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06/05/2024 | FRANCE | N°23/02239

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Ch.secu-fiva-cdas, 06 mai 2024, 23/02239


C6



N° RG 23/02239



N° Portalis DBVM-V-B7H-L3QK



N° Minute :







































































Notifié le :



Copie exécutoire délivrée le :







AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



CHAMBRE SOCIALE - PROTECTION S

OCIALE

ARRÊT DU LUNDI 06 MAI 2024

Ch.secu-fiva-cdas





Appel d'une décision (N° RG 23/00075)

rendue par le pôle social du tribunal judiciaire de Grenoble

en date du 31 mai 2023

suivant déclaration d'appel du 14 juin 2023



APPELANTS :



Mme [V] [P]

[Adresse 2]

[Localité 4]



M. [Y] [C]

[Adresse 6]

[Localité 4]



représentés par Me Aurélie LEGEAY...

C6

N° RG 23/02239

N° Portalis DBVM-V-B7H-L3QK

N° Minute :

Notifié le :

Copie exécutoire délivrée le :

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE SOCIALE - PROTECTION SOCIALE

ARRÊT DU LUNDI 06 MAI 2024

Ch.secu-fiva-cdas

Appel d'une décision (N° RG 23/00075)

rendue par le pôle social du tribunal judiciaire de Grenoble

en date du 31 mai 2023

suivant déclaration d'appel du 14 juin 2023

APPELANTS :

Mme [V] [P]

[Adresse 2]

[Localité 4]

M. [Y] [C]

[Adresse 6]

[Localité 4]

représentés par Me Aurélie LEGEAY, avocat au barreau de GRENOBLE

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2024-001796 du 15/04/2024 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de GRENOBLE)

INTIMEE :

LA MAISON DEPARTEMENTALE DES PERSONNES HANDICAPEES ' MDPH, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 5]

[Localité 3]

représentée par Me Delphine DUMOULIN de la SELARL GALLIZIA DUMOULIN ALVINERIE, avocat au barreau de GRENOBLE

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DÉLIBÉRÉ :

M. Jean-Pierre DELAVENAY, Président,

M. Pascal VERGUCHT, Conseiller,

Mme Elsa WEIL, Conseiller,

DÉBATS :

A l'audience publique du 1er février 2024

M. Pascal VERGUCHT, Conseiller en charge du rapport, a entendu les représentants des parties en leurs observations, assisté de M. Fabien OEUVRAY, Greffier, et en présence de Mme Laurie ONDELE, Greffier stagiaire, conformément aux dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, les parties ne s'y étant pas opposées ;

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 06 mai 2024, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.

L'arrêt a été rendu le 06 mai 2024.

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Le 29 mars 2022, Mme [V] [P] et M. [Y] [C], parents de [T] [C], né le 31'octobre 2017, ont saisi la Maison Départementale des Personnes Handicapées (MDPH) de l'Isère aux fins d'obtention de l'Allocation d'Education de l'Enfant Handicapé (AEEH), de l'un de ses compléments : la Prestation de Compensation du Handicap (PCH) et de l'AESH (Accompagnant d'Elèves en situation de Handicap).

Ces demandes ont fait l'objet de trois refus par la Commission des Droits et de l'Autonomie des Personnes Handicapées (Cdaph) de l'Isère suivant décisions du 14 juin 2022.

Suite au recours administratif préalable obligatoire déposé par les parents, par deux décisions du 4 octobre 2022, notifiées le lendemain, la Cdaph a maintenu son refus concernant l'AEEH et la PCH et a fait droit, en revanche, à une AESH pour la période du 4 octobre 2022 au 31 août 2023 ainsi qu'à une demande d'orientation de l'enfant vers un Service d'Education Spéciale et de Soins à Domicile (SESSAD) pour la période du 4 octobre 2022 au 30 septembre 2023 afin de permettre une évaluation globale de la situation de l'enfant et de ses besoins.

Le 8 novembre 2022, Mme [P] et M. [C], agissant en leur qualité de représentants légaux de leur fils mineur, ont saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Grenoble d'un recours à l'encontre des décisions de la Cdaph leur refusant le bénéfice de l'AEEH et la PCH.

