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13/06/2024 | FRANCE | N°22/01994

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Ch. sociale -section b, 13 juin 2024, 22/01994


C 9



N° RG 22/01994



N° Portalis DBVM-V-B7G-LL7M



N° Minute :























































































Copie exécutoire délivrée le :





Me Manon ALLOIX



la SELARL DAUPHIN ET MIHAJLOVIC

AU NOM DU PEUP

LE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



Ch. Sociale -Section B

ARRÊT DU JEUDI 13 JUIN 2024





Appel d'une décision (N° RG 20/00322)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOURGOIN JALLIEU

en date du 12 avril 2022

suivant déclaration d'appel du 20 mai 2022



Ordonnance de rejet de la saisine en référé devant le premier président de la cour d'appel en date...

C 9

N° RG 22/01994

N° Portalis DBVM-V-B7G-LL7M

N° Minute :

Copie exécutoire délivrée le :

Me Manon ALLOIX

la SELARL DAUPHIN ET MIHAJLOVIC

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

Ch. Sociale -Section B

ARRÊT DU JEUDI 13 JUIN 2024

Appel d'une décision (N° RG 20/00322)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOURGOIN JALLIEU

en date du 12 avril 2022

suivant déclaration d'appel du 20 mai 2022

Ordonnance de rejet de la saisine en référé devant le premier président de la cour d'appel en date du 30 novembre 2022

APPELANTE :

S.A.R.L. [D] prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié es qualités audit siège

SIRET 81029905700028

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Manon ALLOIX, avocat au barreau de GRENOBLE, Me Delphine GIORGI, avocat au barreau de LYON

INTIME :

Monsieur [G] [I]

[Adresse 1]

[Localité 3]

représenté par Me Dejan MIHAJLOVIC de la SELARL DAUPHIN ET MIHAJLOVIC, avocat postulant au barreau de GRENOBLE,

et par Me Nathalie PALIX, avocat plaidant au barreau de LYON

(bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro 2022/008027 du 05/10/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de GRENOBLE)

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DÉLIBÉRÉ :

M. Frédéric BLANC, Conseiller faisant fonction de Président,

M. Jean-Yves POURRET, Conseiller,

Mme Hélène BLONDEAU-PATISSIER, Conseillère,

DÉBATS :

A l'audience publique du 10 avril 2024,

Frédéric BLANC, conseiller faisant fonction de président chargé du rapport et Jean-Yves POURRET, conseiller, ont entendu les parties en leurs conclusions et plaidoiries, assistés de Mme Carole COLAS, Greffière, conformément aux dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, les parties ne s'y étant pas opposées ;

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 13 juin 2024, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.

L'arrêt a été rendu le 13 juin 2024.

EXPOSE DU LITIGE

M. [G] [I] a été embauché par la société à responsabilité limitée (SARL) [D] le 12 novembre 2018 suivant contrat de travail à durée indéterminée de chantier en qualité d'aide peintre, OE1, niveau 1, coefficient 150 de la convention collective du bâtiment employant moins de 10 salariés.

Par avenant du 1er juillet 2019, le contrat de M. [I] a été reconduit jusqu'au 30 septembre 2019.

Puis, par avenant du 1er octobre 2019, le contrat a de nouveau été reconduit jusqu'au 20 décembre 2019.

La société [D] est implantée dans la zone artisanale de [Localité 4] et a pour activité les travaux de peinture et de vitrerie. Elle emploie moins de 11 salariés.

Le lundi 14 octobre 2019, un vol a été commis au préjudice d'un client de la société, la victime considérant que des salariés de ladite société en seraient responsables. Le maître d'oeuvre a alors décidé de cesser toute collaboration avec la société.

Le 21 octobre 2019, par courrier recommandé avec accusé de réception, M. [D], gérant de la société, a demandé à M. [I] de justifier de son absence, ce dernier ne s'étant pas présenté à son poste de travail le 14 octobre 2019.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 23 octobre 2019, la société [D] a convoqué M. [I] à un entretien préalable en vue d'un licenciement éventuel avec mise à pied à titre conservatoire.

