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25/06/2024 | FRANCE | N°22/01890

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Ch. sociale -section a, 25 juin 2024, 22/01890


C4



N° RG 22/01890



N° Portalis DBVM-V-B7G-LLQS



N° Minute :























































































Copie exécutoire délivrée le :





la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE - CHAMBERY



Me BATARAY

AU NOM DU PEU

PLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



Ch. Sociale -Section A

ARRÊT DU MARDI 25 JUIN 2024





Appel d'une décision (N° RG F 20/00239)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VIENNE

en date du 13 avril 2022

suivant déclaration d'appel du 11 mai 2022





APPELANTE :



E.U.R.L. SUEZ RR IWS CHEMICALS FRANCE, prise en la personne de son représentant légal do...

C4

N° RG 22/01890

N° Portalis DBVM-V-B7G-LLQS

N° Minute :

Copie exécutoire délivrée le :

la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE - CHAMBERY

Me BATARAY

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

Ch. Sociale -Section A

ARRÊT DU MARDI 25 JUIN 2024

Appel d'une décision (N° RG F 20/00239)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VIENNE

en date du 13 avril 2022

suivant déclaration d'appel du 11 mai 2022

APPELANTE :

E.U.R.L. SUEZ RR IWS CHEMICALS FRANCE, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège,

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Alexis GRIMAUD de la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE - CHAMBERY, avocat postulant inscrit au barreau de GRENOBLE,

et par Me Florian GROBON de la SELARL ELECTA JURIS, avocat plaidant inscrit au barreau de LYON,

INTIME :

Monsieur [K] [T]

né le 26 Septembre 1958 à [Localité 5]

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 2]

représenté par Me Zerrin BATARAY, avocat au barreau de GRENOBLE substitué par Me Magalie AIDI, avocat au barreau de VIENNE,

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Hélène BLONDEAU-PATISSIER, Conseillère faisant fonction de Présidente

Madame Gwenaelle TERRIEUX, Conseillère,

M. Frédéric BLANC, Conseiller,

DÉBATS :

A l'audience publique du 06 mai 2024

Mme Hélène BLONDEAU-PATISSIER, Conseillère faisant fonction de Présidente en charge du rapport et Madame Gwenaelle TERRIEUX, Conseillère, ont entendu les représentants des parties en leurs conclusions et plaidoirie, assistées de Mme Mériem CASTE-BELKADI, Greffière, conformément aux dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, les parties ne s'y étant pas opposées ;

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 25 juin 2024, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.

L'arrêt a été rendu le 25 juin 2024.

EXPOSE DU LITIGE :

M. [K] [T], né le 26 septembre 1958, a été embauché le 19 septembre 1977 par la société Rhône-Poulenc suivant contrat de travail à durée indéterminée en qualité d'exploitant.

Au 1er juillet 2010 ce contrat de travail a été repris par la société par actions simplifiée (SAS) Suez RR IWS chemicals France, avec reprise de l'ancienneté de M. [T] au 19 septembre 1977.

Au dernier état de la relation contractuelle, il exerçait les fonctions d'agent de maîtrise-exploitation.

Le contrat est soumis à l'application de la convention collective nationale des industries chimiques.

Par courrier remis en mains propres le 20 janvier 2020, M. [T] a informé son directeur de sa décision de faire valoir ses droits à la « retraite amiante », avec un préavis de 3 mois.

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 20 février 2020, l'employeur a accusé réception de ce courrier.

Par courriel en date du 11 mars 2020, l'employeur a informé M. [T] du montant de l'indemnité de départ à percevoir.

Le 13 mars 2020, M. [T] a contesté le mode de calcul de cette indemnité de départ à la retraite au regard des dispositions de l'article 21 bis de la convention collective nationale des industries chimiques.

Par courrier du 27 avril 2020, l'employeur a maintenu sa position.

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception en date du 10 juillet 2020, le conseil de M. [T] a mis en demeure l'employeur de lui régler l'intégralité de l'indemnité de départ à la retraite.

Par requête visée au greffe le 19 novembre 2020, M. [T] a saisi le conseil de prud'hommes de Vienne aux fins d'obtenir paiement d'un rappel sur l'indemnité de départ à la retraite et de dommages et intérêts pour résistance abusive.