Après avoir entendu l'enfant et examiné les pièces, le docteur [L] désigné comme médecin-consultant, a finalement retenu un taux d'incapacité compris entre 50 % et 79'% correspondant à des troubles importants entraînant une gêne notable dans la vie sociale et la nécessité d'une prise en charge d'[T] par des soins adaptés.

Après avoir pris connaissance du rapport du docteur [L], le pôle social du tribunal judiciaire de Grenoble a, par jugement du 31 mai 2023 :

- déclaré le recours de Mme [P] et M. [C] recevable et partiellement bien fondé,

- accordé à Mme [P] et M. [C] le bénéfice de l'AEEH pour leur fils [T] pendant une période de 2 ans, soit du 1er avril 2022 au 31 mars 2024, aux fins de permettre à la famille d'initier les soins avant leur prise en charge effective par le SESSAD,

- débouté Mme [P] et M. [C] du surplus de leurs demandes,

- débouté Mme [P] et M. [C] de leur demande au titre des frais irrépétibles,

- condamné la MDPH de l'Isère aux dépens de la procédure.

Le 14 juin 2023, Mme [P] et M. [C] ont interjeté appel de cette décision en ce qu'ils ont été déboutés de leurs demandes de complément d'AEEH et de Prestation de Compensation du Handicap pour leur fils [T] et de leur demande au titre des frais irrépétibles.

EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Au terme de leurs conclusions n°3, transmises par RPVA le 23 janvier 2024 et reprises oralement à l'audience, Mme [V] [P] et M. [Y] [C], agissant en leur qualité de représentants légaux de leur fils mineur, demandent à la cour de :

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il les a déboutés du surplus de leurs demandes,

Et, statuant à nouveau,

- juger qu'ils sont fondés à percevoir le complément 4 d'AEEH pour leur fils [T] depuis le 1er'avril 2022,

A titre subsidiaire,

- juger qu'ils sont fondés à percevoir le complément 3 d'AEEH pour leur fils [T] depuis le 1er'avril 2022,

A titre très subsidiaire,

- juger qu'ils sont fondés à percevoir le complément 2 d'AEEH pour leur fils [T] depuis le'1er'avril 2022,

- juger qu'ils sont fondés à percevoir la PCH pour leur fils [T] depuis le 1er avril 2022,

- condamner la MDPH à leur payer la somme de 1.500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la MDPH de l'Isère aux entiers dépens.

Mme [V] [P] et M. [Y] [C] exposent que leur enfant [T] souffre de troubles graves entraînant une entrave majeure dans sa vie quotidienne avec une atteinte de son autonomie individuelle.

Concernant leur demande de complément d'AEEH, ils soutiennent qu'ils ne peuvent pas travailler étant contraints d'assister leur fils dans tous ses actes de la vie quotidienne jusqu'aux repas et être impactés eux-mêmes par les troubles du sommeil d'[T]. Ils expliquent que l'enfant doit porter des couches ce qui représente des dépenses supplémentaires à hauteur de 60 euros et que l'intervention hebdomadaire d'une psychomotricienne, à raison de 40 séances au total, engendre un coût, selon devis, de 1 800 euros.

Concernant leur demande de Prestation de Compensation du Handicap, ils font valoir d'une part qu'ils doivent bénéficier de l'AEEH et de son complément et que d'autre part, leur enfant [T] remplit parfaitement les critères prévus par l'annexe 2-5 du code de l'action sociale et des familles à savoir présenter une difficulté absolue pour la réalisation d'une activité ou une difficulté grave pour la réalisation d'au moins deux activités listées.

Au terme de ses conclusions notifiées par RPVA le 17 janvier 2024 et reprises oralement à l'audience, la MDPH de l'Isère demande à la cour de :

- confirmer la décision du pôle social du 31 mai 2023 dans toutes ses dispositions,

- débouter Mme [P], M. [C] de toutes leurs demandes.