A la suite de cet entretien préalable qui s'est tenu le 31 octobre 2019, la société [D] a notifié, par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 20 novembre 2019, son licenciement pour faute grave à M. [I] reprochant à ce dernier des faits de vol commis le 14 octobre 2019 dans une maison d'habitation où était intervenue la société.

Par requête du 10 novembre 2020, M. [I] a saisi le conseil de prud'hommes de Bourgoin Jallieu aux fins de contester le bien-fondé de son licenciement pour faute grave et obtenir la condamnation de la société [D] à lui payer les indemnités afférentes, se prévalant également de circonstances vexatoires entourant le licenciement et sollicitant un rappel de salaire sur la période du 15 au 22 octobre 2019.

La société [D] s'est opposée aux prétentions adverses et a formé une demande reconventionnelle de remboursement de trop perçus de salaires.

Par jugement du 12 avril 2022, le conseil de prud'hommes de Bourgoin Jallieu a':

Fixé le salaire moyen de M. [I] à la somme de 1 592,54 euros';

Condamné la société [D] à verser à M. [I] la somme de 441 euros brut au titre de rappel de salaires sur la période du 15 octobre 2019 au 22 octobre 2019 ainsi que la somme de 44 euros brut au titre des congés payés afférents ;

Condamné la société [D] à verser à M. [I] la somme de 1 592,54 euros brut au titre de rappel de salaires pour mise à pied conservatoire ainsi que la somme de 159,25 euros brut au titre des congés payés afférents ;

Condamné la société [D] à verser à M. [I] la somme de 1 592,54 euros brut au titre des indemnités compensatrice de préavis ainsi que la somme de 159,25 euros brut au titre des congés payés afférents ;

Condamné la société [D] à verser à M. [I] la somme de 398,13 euros net au titre de l'indemnité de licenciement ;

Condamné la société [D] à verser à M. [I] la somme de 1 592,54 euros net au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse ;

Condamné la société [D] à verser à M. [I] la somme de 1'500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Débouté M. [I] de sa demande de dommages et intérêts au titre du préjudice moral';

Débouté la société [D] de sa demande reconventionnelle';

Mis les dépens à la charge de la société [D].

La décision a été notifiée par le greffe par lettres recommandées avec accusés de réception signés le 27 avril 2022 pour M. [I] et le 26 avril 2022 pour la société [D].

Par déclaration en date du 20 mai 2022, la société [D] a interjeté appel.

M. [I] a formé appel incident.

Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 5 février 2024, auxquelles il convient expressément de se référer pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, la société [D] sollicite de la cour de':

« Sur l'appel incident,

Dire et juger que les demandes formulées par M. [I] au titre de son appel incident sont infondées';

En conséquence,

Débouter M. [I] de ses demandes à ce titre';

Sur l'appel principal,

Reformer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Bourgoin Jallieu le 12 avril 2022 en ce qu'il a :

- Condamné la société [D] à verser à M. [I] la somme de 441 euros brut au titre de rappel de salaires sur la période du 15 octobre 2019 au 22 octobre 2019 ainsi que la somme de 44 euros brut au titre des congés payés afférents ;

- Condamné la société [D] à verser à M. [I] la somme de 1 592,54 euros brut au titre de rappel de salaires pour mise à pied conservatoire ainsi que la somme de 159,25 euros brut au titre des congés payés afférents ;

- Condamné la société [D] à verser à M. [I] la somme de 1 592,54 euros brut au titre des indemnités compensatrices de préavis ainsi que la somme de 159,25 euros brut au titre des congés payés afférents ;

- Condamné la société [D] à verser à M. [I] la somme de 398,13 euros net au titre de l'indemnité de licenciement ;

- Condamné la société [D] à verser à M. [I] la somme de 1 592,54 euros net au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse ;

- Condamné la société [D] à verser à M. [I] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Débouté la société [D] de sa demande reconventionnelle';

- Mis les dépens à la charge de la société [D]';

Statuant à nouveau,

Débouter M. [I] de l'ensemble de ses demandes ;

Condamner M. [I] au remboursement d'un trop perçu de 700 euros envers la société [D] ;

Pour le surplus,

Confirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Bourgoin-Jallieu le 12 avril 2022 en ce qu'il a :

- Fixé le salaire moyen de M. [I] à la somme de 1 592,54 euros';

- Débouté M. [I] de sa demande de dommages et intérêts au titre du préjudice moral';

En toute hypothèse,

Condamner M. [I] au paiement de la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.'»

Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 25 janvier 2024, auxquelles il convient expressément de se référer pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, M. [I] sollicite de la cour de':

«'Confirmant le jugement du conseil de prud'hommes de Bourgoin Jallieu du 12 avril 2022,

Juger que le licenciement de M. [I] ne repose ni sur une faute grave ni sur une cause réelle et sérieuse';

Condamner la société [D] à payer à M. [I] les sommes suivantes :

- 441 euros brut à titre de rappel de salaire pour la période du 15/10/2019 au 22/10/2019';

- 44 euros brut de congés-payés afférents';

- 1 592,54 euros brut à titre de rappel de salaires pour mise à pied conservatoire';

- 159,25 euros brut de congés-payés afférents';

- 1 592,54 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis';

- 159,25 euros brut de congés-payés afférents';

- 398,13 euros net d'indemnité de licenciement';

- 1 592,54 euros net de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse';

- 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile';

Débouter la société [D] de sa demande de remboursement de trop perçu et de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile';

Condamner la société [D] à payer à M. [I] :

- 1 592,54 euros net supplémentaires de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, portant les dommages et intérêts à ce titre à la somme de 3 185,08 euros net';

Condamner la société [D] à payer à M. [I] 3 185,08 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral';

Ajoutant au jugement du conseil de prud'hommes de Bourgoin Jallieu du 12 avril 2022, Condamner la société [D] à payer à M. [I]'3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel';

Condamner la société [D] aux entiers dépens d'appel';

Dire et juger que les condamnations porteront intérêt légal à compter de la saisine du conseil de prud'hommes.

Pour un exposé complet des moyens et prétentions des parties, il convient au visa de l'article 455 du code de procédure civile de se reporter aux conclusions des parties susvisées.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 8 février 2024.

L'affaire, fixée pour être plaidée à l'audience du 10 avril 2024, a été mise en délibéré au 13 juin 2024.

EXPOSE DES MOTIFS':

Sur le rappel de salaire pour la période du 15 octobre 2019 au 22 octobre 2019':

La société [D] prétend avec une mauvaise foi certaine avoir adressé le 23 octobre 2019 une lettre recommandée avec accusé de réception à M. [I] pour qu'il justifie de son absence pour la période du 14 octobre au 18 octobre 2019 alors que l'avis de réception qu'elle produit a été présenté et distribué à M. [I] le 23 novembre 2019, soit plus d'un mois plus tard, ledit accusé de réception correspondant vraisemblablement à la lettre de licenciement en date du 20 novembre 2019 mais ne pouvant en tout état de cause pas être celui d'un courrier du 23 octobre 2019.

Surtout, si les parties s'accordent sur le fait que M. [I] était absent de son travail le 14 octobre 2019, les pièces produites par l'employeur lui-même et en particulier, l'enquête pénale concernant les faits de cambriolage, contredisent clairement le fait que le salarié [L] pu être absent de l'entreprise sur la totalité de la période du 15 au 22 octobre 2019 comme le prétend l'employeur.

M. [D], le gérant de la société, a ainsi témoigné devant les gendarmes qu'il avait réuni le 21 octobre 2019 tous ses salariés, dont M. [I], pour évoquer le vol commis sur le chantier le 14 octobre 2019.

En outre, M. [F], un autre salarié, a indiqué aux forces de l'ordre que M. [I] s'était confié à lui au cours de la semaine en lui avouant le vol commis'; ce dont il peut se déduire qu'il était bien au travail après le 14 octobre'; ce que confirme M. [W], un autre salarié, qui quoique se trompant d'une semaine, a assuré que le mardi, lendemain de l'absence de M. [I], celui-ci est revenu travailler normalement.