Par conclusions visées le 18 octobre 2021 M. [T] a ajouté une demande additionnelle en paiement d'un rappel de salaire au titre d'heures supplémentaires.

La société Suez RR IWS chemicals France s'est opposée aux prétentions adverses.

Par jugement du 13 avril 2022, le conseil de prud'hommes de Vienne a :

Dit et jugé que M. [T] partiellement bien fondé en ses demandes ;

Condamné la société Suez RR IWS chemicals France à payer à M. [T] les sommes suivantes :

- 451,97 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires pour le mois de décembre 2019 ;

- 45,20 euros au titre des congés payés afférents ;

- 52 954,49 euros à titre de rappel sur le reliquat de l'indemnité de départ à la retraite ;

Débouté M. [T] de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive ;

Condamné la société Suez RR IWS chemicals France à payer à M. [T] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rappelé qu'aux termes des dispositions de l'article R. 1454-28 du code du travail, sont exécutoires de droit à titre provisoire les jugements ordonnant la délivrance de toutes pièces que l'employeur est tenu de remettre (attestation Pôle emploi, etc.) ainsi que les jugements ordonnant le paiement des sommes au titre des rémunérations et indemnités visées à l'article R. 1454-14 du code du travail dans la limite de neuf mensualités, étant précisé que la moyenne brute des salaires des trois derniers mois doit être fixée à la somme de 6 393,15 euros ;

Rappelé que les intérêts légaux courent à compter de la saisine du conseil de prud'hommes, à savoir la date de signature de l'avis de réception de la première convocation par la partie défenderesse pour ce qui est des sommes allouées au titre des salaires et accessoires de salaires et à compter du prononcé du jugement pour toutes les sommes allouées à titre de dommages et intérêts ;
Débouté la société Suez RR IWS chemicals France de sa demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamné la société Suez RR IWS chemicals France aux entiers dépens ;

Rappelé que l'exécution provisoire de la présente décision est de droit en application de l'article R. 1454-28 du code du travail et fixé le salaire moyen mensuel brut de M. [T] au montant de 6 393,15 euros.

La décision a été notifiée par le greffe par lettres recommandées avec accusés de réception signés le 16 avril 2022 pour M. [T] et le 19 avril 2022 pour la société Suez RR IWS chemicals France.

Par déclaration en date du 11 mai 2022, la société Suez RR IWS chemicals France a interjeté appel.

M. [T] a formé appel incident.

Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 18 janvier 2023, auxquelles il convient expressément de se référer pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, la société Suez RR IWS chemicals France sollicite de la cour de :

« Réformer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- Dit et jugé M. [T] partiellement bien fondé en ses demandes ;

- Condamné la société Suez RR IWS chemicals France à payer à M. [T] les sommes suivantes :

451,97 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires pour le mois de décembre 2019 ;

45,20 euros au titre des congés payés afférents ;

52 954,49 euros à titre de rappel sur le reliquat de l'indemnité de départ à la retraite ;

- Condamné la société Suez RR IWS chemicals France à payer à M. [T] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Débouté M. [T] de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive ;

- Rappelé qu'aux termes des disposition de l'article R. 1454-28 du code du travail, sont exécutoires de droit à titre provisoire les jugements ordonnant la délivrance de toutes pièces que l'employeur est tenu de remettre (attestation Pôle emploi, etc.) ainsi que les jugements ordonnant le paiement des sommes au titre des rémunérations et indemnités visées à l'article R. 1454-14 du code du travail dans la limite de neuf mensualités, étant précisé que la moyenne brute des salaires des trois derniers mois doit être fixée à la somme de 6 393,15 euros ;

- Rappelé que les intérêts légaux courent à compter de la saisine du conseil de prud'hommes, à savoir la date de signature de l'avis de réception de la première convocation par la partie défenderesse pour ce qui est des sommes allouées au titre des salaires et accessoires de salaires et à compter du prononcé du jugement pour toutes les sommes allouées à titre de dommages et intérêts ;

- Débouté la société Suez RR IWS chemicals France de sa demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamné la société Suez RR IWS chemicals France aux entiers dépens ;

Et, statuant de nouveau,

Dire et juger que M. [T] a été intégralement rempli de ses droits au titre de l'exécution et de la rupture de son contrat de travail ;

Dire et juger que la société Suez RR IWS chemicals France a fait une parfaite application des dispositions de l'article 21 bis de la convention collective nationale des industries chimiques ;

Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il déboute M. [T] de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive ;

Débouté M. [T] de son appel incident et de l'ensemble de ses demandes, moyens, fins et prétentions ;

Condamner M. [T] à payer à la société Suez RR IWS chemicals France la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens. »

Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 8 avril 2023, auxquelles il convient expressément de se référer pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, M. [T] sollicite de la cour de :

« Déclarer l'appel incident de M. [T] recevable et bien fondé ;

Déclarer les demandes de M. [T] recevables et bien fondées ;

Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- Dit et jugé M. [T] partiellement fondé en ses demandes ;

- Condamné la société Suez RR IWS CHEMICAL France à payer à M. [T] les sommes suivantes :

451,97 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires pour le mois de décembre 2019 ;
45,20 euros au titre des congés payés afférents ;

52 954,49 euros à titre de rappel sur reliquat de l'indemnité de départ à la retraite ;

- Débouté M. [T] de se demande de dommages et intérêts pour résistance abusive ;
Condamné la société Suez RR IWS chemicals France à payer à M. [T] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Débouté la société Suez RR IWS chemicals France de sa demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamné la société Suez RR IWS chemicals France aux entiers dépens ;

Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [T] de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive ;

Et, statuant de nouveau,

Condamner la société Suez RR chemicals France à verser à M. [T] la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive ;

En tout état de cause,

Condamner la société Suez RR IWS chemicals France à verser à M. [T] la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel ;

Débouter la société Suez RR IWS chemicals France de sa demande formulée au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamner le même aux entiers dépens. »

Pour un exposé complet des moyens et prétentions des parties, il convient au visa de l'article 455 du code de procédure civile de se reporter aux conclusions des parties susvisées.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 23 avril 2024.

L'affaire, fixée pour être plaidée à l'audience du 6 mai 2024, a été mise en délibéré au 25 juin 2024.

EXPOSE DES MOTIFS :

1 ' Sur la demande au titre des heures supplémentaires :

L'article L 3121-27 du code du travail énonce que la durée légale de travail effectif des salariés à temps complet est fixée à trente-cinq heures par semaine.

Aux termes de l'article L 3121-28 du code du travail toute heure accomplie au-delà de la durée légale hebdomadaire ou de la durée considérée comme équivalente est une heure supplémentaire qui ouvre droit à une majoration salariale ou, le cas échéant, à un repos compensateur équivalent.

L'article L 3121-36 du même code prévoit qu'à défaut d'accord, les heures supplémentaires accomplies au-delà de la durée légale hebdomadaire fixée à l'article L. 3121-27 ou de la durée considérée comme équivalente donnent lieu à une majoration de salaire de 25 % pour chacune des huit premières heures supplémentaires. Les heures suivantes donnent lieu à une majoration de 50 %.

La convention collective nationale des industries chimiques prévoit en son article 12 que « les heures supplémentaires effectuées au-delà d'une durée normale de travail de 40 heures par semaine donnent lieu à une majoration qui ne pourra être inférieure à :

- 25 % du salaire horaire pour les 8 premières heures supplémentaires ;

- 50 % de ce salaire horaire pour les heures supplémentaires au-delà de la huitième. »

L'article L. 3171-4 du code du travail dispose qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.

Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

En l'espèce, M. [T] affirme qu'il a effectué, au mois de décembre 2019, 24 heures supplémentaires, notées au bulletin de paie de décembre 2019 sous l'intitulé d'heures supplémentaires à 125%. Il conteste le montant de leur rémunération au taux horaire de 4,708 euros qui correspond à 25% de son taux horaire, et soutient que l'employeur s'est limité à rémunérer la majoration des heures effectuées et non pas les heures en elles-mêmes.

Ainsi M. [T] présente des éléments suffisamment précis pour engager le débat et permettre à l'employeur d'y répondre.

En réponse l'employeur soutient que « les 24 heures mentionnées sur le bulletin de paie de décembre 2019, pour une rémunération de 112,99 euros, concernent l'indemnisation complémentaire perçue au titre de l'accord sur le travail posté, et ce concernant un « retour sur congés validés » pour les journées des 12, 13 et 20 novembre 2019 ». Il en déduit que la valorisation de ces heures au taux normal est incluse dans son appointement de base.