La MDPH de l'Isère soutient que les parents d'[T] ne peuvent prétendre ni à un complément d'AEEH ni à la Prestation de Compensation du Handicap faute de remplir les conditions requises.

Elle expose que, dans le cadre de la demande initiale, le dossier ne comportait aucun diagnostic, aucun bilan, que l'enfant ne bénéficiait d'aucun soin et qu'ultérieurement, il lui a été transmis un bilan neurologique du docteur [R] du 31 mai 2022 faisant état d'un retard de développement global avec une opposition certaine, un retard de langage oral (petites phrases courtes) et une marche digitigrade.

Concernant le complément d'AEEH, elle affirme qu'il n'apparaît pas nécessaire pour les parents de réduire leur temps de travail, l'enfant étant scolarisé la journée. Elle ajoute qu'aucun justificatif de frais supplémentaire effectivement exposés à la date du recours administratif préalable obligatoire n'a été joint au dossier.

En l'absence de droit au complément de l'allocation, elle en conclut qu'[T] est inéligible à la Prestation de Compensation du Handicap.

Pour le surplus de l'exposé des moyens des parties au soutien de leurs prétentions, il est renvoyé à leurs conclusions visées ci-dessus par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIVATION

En cause d'appel, Mme [P] et M. [C], parents de [T] [C], né le 31'octobre 2017, contestent le jugement déféré en ce qu'il a maintenu les refus opposés par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées de l'Isère par décisions des 14 juin 2022 et 4 octobre 2022 concernant le complément de l'AEEH et la prestation de compensation du handicap.

L'AEEH leur ayant été accordée du 1er avril 2022 au 31'mars 2024, en première instance, après consultation médicale du docteur [L] retenant un taux d'incapacité compris entre 50 % et 79'% correspondant à des troubles importants entraînant une gêne notable dans la vie sociale et la nécessité d'une prise en charge par des soins adaptés, ce point n'est plus contesté.

Pour rappel, l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé (AEEH) est une aide financière versée aux parents d'un enfant de moins de 20 ans se trouvant en situation de handicap. Dans certains cas, elle peut être complétée par d'autres allocations.

La demande d'allocation d'éducation de l'enfant handicapé, de son complément et de la majoration mentionnés aux articles L. 541-1 et L. 541-4, accompagnée de toutes les pièces justificatives utiles à l'appréciation des droits de l'intéressé, est adressée à la maison départementale des personnes handicapées compétente dans les conditions prévues à l'article L. 146-3 du code de l'action sociale et des familles.

Le droit à l'AEEH et à son complément d'allocation est défini aux articles L. 541-1 et suivants du code de la sécurité sociale et aux articles R. 541-1 du même code.

Il résulte de l'application combinée de ces textes que toute personne qui assume la charge d'un enfant handicapé a droit à une allocation d'éducation de l'enfant handicapé, si l'incapacité permanente de l'enfant, apprécié selon le guide barème pour l'évaluation des déficiences et incapacités des personnes handicapées figurant à l'annexe 2-4 du code de l'action sociale et des familles, est au moins égale à un taux de 80 %.

Un complément d'allocation est accordé pour l'enfant atteint d'un handicap dont la nature ou la gravité exige des dépenses particulièrement coûteuses ou nécessite le recours fréquent à l'aide d'une tierce personne. Son montant varie suivant l'importance des dépenses supplémentaires engagées ou la permanence de l'aide nécessaire.

La même allocation et, le cas échéant, son complément peuvent être alloués, si l'incapacité permanente de l'enfant, sans atteindre le pourcentage mentionné au premier alinéa de l'article L. 541-1 précité (taux de 80 %) reste néanmoins égale ou supérieure à un minimum (50 %), dans le cas où l'enfant fréquente un établissement adapté mentionné au 2° ou au 12° du I de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles ou dans le cas où l'état de l'enfant exige le recours à un dispositif adapté ou d'accompagnement au sens de l'article L. 351-1 du code de l'éducation ou à des soins dans le cadre des mesures préconisées par la commission mentionnée à l'article L. 146-9 du code de l'action sociale et des familles.

