COUR D'APPEL DE
GRENOBLE
2ème Chambre Civile
Cabinet de
Mme Emmanuèle Cardona, Présidente, chargée de la mise en état
N° RG 22/00741 - N° Portalis DBVM-V-B7G-LH3A
N° Minute :
Copie exécutoire
délivrée
le :
à :
la SELARL AABM
SELARL CABINET BALESTAS GRANDGONNET MURIDI
SELARL LEXAVOUE GRENOBLE - CHAMBERY
SCP LACHAT MOURONVALLE
SELARL LEXWAY AVOCATS
SELARL L. LIGAS-RAYMOND - JB PETIT
ORDONNANCE JURIDICTIONNELLE
DU MARDI 28 MAI 2024
Appel d'un jugement (N° R.G. 16/02422)
rendu par le tribunal judiciaire de Grenoble
en date du 06 janvier 2022
suivant déclaration d'appel du 17 février 2022
Vu la procédure entre :
Appelant et demandeur à l'incident
M. [O] [S]
né le [Date naissance 9] 1986 à [Localité 27] (74)
de nationalité Française
[Adresse 4]
[Localité 18]
Représenté par Me Simon BERGERAS de la SELARL AABM, avocat au barreau de GRENOBLE
Et
Intimés
M. [Z] [T]
né le [Date naissance 10] 1990 à [Localité 23] (ALGERIE)
de nationalité Française
[Adresse 8]
[Localité 24]
M. [H] [X]
né le [Date naissance 6] 1990 à [Localité 24]
de nationalité Française
chez M. [B] [L], [Adresse 20]
[Localité 14]
M. [V] [G]
né le [Date naissance 1] 1990 à [Localité 26] (ALGERIE)
de nationalité Française
[Adresse 11]
[Localité 24]
M. [N] [A]
né le [Date naissance 2] 1991 à [Localité 25]
de nationalité Française
chez M. et Mme [P], [Adresse 7]
[Adresse 7]
[Localité 24]
non représentés
Mutuelle MUTUELLE ASSURANCE DE L'EDUCATION (MAE ASSURANCE) prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 16]
[Localité 19]
Représentée par Me Audrey GRANDGONNET de la SELARL CABINET BALESTAS GRANDGONNET MURIDI, avocat au barreau de GRENOBLE
Compagnie d'assurance AXA , prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège,
[Adresse 12]
[Localité 22]
Compagnie d'assurance AXA ASSURANCE IARD agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice, domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 12]
[Localité 22]
Représentée par Me Alexis GRIMAUD de la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE - CHAMBERY, avocat au barreau de GRENOBLE
S.A. ACM La Compagnie d'assurance ACM IARD CORPOREL, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 13]
[Localité 17]
Représentée par Me Christophe LACHAT de la SCP LACHAT MOURONVALLE, avocat au barreau de GRENOBLE
S.A. ALLIANZ IARD prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 3]
[Localité 21]
Représentée par Me Philippe LAURENT de la SELARL LEXWAY AVOCATS, avocat au barreau de GRENOBLE
Partie intervenante :
Organisme FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES DES ACTES DE TEERRORISME ET D'AUTRES INFRACTIONS prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 15]
[Localité 5]
représenté par Me Jean-bruno PETIT de la SELARL L. LIGAS-RAYMOND - JB PETIT, avocat au barreau de GRENOBLE
A l'audience sur incident du 03 avril 2024, Nous, Emmanuèle Cardona, Présidente de chambre, chargée de la mise en état, assistée de Caroline Bertolo, greffière, avons entendu les avocats en leurs conclusions et plaidoiries ;
Puis l'affaire a été mise en délibéré et ce jour avons rendu l'ordonnance dont la teneur suit :
FAITS ET PROCEDURE
Le 9 avril 2010 M. [O] [S], Mme [K] [W] et M [M] [J] ont été agressés par un groupe d'individus composé de majeurs et de mineurs, dans le centre ville de [Localité 24].
M. [S] a été victime de plusieurs coups de poings et de pieds ainsi que de deux coups de couteau.
A l'issue de l'information judiciaire ouverte, plusieurs majeurs et mineurs ont été renvoyés devant les juridictions pénales compétentes et quatre majeurs et quatre mineurs ont été condamnés.
