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28/05/2024 | FRANCE | N°21/01272

France | France, Cour d'appel de Grenoble, 2ème chambre, 28 mai 2024, 21/01272


N° RG 21/01272 - N° Portalis DBVM-V-B7F-KZFF



N° Minute :







C1

































































Copie exécutoire délivrée



le :

à :



la SCP DURRLEMAN-COLAS-DE RENTY



la SELARL CABINET FORT ET ASSOCIES





AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR

D'APPEL DE GRENOBLE



2ÈME CHAMBRE CIVILE



ARRÊT DU MARDI 28 MAI 2024





Appel d'un jugement (N° R.G. 19/00984) rendu par le tribunal judiciaire de Valence en date du 23 février 2021, suivant déclaration d'appel du 15 mars 2021





Appelants :



M. [Y] [A]

de nationalité Française

[Adresse 23]

[Localité 9]



S.A. MAAF prise en la personne de son re...

N° RG 21/01272 - N° Portalis DBVM-V-B7F-KZFF

N° Minute :

C1

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

la SCP DURRLEMAN-COLAS-DE RENTY

la SELARL CABINET FORT ET ASSOCIES

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

2ÈME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU MARDI 28 MAI 2024

Appel d'un jugement (N° R.G. 19/00984) rendu par le tribunal judiciaire de Valence en date du 23 février 2021, suivant déclaration d'appel du 15 mars 2021

Appelants :

M. [Y] [A]

de nationalité Française

[Adresse 23]

[Localité 9]

S.A. MAAF prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 36]

[Localité 30]

représentés par Me Béatrice COLAS de la SCP DURRLEMAN-COLAS-DE RENTY, avocat au barreau de VALENCE

Intimés :

Mme [X] [U]

née le [Date naissance 1] 1955 à [Localité 40]

de nationalité Marocaine

[Adresse 20]

[Localité 16]

Mme [C] [Z] épouse [NW]

plaidant pour elle même et aussi en sa qualité de représentante légale de ses enfants mineurs, petits enfants de MONSIEUR [F] [Z] : [R] [NW], né le [Date naissance 19]/2002, [T] [NW] née le [Date naissance 24]/2005, [BC] [NW], née le [Date naissance 6]/2008, [BL] [NW] né le [Date naissance 7]/2013, [MK] [NW], née le [Date naissance 8]/2014

née le [Date naissance 11] 1977 à [Localité 40]

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 28]

M. [H] [Z]

né le [Date naissance 17] 1984 à [Localité 40] MAROC

de nationalité Marocaine

[Adresse 20]

[Localité 16]

M. [G] [Z]

né le [Date naissance 10] 1986 à [Localité 33]

de nationalité Française

[Adresse 26]

[Localité 33]

M. [KG] [Z]

né en 1949 à [Localité 40] MAROC

de nationalité Marocaine

[Adresse 31]

[Localité 22]

Mme [E] [Z]

née en 1954 à [Localité 40] MAROC

de nationalité Marocaine

[Adresse 29]

[Localité 38]

M. [W] [Z]

né en 1961 à [Localité 40] MAROC

de nationalité Marocaine

[Adresse 35],

[Localité 39]

Mme [P] [Z]

née en 1965 à [Localité 40] MAROC

de nationalité Marocaine

[O] [Localité 40], [PH] [K] [V]

[Localité 39]

Mme [LS] [Z]

née en 1969 à MAROC

de nationalité Marocaine

[Adresse 5],

[Localité 38]

M. [M] [Z]

né le [Date naissance 21] 1993 à

de nationalité Française

résidence du ponant, ad

[Localité 15]

M. [SL] [D]

né le [Date naissance 2] 1997 à [Localité 38]

de nationalité Marocaine

[Adresse 25]

[Localité 14]

Mme [I] [D] épouse [S] agisseur pour elle-même et aussi en qualité d'administrateur légal de sa fille mineure [B] [S] née le [Date naissance 3]/20212 à [Localité 32]

née le [Date naissance 12] 1990 à [Localité 38]

de nationalité Française

[Adresse 34]

[Localité 32]

représentés par Me Alain FORT de la SELARL CABINET FORT ET ASSOCIES, avocat au barreau de VALENCE

Organisme CPAM DE LA DROME prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 27],

[Localité 13]

MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE DE LA DROME prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 18]

[Localité 13]

non représentés

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Emmanuèle Cardona, présidente,

Mme Anne-Laure Pliskine, conseillère,

Mme Ludivine Chetail, conseillère,

DÉBATS :

A l'audience publique du 18 mars 2024

Mme Emmanuèle Cardona, présidente,

Mme Anne-Laure Pliskine, conseillère,

Mme Ludivine Chetail, conseillère, chargée du rapport

assistées lors des débats de Mme Caroline Bertolo, greffière

Les avocats ont été entendus en leurs conclusions.