L'allocation d'éducation de l'enfant handicapé n'est pas due lorsque l'enfant est placé en internat avec prise en charge intégrale des frais de séjour par l'assurance maladie, l'Etat ou l'aide sociale, sauf pour les périodes de congés ou de suspension de la prise en charge.

Concernant plus précisément la détermination du montant du complément d'AEEH, l'article R. 541-2 du code de la sécurité sociale, dans sa version en vigueur depuis le 20 décembre 2005, prévoit que l'enfant handicapé est classé, par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées, au moyen d'un guide d'évaluation défini par arrêté, dans une des six catégories prévues ci-dessous. L'importance du recours à une tierce personne prévu à l'article L. 541-1 est appréciée par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées au regard de la nature ou de la gravité du handicap de l'enfant en prenant en compte, sur justificatifs produits par les intéressés, la réduction d'activité professionnelle d'un ou des parents ou sa cessation ou la renonciation à exercer une telle activité et la durée du recours à une tierce personne rémunérée :

1° Est classé dans la 1ère catégorie l'enfant dont le handicap entraîne, par sa nature ou sa gravité, des dépenses égales ou supérieures à un montant fixé par arrêté conjoint des ministres chargés de la sécurité sociale, du budget et de l'agriculture ;

2° Est classé dans la 2ème catégorie l'enfant dont le handicap contraint l'un des parents à exercer une activité professionnelle à temps partiel réduite d'au moins 20 % par rapport à une activité à temps plein ou exige le recours à une tierce personne rémunérée pendant une durée au moins équivalente à huit heures par semaine ou entraîne des dépenses égales ou supérieures à un montant fixé par arrêté conjoint des ministres chargés de la sécurité sociale, du budget et de l'agriculture ;

3° Est classé dans la 3ème catégorie l'enfant dont le handicap, soit :

a) Contraint l'un des parents à exercer une activité professionnelle à temps partiel réduite d'au moins 50'% par rapport à une activité à temps plein ou l'oblige à recourir à une tierce personne rémunérée pendant une durée au moins équivalente à vingt heures par semaine ;

b) Contraint l'un des parents à exercer une activité professionnelle à temps partiel réduite d'au moins 20'% par rapport à une activité à temps plein ou exige le recours à une tierce personne rémunérée pendant une durée au moins équivalente à huit heures par semaine et entraîne d'autres dépenses égales ou supérieures à un montant fixé par arrêté conjoint des ministres chargés de la sécurité sociale, du budget et de l'agriculture ;

c) Entraîne, par sa nature ou sa gravité, des dépenses égales ou supérieures à un montant fixé par arrêté conjoint des ministres chargés de la sécurité sociale, du budget et de l'agriculture ;

4° Est classé dans la 4ème catégorie l'enfant dont le handicap, soit :

a) Contraint l'un des parents à n'exercer aucune activité professionnelle ou exige le recours à une tierce personne rémunérée à temps plein ;

b) D'une part, contraint l'un des parents à exercer une activité professionnelle à temps partiel réduite d'au moins 50 % par rapport à une activité à temps plein ou exige le recours à une tierce personne rémunérée pendant une durée au moins équivalente à vingt heures par semaine et, d'autre part, entraîne des dépenses égales ou supérieures à un montant fixé par arrêté conjoint des ministres chargés de la sécurité sociale, du budget et de l'agriculture ;

c) D'une part, contraint l'un des parents à exercer une activité professionnelle à temps partiel réduite d'au moins 20 % par rapport à une activité à temps plein ou exige le recours à une tierce personne rémunérée pendant une durée au moins équivalente à huit heures par semaine et, d'autre part, entraîne des dépenses égales ou supérieures à un montant fixé par arrêté conjoint des ministres chargés de la sécurité sociale, du budget et de l'agriculture ;

d) Entraîne, par sa nature ou sa gravité, des dépenses égales ou supérieures à un montant fixé par arrêté conjoint des ministres chargés de la sécurité sociale, du budget et de l'agriculture ;