Ainsi, par jugement du 6 octobre 2011 le tribunal correctionnel de Grenoble a notamment :
déclaré coupables MM. [Z] [T], [H] [X], [V] [G] et [N] [A] des faits reprochés et responsables des préjudices subis par les victimes,
alloué à M. [S] une provision de 10 000 euros à valoir sur l'indemnisation de ses préjudices,
désigné le docteur [U] en tant qu'expert judiciaire,
alloué à Mme [W] et M. [J] une somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts.
En parallèle les mineurs ont été jugés coupables par le tribunal pour enfant et la réparation du préjudice de M. [S] a été évaluée à la somme de 122 122,50 euros.
Par arrêt du 5 novembre 2019 la cour d'appel de Grenoble saisie d'un recours de M. [S] contre la décision de la Commission d'Indemnisation des Victimes d'Infractions du 20 mars 2014, a fixé à 148 012,50 euros l'indemnisation de celui-ci.
Par actes des 26 avril et 6 mai 2016, M. [S], Mme [W] et M. [J] ont fait citer devant le tribunal de grande instance de Grenoble la Mutuelle Assurance de l'Education (MAE), en tant qu'assureur des représentants légaux de M. [C] et la société Assurance du Crédit Mutuel Iard Corporel (ACM), en tant qu'assureur des représentants légaux de M. [I], aux fins de solliciter leurs condamnations solidaires à indemniser leurs préjudices.
Le Fonds de Garantie des Victimes des Actes de Terrorisme et d'Autres Infractions est intervenu volontairement à la procédure.
Par jugement du 6 janvier 2022 le tribunal judiciaire de Valence a notamment :
déclaré recevable l'action directe de M. [S] contre les assureurs,
fixé le préjudice de M. [S] à la somme de 136 542,50 euros,
condamné in solidum la MAE et les sociétés ACM IARD Corporel, Allianz et Axa Assurances IARD à payer à la victime la somme de 136 542,50 euors en deniers ou quittances,
déclaré M. [S] rempli de ses droits, du fait de l'indemnisation versées par le Fonds de Garantie des Victimes des Actes de Terrorisme et d'Autres Infractions,
a limité le recours subrogatoire du Fonds de Garantie des Victimes des Actes de Terrorisme et d'Autres Infractions à la somme de 61 261,56 euros et condamné les assureurs des représentants légaux et les quatre auteurs majeurs à verser à hauteur de 1/8ème chacun cette somme au fgti,
condamné in solidum les assureurs des représentants légaux à payer à Mme [W] la somme de 8 000 euros au titre de son préjudice,
condamné in solidum les mêmes à payer à M. [J] la somme de 3 000 euros en réparation de son préjudice,
dit que dans leurs rapports entre eux MM. [C], [I], [D] et [Y], leurs représentants légaux et leurs assureurs et MM. [Z], [X], [R] et [A] seront tenus à 1/8ème des condamnations prononcées à l'encontre des co-responsables.
M. [O] [S] a interjeté appel le 17 février 2022, intimant, la MAE et la société ACM IARD Corporel.
Par acte du 26 juillet 2022 la MAE a assigné en appel provoqué les société Axa, Allianz IARD et MM [T], [X], [G] et [A].
Les dossiers ont été joints le 27 septembre 2022 sous le numéro 22/741.
Le fonds de garantie a déposé des conclusions d'intervention volontaire et d'appel provoqué le 12 décembre 2022.
Par déclaration d'appel du 14 décembre 2023 il a intejeté un appel principal, intimant M. [S], les société MAE, ACM IARD Corporel, Allianz IARD et AXA France IARD, Mme [W], M. [J] et MM [T], [G], [A] et [X].
Par conclusions d'incident déposées dans le dossier n° 22/741 M. [S] demande au conseiller de la mise en état de :
déclarer irrecevables, comme étant nouvelles en cause d'appel, les demandes de la société Axa visant à :
- dire et juger qu'aucune condamnation à indemniser M. [S] ne pourra être prononcée contre Axa,
- dire et juger que la cour ne pourra statuer que sur les actions récursoires et sur l'action subrogatoire du fonds de garantie,
- dire et juger qu'Axa n'est tenue qu'à hauteur de 1/8ème,
- donner acte à Axa qu'elle a réglé la somme de 30 391,63 euros au lieu de 17 067,81 euros et qu'elle est fondée à solliciter la restitution de la somme de 13 323,82 euros,
- débouter le fonds de garantie de toute demande contre Axa,
déclarer irrecevable comme nouvelle en cause d'appel la demande de la MAE visant à voir fixer le préjudice corporel de M. [S] dans ses rapports avec la MAE à la somme de 122 122,50 euros.
