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23/05/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000006950760

France | France, Cour d'appel de Limoges, Chambre de l'instruction, 23 mai 2006, JURITEXT000006950760


COUR D'APPEL DE LIMOGES
23 MAI 2006 arrêt qui confirme l'ordonnance de désignation d'un administrateur adho'c
CHAMBRE DE L'INSTRUCTION
A l'audience du VINGT TROIS MAI DEUX MILLE SIX, l'arrêt suivant a été prononcé par LA CHAMBRE DE L'INSTRUCTION DE LA COUR D'APPEL de LIMOGES, EN CHAMBRE DU CONSEIL, dans l'affaire suivie au parquet de LIMOGES ENTRE :
Tony X...
né le 19 Mai 1983 à LIMOGES
fils de Jean-Pierre et de Béatrice Y...
sans emploi
demeurant chez Mademoiselle X... et Monsieur Z...
...
87000 LIMOGES
MIS EN EXAMEN du chef de VIOLS PAR PER

SONNE AYANT AUTORITE SUR MINEURE DE 15 ANS
Ayant pour avocat Maître VILLETTE, du barreau...

COUR D'APPEL DE LIMOGES
23 MAI 2006 arrêt qui confirme l'ordonnance de désignation d'un administrateur adho'c
CHAMBRE DE L'INSTRUCTION
A l'audience du VINGT TROIS MAI DEUX MILLE SIX, l'arrêt suivant a été prononcé par LA CHAMBRE DE L'INSTRUCTION DE LA COUR D'APPEL de LIMOGES, EN CHAMBRE DU CONSEIL, dans l'affaire suivie au parquet de LIMOGES ENTRE :
Tony X...
né le 19 Mai 1983 à LIMOGES
fils de Jean-Pierre et de Béatrice Y...
sans emploi
demeurant chez Mademoiselle X... et Monsieur Z...
...
87000 LIMOGES
MIS EN EXAMEN du chef de VIOLS PAR PERSONNE AYANT AUTORITE SUR MINEURE DE 15 ANS
Ayant pour avocat Maître VILLETTE, du barreau de LIMOGES,
ET :
PARTIES CIVILES
Marie Claire A...
...-87890 JOUAC
Patrice B...
...-87160 ARNAC LA POSTE
Ayant pour avocat Maître LEBOUC, du barreau de LIMOGES ET : Monsieur le Procureur Général,
Maître LEBOUC, conseil des parties civiles ayant, le 11 Avril 2006
interjeté appel d'une ordonnance de désignation d'un administrateur ad'hoc rendue le 03 Avril 2006 par Madame Estelle LAMOTTE, juge d'instruction au tribunal de grande instance de LIMOGES,
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU PRONONCE DE L'ARRET PRESIDENT : Monsieur Serge BAZOT, Président de la chambre de l'instruction, CONSEILLERS ASSESSEURS TITULAIRES : Monsieur Philippe NERVEet Monsieur Pierre-Louis PUGNET, Tous trois désignés en application de l'article 191 du code de procédure pénale
MINISTERE PUBLIC : Monsieur Pierre FOUCART, Avocat Général,
GREFFIER : Madame Nathalie ROCHE
Le Président et les Conseillers sus-désignés en ayant délibéré conformément à la loi hors la présence du ministère public et du greffier.