En outre, il est significatif que l'employeur [L] adressé un courrier daté du 21 octobre 2019 pour demander au salarié de se justifier sur son absence du 14 octobre 2019, sans aucunement mentionner les jours suivants.

Quoique le salarié [L] été en garde à vue les 21 et 22 octobre 2019, force est de constater qu'il était à son travail à tout le moins le matin du 21 puisque le dirigeant a organisé une réunion sans que l'employeur ne fournisse de précision quant à proratisation des retenues en heures à effectuer sur la première journée.

M. [I] ne pouvait en revanche être à son travail la journée du 22 puisque la garde à vue a été levée à 15h15.

Au vu de l'ensemble de ces éléments, au visa de l'article 1353 du code civil, il est certain que M. [I] s'est tenu à la disposition de son employeur du 15 au 21 octobre 2019 et que celui-ci ne l'a pas payé à tort'; ce qui représente un montant de 514,50 euros brut avec un taux horaire de 10,50 euros brut, 7 heures de travail par jour et 7 jours, la cour d'appel ne pouvant statuer ultra petita.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société [D] à verser à M. [I] la somme de 441 euros brut au titre de rappel de salaires sauf à préciser sur la période du 15 octobre 2019 au 21 octobre 2019 ainsi que la somme de 44 euros brut au titre des congés payés afférents.

Sur le licenciement':

D'une première part, l'article L 1232-1 du code du travail dispose que tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse.

La faute grave est définie comme celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis.

La charge de la preuve de la faute grave incombe à l'employeur, qui doit prouver à la fois la faute et l'imputabilité au salarié concerné.

La procédure pour licenciement pour faute grave doit être engagée dans un délai restreint après la découverte des faits.

En vertu de l'article L 1232-6 du code du travail, la lettre de licenciement fixe les termes du litige.

En l'espèce, quoiqu'évoquant dans la lettre de licenciement l'absence injustifiée du 14 octobre 2019, la société [D] a expressément exclu dans ses conclusions d'appel qu'il [L] pu s'agir d'un des griefs fondant la faute grave dans les termes suivants (page 17 § 7 et 8)':

«'Que dans la lettre de licenciement, la société n'a parlé que d'une absence injustifiée lors de la journée du 14 octobre 2019. Et pour cause, ce sont bien les faits de vol commis le 14 octobre 2019 par M. [I] qui ont conduit au licenciement de ce dernier et non la situation d'absence injustifiée.'».

Il s'ensuit que la seule faute grave dont se prévaut l'employeur est la participation alléguée de M. [I] aux faits de vol commis le 14 octobre 2019 au préjudice des époux [O].

La société [D] établit certes des faits et circonstances troublantes et qui ne peuvent objectivement qu'interroger.

