La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/05/2024 | FRANCE | N°22/03874

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Ch.secu-fiva-cdas, 30 mai 2024, 22/03874


C6



N° RG 22/03874



N° Portalis DBVM-V-B7G-LSBW



N° Minute :





































































Notifié le :



Copie exécutoire délivrée le :











AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



CHAMBRE SOCIALE - PROT

ECTION SOCIALE

ARRÊT DU JEUDI 30 MAI 2024





Appel d'une décision (N° RG 21/00783)

rendue par le pôle social du tribunal judiciaire de Grenoble

en date du 04 octobre 2022

suivant déclaration d'appel du 26 octobre 2022





APPELANT :



Monsieur [H] [D]

né le 12 décembre 1957

[Adresse 2]

[Localité 4]



représenté par Me Romain JAY de la SELARL CDMF AVOCATS, avo...

C6

N° RG 22/03874

N° Portalis DBVM-V-B7G-LSBW

N° Minute :

Notifié le :

Copie exécutoire délivrée le :

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE SOCIALE - PROTECTION SOCIALE

ARRÊT DU JEUDI 30 MAI 2024

Appel d'une décision (N° RG 21/00783)

rendue par le pôle social du tribunal judiciaire de Grenoble

en date du 04 octobre 2022

suivant déclaration d'appel du 26 octobre 2022

APPELANT :

Monsieur [H] [D]

né le 12 décembre 1957

[Adresse 2]

[Localité 4]

représenté par Me Romain JAY de la SELARL CDMF AVOCATS, avocat au barreau de GRENOBLE substitué par Me Alexis BANDOSZ, avocat au barreau de GRENOBLE

INTIMEE :

La CPAM DE L'ISERE, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 3]

comparante en la personne de Mme [W] [J], régulièrement munie d'un pouvoir

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DEBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

M. Jean-Pierre DELAVENAY, Président,

M. Pascal VERGUCHT, Conseiller,

Mme Elsa WEIL, Conseiller,

Assistés lors des débats de M. Fabien OEUVRAY, Greffier,

En présence de Mme [N] [R], juriste assistant,

DÉBATS :

A l'audience publique du 12 mars 2024,

Mme Elsa WEIL, Conseiller chargée du rapport, M. Jean-Pierre DELAVENAY, Président et M. Pascal VERGUCHT, Conseiller ont entendu les représentants des parties en leurs observations,

Et l'affaire a été mise en délibéré à la date de ce jour à laquelle l'arrêt a été rendu.

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

M. [H] [D] est titulaire d'une pension d'invalidité depuis le 1er janvier 2012. Âgé de 62 ans au 12 décembre 2019, il a été informé par la caisse primaire d'assurance maladie que la pension d'invalidité cesserait de lui être versée, à l'âge théorique de la retraite, sauf s'il justifiait d'une activité salariée.

M. [H] [D] a transmis son bulletin de salaire pour le mois de janvier 2020 ainsi que sa déclaration de situation et de ressources pour la période correspondante, justifiant ainsi d'une activité salariée, ouvrant droit à la perception de la pension d'invalidité qui lui sera versée jusqu'en juin 2021.

Le 7 mai 2021, la CARSAT a informé la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère que M. [H] [D] percevait sa retraite personnelle depuis le 1er janvier 2020.

Le 8 juin 2021, la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère a notifié à M. [H] [D] un indu pour un montant de 19'113, 30 € au titre de la pension d'invalidité versée du 1er janvier 2020 au 1er avril 2021.

Par décision en date des 27 et 29 juillet 2021, la commission de recours amiable a rejeté les recours de M. [H] [D] relatifs à la fois à demande de remise de dette et à la contestation de l'indu qui lui avait été notifié. Le 7 septembre 2021, celui-ci a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Grenoble de deux recours afin de contester ces décisions.

Par jugement en date du 4 octobre 2022, le pôle social du Tribunal Judiciaire de Grenoble a'ordonné la jonction entre les deux procédures, débouté M. [H] [D] de l'ensemble de ses demandes et confirmé l'indu à hauteur de 19'055, 30€.

Le 26 octobre 2022, M. [H] [D] a interjeté appel de cette décision.

Les débats ont eu lieu à l'audience du 12 mars 2024 et les parties avisées de la mise à disposition au greffe de la présente décision le 30 mai 2024.

EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

M. [H] [D], selon ses conclusions d'appel responsives et récapitulatives notifiées par RPVA le 23 janvier 2023, déposées le 5 février 2024, et reprises à l'audience demande à la cour de :

- Réformer le jugement du pôle social de Grenoble du 4 octobre 2022,

Statuant à nouveau,

- à titre principal, annuler les décisions de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère en date des 27 et 29 juillet 2021,

- à titre subsidiaire, déduire de la somme répétée (19 113, 30 €), la somme de 19 113, 30 € à titre de dommages et intérêts compte-tenu des manquements de la caisse primaire d'assurance maladie ;

- condamner la caisse primaire d'assurance maladie à lui verser la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'au paiement des entiers dépens.

