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06/06/2024 | FRANCE | N°23/00686

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Ch. sociale -section b, 06 juin 2024, 23/00686


C 9



N° RG 23/00686



N° Portalis DBVM-V-B7H-LWNN



N° Minute :























































































Copie exécutoire délivrée le :





la SCP GERMAIN-PHION JACQUEMET





AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS




COUR D'APPEL DE GRENOBLE



Ch. Sociale -Section B

ARRÊT DU JEUDI 06 JUIN 2024





Appel d'une décision (N° RG 22/00542)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de GRENOBLE

en date du 30 janvier 2023

suivant déclaration d'appel du 14 février 2023





APPELANT :



Monsieur [K] [L]

né le 29 Novembre 1985 à [Localité 7]

[Adresse 1]

[Localité 5]



représenté par...

C 9

N° RG 23/00686

N° Portalis DBVM-V-B7H-LWNN

N° Minute :

Copie exécutoire délivrée le :

la SCP GERMAIN-PHION JACQUEMET

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

Ch. Sociale -Section B

ARRÊT DU JEUDI 06 JUIN 2024

Appel d'une décision (N° RG 22/00542)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de GRENOBLE

en date du 30 janvier 2023

suivant déclaration d'appel du 14 février 2023

APPELANT :

Monsieur [K] [L]

né le 29 Novembre 1985 à [Localité 7]

[Adresse 1]

[Localité 5]

représenté par Me Laure GERMAIN-PHION de la SCP GERMAIN-PHION JACQUEMET, avocat au barreau de GRENOBLE

INTIMES :

Maître [Y] [U] ès qualités de mandataire ad'hoc de la S.A.S.U LINKOOPRO

[Adresse 6]

[Localité 3]

Défaillant

S.A.S.U. LINKOOPRO prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 4]

Défaillante

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DÉLIBÉRÉ :

M. Frédéric BLANC, Conseiller faisant fonction de Président,

M. Jean-Yves POURRET, Conseiller,

Mme Hélène BLONDEAU-PATISSIER, Conseillère,

DÉBATS :

A l'audience publique du 03 avril 2024,

Frédéric BLANC, conseiller faisant fonction de président chargé du rapport et Jean-Yves POURRET, conseiller, ont entendu les parties en leurs conclusions, assistés de Mme Carole COLAS, Greffière, conformément aux dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, les parties ne s'y étant pas opposées ;

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 06 juin 2024, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.

L'arrêt a été rendu le 06 juin 2024.

EXPOSE DU LITIGE':

Se prévalant d'avoir été lié avec la société par actions simplifiée Linkoopro, représentée par Me [U] ès qualités de mandataire ad'hoc selon ordonnance de la présidente du tribunal de commerce de Grenoble du 08 juillet 2022, par un contrat de travail, M. [K] [L] a saisi le conseil de prud'hommes de Grenoble par requête en date du 30 juin 2022 afin d'obtenir que':

- soit constaté qu'il a réalisé une prestation de travail pour le compte de la société Linkoopro

- soit constaté l'existence d'un lien de subordination,

En conséquence,

- que la relation de travail soit requalifiée en contrat à durée indéterminée à temps plein,

- qu'il soit jugé que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse,

- que la société Linkoopro soit condamnée à lui verser les sommes suivantes :

- 11901 euros net au titre de l'indemnité forfaitaire de travail dissimulé,

- 10000 euros net de CSG et de CRDS en réparation du préjudice subi du fait de l'exécution déloyale du contrat de travail par la société Linkproo,

- 27 770 euros brut à titre de rappel de salaire, outre la somme de 2 777 euros brut au titre des congés payés afférents,

- 5000 euros net à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice financier subi par M. [L] des suites de l'absence de prise en charge de ses frais professionnels,

- 578,55 euros net à titre d'indemnité légale de licenciement,

- 3967,20 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 396,72 euros brut au titre des congés payés afférents,

- 3967,2 euros net à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 10 000 euros net à titre d'indemnité ensuite du manquement de l'employeur à ses obligations de sécurité et de prévention,

- 3000 euros net sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens.