Aux termes de ses conclusions d'incident n°3 M. [S] maintient ses demandes initiales et y ajoutant, demande au conseiller de la mise en état de :
déclarer irrecevables les conclusions d'intimée sur appel provoque en date du 29 janvier 2023 de la société Allianz,
débouter la MAE de sa demande d'irrecevabilité des passages de ses conclusions n°2 en pages 19 à 21 et en page 24 et 25,
débouter les sociétés Axa, MAE et Allianz IARD de leurs demandes,
condamner la société Allianz à lui verser la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Il soutient :
- qu'il est contraint de saisir le conseiller de la mise en état pour l'irrecevabilité des demandes nouvelles, pour préserver ses droits,
- que la compétence du conseiller de la mise en état pour statuer sur la prétendue irrecevabilité partielle de ses conclusions d'appelant n°2 fait débat,
- qu'il était recevable à répliquer aux conclusions de la MAE visant à développer son appel principal,
- que la MAE a signifié ses conclusions d'appel provoqué à la société Allianz le 21 juillet 2022 et qu'en vertu de l'article 910 du code de procédure civile les conclusions de cette dernière auraient dû être notifées dans les 3 mois, soit avant le 21 octobre 2022 ; que les conclusions du 29 janvier 2023 sont donc tardives et irrecevables.
La société Allianz conclut au rejet de la demande et à la condamnation de M. [S] à lui payer la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle soutient avoir été attraite dans la procédure d'appel par la société Axa le 28 octobre 2022 et en déduit que ses conclusions du 29 janvier 2023 sont recevables.
Par conclusions du 13 juin 2023 la société Axa conclut à l'incompétence du conseiller de la mise en état pour statuer sur la recevabilité des demandes nouvelles et à titre subsidiaire à la recevabilité de ses demandes.
Elle se fonde sur l'avis de la Cour de cassation du 11 octobre 2022.
Par conclusions d'incident déposées dans les deux dossier 22/741 et 23/4214 la MAE demande au conseiller de la mise en état de :
déclarer irrecevable l'intervention volontaire et l'appel provoqué interjeté par le Fonds de Garantie des Victimes des Actes de Terrorisme et d'Autres Infractions,
prononcer la jonction des affaires 22/741 et 23/4214,
déclarer irrecevable l'appel principal interjeté par le FGTI,
déclarer irrecevables les conclusions d'appelant du Fonds de Garantie des Victimes des Actes de Terrorisme et d'Autres Infractions du 28 févreir 2024,
déclarer irrecevable la fin de non recevoir tenant à l'irrecevabilité de sa demande prétendument nouvelle,
à titre subsidiaire,
déclarer recevable sa prétention tendant à voir fixer le préjudice de M. [S] à la somme de 122 122,50 euros,
déclarer irrecevables partiellement les conclusions d'appelant n°2 de M. [S],
condamner M. [S] à lui payer la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
condamner le Fonds de Garantie des Victimes des Actes de Terrorisme et d'Autres Infractions à lui payer la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
condamner M. [S] et le Fonds de Garantie des Victimes des Actes de Terrorisme et d'Autres Infractions aux dépens de l'incident.
Elle expose :
- que l'intervention volontaire du fonds de garantie, partie en première instance, est irrecevable,
- que dès lors que le fonds de garantie n'a pas la qualité d'intimé, il ne peut former un appel provoqué,
- que l'appel principal du Fonds de Garantie des Victimes des Actes de Terrorisme et d'Autres Infractions, enrôlé sous le numéro 23/4214 le 14 décembre 2023 est tardif, dès lors qu'il a lui-même fait signifier le jugement le 2 mai 2022,
- que le conseiller de la mise en état n'est pas compétent pour statuer sur la recevabilité des demandes nouvelles en appel,
- qu'à titre subsidiaire, sa demande est recevable,
- que la partie des conclusions de M. [S] visant à répondre à son appel incident du 21 juillet 2022 est tardive et donc irrecevable.
Le fonds de garantie n'a conclu sur l'incident dans aucune des deux procédures.
MOTIFS
A titre liminaire, il est rappelé que l'appel principal du Fonds de Garantie des Victimes des Actes de Terrorisme et d'Autres Infractions étant déclaré irrecevable dans la procédure n° 23/4214, il n'y a pas lieu à jonction avec la présente procédure n° 22/741.
