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18/06/2024 | FRANCE | N°22/04489

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Ch.secu-fiva-cdas, 18 juin 2024, 22/04489


C6



N° RG 22/04489



N° Portalis DBVM-V-B7G-LT23



N° Minute :





































































Notifié le :



Copie exécutoire délivrée le :





La SARL ANAÉ AVOCATS



La CPAM DE L'ISERE





AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'

APPEL DE GRENOBLE



CHAMBRE SOCIALE - PROTECTION SOCIALE

ARRÊT DU MARDI 18 JUIN 2024





Appel d'une décision (N° RG 18/01034)

rendue par le pôle social du tribunal judiciaire de Grenoble

en date du 25 novembre 2022

suivant déclaration d'appel du 15 décembre 2022





APPELANTE :



Madame [X] [I] [Y]

née le 02 avril 1970 à [Localité 7]

[Adresse 2]

[Localité 4]

...

C6

N° RG 22/04489

N° Portalis DBVM-V-B7G-LT23

N° Minute :

Notifié le :

Copie exécutoire délivrée le :

La SARL ANAÉ AVOCATS

La CPAM DE L'ISERE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE SOCIALE - PROTECTION SOCIALE

ARRÊT DU MARDI 18 JUIN 2024

Appel d'une décision (N° RG 18/01034)

rendue par le pôle social du tribunal judiciaire de Grenoble

en date du 25 novembre 2022

suivant déclaration d'appel du 15 décembre 2022

APPELANTE :

Madame [X] [I] [Y]

née le 02 avril 1970 à [Localité 7]

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Typhaine ROUSSELLET de la SARL ANAÉ AVOCATS, avocat au barreau de GRENOBLE substituée par Me Ophélie AMIEZ, avocat au barreau de GRENOBLE

INTIMEE :

La CPAM DE L'ISERE, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

Service Contentieux Général

[Adresse 1]

[Localité 3]

comparante en la personne de M. [L] [E], régulièrement muni d'un pouvoir

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DEBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

M. Jean-Pierre DELAVENAY, Président,

M. Pascal VERGUCHT, Conseiller,

Mme Elsa WEIL, Conseiller,

Assistés lors des débats de M. Fabien OEUVRAY, Greffier,

DÉBATS :

A l'audience publique du 09 avril 2024,

Mme Elsa WEIL, Conseiller chargée du rapport, M. Jean-Pierre DELAVENAY, Président et M. Pascal VERGUCHT, Conseiller ont entendu les représentants des parties en leurs conclusions et plaidoirie,

Et l'affaire a été mise en délibéré à la date de ce jour à laquelle l'arrêt a été rendu.

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Madame [X] [I] [Y] était salariée en contrat à durée indéterminée en qualité de secrétaire médicale auprès de différents cabinets médicaux depuis1992.

Le 13 novembre 2017, elle a sollicité auprès de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère la prise en charge au titre de la législation professionnelle d'une épicondylalgie coude droit, tableau 57B, sur la base d'un certificat médical initial établi le 17 octobre 2017 par le docteur [D] [B].

Après enquête administrative et avis du CRRMP de [Localité 5] qui ne retenait pas de lien direct entre la maladie et l'activité professionnelle de l'assurée, la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère a rejeté le 17 juillet 2018 la demande de madame [X] [I] [Y] de prise en charge de sa pathologie au titre de la législation professionnelle.

Madame [X] [I] [Y] saisissait la Commission de recours amiable, qui confirmait la décision de la caisse primaire d'assurance maladie le 27 août 2018.

Elle saisissait le pôle social du tribunal judiciaire de Grenoble d'un recours contre cette décision de rejet.

Par ordonnance en date du 30 décembre 2021, la présidente de la formation de jugement du pôle social du tribunal judiciaire de Grenoble a désigné avant dire-droit le CRRMP de [Localité 6] avec mission de lui donner son avis motivé aux fins de déterminer si la maladie de madame [X] [I] [Y], objet du certificat médical du 17 octobre 2017, avait été directement causée par le travail habituel de l'assurée.

Après avis du CRRMP déposé le 5 mai 2022, qui concluait au rejet de l'origine professionnelle de la maladie, le pôle social du tribunal judiciaire de Grenoble, par jugement du 25 novembre 2022, a débouté madame [X] [I] [Y] de l'ensemble de ses demandes et laissé les dépens à la charge de chaque partie.

Le 15 décembre 2022, madame [X] [I] [Y] a interjeté appel de cette décision.

Les débats ont eu lieu à l'audience du 9 avril 2024 et les parties avisées de la mise à disposition au greffe de la présente décision le 18 juin 2024.

EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Madame [X] [I] [Y], selon ses conclusions d'appel responsives et récapitulatives notifiées par RPVA le 23 janvier 2024, déposées le 15 mars 2024, et reprises à l'audience, demande à la cour de :

Infirmer le jugement du 25 novembre 2022 du Pôle social du Tribunal judiciaire de Grenoble,

Statuant à nouveau,

Annuler la décision implicite de rejet de la Commission de Recours Amiable de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère, suite au recours en date du 23 Juillet 2018,

Annuler la décision explicite de rejet de la Commission de Recours Amiable de la Caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère, rendue le 06 septembre 2018,

Reconnaître le caractère professionnel de la maladie professionnelle du 17 octobre 2017, dont Mme [X] [I] [Y] est atteinte,

Ordonner à la caisse primaire d'assurance maladie de lui faire produire tous les effets et droits attachés,

Condamner la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère au paiement de la somme de 2.000,00 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Madame [X] [I] [Y] soutient que contrairement à ce qui a été retenu par les deux CRRMP, elle a continué à travailler postérieurement tant au 8 novembre 2013 qu'au mois de novembre 2015. Elle souligne qu'elle était toujours en poste lorsque le certificat médical initial a été dressé le 17 octobre 2017. Elle estime donc qu'elle a été exposée au risque de manière continue et que de ce fait, la condition liée au délai de prise en charge de 14 jours est bien remplie car celui-ci n'a pu commencer à courir à la date de la première constatation médicale.

Par ailleurs, elle souligne que le CRRMP a confirmé pour l'autre côté le lien entre son travail et la maladie qui a été diagnostiquée, une épicondylite ayant été prise en charge pour son coude gauche au titre de la maladie professionnelle. Elle estime que cette même pathologie pour le coude droit s'est développée exactement dans les mêmes conditions que pour le coude gauche, et qu'elle relève donc d'une prise en charge au titre de la législation professionnelle.

La caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère, par ses conclusions d'intimée déposées le 9 avril 2024 et reprises à l'audience, demande à la cour de confirmer le jugement du 25 novembre 2022 du pôle social du tribunal judiciaire de Grenoble.

La caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère explique que la date de première constatation médicale a été fixée pour madame [I] [Y] au 5 mars 2014, ce qui correspond à la date retenue par son médecin traitant. Elle rappelle que pour une épicondylite du coude droit (tableau 57B), le délai de prise en charge après cessation d'exposition au risque est de 14 jours et souligne que le dernier jour de travail de l'assurée est le 8 novembre 2013, date de son départ en arrêt maladie. Elle relève donc que le délai entre la date de première constatation et la fin de l'exposition au risque est de 3 mois et 25 jours, ce qui est supérieur au délai prévu par le tableau. Elle indique que les deux CRRMP saisis ayant exclu un lien direct entre l'activité professionnelle et la maladie, la demande de prise en charge de celle-ci au titre de la législation professionnelle ne peut qu'être écartée.

Pour le surplus de l'exposé des moyens des parties au soutien de leurs prétentions, il est renvoyé à leurs conclusions visées ci-dessus par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIVATION

L'article L461-1 du code de la sécurité sociale dispose que " Les dispositions du présent livre sont applicables aux maladies d'origine professionnelle sous réserve des dispositions du présent titre. En ce qui concerne les maladies professionnelles, est assimilée à la date de l'accident :

1° La date de la première constatation médicale de la maladie ;

2° Lorsqu'elle est postérieure, la date qui précède de deux années la déclaration de maladie professionnelle mentionnée au premier alinéa de l'article L. 461-5 ;

3° Pour l'application des règles de prescription de l'article L. 431-2, la date à laquelle la victime est informée par un certificat médical du lien possible entre sa maladie et une activité professionnelle.

Est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau.

Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée dans un tableau de maladies professionnelles peut être reconnue d'origine professionnelle lorsqu'il est établi qu'elle est directement causée par le travail habituel de la victime.

Peut être également reconnue d'origine professionnelle une maladie caractérisée non désignée dans un tableau de maladies professionnelles lorsqu'il est établi qu'elle est essentiellement et directement causée par le travail habituel de la victime et qu'elle entraîne le décès de celle-ci ou une incapacité permanente d'un taux évalué dans les conditions mentionnées à l'article L. 434-2 et au moins égal à un pourcentage déterminé.

Dans les cas mentionnés aux deux alinéas précédents, la caisse primaire reconnaît l'origine professionnelle de la maladie après avis motivé d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles. La composition, le fonctionnement et le ressort territorial de ce comité ainsi que les éléments du dossier au vu duquel il rend son avis sont fixés par décret. L'avis du comité s'impose à la caisse dans les mêmes conditions que celles fixées à l'article L. 315-1.

Les pathologies psychiques peuvent être reconnues comme maladies d'origine professionnelle, dans les conditions prévues aux septième et avant-derniers alinéas du présent article. Les modalités spécifiques de traitement de ces dossiers sont fixées par voie réglementaire.