M. [H] [D] soutient qu'il a systématiquement suivi les instructions de la caisse primaire d'assurance maladie et qu'il lui a transmis les éléments demandés par celle-ci, à savoir ses bulletins de salaire. Il estime, à défaut, que la caisse primaire d'assurance maladie a commis une faute à son égard par négligence dans le traitement de son dossier.

S'estimant de bonne foi, il considère que le trop-perçu versé par la caisse primaire d'assurance maladie résulte de la faute de celle-ci et que sa demande de remise de dette est donc justifiée. Il souligne le caractère modeste de ses revenus, le mettant en difficulté pour rembourser une telle somme.

La caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère, par ses conclusions déposées le 8 mars 2024 et reprises à l'audience demande à la cour de confirmer le jugement du pôle social de Grenoble du 4 octobre 2022.

La caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère expose que M. [H] [D] ne lui a pas indiqué qu'il avait sollicité sa pension de retraite alors qu'il était bien spécifié dans les différents formulaires à lui renvoyer qu'il fallait le préciser. Elle rappelle que la pension de retraite ne peut pas se cumuler avec la pension d'invalidité et que cette situation est à l'origine de l'indu qu'elle réclame. Elle souligne que M. [H] [D] a demandé à la CARSAT la liquidation de sa retraite en janvier 2020, ce qui permet de douter de sa bonne foi, lorsqu'il a indiqué parallèlement à la caisse primaire d'assurance maladie qu'il n'avait pas sollicité celle-ci. En ce qui concerne la demande de remise de dette, la caisse primaire d'assurance maladie relève qu'au regard de ses ressources et de son patrimoine, M. [H] [D] n'apparaît pas en situation de précarité et que cette demande n'est pas justifiée.

Pour le surplus de l'exposé des moyens des parties au soutien de leurs prétentions il est renvoyé à leurs conclusions visées ci-dessus par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIVATION

Sur l'indu réclamé par la caisse primaire d'assurance maladie':

L'article L. 341-15 du code de la sécurité sociale dispose que la pension d'invalidité prend fin à l'âge prévu à l'article L. 351-1-5 (à savoir 62 ans pour les assurés nés après le 1er janvier 1955). Elle est remplacée à partir de cet âge par la pension de vieillesse allouée en cas d'inaptitude au travail.

La pension de vieillesse substituée à une pension d'invalidité ne peut être inférieure au montant de l'allocation aux vieux travailleurs salariés.

Toutefois, lorsqu'ils atteignent l'âge prévu à l'article L. 351-1-5, les titulaires d'une pension d'invalidité liquidée avant le 31 mai 1983 peuvent prétendre à une pension de vieillesse qui ne peut être inférieure à la pension d'invalidité dont bénéficiait l'invalide à cet âge.

Par dérogation, l'article L341-16 précise que lorsque l'assuré exerce une activité professionnelle, la pension de vieillesse allouée au titre de l'inaptitude au travail n'est attribuée que si l'assuré en fait expressément la demande.

L'assuré qui exerce une activité professionnelle et qui, à l'âge prévu à l'article L. 351-1-5, ne demande pas l'attribution de la pension de vieillesse substituée continue de bénéficier de sa pension d'invalidité jusqu'à la date à laquelle il demande le bénéfice de sa pension de retraite et au plus tard jusqu'à l'âge mentionné au 1° de l'article'L. 351-8.

Dans ce cas, ses droits à l'assurance vieillesse sont ultérieurement liquidés dans les conditions prévues aux articles L. 351-1, à l'exclusion de son premier alinéa, et L. 351-8.

Toutefois, la pension de vieillesse qui lui est alors servie ne peut pas être inférieure à celle dont il serait bénéficiaire si la liquidation de ses droits avait été effectuée dans les conditions fixées à l'article L. 341-15.

En cas de reprise ou de poursuite d'une activité ouvrant droit à une nouvelle pension de retraite, la demande de retraite mentionnée aux deux premiers alinéas du présent article est celle effectuée lors de la première liquidation de la retraite.

Dès lors, il est donc possible pour une personne invalide qui exerce une activité professionnelle au-delà de l'âge légal de départ à la retraite de cumuler son revenu d'activité avec sa pension d'invalidité qui peut être maintenue jusqu'à l'âge d'obtention de la retraite à taux plein. Dans cette hypothèse il est donc nécessaire de ne pas avoir demandé la liquidation de sa pension de retraite et de maintenir une activité professionnelle.

En l'espèce, M. [H] [D] a sollicité et obtenu auprès de la CARSAT la liquidation de sa pension de retraite à compter du 1er janvier 2020 (pièce n°4 de l'intimée). Dès lors, par application des textes susvisés, à partir de cette date, il ne pouvait cumuler le montant de sa pension d'invalidité et de sa pension de retraite. L'indu réclamé par la caisse primaire d'assurance maladie est donc parfaitement justifié.