Puis l'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu ce jour.

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Le 9 août 2015, alors qu'il circulait au volant de son véhicule, M. [F] [Z], assuré par Groupama, a, pour une raison indéterminée, percuté les glissières de sécurité sur l'autoroute A7 puis est descendu de son véhicule immobilisé sur la voie de gauche.

M. [Y] [A], assuré par la MAAF et qui effectuait le dépassement d'un véhicule circulant sur la voie centrale au volant de son véhicule, a percuté M. [F] [Z] après avoir effectué une manoeuvre par la droite pour éviter une collision avec le véhicule immobilisé de M. [F] [Z].

M. [F] [Z] a été projeté sur la voie centrale, puis plusieurs autres véhicules ont roulé sur son corps.

Les ayants droits de [F] [Z], décédé lors de cet accident, n'ont pu obtenir une indemnisation de leurs préjudices.

Mme [X] [U] veuve [Z], Mme [C] [Z] épouse [NW], agissant à titre personnel et ès qualités de représentante légale de ses enfants mineurs [R], [BC], [BL] et [MK] [NW], M. [H] [Z], M. [G] [Z], M. [KG] [Z], Mme [E] [Z], M. [W] [Z], Mme [P] [Z], Mme [LS] [Z], M. [M] [D], M. [SL] [D] et Mme [I] [S] (ci-après les consorts [Z], [NW], [D] et [S]) ont assigné par actes des 28 mars, 1er et 5 avril, 1er et 17 mai 2019 M. [A], la société MAAF assurances, la société Mutualité sociale agricole (ci-après MSA) et la caisse primaire d'assurance-maladie de la Drôme.

Par jugement en date du 23 février 2021, le tribunal judiciaire de Valence a :

- dit que les fautes commises par [F] [Z] réduisent le droit à indemnisation des tiers victimes de 20 % ;

- dit en conséquence que le droit à indemnisation des tiers victimes est limité à 80 % du montant des préjudices subis ;

- condamné la MAAF assurances à payer au titre du préjudice d'affection à :

Mme [X] [Z] : 20 000 euros ;

Mme [C] [Z] épouse [NW] : 10 400 euros ;

M. [H] [Z] : 12 000 euros ;

M. [G] [Z] : 10 400 euros ;

M. [KG] [Z] : 4 800 euros ;

Mme [E] [Z] : 4 800 euros ;

M. [W] [Z] : 4 800 euros ;

Mme [P] [Z] : 4 800 euros ;

Mme [LS] [Z] : 4 800 euros ;

M. [R] [NW] : 5 600 euros ;

Mme [T] [NW] : 5 600 euros ;

Mme [BC] [NW] : 5 600 euros ;

M. [BL] [NW] : 5.600 euros ;

Mme [MK] [NW] : 5 600 euros ;

M. [M] [D] : 10 400 euros ;

M. [SL] [D] : 10 400 euros ;

Mme [I] [D] épouse [S] : 10 400 euros ;

Mme [B] [S] : 4 000 euros ;

- condamné en outre la MAAF assurances à payer à Mme [X] [Z] au titre de son préjudice économique la somme de 16 788 euros ;

- condamné la MAAF assurances à payer à Mme [C] [Z] épouse [NW] et M. [H] [Z] la somme de 2 030 euros au titre des frais de déplacement ;

- débouté les demandeurs de leur demande complémentaire en dommages-intérêts ;

- condamné la MAAF assurances à payer aux demandeurs la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté M. [Y] [A] et la MAAF assurances de leur demande présentée à ce titre ;

- ordonné l'exécution provisoire à concurrence de la moitié des sommes allouées ;

- condamné la MAAF assurances aux entiers dépens.

Par déclaration d'appel en date du 13 mars 2021, la SA MAAF et M. [Y] [A] ont interjeté appel du jugement.

Les consorts [Z] ont interjeté appel du jugement par déclaration d'appel en date du 26 janvier 2022 (RG n° 22/429). Cet appel a été déclaré irrecevable par ordonnance du président chargé de la mise en état du 4 juillet 2023.

EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par conclusions notifiées par voie électronique le 14 juin 2021, M. [Y] [A] et la SA MAAF demandent à la cour de :

- réformer le jugement déféré en ce qu'il a :

dit que les fautes commises par M. [F] [Z] réduisent le droit à indemnisation des tiers victimes de 20 % ;

dit en conséquence que le droit à indemnisation des tiers victimes est limité à 80 % du montant des préjudices subis ;

condamné la MAAF assurances à payer au titre du préjudice d'affection à :

Mme [X] [Z] : 20 000 euros ;

Mme [C] [Z] épouse [NW] : 10 400 euros ;

M. [H] [Z] : 12 000 euros ;

M. [G] [Z] : 10 400 euros ;

M. [KG] [Z] : 4 800 euros ;

Mme [E] [Z] : 4 800 euros ;

M. [W] [Z] : 4 800 euros ;

Mme [P] [Z] : 4 800 euros ;

Mme [LS] [Z] : 4 800 euros ;

M. [R] [NW] : 5 600 euros ;

Mme [T] [NW] : 5 600 euros ;

Mme [BC] [NW] : 5 600 euros ;

M. [BL] [NW] : 5.600 euros ;

Mme [MK] [NW] : 5 600 euros ;

M. [M] [D] : 10 400 euros ;

M. [SL] [D] : 10 400 euros ;

Mme [I] [D] épouse [S] : 10 400 euros ;

Mme [B] [S] : 4 000 euros ;

condamné en outre la MAAF assurances à payer à Mme [X] [Z] au titre de son préjudice économique la somme de 16 788 euros ;

condamné la MAAF assurances à payer à Mme [C] [Z] épouse [NW] et M. [H] [Z] la somme de 2 030 euros au titre des frais de déplacement ;

condamné la MAAF assurances à payer aux demandeurs la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

débouté M. [Y] [A] et la MAAF assurances de leur demande présentée à ce titre ;

condamné la MAAF assurances aux entiers dépens ;

- statuant à nouveau : dire et juger que M. [Z], qui avait conservé la qualité de conducteur, a commis des fautes de nature à exclure tout droit à indemnisation et débouter en conséquence les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes ;

- à titre subsidiaire :

débouter M. [M] [D], M. [SL] [D] et Mme [B] [S] de leurs demandes d'indemnisation au titre d'un préjudice d'affection ;

réduire à de plus justes proportions l'indemnisation des préjudices d'affection de Mme [X] [Z], Mme [C] [Z], [R], [T], [BC], [BL] et [MK] [NW], MM. [H] et [G] [Z], [KG], [E], [W], [P] et [LS] [Z] ;

débouter Mme [X] [Z] de sa demande d'indemnisation d'un préjudice économique ;

débouter les demandeurs du surplus de leurs demandes ;

condamner les consorts [Z] au paiement d'une somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Les intimés ont constitué avocat le 17 juin 2021 mais n'ont pas conclu.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La caisse primaire d'assurance-maladie de la Drôme et la MSA, intimées citées à personnes habilitées, n'ont pas constitué avocat ; le présent arrêt est réputé contradictoire.

1. Sur le droit à indemnisation

Moyens des parties

La SA MAAF et M. [A] soutiennent que M. [F] [Z] a conservé sa qualité de conducteur, excluant toute application de l'article 3 de la loi du 5 juillet 1985. Ils estiment que M. [Z] a commis plusieurs fautes de nature à exclure toute droit à indemnisation en circulant à bord d'un véhicule présentant des défauts techniques, en ne restant pas maître de son véhicule voire a commis une erreur de conduite, en ce qu'aucune cause étrangère n'explique la présence de son véhicule immobilisé sur la voie de gauche tous feux éteints, et en sortant du véhicule sans gilet jaune.

Réponse de la cour

Selon l'article 6 de la loi du 5 juillet 1985 tendant à l'amélioration de la situation des victimes d'accidents de la circulation, le préjudice subi par un tiers du fait des dommages causés à la victime directe d'un accident de la circulation est réparé en tenant compte des limitations ou exclusions applicables à l'indemnisation de ces dommages.

En application de l'article 3 alinéa 1er de la loi du 5 juillet 1985, les victimes, hormis les conducteurs de véhicules terrestres à moteur, sont indemnisées des dommages résultant des atteintes à leur personne qu'elles ont subis, sans que puisse leur être opposée leur propre faute à l'exception de leur faute inexcusable si elle a été la cause exclusive de l'accident.