A l'audience tenue en CHAMBRE DU CONSEIL le 18 Mai 2006, Maître CHAUPRADE substituant Maître VILLETTE a déclaré s'en remettre à droit,
A ladite audience ont été entendus :
Monsieur le conseiller Pierre-Louis PUGNETen son rapport oral,
Maître LEBOUC en ses explications orales pour les parties civiles,
Monsieur l'Avocat Général en ses réquisitions orales pour Monsieur le Procureur Général,
Les débats étant terminés, Monsieur le président a renvoyé le prononcé de l'arrêt pour plus ample délibéré à l'audience du vingt trois mai deux mille six,
LA COUR
Vu les pièces de la procédure,
Vu l'ordonnance de désignation d'un administrateur ad'hoc rendue le 03 Avril 2006 par Madame Estelle LAMOTTE, juge d'instruction au
tribunal de grande instance de LIMOGES,
Vu l'appel interjeté le 11 Avril 2006 par Maître LEBOUC, conseil des parties civiles contre ladite ordonnance,
Vu les pièces de la procédure desquelles il résulte que Monsieur le Procureur général a donné avis par lettre recommandée, le 24 avril 2006 au mis en examen et à son avocat, aux parties civiles et à leur avocat, de la date de l'audience, soit le 18 mai 2006, à laquelle l'affaire serait appelée,
Vu les réquisitions écrites de Monsieur le Procureur Général en date du 15 Mai 2006,
Vu le mémoire déposé au greffe de la chambre de l'instruction le 16 mai 2006 par Maître LEBOUC, conseil des parties civiles,
Attendu qu'il a été satisfait aux formes et délais prescrits par l'article 197 du code de procédure pénale,
Attendu que de l'information résultent les faits suivants :
Le 9 mars 2006, vers 19 heures, Marie Claire A... signalait aux services de gendarmerie que sa fille D... B..., âgée de 6 ans, avait été victime de faits de viol par son compagnon Tony X... Les agissements dénoncés avaient été commis la veille, 8 mars 2006, entre 14 heures 45 et 17 heures.
Entendue le 10 mars, vers 11 heures, elle expliquait aux enquêteurs que, le 9 mars, en fin d'après midi, son autre fille C... B..., avait fait état que son compagnon actuel, Tony X..., " avait mis son zizi dans la bouche d'D... ".
Le mis en cause, alors présent, avait démenti ; elle même avait appelé au téléphone Laurent G... proche voisin, avec lequel elle avait eu une liaison, puis Patrick B... père de C... et D.... Durant son trajet depuis Limoges, ce dernier était contacté sur portable par Tony X..., qui protestait de son innocence.
Interrogée, dans le même temps, successivement par Laurent G... et Patrick B..., D... B... leur avait confirmé avoir été victime des faits d'agression sexuelle de la part de Tony X...

