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25/06/2024 | FRANCE | N°22/01649

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Ch. sociale -section a, 25 juin 2024, 22/01649


C1



N° RG 22/01649



N° Portalis DBVM-V-B7G-LKZZ



N° Minute :























































































Copie exécutoire délivrée le :





Me Marine VARLET



Me Nicolas BOURGEY

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAISr>


COUR D'APPEL DE GRENOBLE



Ch. Sociale -Section A

ARRÊT DU MARDI 25 JUIN 2024





Appel d'une décision (N° RG )

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VIENNE

en date du 30 mars 2022

suivant déclaration d'appel du 21 avril 2022





APPELANTE :



Madame [M] [I]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 2]



représentée par Me Marine VARLET, avocat ...

C1

N° RG 22/01649

N° Portalis DBVM-V-B7G-LKZZ

N° Minute :

Copie exécutoire délivrée le :

Me Marine VARLET

Me Nicolas BOURGEY

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

Ch. Sociale -Section A

ARRÊT DU MARDI 25 JUIN 2024

Appel d'une décision (N° RG )

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VIENNE

en date du 30 mars 2022

suivant déclaration d'appel du 21 avril 2022

APPELANTE :

Madame [M] [I]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me Marine VARLET, avocat au barreau de VILLEFRANCHE-SUR-SAONE,

INTIMEE :

S.A.S. OVERSIGHT SECURITY, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège,

[Adresse 4]

[Localité 3]

représentée par Me Nicolas BOURGEY, avocat au barreau de VIENNE,

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Hélène BLONDEAU-PATISSIER, Conseillère faisant fonction de Présidente

Madame Gwenaelle TERRIEUX, Conseillère,

M. Frédéric BLANC, Conseiller,

DÉBATS :

A l'audience publique du 29 avril 2024

Madame Gwenaelle TERRIEUX, Conseillère, en charge du rapport et Mme Hélène BLONDEAU-PATISSIER, Conseillère faisant fonction de Présidente, ont entendu les représentants des parties en leurs conclusions et observations, assistées de Mme Mériem CASTE-BELKADI, Greffière, conformément aux dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, les parties ne s'y étant pas opposées ;

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 25 juin 2024, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.

L'arrêt a été rendu le 25 juin 2024.

EXPOSE DU LITIGE

Mme [M] [I] a été embauchée par la société par actions simplifiée (SAS) Oversight security à compter du 1er novembre 2019 selon contrat de travail à durée déterminée renouvelé jusqu'au 30 novembre 2019 en qualité d'agent de sécurité cynophile.

Le 1er décembre 2019, elle a été embauchée selon contrat de travail à durée indéterminée en qualité d'agent de sécurité cynophile.

La relation de travail est soumise à la convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité du 15 février 1985.

Le 15 juin 2020, la SAS Oversight security a notifié à Mme [I] un avertissement.

Le même jour, Mme [I] a été placée en arrêt de travail.

Par courrier du 6 juillet 2020 envoyé par lettre recommandée avec avis de réception, Mme [I] a pris acte de la rupture du contrat de travail aux torts exclusifs de son employeur.

Par requête du 30 novembre 2020, Mme [I] a saisi le conseil de prud'hommes de Vienne aux fins d'obtenir la condamnation de la SAS Oversight security à lui payer un rappel de salaire au titre des heures supplémentaires, des rappels d'indemnités, voir juger que sa prise d'acte produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et obtenir les indemnités afférentes à la rupture de la relation de travail.

Par jugement du 30 mars 2022, le conseil de prud'hommes de Vienne a :

Dit et jugé Mme [I] partiellement bien fondée en ses demandes,

Condamné la société Oversight security à régler à Mme [I] les sommes suivantes :

- 402,99 euros au titre des indemnités de transport du chien,

- 706,80 euros à titre de remboursement de frais de déplacement,

- 1 500,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Débouté Mme [I] de ses demandes à titre de paiement des heures supplémentaires, des heures de nuit, des heures de dimanche, des heures de jours fériés ; de sa demande d'indemnité forfaitaire horaire cynophile ; de sa demande de prise en charge des frais de formation,

Dit et jugé que la prise d'acte de Mme [I] est une démission,

En conséquence,

Débouté Mme [I] de sa demande de requalification de la prise d'acte en licenciement sans cause réelle et sérieuse et indemnités afférentes,

Débouté la société Oversight security de sa demande à titre d'indemnité compensatrice de préavis de démission et de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamné chacune des parties à la charge de ses propres dépens.

La décision a été notifiée par le greffe aux parties par lettres recommandées avec avis de réception.

Par déclaration en date du 21 avril 2023, Mme [I] a interjeté appel.

Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 11 juin 2022, auxquelles il convient expressément de se référer pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, Mme [I] sollicite de la cour de :

« Confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Oversight security à verser à Mme [I] les sommes de :

402,99 euros au titre des indemnités de transport du chien,

706,80 euros au titre du remboursement des frais de déplacement,

Infirmer le jugement pour le surplus,

En conséquence,

Condamner la société Oversight security à payer à Mme [I] les sommes de :

- 11 597,15 euros brut à titre de rappel d'heures supplémentaires, outre 1 159,71 euros de congés payés afférents,

- 800,83 euros brut au titre des heures de nuit, outre 80,09 euros de congés payés afférents,

- 579,98 euros brut au titre des heures travaillées le dimanche, soit 57,99 euros de congés payés afférents,

- 247,68 euros brut au titre des heures travaillées les jours fériés, outre 24,77 euros de congés payés afférents,

- 2 246,15 euros brut de prime de chien,

Déclarer la prise d'acte de la rupture du contrat de travail bien fondée et qu'elle doit produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Condamner en conséquence la société Oversight security à payer à Mme [I] les sommes de :

- 509,18 euros net à titre d'indemnité légale de licenciement,

- 2 036,70 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 203,67 euros au titre des congés payés afférents,

- 4 073,40 euros net à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Prononcer que la somme allouée à titre de dommage-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse portera intérêts au taux légal à compter du présent arrêt, que les autres sommes allouées porteront intérêts au taux légal à compter du 7 juillet 2020 et que les intérêts seront eux-mêmes capitalisés en application de l'article 1343-2 du code civil,

Dire que la société Oversight security doit délivrer à Mme [I] un bulletin de salaire conforme au présent arrêt,

Condamner la société Oversight security au paiement de la somme de 4 000 euros à Mme [I] au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamner la société Oversight security aux dépens ».

Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 2 août 2022, auxquelles il convient expressément de se référer pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, la société Oversight security sollicite de la cour de :

« A titre principal,

Recevoir la société Oversight security dans ses écritures, les disant recevables et bien-fondés,

Confirmer le jugement rendu le 30 mars 2022 par le conseil de prud'hommes de Vienne en ce qu'il a :

Débouté Mme [I] de ses demandes à titre de paiement des heures supplémentaires, des heures de nuit, des heures de dimanche, des heures de jours fériés ; de sa demande d'indemnité forfaitaire horaire cynophile ; de sa demande de prise en charge des frais de formation,

Dit et jugé que la prise d'acte de Mme [I] est une démission et l'a déboutée de sa demande de requalification de la prise d'acte un licenciement sans cause réelle et sérieuse et indemnités afférentes,

Réformer le jugement rendu le 30 mars 2022 par le conseil de prud'hommes de Vienne en ce qu'il a dit et jugé Mme [I] partiellement bien fondée en ses demandes et condamné la société Oversight security à régler à Mme [I] les sommes suivantes :

- 402,99 euros au titre des indemnités de transport de chien,

- 706,80 euros au titre de remboursement de frais de déplacement,

- 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

A titre incident,

Réformer le jugement rendu le 30 mars 2022 par le conseil de prud'hommes de Vienne en ce qu'il a débouté la société Oversight security des demandes suivantes :

- 2 000,22 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis de démission,

- 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Et, statuant à nouveau,

Condamner Mme [I] à payer à la société Oversight security la somme de 2 000,22 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis de démission ainsi que 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Débouter Mme [I] de sa demande de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en première instance,

En tout état de cause,

Débouter Mme [I] de sa demande de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel et la condamner au paiement de la somme de 2 500 euros à la société Oversight security sur le même fondement,

Condamner Mme [I] aux entiers dépens ».

Pour un exposé complet des moyens et prétentions des parties, il convient au visa de l'article 455 du code de procédure civile de se reporter aux conclusions des parties susvisées.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 26 mars 2024.

L'affaire, fixée pour être plaidée à l'audience du 29 avril 2024, a été mise en délibéré au 25 juin 2024.

MOTIFS DE LA DECISION :

A titre liminaire, il y a lieu de relever que la SAS Oversight security demande à ce que Mme [I] soit déboutée de sa demande de rappel de salaire au titre des heures de formation.

Or, si le jugement de première instance a débouté la salariée de sa demande formulée à ce titre, il apparaît que la salariée n'a formulé aucune demande en ce sens dans le dispositif de ses conclusions devant la cour, de sorte que celle-ci n'est saisie d'aucune demande à ce titre.

Sur la demande de rappel de salaire au titre des heures non rémunérées :

Moyens des parties,

Mme [I] fait valoir que :

- Elle a réalisé des heures supplémentaires, des heures le dimanche, des heures les jours fériés et des heures de nuit qui ne lui ont pas été rémunérées par l'employeur,

- Elle produit des tableaux manuscrits et informatisés qu'elle a réalisés afin de comptabiliser ses heures de travail,

- Les bulletins de paie ne mentionnent pas la totalité des heures réalisées,

- Elle produit les plannings fournis par l'employeur qui révèlent qu'elle a travaillé davantage d'heures que les heures qui lui ont été payées,

- L'employeur ne produit pas d'éléments permettant d'établir les heures de travail qu'elle a effectivement réalisées.

La SAS Oversight security fait valoir pour sa part que :

- Les plannings à partir desquels la salariée a établi les tableaux de décompte de son temps de travail ne sont pas les plannings de travail de la salariée, mais des plannings précisant par site d'affectation, les horaires de travail possibles pour chaque salarié, dont Mme [I], et qui servent à chaque salarié pour positionner sur des plages horaires selon leurs disponibilités,

- La lecture des plannings démontre qu'il ne s'agit pas de plannings de travail d'un salarié, ces plannings prévoyant des plages horaires de travail longues, parfois plus de 51 heures de travail continues les week-ends, impliquant nécessairement une répartition de ce temps de travail entre plusieurs salariés de l'entreprise,

- La salariée ne verse aux débats aucune note de frais sur les périodes au titre desquelles elle demande un rappel de salaire au titre des heures supplémentaires,

- La salariée n'a pas réalisé l'intégralité de ces heures, mais les heures décomptées par l'employeur sur le décompte et reportées sur le bulletin de paie,

- A la lecture des pièces versées aux débats par la SAS Oversight security, des tickets de péage d'autoroute de la salariée, et de ses bulletins de paie, il ne peut qu'être constaté que la salariée a été intégralement remplies de ses droits s'agissant du paiement de ses heures travaillées au cours des mois de décembre 2019 à juin 2020,

- Elle produit des attestations d'autres membres de l'entreprise confirmant les heures de travail réalisées,

- La salariée n'a jamais voulu utiliser le mécanisme de main courante électronique, de sorte qu'elle ne détient pas de mains courantes pour Mme [I], ce que la salariée sait parfaitement,

- Pour autant, le nom de la salariée apparaît sur des mains courantes d'autres salariés versées aux débats, car lorsqu'une prise de fonction est faite, le nom du salarié dont le relais est pris est mentionné sur la main courante,

- Les tickets de péage versés par la salariée ne corroborent pas ces décomptes, et certains sont des tickets de déplacements personnels,

- Les attestations de proches qu'elle verse aux débats sont dépourvues de valeur probante, les personnes ayant attesté ne faisant que retranscrire les propos de la salariée,

- Dans tous les cas, le quantum du rappel de salaire demandé est erroné et conduit à rémunérer deux fois la salariée pour les mêmes heures (double paiement du taux horaire de base),

- L'employeur justifie avoir rémunéré la salariée en appliquant le bon taux de majoration des heures supplémentaires, à l'exception d'une erreur qu'il a régularisées.