- l'exécution provisoire soit attachée à la décision à intervenir.

La société Linkoopro représentée par Me [U] ès qualités n'est ni présente ni représentée à l'instance.

Par jugement en date du 30 janvier 2023, le conseil de prud'hommes de Grenoble a':

- constaté que M. [L] a réalisé une prestation de travail pour le compte de la société Linkoopro

- constaté l'existence d'un lien de subordination entre M. [L] et la société Linkoopro

- débouté M. [L] de ses autres demandes.

- laissé à M. [L] la charge de ses propres dépens.

La décision a été notifiée par lettres recommandées avec accusés de réception signés le 01 février 2023 pour Me [U] es qualités, le 02 février 2023 pour M. [L] et le pli est revenu avec la mention 'destinataire inconnu à l'adresse' concernant la société Linkoopro.

Par déclaration en date du 14 février 2023, M. [L] a interjeté appel à l'encontre dudit jugement.

Il s'en est remis à des conclusions transmises le 15 janvier 2024 et demande à la cour d'appel de':

CONFIRMER le jugement entrepris en ce que le conseil a :

- Constaté que M. [L] a réalisé une prestation de travail pour le compte de la société Linkoproo,

- Constaté l'existence d'un lien de subordination entre M. [L] et la société Linkoproo.

Le REFORMER pour le surplus et, statuant à nouveau,

JUGER le licenciement de M. [L] sans cause réelle et sérieuse,

CONDAMNER la société Linkoopro à verser à M. [L] les sommes suivantes :

- 11901 euros net, au titre de l'indemnité forfaitaire de travail dissimulé,

- 10000 euros net de CSG et de CRDS en réparation du préjudice subi du fait de l'exécution déloyale du contrat de travail par la société Linkoproo,

- 27770 euros brut, sauf à parfaire, à titre de rappel de salaire, outre la somme de 2 777 euros brut, sauf à parfaire, au titre des congés payés afférents,

- 5000 euros net à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice financier subi par M. [L] des suites de l'absence de prise en charge de ses frais professionnels,

-10 000 euros net à titre d'indemnité ensuite du manquement de l'employeur à ses obligations de sécurité et de prévention,

- 578,55 euros net à titre d'indemnité légale de licenciement,

- 5950,80 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 595,08 euros brut au titre des congés payés afférents,

- 3967,2 euros net à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 4500 euros net sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que les dépens.

ORDONNER l'inscription de ces sommes à l'état des créances de la société Linkoproo, au bénéfice de M. [L].

La déclaration d'appel a été signifiée à personne par acte de commissaire de justice du17 avril 2023 à Me [U] ès qualités de mandataire ad'hoc de la société Linkoopro, qui n'est pas représenté à la procédure d'appel.

Pour un exposé complet des moyens et prétentions de l'appelant il convient au visa de l'article 455 du code de procédure civile de se reporter à ses conclusions sus-visées.

La clôture a été prononcée le 01 février 2024.

EXPOSE DES MOTIFS':

Au visa des articles 542 et 562 du code de procédure civile, en l'absence d'appel principal ou incident à ce titre visant à la réformation, la cour d'appel n'est saisie d'aucune critique des dispositions du jugement entrepris en ce qu'il a constaté que M. [L] a réalisé une prestation de travail pour le compte de la société Linkoopro et l'existence d'un lien de subordination entre M. [L] et la société Linkoopro.

Il s'ensuit que ces dispositions sont définitives et qu'il n'y a pas lieu de les confirmer.

Ceci a pour conséquence que le principe d'un contrat de travail ayant lié la société Linkoopro à M. [L] est définitivement acquis.

En outre, il résulte de l'article 472 du code de procédure civile, qu'en appel, si l'intimé ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond, mais le juge ne fait droit aux prétentions et moyens de l'appelant que dans la mesure où il les estime réguliers, recevables et bien fondés. Aux termes de l'article 954 du code de procédure civile, la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs. (2e Civ., 25 novembre 2021, pourvoi n° 20-13.780).