5° Est classé dans la 5ème catégorie l'enfant dont le handicap contraint l'un des parents à n'exercer aucune activité professionnelle ou à recourir à une tierce personne rémunérée à temps plein et entraîne des dépenses égales ou supérieures à un montant fixé par arrêté conjoint des ministres chargés de la sécurité sociale, du budget et de l'agriculture ;

6° Est classé en 6ème catégorie l'enfant dont le handicap, d'une part, contraint l'un des parents à n'exercer aucune activité professionnelle ou exige le recours à une tierce personne rémunérée à temps plein et, d'autre part, dont l'état impose des contraintes permanentes de surveillance et de soins à la charge de la famille ; en cas notamment de prise en charge de l'enfant en externat ou en semi-internat par un établissement d'éducation spéciale, la permanence des contraintes de surveillance et de soins à la charge de la famille est définie par arrêté, en tenant compte des sujétions qui pèsent sur la famille en dehors des heures passées par l'enfant en établissement.

Pour l'application du présent article, l'activité à temps plein doit être entendue comme l'activité exercée conformément à la durée légale ou à la durée équivalente du travail.

Au soutien de leur demande d'attribution, à compter du 1er avril 2022, du complément de l'AEEH (catégorie 2, 3 ou 4), Mme [P] et M.[C] prétendent que, compte tenu des troubles graves dont souffre [T], impliquant une atteinte de son autonomie individuelle, ils ne peuvent pas travailler car ils doivent l'assister dans tous ses actes de la vie quotidienne jusqu'aux repas et se trouvent aussi impactés sur leur propre sommeil en raison des difficultés d'endormissement de leur fils.

Ils font valoir en outre des dépenses supplémentaires par rapport à un enfant de l'âge d'[T] en ce qui concerne l'achat de couches pour un coût mensuel de 60 euros et l'intervention hebdomadaire d'une psychomotricienne (40 séances au total) représentant un coût, selon devis, de 1 800 euros.

Toutefois, pour apprécier le bien-fondé de la demande des parents d'[T] à un complément d'AEEH, il est nécessaire de se placer uniquement à la date du dépôt de la demande d'AEEH soit le 29 mars 2022, examiner la situation et les éléments contemporains de l'instruction de cette demande transmis à la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées.

Toutes les autres pièces postérieures à ce dépôt ou au recours administratif préalable obligatoire seront par conséquent écartées.

D'après le certificat médical du docteur [Z] daté du 28 février 2022 (pièce appelants n°12), l'enfant [T] présente':

- un retard de développement psychomoteur global d'étiologie pour l'instant non déterminée avec un retard de langage oral (« Il parle un peu en utilisant des mots isolés et parfois en associant des mots »), des difficultés comportementales avec une intolérance à la frustration, certaines stéréotypies.

- sur le plan moteur, une marche sur la pointe des pieds dite digitigrade,

- sur le plan de la vie quotidienne, un sommeil compliqué avec un coucher entre 21h et 23h, [T] se réveillant le matin à 7h30 en semaine ou entre 10h et 12h le week-end. Durant la nuit, il peut exister des réveils de plusieurs heures.

- sur le plan alimentaire, l'alimentation est toujours extrêmement difficile, les parents doivent forcer pour qu'[T] accepte de manger.

Ces constats quant à un retard de développement global (langage oral, marche digitigrade notamment) sont confirmés par le docteur [R], dans son certificat médical du 31 mai 2022 (pièce appelants n°14) puisqu'il parle d'un petit garçon, alors âgé de 4 ans, en moyenne section de maternelle, qui « nécessitera une AVS à l'école, des adaptations et probablement quand même une prise en charge pluridisciplinaire (éducative, orthophonique, psychomotricité, ergothérapie) de type SESSAD ».

Par décision du 4 octobre 2022, la Cdaph a d'ailleurs accordé la demande d'AESH pour la période du 4 octobre 2022 au 31 août 2023 et la demande d'orientation de l'enfant vers un Service d'Education Spéciale et de Soins à Domicile (SESSAD) pour la période du 4 octobre 2022 au 30 septembre 2023.