En effet, M. [I], qui a bien travaillé peu de temps auparavant sur le lieu du cambriolage et repéré, de son propre aveu, l'existence d'une pièce secrète dans laquelle notamment a eu lieu le vol d'objets de valeur, n'était pas au travail ce jour-là. Les investigations ont mis en évidence qu'il n'avait pas prévenu son employeur directement mais la veille un collègue de travail, M. [W], dont il prétend de manière pour le moins contradictoire, que ce dernier ne l'appréciait pas. Elles ont également démontré grâce aux données techniques de téléphonie, que le jour des faits, le téléphone de M. [I] bornait à [Localité 5] (38) à 6h31 le matin et était allumé mais qu'il a ensuite été éteint de 8h40 à 10h35 pour ne déclencher de nouveau un borne relais à [Localité 5] qu'à 10h43, étant observé que la victime a indiqué lors de son audition que l'alarme de son domicile situé à [Localité 6] (69) a été déclenchée à 8h25 le matin le 14 octobre 2019. Mme [Y], qui réside à [Localité 5], a certes confirmé aux forces de l'ordre que M. [I] s'était rendu chez elle le 14 ou le 15 octobre 2019 pour effectuer le débarrassage de son garage et regarder le travail à faire pour établir un devis dans des circonstances pour le moins inhabituelles puisque ce témoin a précisé avoir rencontré M. [I] en 2011 lors d'une sortie camping du centre social de [Localité 5] et qu'elle était allée voir des jeunes dans le quartier du Triforium pour qu'ils lui donnent un coup de main, M. [I] étant alors présent. De son côté, Mme [L] [X], la compagne de M. [I] a expliqué aux services de gendarmerie que son concubin était parti le 14 octobre 2019 vers 7h ou 7h30 pour aller travailler avec sa tenue de travail et qu'il était revenu vers 16 heures. Les enquêteurs se sont étonnés à juste titre du fait qu'elle avait appelé M. [I] plus de 20 fois le 14 octobre 2019 en deux heures entre 8 et 10 heures du matin'; ce à quoi celle-ci a répondu qu'elle n'aimait pas quand il ne répondait pas et qu'elle le harcelait, les gendarmes lui faisant observer qu'il était supposé être au travail. Ce témoin a également confirmé s'être vu demander par M. [I], lors de la perquisition à leur domicile, de prévenir «'[A]'» et «'[V] [C]'»'; ce qu'elle a fait via le système de messagerie Snapchat, M. [I] ayant simplement indiqué sur ce point et sans autre précision que c'était par rapport à l'avocat. Il est également pour le moins surprenant que M. [I] [L] refusé de donner l'identité d'un ami chez lequel il a, dit-il, rechargé son téléphone portable le 14 octobre 2019 pour ne pas que ce dernier puisse croire qu'il l'a «'balancé pour quelque chose'» alors qu'il ne s'agissait, lui ont fait remarquer à juste titre les gendarmes, que de confirmer de sa présence à [Localité 5]. En outre, M. [I], qui a contesté être l'auteur du cambriolage tout en ayant admis lors de son audition, être connu de la justice notamment pour vol, s'est limité à expliquer le fait qu'il avait fait croire à sa compagne qu'il allait travailler le jour des faits pour éviter qu'elle ne soit jalouse puisqu'il allait travailler chez une femme, l'employeur développant à ce titre un moyen de fait pertinent tenant à la circonstance qu'il est pour le moins contradictoire de perdre une journée de salaire alors que M. [I] a également fait état, lors de ses auditions, de ses difficultés financières. Enfin, un collègue de travail, M. [F], a mis en cause M. [I], à raison du fait que celui-ci s'était vanté auprès de lui d'avoir été l'auteur du cambriolage avec trois amis à lui'; ce que ce dernier conteste.

Pour autant, si cela ne lie pas la présente juridiction, il ne peut qu'être observé que la procédure pénale a fait l'objet le 21 janvier 2019 d'une décision de classement sans suite pour auteur inconnu par le procureur de la République du tribunal judiciaire de Vienne.

La présente juridiction ne peut qu'aboutir à la même conclusion au vu des pièces et éléments produits par l'employeur dont il se déduit une forte suspicion pesant sur M. [I] quant à la commission de ces faits mais pas la preuve certaine qu'il y a participé directement en qualité d'auteur, de complice ou de receleur puisque les investigations n'ont pas permis d'identifier les autres individus ayant pu les commettre, qu'il n'a pas été possible d'établir sa présence sur les lieux et que la perquisition à son domicile s'est avérée infructueuse.

En conséquence, à défaut pour l'employeur de rapporter la preuve certaine de la faute qu'il reproche au salarié, il convient par confirmation du jugement entrepris de déclarer sans cause réelle et sérieuse le licenciement notifié par la société [D] à M. [I].

Sur les prétentions afférentes à la rupture du contrat de travail':

Premièrement, dès lors que le jugement est déclaré sans cause réelle et sérieuse, rendant la mise à pied à titre conservatoire également injustifiée, la société [D] ne développant aucun moyen critique sur les montants retenus, il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a':

- condamné la société [D] à verser à M. [I] la somme de 1 592,54 euros brut au titre de rappel de salaires pour mise à pied conservatoire ainsi que la somme de 159,25 euros brut au titre des congés payés afférents';

- condamné la société [D] à verser à M. [I] la somme de 1 592,54 euros brut au titre des indemnités compensatrice de préavis ainsi que la somme de 159,25 euros brut au titre des congés payés afférents ;

- condamné la société [D] à verser à M. [I] la somme de 398,13 euros net au titre de l'indemnité de licenciement.