La société Linkoopro n'ayant pas constitué de représentant en appel est réputée s'en remettre aux motifs de la décision entreprise s'agissant des dispositions critiquées par l'appelant du jugement.

Sur le rappel de salaire':

L'article L2261-2 du code du travail énonce que':

La convention collective applicable est celle dont relève l'activité principale exercée par l'employeur.

En cas de pluralité d'activités rendant incertaine l'application de ce critère pour le rattachement d'une entreprise à un champ conventionnel, les conventions collectives et les accords professionnels peuvent, par des clauses réciproques et de nature identique, prévoir les conditions dans lesquelles l'entreprise détermine les conventions et accords qui lui sont applicables.

Le code APE de l'entreprise n'a qu'une valeur indicative. (Soc., 18 juillet 2000, pourvoi n° 98-42.949, Bull. civ. 2000, V, n° 297)

En l'espèce, M. [L] établit par la production de différents SMS échangés avec M. [I] [X], dirigeant de la société Linkoopro, avait travaillé avec cette société dans le cadre d'un contrat de travail définitivement reconnu sur la période du 02 juillet 2020 au 02 septembre 2021.

Pour débouter M. [L] de sa demande de rappel de salaire, les premiers juges, après avoir reconnu l'existence d'un lien de subordination et partant, celle d'un contrat de travail, ont développé des motifs inopérants et hypothétiques à raison du fait que la mise à disposition d'un téléphone et d'une messagerie électronique par l'entreprise au salarié était dérisoire par rapport au salaire que M. [L], ingénieur diplômé, était en droit de négocier et que les éléments précédemment énoncés ne sauraient constituer une rémunération en nature.

M. [L] établit au visa de l'article 1353 du code civil qu'il a droit à raison de l'existence d'un contrat de travail au versement d'un salaire.

La fiche du répertoire Siren de la société Linkoopro mentionne comme code APE 6312Z Portails internet qui est listé à l'article 1.1 de la convention collective Syntec dans sa version applicable au litige.

Ce code APE n'a certes qu'une valeur indicative s'agissant de la convention collective applicable mais pour autant la société Linkoproo ne s'est pas faite représenter pour élever la moindre contestation à ce titre à la présente instance.

Il s'ensuit qu'il est considéré que la convention collective applicable au contrat de travail est la convention Syntec.

M. [L], qui d'après l'organigramme produit en pièce n°1.43, avait au sein de la société des missions commerciales et un poste de conseiller pour les professionnels, revendique le statut cadre, position 1.1 coefficient 95 avec un salaire de 1983,60 euros, étant relevé qu'il supporte la charge de la preuve du positionnement conventionnel qu'il revendique au regard des missions principalement exercées.

Il justifie être titulaire d'un diplôme d'ingénieur en systèmes industriels de l'université de technologie de [Localité 8] délivré le 11 octobre 2009.

Il ressort des pièces produites qu'il jouait un rôle prépondérant dans le développant commercial de la société, agissant directement sous les ordres de son dirigeant, M. [I] [X], tout en ayant une réelle autonomie dans l'accomplissement de ses missions sur le terrain.

Au vu des seuls éléments produits par l'appelant, la société Linkoopro régulièrement appelée à la procédure d'appel ne s'étant pas faite représenter pour développer des moyens contraires, il est jugé que preuve suffisante est rapportée que M. [L] doit se voir reconnaitre le statut cadre, position 1.1, coefficient 95 (niveau débutant) de la convention collective Syntec et un salaire de 1983,60 euros brut par mois.

Il convient en conséquence par infirmation du jugement entrepris de condamner la société Linkoopro à payer à M. [L] la somme de 27770 euros brut à titre de rappel de salaires sur la période du 02 juillet 2020 au 02 septembre 2020, outre 2777 euros brut au titre des congés payés afférents.