Selon l'article 4 de la loi du 5 juillet 1985, la faute commise par le conducteur du véhicule terrestre à moteur a pour effet de limiter ou d'exclure l'indemnisation des dommages qu'il a subis.

La qualité de conducteur ou de piéton de la victime ne peut changer au cours d'un accident de la circulation reconnu comme un accident unique et indivisible (Civ. 2ème, 1er juillet 2010, n° 09-67.627 ; 17 janv. 2019, n° 18-11.320 et n° 18-11.440).

Il ressort la synthèse du procès-verbal de transport et de constatations établi par les services de gendarmerie le 16 septembre 2015 que les faits se sont déroulés comme suit :

« Pour une raison indéterminée, le véhicule du défunt (A) percute les glissières de sécurité du terre-plein central au PK 176+500 sens nord sud autoroute 17 commune de [Localité 37] et s'immobilise sur la voie de gauche.

Circulant dans le même sens et sur voie de gauche, le conducteur du véhicule ([J] [A]) aperçoit au dernier moment le véhicule (A) feux éteints. Il se déporte sur la voie centrale mais percute le conducteur (A) au niveau de l'arrière droit de son véhicule. Le corps est projeté sur la voie centrale à 9,45 mètres du point de choc. »

Par suite, il est établi que des collisions successives sont intervenues dans un même laps de temps et dans un enchaînement continu de sorte qu'elles constituent un seul et même accident. Il en résulte que M. [F] [Z] a conservé sa qualité de conducteur d'un des véhicules impliqués.

Il convient donc d'exclure l'application de l'article 3 de la loi du 5 juillet 1985 et de rechercher l'existence d'une faute de sa part en application de l'article 4.

M. [N] [ND], expert judiciaire requis par les enquêteurs, a conclu comme suit :

« Je peux, sans risque de me tromper, affirmer que ce sinistre ne trouve pas son origine dans une défectuosité mécanique des trains roulants ou du groupe motopropulseur.

Le blocage extraordinaire des roues avant, l'absence totale de marque de freinage sur les roues arrières, la trajectoire d'éjection vers la gauche en fin de freinage de quatre-vingt mètres et l'intensité de l'impact m'autorisent à penser que cette voiture a été poussée par un autre véhicule sur au moins sa distance de freinage avant qu'elle ne se trouve déséquilibrée et propulsée, sans quasiment de perte d'énergie initiale, dans le rail de sécurité du terre-plein central.

L'environnement nocturne et le manque d'intensité d'éclairage à l'arrière de la voiture favorise cette hypothèse.

Cependant, l'état de la carosserie fortement dégradée ne me permet pas d'identifier des traces d'appui. »

Il ressort du procès-verbal de contrôle technique que le véhicule conduit par [F] [Z] présentait plusieurs défauts justifiant une contre-visite avant le 30 septembre 2015, et notamment que le pare-brise était en mauvais état, que les feux de croisement étaient réglés trop bas, que les amortisseurs avant étaient mal fixés.

Les conclusions de l'expert ne permettent pas de déterminer de manière certaine l'origine de l'accident qui a conduit à l'immobilisation du véhicule de [F] [Z].

Il n'est pas non plus certain qu'un défaut de maîtrise de la part de [F] [Z] soit à l'origine de l'accident.

Cependant, même si [F] [Z] avait été poussé par un autre véhicule, l'état de son propre véhicule tel qu'établi lors du contrôle technique permet de penser que la mauvaise qualité de l'éclairage peut être à l'origine de l'accident.

Surtout, en quittant son véhicule, accidenté sur l'autoroute, de nuit, sans avoir actionné les feux d'avertissement et sans se munir d'un gilet jaune réfléchissant pour se positionner sur le côté droit de son véhicule, c'est à dire dans une position le plaçant sur la trajectoire des véhicules arrivant derrière lui, [F] [Z] a commis plusieurs fautes ayant conduit directement et certainement à la réalisation du dommage.

Par suite, son droit à indemnisation doit être limité. La concomitance de ses fautes a concouru à la réalisation du dommage dans une large proportion, de telle sorte qu'il convient d'évaluer le droit à indemnisation de [F] [Z], et par suite de ses ayants-droits, à 20 % de leurs préjudices.

Le jugement déféré sera donc infirmé en ce qu'il a dit que les fautes commises par [F] [Z] réduisent le droit à indemnisation des tiers victimes de 20 % et dit en conséquence que le droit à indemnisation des tiers victimes est limité à 80 % du montant des préjudices subis.