Sur ce,

Aux termes de l'article L. 3121-1 du code du travail, la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles.

Selon l'article L. 3121-27 du même code, la durée légale de travail effectif des salariés à temps complet est fixée à trente-cinq heures par semaine.

La durée légale du travail constitue le seuil de déclenchement des heures supplémentaires payées à un taux majoré dans les conditions de l'article L. 3121-28 du code du travail, les heures supplémentaires devant se décompter par semaine civile selon l'article L. 3121-29.

Selon l'article L. 3171-2 du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés.

Selon l'article D. 3171-8 du code du travail, lorsque les salariés d'un atelier, d'un service ou d'une équipe, au sens de l'article D. 3171-7, ne travaillent pas selon le même horaire collectif de travail affiché, la durée du travail de chaque salarié concerné est décomptée selon les modalités suivantes :

1° Quotidiennement, par enregistrement, selon tous moyens, des heures de début et de fin de chaque période de travail ou par le relevé du nombre d'heures de travail accomplies ;

2° Chaque semaine, par récapitulation selon tous moyens du nombre d'heures de travail accomplies par chaque salarié.

Selon l'article D. 3171-12, lorsque des salariés d'un atelier, d'un service ou d'une équipe ne travaillent pas selon le même horaire collectif de travail affiché, un document mensuel, dont le double est annexé au bulletin de paie, est établi pour chaque salarié.

Ce document comporte les mentions prévues à l'article D. 3171-11 ainsi que :

1° Le cumul des heures supplémentaires accomplies depuis le début de l'année ;

2° Le nombre d'heures de repos compensateur de remplacement acquis en application des articles L. 3121-28, L. 3121-33 et L. 3121-37 ;

3° Le nombre d'heures de repos compensateur effectivement prises au cours du mois ;

4° Le nombre de jours de repos effectivement pris au cours du mois, dès lors qu'un dispositif de réduction du temps de travail par attribution de journées ou de demi-journées de repos dans les conditions fixées par les articles L. 3121-44 et D. 3121-27 s'applique dans l'entreprise ou l'établissement.

Selon l'article L. 3171-4 du même code, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

A titre liminaire, il doit être relevé que selon l'article 6 du contrat de travail du 1er décembre 2019 : « Le contrat est 151.40 heures mensuel. La durée des vacations est fixée selon les besoins du service. Elle est aménagée en fonction de la durée hebdomadaire de 35 heures, variable en fonction du cycle de travail. Elle est déterminée par le planning de service, si l'événement le justifie.

Chaque salarié(e) est tenu de faire part de sa prise de service et de sa fin de service, à chaque vacation, auprès de son responsable ou à la direction de la société soit par sms ou appel téléphonique ».

Ainsi, le contrat de travail ne détermine pas les horaires de travail de la salariée.

Au soutien de sa demande de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires non rémunérées, la salariée verse aux débats :

- un courrier du 17 juin 2020 adressé à son employeur dans lequel elle demande le paiement d'heures supplémentaires et des rappels de salaire au titre des heures de nuit, de dimanche, et de jours fériés,

- un décompte réalisé par ses soins des heures qu'elle allègue avoir travaillé chaque mois sur la période de décembre 2019 à juin 2020,

- des tickets de péage,

- des plannings de travail des mois d'avril, mai et juin 2020,

- des attestations de proches.

Ces éléments sont suffisamment précis pour engager le débat et permettre à l'employeur, tenu de décompter et contrôler le temps de travail de ses salariés, d'y répondre en apportant ses propres éléments.

D'une première part, dès lors qu'il n'incombe pas au salarié de démontrer les horaires de travail qu'il a réalisés, mais d'apporter des éléments suffisamment précis permettant à l'employeur d'y répondre en produisant ses propres éléments, il est sans incidence que les plannings de travail produits par la salariée soient des plannings de travail ou des plannings prévisionnels, dès lors qu'elle verse aux débats un décompte précis des horaires qu'elle allègue avoir effectués, et que cet élément est suffisant, à lui seul, pour permettre à l'employeur d'apporter ces propres éléments.

Au surplus, l'employeur échoue à démontrer que lesdits plannings de travail ne seraient que des propositions de plages de travail parmi lesquelles la salariée devait se positionner.

En effet, les deux attestations de deux salariés de l'entreprise versées aux débats par l'employeur, rédigées dans des termes identiques, ne sont pas des éléments suffisamment objectifs permettant de déterminer la nature de ces plannings.

Et les plannings de travail aux noms d'autres salariés, produits par l'employeur, faute d'être corroborés par des éléments objectifs démontrant qu'ils étaient préalablement communiqués aux salariés, dont Mme [I], afin de leur permettre de choisir leurs plages de travail, et en l'absence de toute explication sur la manière dont les salariés communiquaient leurs préférences pour certaines plages de travail, ne sont d'aucune valeur probante.

D'une deuxième part, les plannings de travail par site indiquant le nom des salariés pour chaque plage de travail du site concerné ne permettent pas d'établir les horaires de travail effectués par la salariée, faute pour la SAS Oversight security d'établir, par la production d'éléments objectifs, que ces plannings étaient bien communiqués à la salariée.

D'une troisième part, les attestations d'autres salariés qui se limitent à indiquer les plages de travail qu'ils auraient effectuées par mois ne sont pas suffisamment objectives pour démontrer les horaires de travail effectués par la salariée. Dès lors, il est sans pertinence qu'ils y mentionnent des plages de travail que la salariée soutient avoir effectuées.

D'une quatrième part, la SAS Oversight security produit deux attestations de salariés de l'entreprise dans lesquelles ceux-ci indiquent que la salariée a toujours refusé d'utiliser le logiciel de main courante pour la prise de pose et la fin de poste, et des liasses de courriels de mains courantes pour plusieurs salariés de l'entreprise mentionnant le lieu d'activité, l'heure de prise de service et l'heure de fin de service.