Sur la demande indemnitaire au titre des frais professionnels':

Les frais qu'un salarié justifie avoir exposés pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de l'employeur doivent être remboursés sans qu'ils puissent être imputés sur la rémunération qui lui est due, à moins qu'il n'ait été contractuellement prévu qu'il en conserverait la charge moyennant le versement d'une somme fixée à l'avance de manière forfaitaire et à la condition que la rémunération proprement dite du travail reste au moins égale au SMIC.

Il résulte de l'article 1353 du code civil que celui qui se prévaut d'une obligation doit la prouver et que le débiteur de celle-ci doit démontrer qu'il s'en est libéré.

En l'espèce, M. [L] produit divers éléments mettant en évidence qu'il a dû utiliser son véhicule personnel afin de réaliser ses missions de prospection commerciale.

Il établit dès lors avoir engagé des frais professionnels pour le compte de la société Linkoopro qui doit justifier les avoir pris en charge'; ce que les pièces produites par le seul appelant ne mettent pas en évidence.

Pour autant, M. [L] ne sollicite pas le remboursement de ses frais professionnels ainsi que relevé par les premiers juges mais une réparation à raison du préjudice financier subi.

Il est considéré que le salarié a effectivement subi un préjudice financier à raison du fait qu'il a dû faire l'avance pendant 14 mois de frais professionnels constitués par l'entretien de son véhicule personnel utilisé pour son activité salariale auprès de la société Linkoopro ainsi que par le coût du carburant.

Son préjudice est évalué à 2000 euros net, somme à laquelle la société Linkoopro est condamnée par réformation du jugement entrepris qui a statué par des motifs inopérants et hypothétiques pour débouter le salarié de ses autres demandes, le surplus de la demande étant rejeté.

Sur le travail dissimulé':

Au visa des articles L 8221-5 et L 8223-1 du code du travail, M. [L] rapporte la preuve suffisante de l'élément matériel du travail dissimulé ayant consisté pour la société Linkoopro à ne pas procéder à une déclaration à l'embauche d'après la réponse fournie par l'Urssaf par lettre du 23 juin 2023, à ne pas déclarer ses heures de travail et n'avoir établi aucun bulletin de salaire.

Il démontre également le caractère intentionnel résultant du fait que la société Linkoopro, qui avait intégré M. [L] à un service organisé en lui confiant pour tâche son développement commercial sans que le moindre autre statut n'ait manifestement été envisagé d'après les pièces produites aux débats, en particulier l'attestation de Mme [O] [E] qui témoigne avoir également travaillé en qualité de comunity manager pour le compte de la société Linkoopro sans être non plus rémunérée mais encore les échanges de SMS entre MM. [L] et [X], le dirigeant, par lequel le premier a en substance demandé au second de clarifier sa situation se plaignant d'être dans le flou, avait nécessairement conscience de la circonstance qu'elle était liée à M. [L] par un contrat de travail.

Infirmant le jugement entrepris qui a statué par des motifs inopérants et hypothétiques pour débouter le salarié de ses autres demandes, il convient de condamner la société Linkoopro à payer à M. [L] la somme de 11901 euros net à titre d'indemnité pour travail dissimulé.

Sur l'exécution fautive du contrat de travail':

L'article L 1222-1 du code du travail prévoit que le contrat de travail est exécuté de bonne foi.

Celle-ci étant présumée, il appartient en principe au salarié de rapporter la preuve d'une exécution fautive et/ou déloyale du contrat de travail par l'employeur.

En l'espèce, M. [L] développe trois moyens au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail ayant consisté pour l'employeur à ne pas lui mettre à disposition un véhicule de fonction, à ne pas lui avoir versé son salaire et à ne pas lui avoir délivré de bulletins de paie.

Pour autant, si le manquement de l'employeur est établi, M. [L] est d'ores et déjà indemnisé à ce titre puisqu'il lui est alloué une indemnité pour travail dissimulé ainsi que des dommages et intérêts à raison des frais professionnels qu'il a engagés pour la société qui n'ont pas été pris en charge.

Il s'ensuit que la demande de ce chef est rejetée par confirmation du jugement entrepris mais par substitution de motifs.