2. Sur l'évaluation des préjudices

a) sur le préjudice d'affection

- sur le préjudice des consorts [Z] et [NW]

Moyens des parties

La SA MAAF et M. [Y] [A] demandent la réduction des indemnisations de la veuve, des enfants et des frères et soeurs de [F] [Z] à des proportions conformes à la jurisprudence habituelle.

Réponse de la cour

La juridiction de première instance a évalué le préjudice d'affection des consorts [Z] et [NW] comme suit, après application de la réduction de leur droit à indemnisation de 20 % :

- Mme [X] [U] veuve [Z] (veuve) : 20 000 euros ;

- Mme [C] [Z] épouse [NW] (fille) : 10 400 euros ;

- M. [H] [Z] (fils vivant au domicile de ses parents) : 12 000 euros ;

- M. [G] [Z] (fils) : 10 400 euros ;

- M. [KG] [Z] (frère) : 4 800 euros ;

- Mme [E] [Z] (soeur) : 4 800 euros ;

- M. [W] [Z] (frère) : 4 800 euros ;

- Mme [P] [Z] (soeur) : 4 800 euros ;

- Mme [LS] [Z] (soeur) : 4 800 euros ;

- M. [R] [NW] (petit-fils) : 5 600 euros ;

- Mme [T] [NW] (petite-fille) : 5 600 euros ;

- Mme [BC] [NW] (petite-fille) : 5 600 euros ;

- M. [BL] [NW] (petit-fils) : 5 600 euros ;

- Mme [MK] [NW] (petite-fille) : 5 600 euros.

Cette évaluation correspond à une réparation intégrale des préjudices subis par chacun des membres de la famille de [F] [Z].

Néanmoins, en regard de la réduction du droit à indemnisation de la victime et de ses ayants droits de 80 %, il convient d'infirmer le jugement déféré et de condamner la SA MAAF à verser aux ayants droits de [F] [Z] les sommes suivantes :

- Mme [X] [U] veuve [Z] (veuve) : 5 000 euros ;

- Mme [C] [Z] épouse [NW] (fille) : 2 600 euros ;

- M. [H] [Z] (fils vivant au domicile de ses parents) : 3 000 euros ;

- M. [G] [Z] (fils) : 2 600 euros ;

- M. [KG] [Z] (frère) : 1 200 euros ;

- Mme [E] [Z] (soeur) : 1 200 euros ;

- M. [W] [Z] (frère) : 1 200 euros ;

- Mme [P] [Z] (soeur) : 1 200 euros ;

- Mme [LS] [Z] (soeur) : 1 200 euros ;

- M. [R] [NW] (petit-fils) : 1 200 euros ;

- Mme [T] [NW] (petite-fille) : 1 200 euros ;

- Mme [BC] [NW] (petite-fille) : 1 200 euros ;

- M. [BL] [NW] (petit-fils) : 1 200 euros ;

- Mme [MK] [NW] (petite-fille) : 1 200 euros.

- sur le préjudice de M. [M] [D], M. [SL] [D], Mme [I] [S] et sa fille [B] [S]

Moyens des parties

La SA MAAF et M. [Y] [A] contestent l'existence d'un préjudice d'affection pour M. [M] [D], M. [SL] [D], Mme [I] [S] et sa fille [B] [S] au motif que la [L] qui les unissaient est un simple 'contrat moral' et que les seules photos versées aux débats ne permettent pas d'identifier un lien effectif d'affection au jour du décès.

Réponse de la cour

Le préjudice d' affection doit être établi par tout moyen de preuve dès lors que l'on s'éloigne de la parentèle directe et, surtout, si aucun lien de parenté n'unit le demandeur en indemnisation et la victime directe.

En l'espèce, la juridiction de première instance a considéré que M. [M] [D], M. [SL] [D], Mme [I] [S] et sa fille [B] [S], adoptés par [L] par [F] [Z], justifient suffisamment par la production de photographies qu'un lien de proximité les unissaient à ce dernier.

Les appelants ne rapportent pas la preuve du contraire.

La juridiction a évalué le préjudice subi par les consorts [D]-[S] dans des proportions qui correspondent à la réparation intégrale de leur préjudice.

