N° RG 24/00096
N° Portalis DBVM-V-B7I-MMCW
N° Minute :
Notification le :
23 août 2024
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
C O U R D ' A P P E L D E G R E N O B L E
JURIDICTION PREMIER PRESIDENT
ORDONNANCE DU 23 AOUT 2024
Appel d'une ordonnance 24/991 rendue par le Juge des libertés et de la détention de GRENOBLE en date du 08 août 2024 suivant déclaration d'appel reçue le 14 août 2024,
ENTRE :
APPELANT :
Monsieur [N] [W], actuellement hospitalisé au centre hospitalier [4] à [Localité 6],
né le 14 Juillet 1953 à [Localité 5]
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 3]
assisté de Me Julien PARIS, avocat au barreau de GRENOBLE,
ET :
INTIME :
Etablissement CENTRE HOSPITALIER [4]
[Adresse 2]
[Localité 6]
non comparant,
MINISTÈRE PUBLIC :
L'affaire a été régulièrement communiquée à Mme Dietlind BAUDOIN, Avocat général près la cour d'appel de Grenoble qui a fait connaître son avis le 20 août 2024,
DEBATS :
A l'audience publique tenue le 22 août 2024 par Olivier CALLEC, Conseiller, délégué par le premier président en vertu d'une ordonnance en date du 23 décembre 2023, assisté de Mériem CASTE-BELKADI, Greffière,
ORDONNANCE :
prononcée publiquement le 23 août 2024 par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signée par Olivier CALLEC, Conseiller délégué par le premier président, et par Mériem CASTE-BELKADI, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCEDURE :
Vu la décision d'admission en soins psychiatriques en cas de péril imminent de [N] [W] au Centre Hospitalier [4] en date du 29 juillet 2024 ;
Vu les certificats médicaux des docteurs [C] et [J] des 30 juillet et 1er août 2024 ;
Vu la décision de maintien en soins psychiatriques sous la forme d'une hospitalisation complète en date du 1er août 2024 ;
Vu la requête du directeur du Centre Hospitalier [4] en date du 2 août 2024 saisissant le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Grenoble et le certificat médical prévu par l'article L3211-12-1 du code de la santé publique établi par le docteur [R] le 4 août 2024 ;
Vu l'ordonnance du juge des libertés et de la détention en date du 8 août 2024 autorisant le maintien de la mesure d'hospitalisation complète ;
Vu l'appel interjeté le 14 août 2024 par [N] [W] ;
Le 14 août 2024, les parties ont été convoquées à l'audience tenue par le premier président de la cour d'appel ou son délégué.
Par conclusions écrites du 14 août 2024, mises à la disposition des parties, le parquet général conclut à la confirmation de l'ordonnance contestée.
Le 20 août 2024, le docteur [C] a établi un avis médical selon lequel les soins psychiatriques devaient être poursuivis dans le cadre d'une hospitalisation à temps complet.
A l'audience, [N] [W], assisté de son conseil, demande d'infirmer l'ordonnance et, statuant à nouveau, d'ordonner la mainlevée de la mesure, en faisant valoir, que :
- la condition légale tenant à l'incapacité de consentir aux soins n'est pas remplie puisque, selon les certificats médicaux, il va bien et il est accessible aux compromis,
- son hospitalisation repose sur une lettre dont on ignore tout du contenu puisqu'elle n'est pas produite,
- la délégation de signature ne contient pas toutes les informations nécessaires et la preuve de sa publication n'est pas rapportée.
MOTIFS DE LA DECISION :
L'appel formé par [N] [W] est recevable.
Sur la régularité de la mesure,
Dans un autre dossier figurant au rôle de l'audience, dans lequel intervient le même conseil que dans la présente affaire, figure la « délégation générale de signature », datée du 1er février 2024, donnée par le directeur à la directrice adjointe de l'établissement. Ses mentions répondent aux prescriptions de l'article D. 6143-34 du même code.
Aux termes de l'article D. 6143-35, la publication des délégations a pour seule fin de les rendre consultables, ce n'est pas une condition de leur validité. L'absence de preuve au dossier que la délégation dont s'agit a bien été publiée ne fait pas grief dans la mesure où [N] [W] a pu la consulter dans le cadre de la présente instance.
Les moyens d'irrégularité soulevés par l'appelant sont par conséquent rejetés.
Sur le fond,
Selon l'article L. 3212-1 du code de la santé publique, une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l'objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d'un établissement que lorsque ses troubles rendent impossible son consentement et que son état mental impose des soins immédiats assortis d'une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète.
Si d'après les certificats des 24 et 72 heures [N] [W] présente un syndrome délirant à thématique de complot, de préjudice et de persécution, avec un déni total et inattaquable de cet ensemble délirant de nature paranoïaque, il ressort toutefois des avis des 4 et 20 août 2024 que le patient est « bien plus accessible aux compromis », est « calme et cohérent », « présente un comportement adapté dans le service », et que cette évolution favorable constatée depuis plusieurs jours s'observe également dans la capacité de celui-ci à « élaborer calmement autour des événements ayant motivé son hospitalisation » et « à prendre de la distance sur le plan émotionnel ». Par ailleurs, dans le dernier avis médical il y est relaté une absence « d'élément thymique en faveur d'un état dépressif caractérisé ou d'un état maniaque ou hypomaniaque » ainsi qu'une absence d'idée suicidaire.
Il résulte ainsi des éléments médicaux les plus récents, d'une part, que les troubles dont souffre [N] [W] ne rendent plus impossible son consentement et, d'autre part, que son état mental n'impose plus des soins immédiats dans le cadre d'une hospitalisation complète.
La décision du juge des libertés et de la détention sera infirmée.
Dès lors qu'il ressort de l'avis médical du 20 août 2024 une nécessité de « consolider les soins et l'étayage psychothérapeutique et médicamenteux afin de minimiser au maximum le risque de rechute », il convient, en application de l'article L. 3211-12-1 III du code de la santé publique, de dire que la mainlevée de la mesure d'hospitalisation prendra effet dans un délai maximal de 24 heures afin qu'un programme de soins puisse être établi en application du II de l'article L. 3211-2-1 du même code.
PAR CES MOTIFS :
Nous, Olivier Callec, délégué par le premier président de la cour d'appel de Grenoble, statuant publiquement par ordonnance réputée contradictoire et en dernier ressort,
Infirmons l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Grenoble en date du 8 août 2024 ;
Statuant à nouveau,
Ordonnons la mainlevée de la mesure d'hospitalisation complète ;
Disons que la mainlevée de la mesure d'hospitalisation prendra effet dans un délai maximal de 24 heures afin qu'un programme de soins puisse être établi en application du II de l'article L. 3211-2-1 du code de la santé publique ;
Disons que la présente ordonnance sera notifiée par les soins du greffe à l'ensemble des parties appelées par tout moyen,
Laissons les dépens à la charge de l'Etat.
La greffière Le président