402
Date de la décision : 13/10/2008

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Limoges


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-10-13;08.402 ?
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