Les investigations diligentées dans le cadre de flagrance faisaient ressortir les éléments suivants :
- Marie Claire A..., mariée en 1985 à Jean Philippe H..., dont elle avait eu un fils E..., âgé de 20 ans, s'était, courant 1991 mis en ménage avec un nommé Laurent G..., dont elle avait un fils E... âgé de 12 ans, et vivant à ce jour avec elle ; par la suite, s'étant séparée de Laurent G..., elle avait vécu avec Patrice B... ; le couple s'était alors installé à BAILLY-CARROIS (77) en région parisienne.
Deux enfants étant nées de cette liaison C..., âgée de 9 ans, comme étant née le 13 novembre 1997 et D..., âgée de 6 ans, comme étant née le 18 octobre 1999.
Marie Claire A... était venue en 2003 s'installer avec ses quatre enfants, en Haute-Vienne, à JOUAC, Patrice B... venant les retrouver en fin de semaine, du fait de son emploi en région parisienne.
Peu après, celui-ci décidait de se séparer de son amie, et s'installait à ARNAC LA POSTE, ayant entre temps trouvé du travail sur LIMOGES, Il continuait de voir ses filles, et de les recevoir à domicile, en accord avec Marie Claire A..., avec laquelle il était resté en bons termes.
De son côté Marie Claire A... connaissait plusieurs liaisons passagères, en dernier lieu, avec Tony X..., qui vivait depuis fin 2004 auprès d'elle ; l'entente de ce dernier avec les 3 enfants de sa compagne, présents à son domicile, apparaissait bonne.
*
* *
Le 8 mars 2006 Marie-Claire A... avait quitté vers 14 heures 45 son domicile pour conduire ses enfants F... et C... à une leçon d'équitation ; Laurent G... les y accompagnait ainsi qu'une camarade de C..., dénommée I.... A l'issue de la séance de monte, Marie Claire A... avait reconduit I... chez sa mère, qui tient un bar. Ils y avaient fait halte, les 3 enfants ayant joué pendant une heure, avant d'être rejoints sur place par Tony X... et D....
Pendant l'absence de Marie-Claire A..., ceux-ci étaient restés dans un premier temps au domicile familial. Alors que Tony X... regardait la télévision dans la chambre de sa compagne. Il demandait à D... de l'y rejoindre, et l'invitait à prendre place dans le lit, où il était lui-même couché, sous la couette.
Il entreprenait de lui ôter son pantalon et sa culotte, puis lui imposait une fellation, tout en lui caressant le sexe, avec son doigt, préalablement humecté de salive. Il mettait de lui-même fin à ces attouchements, non accompagnés d'éjaculation, et recommandait à D... " de garder la chose secrète " ainsi que de ne rien dire à personne.
Tony X..., conduisait ensuite D... chez sa propre mère, Béatrice Y..., laquelle coupait les cheveux de la jeune enfant, puis se rendait chez ses propres grands parents, demeurant à proximité. Entre-temps il s'était allé chez David J... à La BURE pour y prendre du blé ; il avait été invité par ce dernier à revenir le lendemain.
La jeune D... confiait le soir du 8 mars 2006, à sa soeur C... que Tony X... lui avait mis le " kiki " dans la bouche et que qu'elle ne pouvait plus respirer, ainsi que son doigt sur sa " nenette ".
Le lendemain à l'école C... avait raconté à K... X... ce qui était arrivé à sa soeur D..., laquelle l'avait confirmé, ainsi qu'à L... M..., autre amie et confidente d'D..., à laquelle celle-ci avait aussi confié " son secret ".
- Le même jour, au retour de l'école C... avait à la maison, interpellé sa mère en lui disant " Tony t'as trompé, hier il a mis son zizi dans la bouche d'D... ". Selon les déclarations de l'intéressée, les faits du 8 mars 2006 n'avaient pas été uniques, mais précédés de plusieurs autres attouchements. L'examen gynécologique de la victime ne révélait aucune trace de violence ou de défloration
Placé en garde à vue le 13 mars 2006, Tony X..., qui avait dès la révélation des faits par André, quitté le domicile de sa compagne, pour se rendre chez ses parents, habitant à proximité, contestait les agissements qui lui étaient imputés, disait avoir été victime d'une machination, orchestrée par Marie Claire A..., mécontente de son intention de la quitter, dont il lui avait fait part peu auparavant. Il fournissait un alibi, qui, s'avérait, après vérification incertain quant aux horaires allégués.
Il apparaissait enfin que la famille A...- B... avait fait l'objet d'un signalement le 19 avril 2005, par les services de l'Aide Sociale à l'Enfance, auprès du Parquet de LIMOGES, eu égard à la situation familiale des enfants, et au contexte particulier au sein duquel vivait, Marie-Claire A....
Entendu le 10 mars 2006 en la qualité de civilement responsable de la jeune D..., Patrice B... disait déposer plainte ; Marie Claude A... indiquait, pour sa part, vouloir réfléchir, ayant déjà vécu une situation similaire avec son fils E..., alors victime d'agressions sexuelles, ayant conduit leur auteur à sa condamnation
en cour d'assises.