Lors de la demande initiale d'AEEH, de son complément et de la PCH, l'enfant [T] était donc scolarisé en école maternelle la journée, sans faire l'objet d'une prise en charge particulière ou de soins. En outre, comme le souligne la MDPH, d'après le certificat médical du 2 mars 2022 joint au formulaire, il est indiqué que l'enfant peut manger et boire seul, donc sans difficulté ni aide.

Dès lors, ni la situation de handicap, ni la gravité des troubles de leur enfant, y compris ceux liés à l'endormissement, ne peuvent expliquer, comme Mme [P] et M. [C] l'affirment, leur impossibilité d'exercer une activité professionnelle, exigée pour un complément d'AEEH de 4ème catégorie.

Par ailleurs, conformément aux dispositions de l'article R. 541-2 du code de la sécurité sociale précité, pour prétendre à un complément d'AEEH de 2ème ou 3ème catégorie, il faut que l'un des parents soit contraint d'exercer une activité professionnelle à temps partiel réduite respectivement d'au moins 20'% ou 50 % par rapport à une activité à temps plein, ce qui n'est pas le cas non plus en l'espèce.

Concernant les dépenses supplémentaires dont se prévalent les parents d'[T] pour les couches, du fait d'une propreté non acquise, elles ne peuvent être prises en compte faute d'avoir été transmises à la commission lors du dépôt de la demande initiale tandis que les dépenses relatives à l'intervention d'une psychomotricienne ne peuvent être acceptées au motif que le devis a été établi le 20 juin 2023.

Mme [P] et M. [C] ne peuvent arguer au surplus du fait que la MDPH leur a attribué, par trois décisions du 4 octobre 2023 (pièce appelants n°24) le complément d'AEEH 2ème catégorie pour la période du 1er août 2023 au 31 juillet 2028 ainsi que les cartes Carte Mobilité Inclusion mentions Priorité et Stationnement, pour en déduire que la même position doit être adoptée, de manière rétroactive, au 1er avril 2022 puisque ces décisions reposent sur de nouveaux éléments non contemporains de la première instruction.

Les conditions exigées pour prétendre à un complément d'AEEH n'étant pas remplies à la date du dépôt de la demande, Mme [P] et M. [C] seront ainsi déboutés de leur prétention formulée à ce titre par voie de confirmation.

Enfin concernant la Prestation de Compensation du Handicap, il est de principe, pour les jeunes de moins de 20 ans, que ces derniers ne peuvent y prétendre que sous réserve de satisfaire trois conditions cumulatives : bénéficier de l'AEEH et au moins l'un des compléments et enfin rencontrer, au moins, soit une difficulté absolue pour au moins 1 des 20 activités du référentiel d'accès à la PCH soit une difficulté grave pour au moins 2 des 20 activités du même référentiel (activité réalisée difficilement et avec un résultat altéré).

Or, en l'espèce, l'enfant [T] a, certes, été reconnu bénéficiaire de l'AEEH suite à la décision rendue par le tribunal judiciaire de Grenoble le 31 mai 2023, non contestée sur ce point par les parties, mais le complément d'AEEH, en revanche, ne lui a pas été accordé.

Dans ces conditions, faute de remplir les conditions pour y avoir droit, les appelants seront également déboutés de leur demande relative à la Prestation de Compensation du Handicap pour leur fils [T].

Le jugement déféré sera dès lors également confirmé de ce chef.

Sur les mesures accessoires,

En application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile, les dépens seront supportés par Mme [P] et M. [C] qui succombent et seront donc déboutés de leur demande au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme le jugement RG n° 23/00075 rendu le 31 mai 2023 par le pôle social du tribunal judiciaire de Grenoble.

Y ajoutant,

Déboute Mme [V] [P] et M. [Y] [C] de toutes leurs demandes.

Condamne Mme [V] [P] et M. [Y] [C] aux dépens d'appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par M. Jean-Pierre Delavenay, président et par Mme Chrystel Rohrer, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Ch.secu-fiva-cdas
Numéro d'arrêt : 23/02239
Date de la décision : 06/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 12/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-06;23.02239 ?
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