RG N : C06 01402
AFFAIRE :
Daniel X...
C /
MINISTERE PUBLIC PROCUREUR GENERAL, FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES DE TERRORISME ET D'AUTRES INFRACTIONS
INDEMNISATION PREJUDICE CORPOREL AGRESSION
Grosse délivrée à Me JUPILE BOISVERD, avoué
COUR D'APPEL DE LIMOGES
CHAMBRE CIVILE DEUXIÈME SECTION
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ARRÊT DU 22 JANVIER 2008
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A l'audience publique de la chambre civile deuxième section de la cour d'appel de LIMOGES, tenue en chambre du conseil le VINGT DEUX JANVIER DEUX MILLE HUIT a été rendu l'arrêt dont la teneur suit :
ENTRE :
Daniel X..., de nationalité Française, né le 21 Juillet 1951 à PANAZOL (Haute-Vienne), demeurant... 87000 LIMOGES
représenté par Me Jean-Pierre GARNERIE, avoué à la Cour
assisté de Me Marie-Claude GUITARD, avocat au barreau de LIMOGES
APPELANT d'un jugement rendu le 9 octobre 2006 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE LIMOGES
ET :
FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES DE TERRORISME ET D'AUTRES INFRACTIONS, dont le siège social est 64 Rue Defrance-94682 VINCENNNES CEDEX
représentée par Me Erick JUPILE-BOISVERD, avoué à la Cour
assistée de Me Sylvie BARONNET, avocat au barreau de LIMOGES
INTIME
EN PRESENCE DE :
Monsieur le PROCUREUR GENERAL, près la Cour d'Appel de LIMOGES, domicilié en cette qualité au Palais de Justice Place d'Aine 87031 LIMOGES CEDEX
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Le dossier a été communiqué au MINISTERE PUBLIC le 7 février 2007.
L'affaire a été fixée à l'audience du 11 Décembre 2007, après ordonnance de clôture rendue le 14 Novembre 2007 la Cour étant composée de Monsieur Jacques LEFLAIVE, Président de chambre, et de Monsieur Gérard SOURY et Madame Anne-Marie DUBILLOT-BAILLY, Conseillers, assistés de Madame Pascale SEGUELA, Greffier. A cette audience tenue en chambre du conseil, Monsieur Jacques LEFLAIVE, président, a été entendu en son rapport oral, Maître Marie-Claude GUITARD et Maître Sylvie BARONNET, avocats, ont été entendus en leurs plaidoiries, Monsieur CLEMENT, avocat général a été entendu en ses observations ;
Puis Monsieur Jacques LEFLAIVE, Président de chambre, a renvoyé le prononcé de l'arrêt, pour plus ample délibéré, à l'audience du 22 Janvier 2008 ;
A l'audience ainsi fixée, l'arrêt qui suit a été prononcé, ces mêmes magistrats en ayant délibéré.
LA COUR
Le 17 novembre 2002, Monsieur Daniel X... a été victime de violences volontaires avec arme par destination, alors qu'il sortait de son domicile... à LIMOGES. L'auteur des faits, Monsieur Moulay C... a été déclaré irresponsable pour troubles psychiques, hospitalisé à Esquirol et la plainte déposée par M. X... a fait l'objet d'un classement sans suite.
Par ordonnance de référé du 12 décembre 2003, une expertise médicale a été organisée et confiée au Professeur D.... Celui-ci a déposé son rapport le 5 avril 2004. Sur la base de ce rapport, Daniel X... a saisi le Tribunal de Grande Instance de LIMOGES pour voir statuer sur la responsabilité civile de Moulay C... et liquider le préjudice corporel.
Par jugement du 3 février 2005, le Tribunal de Grande Instance de LIMOGES a déclaré M. C... entièrement responsable de l'agression physique subie par M. X... le 17 novembre 2002, fixé à 5 500 euros le préjudice de la victime, qui a été déboutée de sa demande au titre du préjudice moral et s'est vu allouer une somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du NCPC. Ce jugement a été confirmé en toutes ses dispositions par arrêt de la Cour d'appel de LIMOGES en date du 14 mars 2006.
Le 4 mai 2006, Monsieur X... a saisi la Commission d'Indemnisation des Victimes d'Infractions (CIVI) d'une requête déclarée irrecevable par jugement du 9 octobre 2006.
Par déclaration du 31 octobre 2006, Daniel X... a relevé appel de cette décision, dont il souhaite l'infirmation. Il demande à la Cour à titre principal de constater l'aggravation de son état de santé en lien avec l'agression subie le 17 novembre 2002, de déclarer sa requête recevable et de mettre à la charge du Fonds de Garantie les indemnisations suivantes :
* 6 000 euros en réparation du préjudice moral
* 5 000 euros en réparation du préjudice résultant de l'IPP
* 2 500 euros en réparation du préjudice résultant des souffrances endurées
à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise médicale aux fins de constater l'aggravation de son état de santé, dire si cette aggravation est en relation avec l'agression du 17 novembre 2002 ; de déterminer le préjudice complémentaire découlant de cette aggravation, et notamment la durée de la nouvelle période d'ITT, le taux d'IPP complémentaire ainsi que les souffrances endurées et l'éventuel préjudice d'agrément. M. X... réclame également une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
L'appelant soutient que les traumatismes subis l'ont empêché de saisir la commission dans le délai légal et qu'il a subi une aggravation de son état de santé directement imputable aux faits, qui a nécessité des séances de rééducation et de massage du dos et qu'il a présenté par ailleurs des troubles de nature psychogène, que le neurologue impute à l'agression subie. Il en déduit que sa requête est recevable, en application de l'article 706-5 du code de procédure pénale, sollicitant en tant que de besoin l'organisation d'une expertise médicale. L'appelant ajoute qu'à supposer que l'aggravation de son état de santé ne puisse être retenue, il allègue avoir subi de la part de son agresseur un véritable harcèlement ainsi que des menaces, qui l'ont dissuadé d'entreprendre les démarches nécessaires pour obtenir la réparation de son préjudice tant moral que découlant de l'IPP et des souffrances endurées.