Sur l'obligation de prévention et de sécurité':

L'employeur a une obligation s'agissant de la sécurité et de la santé des salariés dont il ne peut le cas échéant s'exonérer que s'il établit qu'il a pris toutes les mesures nécessaires et adaptées énoncées aux articles L 4121-1 et L 4121-2 du code du travail ou en cas de faute exclusive de la victime ou encore de force majeure.

En l'espèce, M. [L] établit avoir fait part de son mal-être à son employeur fin août 2021 par SMS en sollicitant un rendez-vous avec le dirigeant tenant au «'flou'» dans lequel il se trouvait, renvoyant au fait qu'il n'était pas payé depuis le début de la relation de travail plus d'un an auparavant.

L'employeur ne justifie avoir pris aucune mesure appropriée et n'a au contraire cessé de différer toute discussion à ce titre.

Il n'est pas davantage justifié de la mise en 'uvre des mesures de prévention des risques en particulier de l'établissement d'un document unique d'évaluation des risques professionnels.

Le manquement de l'employeur à son obligation de prévention et de sécurité est dès lors établi.

Sans qu'il ne soit indemnisé une éventuelle maladie professionnelle au vu des éléments médicaux produits par M. [L], ce dernier a incontestablement subi un préjudice moral à raison du manquement de l'employeur qui est évalué à la somme de 2000 euros à laquelle la société Linkoopro est condamnée par réformation du jugement entrepris qui a statué par des motifs inopérants et hypothétiques pour débouter le salarié de ses autres demandes.

Sur les prétentions afférentes à la rupture du contrat de travail':

Il appartient à celui qui se prévaut d'un licenciement verbal ou en tout état de cause d'une rupture du contrat de travail d'en rapporter la preuve.

La rupture du contrat de travail, en l'absence de lettre de licenciement, ne peut résulter que d'un acte de l'employeur par lequel il manifeste au salarié sa volonté de mettre fin au contrat de travail (Soc., 19 octobre 2011, pourvoi n 10-17.337, Bull. 2011, V, n 237'; soc., 6 décembre 2023, pourvoi n° 22-20.414)

Le licenciement verbal ou le licenciement mené sans qu'il n'ait été observé la moindre procédure de licenciement est nécessairement sans cause réelle et sérieuse.

En l'espèce, M. [L] rapporte la preuve suffisante d'une rupture à l'initiative de l'employeur au 02 septembre 2021 résultant de la circonstance que celui-ci l'a informé de la résiliation par ses soins de sa ligne téléphonique professionnelle l'empêchant ainsi définitivement d'entrer en contact avec la clientèle de l'entreprise qu'il avait développée, certains clients de la société Linkoopro confirmant n'avoir plus eu de contact avec M. [L] ou avoir appris la cessation de son activité pour cette entreprise à partir de septembre 2021'([J], [C] et [F]); ce qui corrobore le fait avancé par le salarié que sa boite mails professionnelle avait également été bloquée, étant observé sans que cela soit déterminant que certains des témoins précités ont indiqué que M. [L] leur avait confié que M. [X], le dirigeant de la société Linkoopro avait adressé à la plupart des clients de celle-ci un avenant afin que leur contrat de prestations de services soit transféré au profit de son activité d'auto-entrepreneur Ets [X] sans qu'il n'apparaisse d'après les pièces produites qu'il ait jamais été envisagé un quelconque transfert du contrat de travail à cette autre entreprise.

La volonté certaine de l'employeur de rompre le contrat de travail qui l'unissait à M. [L] est également confirmée par le fait que fin août 2021, les parties ont eu des discussions qui n'ont pas abouti autour de la rémunération du salarié et que la société Linkoopro a déclaré une cessation d'activité au 31 octobre 2021.

Il n'est justifié d'aucune procédure de licenciement avec une notification écrite de ses motifs de sorte qu'en présence d'un licenciement verbal, il y a lieu de le déclarer sans cause réelle et sérieuse par infirmation du jugement entrepris qui a statué par des moyens hypothétiques et inopérants.