1. sur les demandes de M. [S]
- sur les demandes nouvelles
Selon l'avis rendu par la Cour de cassation le 11 octobre 2022, le conseiller de la mise en état n'est compétent que pour statuer sur les fins de non-recevoir touchant à la procédure d'appel et non sur celle relevant de l'appel et l'examen des fins de non-recevoir de l'article 564 du code de procédure civile, interdisant de soumettre des prétentions nouvelles en appel, relève de l'appel et donc de la compétence de la cour d'appel.
Les demandes de M. [S] visant à voir déclarer irrecevables les demandes nouvelles de la MAE et d'Axa excèdent donc les pouvoirs du conseiller de la mise en état.
- sur l'irrecevabilité des conclusions de la société Allianz
Il résulte des dispositions de l'article 910 du code de procédure civile, pris en son alinéa 2 que l'intervenant forcé à l'instance d'appel dispose, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, d'un délai de trois mois à compter de la date à laquelle la demande d'intervention formée à son encontre lui a été notifiée pour remettre ses conclusions au greffe.
En l'espèce, il résulte des pièces produites par la MAE que son assignation en appel provoqué a été signifié à la société Allianz le 21 juillet 2022.
Celle-ci disposait donc d'un délai de 3 mois à compter de cette date pour conclure et ses conclusions du 29 janvier 2023 sont irrecevables comme tardives.
2. Sur les demandes de la MAE
- à l'encontre du FGTI
Par conclusions du 29 août 2022 le fonds de garantie a notifié des conclusions d'intervention volontaire dans le dossier enrôlé sous le n° 22/741.
Or, en application des dispositions de l'article 554 du code de procédure civile, l'intervention en cause d'appel n'est ouverte qu'aux personnes qui n'ont été ni parties ni représentées en première instance, ce qui n'est pas le cas du fonds de garantie, qui est déjà intervenu volontairement à la procédure de première instance.
Son intervention volontaire est donc irrecevable.
Par conclusions du 12 décembre 2022 il a ensuite indiqué former un appel provoqué. Cependant, dès lors que son intervention volontaire est déclarée irrecevable, il n'est pas partie à la procédure d'appel en tant qu'intimé et ne peut donc former un appel provoqué par voie de conclusions.
Son appel provoqué doit donc être déclaré irrecevable.
- à l'encontre de M. [S]
Il résulte des dispositions de l'article 910 du code de procédure civile que l'intimé à un appel incident dispose, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, d'un délai de trois mois à compter de la notification qui lui en est faite, pour remettre ses conclusions au greffe.
Cette irrecevabilité relève bien de la compétence du conseiller de la mise en état en vertu de l'article 914 du même code lui attribuant compétence exclusive pour déclarer les conclusions irrecevables en applicaiton des articles 909 et 910, l'avis de la Cour de cassation précédemment cité ne visant que l'article 910-4 du code de procédure civile.
En l'espèce, la MAE a notifié le 21 juillet 2022 des conclusions d'intimé et d'appel incident et M. [S], appelant principal, n'a répondu à ces conclusions que le 20 janvier 2023, par conclusions d'appelant n°2 récapitulatives et en réponse.
Cependant, M. [S] ayant interjeté un appel principal sur les mêmes chefs de jugement que ceux visés par l'appel incident de la MAE, ses conclusions n°2 sont également destinées à développer ses arguments quant à son appel principal et il n'y a donc pas lieu de les déclarer irrecevables.
PAR CES MOTIFS
Nous, Emmanuèle Cardona, Présidente de la deuxième chambre civile, chargée de la mise en état, statuant publiquement, par ordonnance contradictoire, mise à disposition au greffe,
Disons n'y avoir lieu à jonction avec le dossier n° 23/4214,
Disons que les demandes de [S] quant aux demandes nouvelles excèdent les pouvoirs du conseiller de la mise en état,
Déclarons irrecevables les conclusions d'intimée de la société Allianz en date du 29 janvier 2023,
Déclarons irrecevable l'intervention volontaire formée par le FGTI,
Déclarons irrecevable l'appel provoqué interjeté par le FGTI,
Déboutons la MAE de sa demande d'irrecevabilité partielle des conclusions n°2 de M. [S],
Disons n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,
Disons que les dépens de l'incident suivront le sort de l'instance au fond.
Prononcée par mise à disposition de la décision au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signée par Emmanuèle Cardona, Présidente, chargée de la mise en état, et par la Greffière, Caroline Bertolo, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière La Présidente chargée de la mise en état