Le Fonds de Garantie des victimes d'actes de terrorisme et autres infractions conclut à la confirmation de la décision déférée.
L'intimé fait valoir que l'appelant était parfaitement en mesure d'engager la procédure dans les délais étant assisté d'un conseil, ce qui excluait toute difficulté liée à la connaissance des délais requis alors que sur la même période, il poursuivait la procédure civile d'indemnisation. Le Fonds de Garantie ajoute que l'appelant ne démontre en rien l'aggravation de son état qu'il allègue, l'expert ayant pris en compte le retentissement psychologique de l'agression tant au titre de l'IPP que du pretium doloris et l'intéressé, dont l'indemnisation a été fixée par un jugement confirmé par arrêt de la Cour, ne produisant aucune pièce médicale nouvelle.
Le Ministère public a conclu à la confirmation de la décision querellée.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 14 novembre 2007 par le conseiller de la mise en état.
SUR QUOI
Daniel X... ne conteste pas que sa demande à la CIVI a été présentée hors du délai prévu par l'article 706-5 du code de procédure pénale, mais sollicite un relevé de forclusion en arguant à la fois d'une aggravation de son préjudice et d'un motif légitime tel que prévu par le texte susvisé. Les certificats médicaux des docteurs E... et F... ne permettent pas d'imputer la rupture de la coiffe des rotateurs de l'épaule à l'infraction, aucune lien de causalité n'étant établi avec certitude entre la lésion dont souffre actuellement M. X... et l'agression qu'il a subie le 17 novembre 2002, le docteur E... exposant que cette lésion peut être en rapport avec un traumatisme et le docteur F... évoquant des douleurs de l'épaule gauche, alors que le certificat descriptif initial fait état de douleurs de l'avant-bras droit, d'une entorse du poignet droit et que dans ses déclarations aux services de police à l'époque de l'agression, M. X... n'a jamais évoqué de coups portés à l'épaule, que le professeur D... ne mentionne pas non plus dans son rapport. L'aggravation sur le plan psychologique n'est pas davantage démontrée, car il ressort du rapport précité que son état avait été constaté à l'hôpital et qu'il a été suivi immédiatement après son agression par le docteur G..., qui a précisé " pour un état dépressif réactionnel avec anxiété généralisée, réaction phobique, en relation avec un choc traumatique généré par une agression physique ", cet état ayant été confirmé par les docteurs I...et J... en 2003. Le professeur H..., dans son certificat du 26 juillet 2006, évoque des troubles de nature psychogène, qui pourraient être en rapport avec une agression survenue en 2002. M. X... échoue donc dans la démonstration de l'aggravation de son état et une mesure d'expertise ne saurait être ordonnée pour pallier cette carence.
Daniel X... prétend par ailleurs qu'il a été terriblement affecté par l'agression subie, que son humeur et son comportement s'en sont trouvés modifiés, qu'il a vécu dans la terreur d'une nouvelle agression de la part d'une personne qui le menaçait et le harcelait, ce qui l'aurait empêché d'entreprendre les démarches nécessaires dans les délais. La Cour constate, comme les premiers juges, que M. X..., qui a bénéficié pendant toutes ces années de l'assistance d'un avocat, a engagé une procédure devant la juridiction civile, que son état ne l'a pas rendu inapte à agir devant la CIVI et qu'aucun élément du dossier ne justifie le relevé de forclusion qu'il sollicite. Il convient par conséquent de confirmer la décision critiquée qui a déclaré sa requête irrecevable.
M. X... succombe en son appel et doit être condamné aux dépens.
PAR CES MOTIFS
LA COUR :
Statuant en Chambre du Conseil, par arrêt contradictoire, en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Confirme la décision rendue le 9 octobre 2006 par la Commission d'Indemnisation des Victimes d'Infractions du Tribunal de Grande Instance de LIMOGES,
Condamne Daniel X... aux dépens d'appel en accordant à Maître JUPILE-BOISVERD, avoué, le bénéfice de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.
CET ARRÊT A ÉTÉ PRONONCÉ EN CHAMBRE DU CONSEIL DE LA CHAMBRE CIVILE DEUXIÈME SECTION DE LA COUR D'APPEL DE LIMOGES EN DATE DU VINGT DEUX JANVIER DEUX MILLE HUIT PAR MONSIEUR LEFLAIVE, PRÉSIDENT.