Sur les prétentions afférentes à la rupture du contrat de travail':

Au visa de l'article 15 de la convention collective Syntec dans sa version en vigueur au jour de la rupture du contrat de travail, le préavis conventionnel des cadres étant de 3 mois, il convient par infirmation du jugement entrepris de condamner la société Linkoopro à payer à M. [L] la somme de 5950,80 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 595,08 euros bruts au titre des congés payés afférents.

L'indemnité légale de licenciement ressort à 578,55 euros net, somme à laquelle la société Linkoopro est également condamnée au bénéfice de M. [L].

Enfin, au visa de l'article L 1235-3 du code du travail, au jour de son licenciement injustifié, M. [L] avait 1 an et 5 mois d'ancienneté préavis compris.

Il justifie s'être inscrit à une formation financée par Pôle emploi sur la période du 18 septembre au 31 décembre 2023.

Il ressort néanmoins de l'attestation de Mme [T] que M. [L] avait retrouvé un emploi de commercial à compter du 06 octobre 2021 pour l'entreprise Encelade Media Group au sujet duquel il ne fournit pas d'éléments.

En conséquence, il lui est alloué la somme de 3000 euros brut à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, le surplus de la demande de ce chef étant rejeté.

Sur les demandes accessoires':

L'équité commande de ne pas laisser à la charge de M. [L] les frais irrépétibles qu'il a exposés pour les besoins de sa défense de sorte que la société Linkoopro est condamnée à lui verser une indemnité de procédure de 3000 euros.

Le surplus des prétentions au titre de l'article 700 du code de procédure civile est rejeté.

Au visa de l'article 696 du code de procédure civile, infirmant le jugement entrepris, il convient de condamner la société Linkoopro, partie perdante, aux dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS';

La cour, statuant publiquement par arrêt réputé contradictoire, dans les limites de l'appel et après en avoir délibéré conformément à la loi';

CONFIRME le jugement en ce qu'il a débouté M. [L] de sa demande indemnitaire pour exécution déloyale du contrat de travail

L'INFIRME pour le surplus,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

DÉCLARE sans cause réelle et sérieuse le licenciement de M. [L] par la société Linkoopro à la date du 02 septembre 2021,

CONDAMNE la société Linkoopro à verser à M. [L] les sommes suivantes :

- vingt-sept mille sept cent soixante-dix euros (27770 euros) brut à titre de rappel de salaire,

- deux mille sept cent soixante-dix-sept euros (2777 euros) brut au titre des congés payés afférents,

- cinq cent soixante-dix-huit euros et cinquante-cinq centimes (578,55 euros) net à titre d'indemnité légale de licenciement,

- cinq mille neuf cent cinquante euros et quatre-vingt centimes (5950,80 euros) brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- cinq cent quatre-vingt-quinze euros et huit centimes (595,08 euros) brut au titre des congés payés afférents,

Outre intérêts au taux légal sur ces sommes à compter du 29 août 2022

- deux mille euros (2000 euros) net à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice financier subi par M. [L] des suites de l'absence de prise en charge de ses frais professionnels,

- deux mille euros (2000 euros) net à titre d'indemnité ensuite du manquement de l'employeur à ses obligations de sécurité et de prévention,

- trois mille euros (3000 euros) brut à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- onze mille neuf cent un euros (11901 euros) net au titre de l'indemnité forfaitaire de travail dissimulé,

Outre intérêts au taux légal sur ces quatre sommes à compter du prononcé de l'arrêt

DÉBOUTE M. [L] du surplus de ses demandes au principal

CONDAMNE la société Linkoopro à verser à M. [L] une indemnité de procédure de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

REJETTE le surplus de la demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile

CONDAMNE la société Linkoopro aux dépens de première instance et d'appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par M. Frédéric BLANC, Conseiller faisant fonction de Président de section, et par Mme Carole COLAS, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Ch. sociale -section b
Numéro d'arrêt : 23/00686
Date de la décision : 06/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 12/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-06;23.00686 ?
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