Il se prévaut des dispositions du protocole d'accord sur l'organisation du travail en rythme continu au sein de l'établissement Sita Rekem Roussillon, signé le 23 avril 2014, qui définit, pour le personnel agent de maîtrise posté en 7 x 8, une annualisation du temps de travail de référence de 219,15 postes de 8 heures effectif de travail par an et une rémunération mensuelle calculée sur une base de 145,60 heures par mois (article 3.2).

Cet élément se révèle en concordance avec le bulletin de paie qui mentionne la même base de 145,60 heures sous l'intitulé d'appointement de base.

Aussi le même accord prévoit en son article 8 intitulé « Calcul du paiement des heures supplémentaires » :

« Les 3 premiers postes réalisés en plus de la tourne planifiée sont considérés comme des heures normales, les suivants seront considérés en heures supplémentaires et seront donc majorées de 25% (taux horaire salaire de base x 1,25) ».

Et l'employeur s'en prévaut pour soutenir qu'il a appliqué une majoration de 25 % sur 24 heures correspondant aux journées des 12 / 13 et 20 novembre, au cours desquels le salarié avait occupé plus de trois postes.

Or la cour constate que le bulletin de paie de décembre 2019 mentionne 216 « heures normales » rémunérées au taux salarial de 12,832 euros pour un montant de 4 067,91 euros, et 24 « heures supplémentaires à 125% » rémunérées au taux salarial de 4,708 euros pour un montant de 112,99 euros.

Aussi, l'employeur affirme, sans l'établir, que les 216 « heures normales » correspondent à 176 heures normales qui auraient été effectuées le mois précédent et 40 « heures normales » qui auraient été effectuées au mois de décembre.

Il s'abstient de verser aux débats tout élément justificatif des dates des heures de travail ainsi comptabilisées.

Il produit devant la cour un tableau intitulé « détail du calcul des majorations perçues au titre du travail posté » qui mentionne qu'en cas de retour sur congés payés validés, le salarié perçoit le paiement de 16 heures normales et le paiement de la seule majoration de 8 heures.

Toutefois ce document est dénué de toute valeur probante s'agissant d'une pièce établie par l'employeur lui-même.

Au demeurant, il se révèle en contradiction avec le document interne, produit par le salarié, intitulé « Principes de rappel des salariés postés sur repos en cas d'absence imprévue d'un autre salarié », dans une version datée du 01/02/2019 qui prévoit que le retour sur congés donne droit à une compensation laquelle ouvre notamment droit à paiement de 8 heures à 1,25, ainsi qu'au paiement d'une prime de rappel équivalente à 16h au taux normal.

En tout état de cause ces explications ne permettent pas d'établir que les 216 « heures normales » comprennent, comme il le prétend, les heures correspondant à des remplacements effectués les 12, 13 et 20 novembre.

Dès lors il échoue à démontrer que ces 216 « heures normales » comprennent d'ores et déjà la rémunération hors majoration des 24 « heures supplémentaires ».

En conséquence la cour retient que le salarié a effectué au mois de décembre 2019, 24 heures supplémentaires distinctes des 216 heures mentionnées sur le bulletin de paie. Le salarié est fondé à obtenir paiement d'un rappel de salaire correspondant au solde de rémunération dû à ce titre.

Le jugement déféré est donc confirmé en ce qu'il a condamné la société Suez RR IWS chemicals France à payer à M. [T] les sommes de 451,97 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires pour le mois de décembre 2019 et 45,20 euros au titre des congés payés afférents.

2 ' Sur la demande de rappel au titre d'un reliquat de l'indemnité de départ à la retraite :

L'article 21 bis de la convention collective nationale des industries chimiques qui fixe les règles de calcul de l'indemnité de départ volontaire à la retraite dispose, dans sa version modifiée par accord du 6 novembre 2009 étendu par arrêté du 20 avril 2010 :

« Le barème des allocations de départ s'applique dans les conditions fixées ci-après :

Tout salarié quittant l'entreprise à sa demande pour prendre sa retraite recevra, au terme du préavis prévu à l'article L. 1234-1 du code du travail, une allocation de départ à la retraite égale à :

- 1,5 mois de son dernier traitement après 5 ans d'ancienneté ;

- 2,5 mois de son dernier traitement après 10 ans d'ancienneté ;

- 3 mois de son dernier traitement après 15 ans d'ancienneté ;

- 4 mois de son dernier traitement après 20 ans d'ancienneté ;

- 4,5 mois de son dernier traitement après 25 ans d'ancienneté ;

- 5 mois de son dernier traitement après 30 ans d'ancienneté ;

- 6 mois de son dernier traitement après 35 ans d'ancienneté ;

- 7,5 mois de son dernier traitement après 40 ans d'ancienneté.