Deuxièmement, au visa de l'article L 1235-3 du code du travail, au jour de son licenciement injustifié, M. [I] avait un salaire de l'ordre de 1592,54 euros brut et une ancienneté de plus d'un an, préavis non exécuté compris.

Il se limite à produire un justificatif de son inscription au répertoire des métiers pour une activité de petit bricolage à compter du 10 mai 2020, sans fournir le moindre élément sur les revenus qu'il tire de cette activité.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement entrepris, les premiers juges ayant fait une juste appréciation du préjudice subi à raison de la perte injustifiée de l'emploi, en ce qu'il a condamné la société Sozari à payer à M. [I] la somme de 1592,54 euros au titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, sauf à préciser qu'il s'agit non d'un montant net mais brut.

Sur la demande indemnitaire au titre des circonstances vexatoires entourant le licenciement':

Si le licenciement de M. [I] est effectivement sans cause réelle et sérieuse, il n'établit aucunement que l'employeur a fautivement porté à son encontre une accusation infamante d'avoir participé à un cambriolage eu égard aux éléments objectifs dont disposait la société Sozari de nature à lui faire suspecter la mise en cause de M. [I] dans ces faits, quoique l'enquête n'[L] en définitive pas permis de conclure de manière certaine que ce dernier [L] pu être l'auteur du cambriolage, étant observé de surcroît qu'il n'est pas allégué que l'employeur [L] pu donner une publicité à ses soupçons dépassant le cadre strict de l'entreprise et en dehors des services enquêteurs en charge des investigations sur le cambriolage, celles-ci étant couvertes par le secret de l'enquête énoncé à l'article 11 du code de procédure pénale.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [I] de sa demande indemnitaire au titre des circonstances vexatoires entourant le licenciement.

Sur la demande de remboursement d'un trop perçu par la société Sozari':

Au visa des articles 1302-1 et suivants du code civil, il résulte de la comparaison entre les bulletins de paie de M. [I] et les relevés du compte bancaire ouvert à la caisse d'épargne par l'employeur, que le salarié a bénéficié de deux acomptes de 200 euros chacun en mars 2019 mais qu'un seul a été déduit sur le bulletin de salaire et que l'acompte de 500 euros du 22 août 2019, et non 2020 comme le prétend à tort le salarié, n'a pas été pris en compte sur le bulletin de salaire d'août 2019, ni sur les suivants de sorte que la preuve d'un indu à hauteur de 700 euros net est suffisamment rapportée, étant observé que M. [I] développe un moyen spéculatif inopérant tenant au fait qu'il est incompréhensible que la société [D] [L] omis de récupérer certains acomptes.

Infirmant le jugement entrepris, il convient de condamner M. [I] à payer à la société [D] la somme de 700 euros net à titre de trop perçu de salaire.

Sur les demandes accessoires':

Infirmant le jugement entrepris, l'équité commande de rejeter les demandes d'indemnité de procédure.

Au visa de l'article 696 du code de procédure civile, confirmant le jugement entrepris et y ajoutant, la société [D], succombant partiellement à l'instance, est condamnée aux dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS';

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et après en avoir délibéré conformément à la loi';

CONFIRME le jugement entrepris sauf à préciser que les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse sont en brut et que le rappel de salaire est accordé pour la période du 15 au 21 octobre 2019, sauf en ce qu'il a débouté la société [D] de sa demande de remboursement d'un indu de salaire et sauf en ce qu'il a alloué une indemnité de procédure à M. [I]

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

CONDAMNE M. [I] à payer à la société [D] la somme de sept cents euros (700 euros) net à titre de remboursement de trop perçu de salaire

DIT n'y avoir lieu à indemnité de procédure

CONDAMNE la société [D] aux dépens d'appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par M. Frédéric BLANC, Conseiller faisant fonction de Président de section, et par Mme Carole COLAS, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Ch. sociale -section b
Numéro d'arrêt : 22/01994
Date de la décision : 13/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 19/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-13;22.01994 ?
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