Le tableau 57B reproduit ci-dessous indique :

Affections périarticulaires provoquées par certains gestes et postures de travail

Date de création : Décret du 2 novembre 1972   |   Dernière mise à jour : Décret du 5 mai 2017

DÉSIGNATION DES MALADIES

DÉLAI DE PRISE EN CHARGE

LISTE LIMITATIVE DES TRAVAUX SUSCEPTIBLES DE PROVOQUER CES MALADIES

- B - Coude

 

 

Tendinopathie d'insertion des muscles épicondyliens associée ou non à un syndrome du tunnel radial.

14 jours

Travaux comportant habituellement des mouvements répétés de préhension ou d'extension de la main sur l'avant-bras ou des mouvements de pronosupination.

Tendinopathie d'insertion des muscles épitrochléens.

14 jours

Travaux comportant habituellement des mouvements répétés d'adduction ou de flexion et pronation de la main et du poignet ou des mouvements de  pronosupination.

Hygromas : épanchement des bourses séreuses ou atteintes inflammatoires des tissus sous-cutanés des zones d'appui du coude.

 

Travaux comportant habituellement un appui prolongé sur la face postérieure du coude

- forme aiguë ;

7 jours

- forme chronique.

90 jours

Syndrome canalaire du nerf ulnaire dans la gouttière épitrochléo-olécrânienne confirmé par électroneuromyographie (EMG).

 

90 jours (sous réserve d'une durée d'exposition de 90 jours)

Travaux comportant habituellement des mouvements répétitifs et/ou des postures maintenues en flexion forcée.

Travaux comportant habituellement un appui prolongé sur la face postérieure du coude.

En l'espèce, il résulte du certificat médical initial du docteurr [D] [B] daté du 17 octobre 2017 (pièce 1 de l'intimée) et du colloque médico-administratif (pièce 7 de l'intimée) que la date de première constatation médicale de la maladie déclarée par madame [X] [I] [Y] a été fixée au 5 mars 2014.

Par ailleurs, l'enquête administrative de la caisse primaire d'assurance maladie (pièce 6 de l'intimée) a établi que l'assurée se trouvait en arrêt de travail du 9 novembre 2013 au 16 mars 2014. Dès lors, s'il n'est pas contesté que madame [X] [I] [Y] réalisait, dans le cadre de son travail, des travaux conformes aux exigences posées par le tableau 57A, en revanche, à la date de première constatation médicale de la maladie, elle n'était plus exposée à ceux-ci depuis plus de 14 jours. A ce titre, il importe peu que l'assurée ait repris une activité professionnelle similaire postérieurement au mois de mars 2014 et jusqu'en novembre 2015, dans la mesure où le tableau impose de computer les délais à partir de la date de première constatation médicale.

Par conséquent, madame [X] [I] [Y] ne remplissait pas une des conditions du tableau permettant la reconnaissance de sa maladie professionnelle et la saisine d'un CRRMP par la caisse était donc justifiée.

Deux CRRMP ont donc été saisis, l'un par la caisse et l'autre par le pôle social du tribunal judiciaire de Grenoble, conformément à l'article R142-17-2 du code de la sécurité sociale. Dans son avis rendu le 12 juillet 2018, le CRRMP de [Localité 5] retenait que si " des gestes suffisamment nocifs pouvaient être retenus au niveau du coude droit en termes de répétitivité, amplitudes ou résistances, jusqu'en 2013, en revanche le délai d'apparition de la pathologie est trop important pour retenir l'étiologie professionnelle". Ce constat l'amenait à écarter un lien direct entre la maladie et l'activité professionnelle (pièce 6 de l'appelante). Or, le second CRRMP saisi a conclu le 5 mai 2022 a indiqué qu'en raison de "l'impossibilité d'étayer une autre date de première constatation médicale antérieure au 5 mars 2014, le délai de prise en charge de 3 mois et 25 jours versus les 14 jours prévus au tableau 57B est de nature à remettre en cause le lien direct entre la pathologie demandée et l'exposition professionnelle. (') la maladie de Mme [X] [I] [Y], objet du certificat médical du 17 octobre 2017, n' a pas été directement été causée par le travail habituel de cette assurée " (pièce 11 de l'intimée).

De son côté,si madame [X] [I] [Y] conteste la date de première constatation médicale retenue par l'ensemble des médecins ou les avis des deux CRRMP, elle ne produit aucun élément médical permettant de retenir une autre date que celle-ci ou de remettre en cause les deux avis concordants des CRRMP de [Localité 5] et [Localité 6].

Madame [X] [I] [Y] sera donc déboutée de ses demandes et le jugement intégralement confirmé.

Madame [X] [I] [Y] succombant à l'instance, elle sera condamnée aux entiers dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme le jugement RG n°18/01034 rendu le 25 novembre 2022 par le pôle social du tribunal judiciaire de Grenoble en toutes ses dispositions.

Y ajoutant,

Condamne madame [X] [I] [Y] aux dépens de l'appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par M. Jean-Pierre Delavenay, président et par Mme Fanny Michon, greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La greffière Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Ch.secu-fiva-cdas
Numéro d'arrêt : 22/04489
Date de la décision : 18/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 26/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-18;22.04489 ?
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