Et il apparaît, à l'examen de ces mains courantes, que le nom de la salariée est mentionné régulièrement avec les mentions suivantes « Départ de Mme [I] » ou « Arrivée de Mme [I] » accompagnées de l'indication de l'heure de cet événement.

Si la salariée n'apporte aucune explication sur ces éléments objectifs produits par l'employeur, celui-ci n'établit pas, sur la base de ces mains courantes, que certaines des plages de travail mentionnées par la salariée dans son décompte n'auraient pas été effectuées par elle, mais par d'autres salariés de l'entreprise.

Et, l'employeur, sur la base de ces mains courantes, ne produit pas non plus de décompte précis permettant de contredire utilement le calcul par la salariée du rappel de salaire dû au titre des heures supplémentaires effectuées sur la base de son propre décompte, la salariée produisant par ailleurs un calcul précis du montant de ce rappel en distinguant les heures supplémentaires devant être payées à un taux majoré de 25 % et celles devant être payées à un taux majoré de 50 %, et en déduisant des sommes ainsi obtenues les sommes déjà versées par l'employeur au titre des heures supplémentaires.

Aussi, il n'apparaît pas que le calcul effectué par la salariée conduirait celle-ci à « obtenir un double paiement du taux horaire de base » comme le soutient la SAS Oversight security dans ses conclusions.

Dès lors, en considération de l'ensemble de ces constatations, faute pour l'employeur, tenu de décompter les temps de travail de ses salariés, d'établir les horaires de travail effectués par Mme [I], il y a lieu de faire droit à sa demande de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires, et de condamner la SAS Oversight security à lui payer la somme de 11 597,15 euros brut, outre 1 159,71 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de congés payés y afférents.

S'agissant des rappels de salaire sollicités par la salariée au titre des majorations pour les heures de nuit, les heures travaillées le dimanche et les heures travaillées les jours fériés, la salariée produit des calculs précis sur la base des taux horaires majorés pour chacune de ces heures travaillées dont elle détaille le nombre pour chaque mois de la relation de travail dans le décompte des heures travaillées qu'elle verse aux débats.

Ces éléments sont suffisamment précis pour permettre à l'employeur, tenu de décompter le temps de travail de ses salariés, d'y répondre en produisant ses propres éléments.

Or, la SAS Oversight security, qui allègue qu'elle a déjà versé les majorations dues au titre de l'ensemble de ces heures, n'en fait pas la démonstration, alors que la charge de la preuve lui incombe.

Par ailleurs, il n'apparaît pas que ces calculs conduiraient à rémunérer deux fois le taux horaire de base, la salariée n'ayant pas calculé les rappels de salaire sur la base du taux majoré, mais uniquement sur le montant de la majoration due.

Et l'employeur ne produit aucune critique utile des calculs effectués par la salariée.

En conséquence, il y a lieu de condamner la SAS Oversight security à payer à Mme [I] les sommes suivantes, par infirmation du jugement entrepris de ce chef :

- 800,83 euros brut à titre de rappel de salaire au titre de la majoration des heures de nuit, outre 80,08 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de congés payés y afférents,

- 579,98 euros brut à titre de rappel de salaire au titre de la majoration des heures travaillées le dimanche, outre 57,99 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de congés payés y afférents,

- 247,68 euros brut à titre de rappel de salaire au titre de la majoration des heures travaillées les jours fériés, outre 24,77 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de congés payés y afférents.

Sur la demande au titre de l'indemnité conventionnelle pour les heures de travail équipe homme-chien :

Moyens des parties,

Mme [I] fait valoir que :

- La convention collective prévoit le versement d'une prime de chien pour chaque heure travaillée avec un chien, qui ne lui a pas été versée,

- Elle a décompté 1 987,95 heures travaillées avec son chien,

- Elle sollicite un rappel de prime en conséquence.

La SAS Oversight security fait valoir pour sa part que :

- Elle justifie par les bulletins de paie du paiement de l'indemnité forfaitaire horaire « Cynophile » pour les heures effectuées par la salariée,

- Il n'existe aucune somme à lui devoir à ce titre,

- Au contraire, un trop-perçu est constaté.

Sur ce,

Selon l'article 7.1 de l'annexe IV de la convention collective prévention et sécurité : agents d'exploitation, employés administratifs et techniciens :

« Les agents de sécurité cynophiles bénéficient d'une indemnité forfaitaire correspondant à l'ensemble des dépenses courantes d'amortissement et d'entretien du chien. Cette indemnité est égale 1,13 euros par heure de travail effectif de l'équipe homme-chien ».

Premièrement, il ressort des conclusions de la salariée que celle-ci sollicite le paiement de cette indemnité pour la totalité des heures travaillées au cours de la relation de travail, telles que celles-ci apparaissent sur le décompte qu'elle verse aux débats, Mme [I] soutenant ainsi implicitement que la SAS Oversight security aurait omis de lui verser cette indemnité durant tout le temps de la relation de travail.

Deuxièmement, il ressort des bulletins de salaire de Mme [I] que l'employeur a versé chaque mois une somme sous la rubrique « Indemnités non soumises à cotisations » pour un montant total sur l'ensemble de la relation contractuelles de 1 267,30 euros brut.

La SAS Oversight security soutient que cette somme, qui n'est pas soumise à cotisations sociales, correspond à la prime dont la salariée sollicite le paiement.

Cette indemnité ayant la valeur de remboursement de frais professionnels, et la salariée ne soutenant pas que les sommes susvisées qu'elle a perçues correspondraient au remboursement d'autres frais professionnels, il y a lieu de retenir que l'employeur a versé la somme de 1 267,30 euros brut à la salariée au titre de cette indemnité sur l'ensemble de la relation de travail.

Troisièmement, la SAS Oversight security, qui soutient que seule une partie des heures travaillées par la salariée justifierait le paiement de cette indemnité au motif que la salariée ne travaillait pas systématiquement avec son chien, ne produit aucun élément permettant d'établir le bien-fondé de son allégation, la cour relevant que la salariée a été embauchée en qualité d'agent de sécurité et agent cynophile, mais que les bulletins de salaire font uniquement mention de l'intitulé de poste : « Agent cynophile ».