L'ancienneté est calculée selon les dispositions de l'article 10 des clauses communes de la CCNIC.

L'assiette de calcul de l'allocation de départ à la retraite s'entend de la rémunération totale mensuelle gagnée par le salarié pendant le mois précédant le préavis de départ à la retraite. Cette rémunération ne saurait être inférieure à la moyenne des rémunérations mensuelles des 12 mois précédant le préavis de départ à la retraite.

Pour le calcul de cette rémunération entrent donc en ligne de compte :

- les appointements de base ;

- les majorations relatives à la durée du travail ;

- les avantages en nature ;

- les primes de toute nature ;

- les commissions ou participations versées pour des performances individuelles liées à l'obtention d'un chiffre d'affaires ou d'un résultat ;

- les indemnités n'ayant pas le caractère de remboursement de frais ;

- les gratifications diverses ayant le caractère contractuel ou de fait d'un complément de rémunération annuelle.

Sont notamment exclues de l'assiette de cette allocation :

- les sommes issues de dispositifs collectifs d'origine légale tels que la participation, l'intéressement, l'épargne retraite ou l'abondement ;

- les sommes versées au titre des brevets d'invention, des indemnités de non-concurrence ainsi que les gratifications d'ancienneté. »

En l'espèce, les parties s'opposent sur l'assiette de calcul de l'allocation de départ à la retraite.

Il est acquis aux débats que la rémunération totale mensuelle gagnée par le salarié pendant le mois précédant le préavis de départ à la retraite correspond à celle du mois de décembre 2019.

Il est établi que le bulletin de salaire de décembre 2019 fait état d'un salaire mensuel brut total se chiffrant à 13 010,54 euros.

L'employeur fait valoir qu'il n'a pas retenu, dans l'assiette du salaire de référence, la rémunération des 176 heures et 24 heures supplémentaires au motif qu'elles relèvent de l'activité du mois de novembre 2019, et qu'il a réparti prorata temporis le montant alloué au titre de la prime de 13ème mois, pour retenir un salaire de référence de 5 791,10 euros.

Pour sa part M. [T] soutient que doivent être compris dans l'assiette du salaire de référence, la rémunération de l'intégralité des heures effectuées en décembre 2019, ainsi que les sommes mentionnées au titre de la prime de 13ème mois et celles mentionnées au titre d'un compte d'annualisation des heures supplémentaires qui ne rentrent dans aucune des deux exclusions énoncées à l'article 21 bis précité.

Premièrement, il résulte des dispositions de l'article 21 bis précité que la rémunération à prendre en considération pour le calcul de l'indemnité de congédiement s'entend du salaire de base du dernier mois précédant le préavis, augmenté des gratifications, celles dont la périodicité est supérieure à un mois, n'étant prises en compte que pour la part venant en rémunération dudit mois. (Soc., 13 mars 2024, pourvoi n° 22-21.659)

En conséquence, la prime de 13ème mois, versée avec le salaire du mois de décembre 2019 pour un montant total de 3 053,51 euros, doit être incluse prorata temporis dans le salaire de référence, soit à hauteur de 254,46 euros.

Deuxièmement, l'employeur affirme, sans l'établir, que la rémunération versée au titre de 216 heures normales comprend en réalité 176 heures effectuées le mois précédent et 40 heures effectuées au mois de décembre 2019.

En effet d'une première part, il a été vu précédemment que la société s'abstient de verser aux débats tout élément justificatif susceptible de permettre d'établir à quelle date ces heures de travail ont été réalisées.

Aussi la lecture du bulletin de salaire conduit à constater qu'il n'est apporté aucune précision sur le fait que ces heures auraient été réalisées le mois précédent et que la rémunération interviendrait à titre de rappel sur la rémunération due pour le mois de novembre 2019.

Dans ces conditions, il y a lieu de prendre en compte dans le salaire de référence l'intégralité de la somme de 4 067,91 euros versée au titre des 216 « heures normales » pour le mois de décembre 2019.