Par ailleurs, dans le cadre de sa déclaration de ressources afin de percevoir sa pension d'invalidité, M. [H] [D] n'a pas précisé à la caisse primaire d'assurance maladie, alors que la demande était clairement indiquée, s'il percevait ou non une pension de retraite en mars et avril 2020. Puis, à l'inverse, il a indiqué à partir de mai 2020 qu'il n'avait pas fait de demande de pension de retraite alors même qu'il percevait celle-ci depuis le mois de janvier 2020 (pièce 2 de l'intimée).

Il ne peut donc sérieusement prétendre avoir scrupuleusement suivi les instructions de la caisse primaire d'assurance maladie alors que dans un premier temps il n'a pas répondu à la question posée sur la demande relative à la liquidation de sa retraite et que dans un second temps il a donné à la caisse primaire d'assurance maladie une fausse information. M. [H] [D] apparaît donc de mauvaise foi et ne rapporte pas la preuve de l'existence d'une faute de la part de la caisse primaire d'assurance maladie à son égard. Sa demande de dommages-intérêts n'est donc pas fondée et il ne peut solliciter une compensation quelconque sur ce fondement.

Il sera donc débouté de sa demande d'annulation de l'indu au titre de la pension d'invalidité versée sur la période de janvier 2020 à avril et condamné au paiement de cette somme. Le jugement sera donc confirmé sur ce point.

Sur la demande de remise de dette':

L'article L. 256-4 du code de la sécurité sociale dispose qu'à l'exception des cotisations et majorations de retard, les créances des caisses nées de l'application de la législation de sécurité sociale, notamment dans des cas mentionnés aux articles'L. 244-8,'L. 374-1,'L. 376-1 à L. 376-3,'L. 452-2 à L. 452-5,'L. 454-1'et'L. 811-6, peuvent être réduites en cas de précarité de la situation du débiteur par décision motivée par la caisse, sauf en cas de man'uvre frauduleuse ou de fausses déclarations.

Par ailleurs, l'article R. 861-22 du même code indique qu'à peine de nullité, la notification de payer doit informer le débiteur qu'il peut demander la remise ou la réduction de sa dette, dans un délai de deux mois à compter de cette notification. Cette demande est déposée auprès de l'organisme qui a émis la notification. Le recouvrement de la somme due ne peut intervenir pendant ce délai, l'article R. 243-20 du code de la sécurité sociale précisant que cette compétence relève du directeur de l'organisme de recouvrement ou de la commission de recours amiable sur proposition de celui-ci à partir d'un seuil fixé par arrêté ministériel.

En outre, la cour de cassation a reconnu au'juge'judiciaire'le pouvoir d'apprécier si la situation de précarité du débiteur justifie une'remise'totale ou partielle de la dette au sens de l'article L. 256-4 du code de la sécurité sociale (Cass. 2e civ., 28 mai 2020, n° 18-26.512).

En l'espèce, la commission de recours amiable de la caisse primaire d'assurance maladie a rejeté la demande de remise de dette de M. [H] [D] qui conteste ce refus. Il appartient donc au juge judiciaire de se prononcer sur cette demande.

M. [H] [D] justifie avoir perçu en 2021 au titre de sa pension de retraite et de ses salaires la somme de 23 577 € et son épouse de 7'816 €. Ils ont également perçu 6 732 € au titre de revenus fonciers (pièce 11 de l'appelant), soit 3 177 €/ mois pour le couple. Ils assument parallèlement jusqu'en 2024 deux prêts, l'un à hauteur de 732 €/mois et l'autre à hauteur de 224, 60 €/mois (pièce 10 de l'appelant). Le solde restant à leur disposition pour faire face à leurs charges courantes et leur vie quotidienne est donc de 2 221 €/mois, étant rappelé qu'à partir de 2024 les deux prêts seront soldés. Dès lors, M. [H] [D] ne démontre pas être dans une situation de précarité justifiant une remise de dette.

Par ailleurs, il sera également rappelé que la situation d'indu a été générée en raison du non renseignement par M. [H] [D] à la caisse primaire d'assurance maladie de sa demande de pension de retraite, puis d'une fausse déclaration sur ce point à compter de mai 2020.

Il sera donc débouté de cette demande et le jugement sera intégralement confirmé.

Sur les demandes accessoires':

M. [H] [D] succombant à l'instance, il sera condamné aux entiers dépens et débouté de sa demande formée au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme le jugement RG n°21/00783 rendu le 4 octobre 2022 par le pôle social du tribunal judiciaire de Grenoble en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne M. [H] [D] aux dépens de l'appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par M. Jean-Pierre Delavenay, président et par Mme Chrystel Rohrer, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Ch.secu-fiva-cdas
Numéro d'arrêt : 22/03874
Date de la décision : 30/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 05/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-30;22.03874 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award