Dès lors, il incombe à l'employeur de démontrer que certaines des heures travaillées l'ont été en l'absence du chien de la salariée.

Quatrièmement, la SAS Oversight security n'établit pas quelles ont été les plages de travail effectuées par la salariée en qualité de « maître chien » et celles effectuées en qualité de simple « agent de sécurité » en l'absence de son chien.

Et l'employeur ne peut se fonder sur les plannings de travail produits par la salariée, qui indiquent pour chaque plage de travail la mentions « MC » (pour « maître chien ») et la mention « ADS » (pour « agent de sécurité »), alors qu'il soutient que ces plannings ne sont que des plannings prévisionnels et ne correspondent pas aux plages de travail effectuées par la salariée.

Au surplus, la SAS Oversight security ne démontre pas que les sommes qu'elle a versées à la salariée au titre de ladite prime correspondent bien à l'ensemble des plages horaires portant la mention « MDC » sur lesdits plannings.

En conséquence, il y a lieu de retenir que la SAS Oversight security échoue à démontrer que seules certaines des heures travaillées par la salariée ont été effectuées en présence de son chien.

Aussi, il doit être fait droit à la demande de rappel de prime pour l'ensemble des heures travaillées demandées par la salariée, soit un total de 1 987,95 heures.

Eu égard à la somme déjà versée par l'employeur, il y a lieu de condamner la SAS Oversight security à payer à Mme [I] la somme de 978,85 euros brut à titre de rappel d'indemnité conventionnelle des heures de travail de l'équipe homme-chien, par infirmation du jugement entrepris de chef.

Sur la demande au titre de l'indemnité de transport de chien :

Moyens des parties,

Mme [I] fait valoir que :

- La convention collective applicable prévoit le versement d'une indemnité lorsqu'elle s'est déplacée avec son chien sur son lieu de travail pour effectuer une vacation avec son chien,

- La convention collective contient un barème de l'indemnité de transport de chien en fonction de la distance parcourue aller et retour,

- L'examen des bulletins de salaire démontre que la SAS Oversight security ne lui a pas versé cette indemnité, lorsqu'elle lui était due.

La SAS Oversight security fait valoir que :

- Le quantum des déplacements avec le chien est erroné,

- La salariée ne prend pas en compte la distance réelle entre le domicile et le site de vacation,

- La salariée a été remplie de ses droits s'agissant du paiement de cette indemnité.

Sur ce,

Selon l'article 7.2 de l'annexe IV de la convention collective prévention et sécurité : agents d'exploitation, employés administratifs et techniciens : « En outre, compte tenu des contraintes particulières liées conjointement aux horaires de travail et au transport et à l'accompagnement du chien, il est attribué aux agents de sécurité cynophile une « indemnité de transport » selon les conditions et modalités suivantes :

Cette indemnité est fixée en fonction de la distance séparant le domicile de l'agent cynophile du site d'affectation déterminé par la planification de l'agent, sur la base de zones concentriques et sur justification de l'utilisation du véhicule. Cette indemnité est versée pour les jours où l'agent s'est effectivement rendu à son travail pour accomplir une vacation avec son chien : elle n'est donc pas due pour tout autre déplacement ne nécessitant pas la présence du chien. Cette indemnité ne se cumule pas une indemnité ayant le même objet ».

Premièrement, il ressort des bulletins de salaire versés aux débats par la salariée que celle-ci a perçu chaque mois une somme au titre de la « fraction titres de transport supérieure à 50 % ou prime de transport », l'employeur alléguant que cette somme correspond au remboursement des frais de déplacement professionnel et à la prime de transport de chien.

Deuxièmement, la SAS Oversight security produit un document dans lequel, pour chaque mois de la relation de travail, elle indique la fraction de cette somme versée au titre de la prime de transport de chien, et celle versée au titre du remboursement des frais de déplacement professionnel.

Ainsi, sur la base de ce décompte, il apparaît que la salariée a perçu la somme totale de 187,86 euros brut au titre de l'indemnité de transport de chien.

Troisièmement, si la salariée soutient qu'elle n'a pas pris en compte les vacations où elle n'a pas travaillé avec son chien dans son calcul de l'indemnité de transport de chien dont elle sollicite le paiement, il apparaît qu'elle ne fait pas la distinction entre les heures travaillées avec son chien et celles travaillées sans chien dans le décompte des heures de travail susvisé, lequel fait mention d'un nombre global de kilomètres parcourus pour chacun des mois travaillés de la relation de travail.

Et, la salariée a effectué le calcul du rappel d'indemnité sollicité par mois sur la base de ce kilométrage global, de sorte qu'il ne peut qu'être retenu que la salariée demande, comme elle l'a fait pour l'indemnité conventionnelle pour les heures de travail équipe homme-chien, le versement de l'indemnité pour les distances parcourues au titre de l'ensemble des vacations réalisées.

Il a déjà été constaté que la SAS Oversight security ne démontrait pas quels jours la salariée avait travaillé avec son chien et quels jours la salariée avait uniquement assuré des missions d'agent de sécurité sans chien.

Or, l'employeur, qui donne les directives de travail, supporte la charge de la preuve.

Dès lors, il y a lieu de retenir qu'elle a effectué l'ensemble des vacations qui lui ont été confiées avec son chien.

La SAS Oversight security ne contestant utilement ni le nombre de kilomètres indiqués par la salariée pour chaque mois travaillé sur son décompte, ni ses calculs de l'indemnité due pour chaque mois travaillé, elle sera condamnée à payer à Mme [I], compte tenu des sommes déjà versées au titre de cette indemnité telles qu'elles apparaissent sur les bulletins de salaire, la somme de 215,13 euros brut, par infirmation du jugement entrepris sur le quantum de la condamnation.