Troisièmement, la société Suez RR IWS chemicals France étant condamnée à payer à M. [T] un rappel de salaire au titre de 24 heures supplémentaires effectuées en décembre 2019, cette somme doit être intégrée dans le salaire de référence, soit la somme de 451,96 euros.

Il résulte de ce qui précède que le salaire de référence de décembre 2019 s'établit à 10 663,45 euros brut (13 010,54 ' 3 053,51 + 254,46 + 451,96).

Par suite, au regard de l'ancienneté de M. [T] qui ne fait l'objet d'aucune discussion, le montant de l'indemnité de départ volontaire à la retraite s'établit à 79 975,87 euros brut (7,5 x 10 663,45).

La société Suez RR IWS chemicals France qui a d'ores et déjà versé la somme de 52 954,49 euros est donc condamnée à verser à M. [T] une somme de 27 021,38 euros brut à titre de solde de l'indemnité de départ volontaire à la retraite.

Le jugement déféré est infirmé de ce chef.

3 ' Sur la demande en dommages et intérêts pour résistance abusive :

La condamnation à des dommages-intérêts pour résistance abusive relève du droit de la responsabilité civile pour faute au sens de l'article 1240 du code civil. Elle suppose, d'une part, que soit caractérisée la faute de la partie perdante et, d'autre part, que soit démontré un lien de causalité entre cette faute et le préjudice subi par la partie qui sollicite les dommages et intérêts pour résistance abusive.

En l'espèce M. [K] [T] soutient que son employeur a fait preuve de mauvaise foi et résisté abusivement à ses demandes.

Cependant, il s'évince des éléments précédemment exposés que la position adoptée par l'employeur quant au calcul de l'indemnité revendiquée, ne révèle, en soi, ni abus ni mauvaise foi de sa part.

Il en résulte que le salarié échoue à établir le caractère fautif du comportement de son employeur.

Par confirmation du jugement déféré, M. [K] [T] est donc débouté de sa demande en dommages et intérêts pour résistance abusive.

4 ' Sur les demandes accessoires :

La société Suez RR IWS chemicals France, partie perdante à l'instance au sens des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile, doit être tenue d'en supporter les entiers dépens de première instance par confirmation du jugement entrepris, y ajoutant les dépens d'appel.

Il serait par ailleurs inéquitable, au regard des circonstances de l'espèce comme des situations économiques des parties, de laisser à la charge de M. [T] l'intégralité des sommes qu'il a été contraint d'exposer en justice pour la défense de ses intérêts, de sorte qu'il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné la société Suez RR IWS chemicals France à lui payer la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés en première instance, et de la condamner à lui verser une indemnité complémentaire de 1 500 euros au titre des frais exposés en cause d'appel, par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, dans les limites de l'appel, et après en avoir délibéré conformément à la loi,

CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a :

- Condamné la SAS Suez RR IWS chemicals France à payer à M. [K] [T] les sommes suivantes :

- 451,97 euros brut à titre de rappel d'heures supplémentaires pour le mois de décembre 2019 ;

- 45,20 euros brut au titre des congés payés afférents ;

- Débouté M. [K] [T] de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive ;

- Condamné la société Suez RR IWS chemicals France à payer à M. [K] [T] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Débouté la société Suez RR IWS chemicals France de sa demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamné la société Suez RR IWS chemicals France aux entiers dépens.

L'INFIRME pour le surplus,

Statuant des chefs d'infirmation et y ajoutant,

CONDAMNE la SAS Suez RR IWS chemicals France à payer à M. [K] [T] une somme de 27 021,38 euros brut à titre de solde d'indemnité de départ volontaire à la retraite,

CONDAMNE la SAS Suez RR IWS chemicals France à payer à M. [K] [T] une indemnité complémentaire de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel,

DEBOUTE la SAS Suez RR IWS chemicals France de sa demande au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

CONDAMNE la SAS Suez RR IWS chemicals France aux dépens d'appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Hélène Blondeau-Patissier, Conseillère faisant fonction de Présidente, et par Madame Mériem Caste-Belkadi, Greffière, à qui la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.

La Greffière, La Conseillère faisant fonction de Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Ch. sociale -section a
Numéro d'arrêt : 22/01890
Date de la décision : 25/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 01/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-25;22.01890 ?
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