Au vu de ces éléments, le Procureur de la République de LIMOGES requérait le 25 mars 2006 l'ouverture d'une information judiciaire contre Tony X..., des chefs de viols sur mineure de 15 ans et par personne ayant autorités.
Mis en examen de ces chefs, Tony X... contestait avoir commis les faits dénoncés, réaffirmant que Marie Claude A... avait manipulé ses enfants. Pour autant, il ne pouvait s'expliquer sur les contradictions émaillant son alibi.
Le juge des libertés et de la détention, saisi par le juge d'instruction, à l'issue de l'interrogatoire de première comparution, décidait de placer le mis en examen sous contrôle judiciaire.
Le lendemain 4 avril 2006, Marie Claire A... et Patrice B... se constituaient parties civiles auprès du magistrat instructeur, et interjetaient appel le 11 avril suivant de l'ordonnance du 3 avril 2006.

SUR QUOI, LA COUR
Attendu que les dispositions de l'article 706-50 du code de procédure pénale permettent au juge d'instruction saisi de faits commis à l'encontre d'un mineur, de désigner un administrateur ad'hoc lorsque la protection des intérêts de celui-ci n'est pas complètement assurée par ses représentants légaux ou par l'un d'entre eux ;
Attendu qu'il s'agit d'une mesure ponctuelle limitée à la protection des intérêts du mineur durant la procédure d'instruction pénale et qui laisse subsister l'autorité parentale ;
Attendu que malgré les graves révélations d'abus sexuels faites par sa fille D..., Marie-Claire A... a déclaré aux enquêteurs le 10 mars 2006 qu'elle devait réfléchir à un éventuel dépôt de plainte dans la mesure où il lui était difficile de revivre une situation qu'elle avait connu avec son fils aîné Y... ;
Que ce n'est que le 4 avril 2006 qu'elle s'est constituée partie civile notamment en sa qualité de représentante légale de sa fille D... ;
Attendu qu'une aussi longue hésitation démontre les difficultés qu'éprouve Madame A... à prendre les décisions qu'impose la protection des intérêts de sa fille dans une procédure qui met en cause son concubin avec lequel la communauté de vie existe depuis 18 mois ;
Attendu qu'en outre un signalement émanant de la direction des interventions sociales et de la solidarité départementale du Conseil Général a notamment évoqué la présence de jeunes adultes connus de la gendarmerie au domicile de Madame A..., la consommation et un trafic de stupéfiants dans ce lieu, la consommation d'alcool, une violence entre adultes, une " prostitution " de Madame ;
Attendu que si le juge des enfants, par décision du 9 juin 2005, a dit n'y avoir lieu à intervenir au titre de l'assistance éducative et a clôturé le dossier au motif que l'évaluation faite par l'ASE n'avait pas permis de corroborer ces éléments, sa décision est fondée sur l'absence de situation de danger des enfants de Madame A... et ne saurait s'étendre à l'hypothèse de l'insuffisance de protection des intérêts de l'un de ces enfants mineurs dans une procédure pénale où il affirme être victime de faits commis volontairement à son encontre ;
Attendu qu'une efficace protection des intérêts d'un enfant mineur dans une procédure d'instruction pénale nécessite de la part de ses représentants légaux une volonté non équivoque d'aboutir à la manifestation de la vérité en exerçant la plénitude des droits d'une partie civile ;
Attendu qu'une protection incomplète peut être constituée par une simple inaction ou passivité de son représentant légal à exercer pour le compte de l'enfant les droits d'une partie civile lesquels ne se réduisent pas à une simple déclaration de principe mais exigent un point de vue critique sur le déroulement de la procédure et la capacité de prendre éventuellement des initiatives pour en infléchir le cours ;
Attendu que l'ensemble de ces éléments démontre que les intérêts de la mineure D... ne sont pas complètement assurés par Madame A... ;
Attendu, s'agissant de Patrice B..., le père d'D..., séparé depuis 3 ans de Madame A..., qu'il ne vit pas avec D..., qu'il s'est associé à Madame A... dans sa constitution de partie civile en qualité de représentant légal de sa fille ;
Qu'il n'apparaît donc pas possible de considérer qu'il serait seul apte à assurer complètement les intérêts de sa fille dans la présente procédure ;
Attendu que la décision entreprise sera en conséquence confirmée ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
CHAMBRE DE L'INSTRUCTION, EN CHAMBRE DU CONSEIL,
En la forme, déclare l'appel recevable,
Au fond, CONFIRME l'ordonnance de désignation d'un administrateur adh'oc rendue le 03 Avril 2006 par le juge d'instruction du tribunal de grande instance de LIMOGES,
Ainsi fait et prononcé en audience de la CHAMBRE DE L'INSTRUCTION de la COUR D'APPEL de LIMOGES, EN CHAMBRE DU CONSEIL, le VINGT TROIS MAI DEUX MILLE SIX.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Limoges
Formation : Chambre de l'instruction
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006950760
Date de la décision : 23/05/2006

Analyses

MINEUR - Action civile - Représentation - Opposition d'intérêts avec ses représentants légaux - Administrateur ad hoc - Désignation par le juge saisi de l'instance - Conditions

L'hésitation durant plusieurs semaines de la mère d'une enfant de 6 ans se plaignant d'avoir subi des abus sexuels de la part du concubin de celle-ci, mis en examen du chef de viols par personne ayant autorité, constitue une passivité révélatrice d'une altération de ses facultés à assurer une complète protection des intérêts de son enfant mineur et justifie la désignation d'un administrateur ad hoc


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.limoges;arret;2006-05-23;juritext000006950760 ?
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