Sur la demande au titre du remboursement des frais de déplacement professionnel :

Moyens des parties,

Mme [I] fait valoir que :

- Elle sollicite le remboursement de la somme correspondant aux frais de péage exposés pour se rendre sur les différents sites sur lesquels elle a été affectée entre février 2020 et juin 2020,

- Ces déplacements ne correspondent pas à des trajets domicile-travail et ont été effectués pour les besoins de son activité professionnelle dans l'intérêt de l'employeur,

- Elle produit les plannings horaires fournis par l'employeur et les tickets de péage,

- Elle devait réaliser en moyenne plus de 100 km pour se rendre et revenir sur ses lieux d'intervention.

La SAS Oversight security fait valoir pour sa part que :

- Les frais d'autoroute ne correspondent pas à des frais professionnels imposés par l'employeur,

- La salariée présente des notes de frais hors toute période de travail.

Sur ce,

Les frais professionnels engagés par le salarié doivent être supportés par l'employeur. Ainsi, les frais qu'un salarié justifie avoir exposé pour les besoins de son activité professionnelle dans l'intérêt de l'employeur, doivent lui être remboursés sans qu'ils puissent être imputés sur la rémunération qui lui est due, à moins qu'il n'ait été contractuellement prévu qu'il en conserverait la charge moyennant le versement d'une somme fixée à l'avance de manière forfaitaire.

Par ailleurs, aux termes de l'article R. 3261-15 du code du travail, dans sa version en vigueur du version en vigueur du 1er janvier 2009 au 11 mai 2020, le salarié qui exerce son activité sur plusieurs lieux de travail au sein d'une même entreprise qui n'assure pas le transport entre ces différents lieux et entre ces lieux et la résidence habituelle du salarié peut prétendre à la prise en charge des frais de carburant ou d'alimentation électrique d'un véhicule engagés lui permettant de réaliser l'ensemble des déplacements qui lui sont imposés entre sa résidence habituelle et ses différents lieux de travail, ainsi qu'entre ces lieux de travail.

Et aux termes du même article, dans sa version en vigueur du 11 mai 2020 au 1er janvier 2022, le salarié qui exerce son activité sur plusieurs lieux de travail au sein d'une même entreprise qui n'assure pas le transport entre ces différents lieux et entre ces lieux et la résidence habituelle du salarié peut prétendre aux prises en charge mentionnées aux articles L. 3261-3 et L. 3261-3-1 pour les déplacements qui lui sont imposés entre sa résidence habituelle et ses différents lieux de travail, ainsi qu'entre ces lieux de travail.

Premièrement, il apparaît que la salariée exerçait bien son activité sur plusieurs lieux de travail au sein de la SAS Oversight security. En conséquence, elle était en droit de solliciter de son employeur qu'il prenne en charge les frais qu'elle a engagés pour se rendre sur ses différents lieux de travail par l'utilisation de son véhicule, ces frais incluant notamment les frais de péage.

Deuxièmement, la salariée produit un ensemble de tickets de péage sur la période de février 2020 à juin 2020.

L'employeur conteste que la salariée ait travaillé le 8 février 2020, et soutient que les frais de péage pour cette journée correspondraient à des frais d'un trajet réalisé pour ses besoins personnels, sans toutefois produire aucun élément permettant d'établir que la salariée n'aurait réalisé aucune prestation de travail ce jour-là comme elle le soutient.

En effet, la SAS Oversight security, chargée de contrôler le temps de travail de ses salariés en sa qualité d'employeur, ne produit aucun élément permettant d'établir les jours travaillés par la salariée, de sorte qu'il ne peut être retenu que la salariée n'aurait pas travaillé au cours de cette journée.

Dès lors, il n'y a pas lieu d'écarter les frais de péage correspondant à cette journée.

En conséquence, la SAS Oversight security est condamnée à payer à Mme [I] la somme de 706,80 euros brut à titre de remboursement des frais de déplacement, par confirmation du jugement entrepris de ce chef.

Sur le bien-fondé de la prise d'acte de la rupture du contrat de travail :

Moyens des parties,

Mme [I] fait valoir que :

- Les manquements commis par l'employeur étaient suffisamment graves pour empêcher la poursuite de la relation de travail,

- Elle reproche à la SAS Oversight security : le non-paiement des heures supplémentaires, de nuit, de dimanche et de jours fériés,

- L'absence de prise en charge de sa formation professionnelle,

- Le non-versement de la prime de chien,

- L'absence de prise en charge de la totalité de ses frais de déplacement et l'absence de versement de l'indemnité de déplacement de chien,

- Une attitude méprisante,

- Un harcèlement moral au cours de son arrêt de travail,

- Elle a signalé à l'employeur ces différents manquements et lui a rédigé un courrier le 17 juin 2020 afin de lui en demander le paiement,

- Dans ce courrier, elle a également contesté le bien-fondé de l'avertissement du mois de juin, car les faits qui sont reprochés n'étaient pas avérés,

- Elle a sollicité à nouveau le paiement des sommes dues par un courriel du 3 juillet 2020,

- L'employeur a reconnu une partie des manquements : absence de paiement des heures de formation, et non application du bon taux de majoration pour les heures supplémentaires,

- La prise d'acte a donc produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et elle a droit aux indemnités afférentes à la rupture abusive de la relation de travail : indemnité légale de licenciement, indemnité compensatrice de préavis, dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La SAS Oversight security fait valoir pour sa part que :

- Aucun des manquements invoqués n'est établi,

- La salariée a été embauchée par une société concurrente immédiatement après la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail,

- La prise d'acte a produit les effets d'une démission,

- Dans tous les cas, la salariée ne fait la démonstration d'aucun préjudice résultant de la perte de son emploi.

Sur ce,

La prise d'acte est un mode de rupture du contrat de travail par lequel le salarié met un terme à son contrat en se fondant sur des manquements qu'il reproche à son employeur.

Elle n'est soumise à aucun formalisme en particulier mais doit être adressée directement à l'employeur.

Elle met de manière immédiate un terme au contrat de travail.

Pour que la prise d'acte produise les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, les manquements invoqués par le salarié doivent non seulement être établis, mais ils doivent de surcroît être suffisamment graves pour rendre impossible la poursuite du contrat de travail.