Néanmoins, en regard de la réduction du droit à indemnisation de la victime et de ses ayants droits de 80 %, il convient d'infirmer le jugement déféré et de condamner la SA MAAF à verser aux ayants droits de [F] [Z] les sommes suivantes :

- M. [M] [D] : 2 600 euros ;

- M. [SL] [D] : 2 600 euros ;

- Mme [I] [S] : 2 600 euros ;

- Mme [B] [S] : 1 000 euros.

b) sur le préjudice économique de Mme [X] [U] veuve [Z]

Moyens des parties

La SA MAAF et M. [Y] [A] soutiennent que Mme [Z] ne subit aucun préjudice économique dès lors qu'il n'y a pas lieu de tenir compte d'un enfant à charge dans la calcul de la part d'autoconsommation et que Mme [Z] a perçu une pension de réversion.

Réponse de la cour

En cas de décès de la victime directe, le préjudice patrimonial subi par l'ensemble de la famille proche du défunt doit être évalué en prenant en compte comme élément de référence le revenu annuel du foyer avant le dommage ayant entraîné le décès de la victime directe en tenant compte de la part de consommation personnelle de celle-ci, et des revenus que continue à percevoir le conjoint, le partenaire d'un pacte civil de solidarité ou le concubin survivant (Civ. 2ème, 7 févr. 2019, n° 18-13.354).

La perte de revenus subie par l'ayant droit d'une victime du fait du décès de celle-ci doit être évaluée au jour de la décision qui le fixe en tenant compte de tous les éléments connus à cette date (Civ. 2ème, 20 novembre 2014, n° 13-25.564).

Le revenu annuel du foyer de M. [F] [Z] et de Mme [X] [Z] était constitué des seuls revenus de M. [F] [Z] pour un montant de 10 720 euros selon l'avis d'imposition 2014 mentionné par le jugement déféré. Cette décision mentionne que le couple avait un enfant mineur à charge, ce qui n'est plus le cas à ce jour.

En déduisant la part d'autoconsommation du défunt qui peut être évaluée à 40 % pour un couple sans enfant, le revenu annuel qu'aurait dû percevoir Mme [X] [Z] est de 6 432 euros.

Selon le jugement déféré, Mme [X] [Z] bénéficie de revenus constitués par une pension de réversion d'un montant annuel de 6 800 euros.

Elle ne subit donc aucun préjudice économique du fait du décès de son conjoint.

Le jugement déféré sera infirmé de ce chef.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi :

Infirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour ;

Statuant à nouveau et y ajoutant :

Dit que les fautes commises par M. [F] [Z] réduisent le droit à indemnisation des tiers victimes de 80 % ;

Dit en conséquence que le droit à indemnisation des tiers victimes est limité à 20 % du montant des préjudices subis ;

Déboute Mme [X] [U] veuve [Z] de sa demande d'indemnisation d'un préjudice économique ;

Condamne la SA MAAF à verser aux ayants droits de [F] [Z] les sommes suivantes à titre d'indemnisation de leur préjudice d'affection :

- Mme [X] [U] veuve [Z] (veuve) : 5 000 euros ;

- Mme [C] [Z] épouse [NW] (fille) : 2 600 euros ;

- M. [H] [Z] (fils vivant au domicile de ses parents) : 3 000 euros ;

- M. [G] [Z] (fils) : 2 600 euros ;

- M. [KG] [Z] (frère) : 1 200 euros ;

- Mme [E] [Z] (soeur) : 1 200 euros ;

- M. [W] [Z] (frère) : 1 200 euros ;

- Mme [P] [Z] (soeur) : 1 200 euros ;

- Mme [LS] [Z] (soeur) : 1 200 euros ;

- M. [R] [NW] (petit-fils) : 1 200 euros ;

- Mme [T] [NW] (petite-fille) : 1 200 euros ;

- Mme [BC] [NW] (petite-fille) : 1 200 euros ;

- M. [BL] [NW] (petit-fils) : 1 200 euros ;

- Mme [MK] [NW] (petite-fille) : 1 200 euros ;

- M. [M] [D] : 2 600 euros ;

- M. [SL] [D] : 2 600 euros ;

- Mme [I] [S] : 2 600 euros ;

- Mme [B] [S] : 1 000 euros ;

Condamne in solidum M. [Y] [A] et la SA MAAF aux dépens de la procédure d'appel.

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Arrêt signé par Mme Emmanuèle Cardona, présidente de la deuxième chambre civile et par Mme Caroline Bertolo, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIERE                                        LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21/01272
Date de la décision : 28/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 09/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-28;21.01272 ?
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