A défaut, la prise d'acte est requalifiée en démission.

Pour évaluer si les griefs du salarié sont fondés et justifient que la prise d'acte produise les effets d'un licenciement, les juges doivent prendre en compte la totalité des reproches formulés par le salarié et ne peuvent pas en laisser de côté : l'appréciation doit être globale et non manquement par manquement.

Par ailleurs, il peut être tenu compte dans l'appréciation de la gravité des manquements de l'employeur d'une éventuelle régularisation de ceux-ci avant la prise d'acte.

En principe, sous la réserve de règles probatoires spécifiques à certains manquements allégués de l'employeur, c'est au salarié, et à lui seul, qu'il incombe d'établir les faits allégués à l'encontre de l'employeur. S'il n'est pas en mesure de le faire, s'il subsiste un doute sur la réalité des faits invoqués à l'appui de sa prise d'acte, celle-ci doit produire les effets d'une démission.

Lorsque la prise d'acte est justifiée, elle produit les effets selon le cas d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ou nul de sorte que le salarié peut obtenir l'indemnisation du préjudice à raison de la rupture injustifiée, une indemnité compensatrice de préavis ainsi que l'indemnité de licenciement, qui est toutefois calculée sans tenir compte du préavis non exécuté dès lors que la prise d'acte produit un effet immédiat.

Premièrement, Mme [I] a pris acte de la rupture de son contrat de travail par courrier du 6 juillet 2020 envoyé par lettre recommandée avec avis de réception, dans lequel la salariée invoque plusieurs manquements de la SAS Oversight security, parmi lesquelles des irrégularités de rémunération.

Deuxièmement, il ressort des pièces versées aux débats par Mme [I] que celle-ci a sollicité de la SAS Oversight security qu'elle lui paie les heures supplémentaires effectuées aux taux majorés de 25 % et de 50 %, les majorations au titre des heures de nuit en semaine, des heures de nuit le week-end, des heures de travail le dimanche, des heures travaillées les jours fériés, ainsi que le paiement de ses frais de déplacement, des indemnités conventionnelles de transport de chien et pour les heures de travail équipe homme-chien, et que M. [C] [X], responsable d'exploitation, a refusé d'accéder à l'ensemble de ces demandes par courriel adressé à la salariée le 2 juillet 2020.

Troisièmement, il a été retenu que la SAS Oversight security n'avait pas payé à la salariée l'intégralité des heures supplémentaires qu'elle avait effectuées, et ne lui avait pas versé plusieurs majorations au titre des heures travaillées la nuit, le dimanche et les jours fériés, qu'elle ne lui avait pas versé l'intégralité de la prime de transport de chien, qu'elle avait omis de lui payer l'indemnité conventionnelle pour les heures de travail équipe homme-chien, ainsi qu'une partie de ses frais professionnels.

Compte tenu de la demande formulée initialement par la salariée à son employeur, du refus que lui a opposé l'employeur en réponse, et eu égard au nombre d'heures supplémentaires effectuées et non rémunérées, les manquements imputables à l'employeur sont suffisamment graves pour empêcher la poursuite de la relation de travail.

Il est sans effet sur la prise d'acte que l'arrêt de travail de la salariée ait pris fin concomitamment à cette dernière, dès lors que la prise d'acte est justifiée par des manquements suffisamment graves empêchant la poursuite de la relation de travail.

Ainsi, et sans qu'il soit nécessaire de se prononcer sur les autres griefs invoqués par la salariée, il y a lieu de retenir que prise d'acte a produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieux.

Selon l'article L. 1234-9 du code du travail, le salarié titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminée, licenciée alors qu'il compte 8 mois d'ancienneté ininterrompus au service du même employeur, a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité de licenciement.

Les modalités de calcul de cette indemnité sont fonction de la rémunération brute dont le salarié bénéficiait antérieurement à la rupture du contrat de travail. Ce taux et ces modalités sont déterminés par voie réglementaire.

Selon l'article L. 1234-11 du code du travail, les circonstances entraînant la suspension du contrat de travail, en vertu soit de dispositions légales, soit d'une convention ou d'un accord collectif de travail, soit de stipulations contractuelles, soit d'usages, ne rompent pas l'ancienneté du salarié appréciée pour la détermination du droit à l'indemnité.

Toutefois, la période de suspension n'entre pas en compte pour la détermination de la durée d'ancienneté exigée pour bénéficier de ces dispositions.

La salariée a été embauchée par la SAS Oversight security à compter du 6 juillet 2019 selon contrat de travail à durée déterminée pour la période du 6 juillet 2019 au 28 juillet 2019, puis de nouveau selon contrats de travail à durée déterminée du 1er au 29 août 2019, du 29 au 30 septembre 2019 et du 1er au 30 novembre 2019. Elle a ensuite été embauchée selon contrat de travail à durée indéterminée à compter du 1er décembre 2019 jusqu'au 6 juillet 2020, date de la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail.

Dès lors, il y a lieu de faire remonter l'ancienneté de la salariée à la date du 1er novembre 2019, et non au 6 juillet 2019 comme le soutient Mme [I] sans fournir au demeurant aucune explication au soutien de son allégation, les contrats précédents le contrat pour la période du 1er au 30 novembre 2019 n'étant pas successifs.

En outre, il apparaît que la salariée a été placée en arrêt de travail à compter du 15 juin 2020, renouvelé par la suite jusqu'à la prise d'acte de la rupture du contrat de travail, et qu'ainsi son contrat de travail a été suspendu à compter de cette date.

En conséquence, à la date de la prise d'acte, la salariée avait acquis sept mois d'ancienneté, ce dont il résulte que la salariée n'est pas fondée à prétendre à une indemnité de licenciement sur le fondement des dispositions susvisées de l'article L. 1234-9 du code du travail.

Selon l'article L. 1234-1 du code du travail, lorsque le licenciement n'est pas motivé par une faute grave, le salarié a droit s'il justifie chez le même employeur d'une ancienneté de services continus comprises entre six mois et moins de deux ans, à un préavis d'un mois.

Il ressort de l'attestation d'employeur destinée à Pôle emploi que la moyenne des six mois de travail de la salariée dans le cadre de son contrat de travail à durée indéterminée s'élève à 2 180,69 euros brut.

En conséquence, la salariée est fondée à prétendre à une indemnité compensatrice de préavis d'un montant de 2 036,70 euros brut, conformément à sa demande, outre 203,67 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de congés payés y afférents, par infirmation du jugement entrepris de ce chef.

Enfin, selon l'article L. 1235-3 du code du travail, si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis.

Si l'une ou l'autre des parties refuse cette réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur dont le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux fixés dans un tableau, soit, pour une ancienneté de moins d'une année, une indemnité ne pouvant dépasser un mois de salaire.

La salariée allègue qu'elle n'a pas pu s'inscrire sur la liste des demandeurs d'emploi et percevoir l'allocation de retour à l'emploi, la prise d'acte étant considérée par Pôle emploi comme une démission n'ouvrant pas droit au bénéfice de l'allocation de retour à l'emploi. Elle soutient par ailleurs qu'elle n'a pas, à ce jour, retrouvé d'emploi et que l'activité de voyance à laquelle la SAS Oversight security fait référence dans ses conclusions n'est pas exercée à titre professionnel mais en tant que loisir dans le cadre d'une association loi 1901.

En considération de ses éléments, de l'âge de la salariée au moment de la rupture de la relation de travail, de son ancienneté et de sa rémunération moyenne brute, il y a lieu de condamner la SAS Oversight security à lui payer la somme de 2 180,69 euros brut à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, par infirmation du jugement entrepris de ce chef.

La prise d'acte de la rupture du contrat de travail ayant produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la demande reconventionnelle de la SAS Oversight security visant à obtenir la condamnation de Mme [I] à lui payer une indemnité équivalente au montant de l'indemnité compensatrice de préavis est sans objet. Dès lors, il y a lieu de débouter la SAS Oversight security de sa demande reconventionnelle formulée à ce titre, par confirmation du jugement entrepris de ce chef.

Sur les demandes accessoires :

Il y a lieu de condamner la SAS Oversight security à remettre à Mme [I] un bulletin de salaire conforme à la présente décision.

Au visa de l'article 1231-7 du code civil, dès lors que les sommes indemnitaires allouées en principal sont d'un montant laissé à l'appréciation du juge, les intérêts au taux légal ne courent qu'à compter de la décision qui les prononce.

Il s'ensuit que les intérêts sur les condamnations aux sommes indemnitaires portent intérêt au taux légal pour celles fixées par les premiers juges et confirmées par le présent arrêt à compter du jugement entrepris, et que les autres condamnations porteront intérêt au taux légal à compter du présent arrêt.

Au cas d'espèce, il y a lieu de dire que les intérêts sur les condamnations aux sommes indemnitaires ont commencé à courir à la date du présent arrêt.

En revanche, les intérêts sur les créances salariales courent à compter de la date de notification de la convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation, ou de la date de l'audience à laquelle les conclusions présentant ces demandes ont été visées par le greffe.

Au cas d'espèce, les demandes salariales ayant été formulées dans la requête par laquelle la salariée a saisi la juridiction prud'homale, il y a lieu de dire que les intérêts sur les créances salariales ont commencé à courir à la date de la notification de la convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation, soit le15 décembre 2021.

La décision de première instance est confirmée sur les frais irrépétibles, mais réformée sur les dépens.

La SAS Oversight security, partie perdante, est condamnée aux dépens de première instance et d'appel et à payer à Mme [I] la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, cette condamnation emportant nécessairement rejet de sa demande formulée à ce titre.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR, statuant publiquement et contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

CONFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a :

Condamné la société Oversight security à régler à Mme [I] les sommes suivantes :

- 706,80 euros au titre de remboursement de frais de déplacement,

- 1 500,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Débouté la société Oversight security de sa demande à titre d'indemnité compensatrice de préavis de démission et de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'INFIRME pour le surplus,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

JUGE que la prise d'acte de la rupture de la relation de travail a produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

CONDAMNE la SAS Oversight security à payer à Mme [I] les sommes suivantes :

- 11 597,15 euros brut à titre de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires, outre 1 159,71 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de congés payés y afférents,

- 800,83 euros brut à titre de rappel de salaire au titre de la majoration des heures de nuit, outre 80,08 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de congés payés y afférents,

- 579,98 euros brut à titre de rappel de salaire au titre de la majoration des heures travaillées le dimanche, outre 57,99 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de congés payés y afférents,

- 247,68 euros brut à titre de rappel de salaire au titre de la majoration des heures travaillées les jours fériés, outre 24,77 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de congés payés y afférents,

- 978,85 euros brut à titre de rappel d'indemnité conventionnelle des heures de travail de l'équipe homme-chien,

- 215,13 euros brut à titre d'indemnité conventionnelle de transport de chien,

- 706,80 euros brut à titre de remboursement des frais de déplacement,

- 2 036,70 euros brut, à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 203,67 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de congés payés y afférents,

- 2 180,69 euros brut à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 2 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

CONDAMNE la SAS Oversight security à remettre à Mme [I] un bulletin de salaire conforme à la présente décision,

DIT que les intérêts sur les condamnations aux sommes indemnitaires ont commencé à courir à la date du présent arrêt, et que les intérêts sur les créances salariales ont commencé à courir le 15 décembre 2021,

DEBOUTE la SAS Oversight security de ses demandes paiement d'une indemnité équivalente à l'indemnité compensatrice de préavis et d'une indemnité au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la SAS Oversight security aux dépens de première instance et d'appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Hélène Blondeau-Patissier, Conseillère faisant fonction de Présidente, et par Madame Mériem Caste-Belkadi, Greffière, à qui la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.

La Greffière, La Conseillère faisant fonction

de Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Ch. sociale -section a
Numéro d'arrêt : 22/01649
Date de la décision : 25/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 01/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-25;22.01649 ?
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