C5
N° RG 22/02882
N° Portalis DBVM-V-B7G-LPBQ
N° Minute :
Notifié le :
Copie exécutoire délivrée le :
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE SOCIALE - PROTECTION SOCIALE
ARRÊT DU JEUDI 21 MARS 2024
Appel d'une décision (N° RG 21/00094)
rendue par le Pole social du TJ de GAP
en date du 29 juin 2022
suivant déclaration d'appel du 27 juillet 2022
APPELANTE :
Madame [R] [T]
[Adresse 4]
[Localité 2]
représentée par Me Jean-françois PHILIP, avocat au barreau de HAUTES-ALPES
INTIMEE :
Organisme CPAM DES HAUTES ALPES
[Adresse 3]
[Localité 1]
comparante en la personne de Mme [H] [G] régulièrement munie d'un pouvoir
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DES DEBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
M. Jean-Pierre DELAVENAY, Président,
M. Pascal VERGUCHT, Conseiller,
Mme Elsa WEIL, Conseiller,
Assistés lors des débats de Mme Chrystel ROHRER, Greffier,
en présence de Mme [I] [S], Juriste assistant,
DÉBATS :
A l'audience publique du 23 janvier 2024,
M. Pascal VERGUCHT, Conseiller chargé du rapport, M. Jean-Pierre DELAVENAY, Président et Mme Elsa WEIL, Conseiller ont entendu les représentants des parties en leurs dépôts de conclusions et observations.
Et l'affaire a été mise en délibéré à la date de ce jour à laquelle l'arrêt a été rendu.
EXPOSÉ DU LITIGE
La CPAM des Hautes Alpes a notifié à Mme [R] [T], par courrier du 15 février 2021, un indu de 19.815,25 euros au titre d'indemnités journalières versées du 5 octobre 2018, en vertu d'un arrêt maladie du 3 avril 2018, jusqu'au 26 janvier 2021, alors que l'assurée a indiqué par courrier du 31 janvier 2021 que le décès de son unique employeur était intervenu le 4 octobre 2018, le contrat de travail ayant alors pris fin et aucun maintien de droit ne pouvant être octroyé au regard du bénéfice d'une pension vieillesse à titre personnel depuis le 1er août 2009.
La caisse a accusé réception, par courrier du 12 mars 2021, d'une saisine de la commission de recours amiable par courrier du 8 mars 2021, et la commission n'a pas statué.
Le Pôle social du Tribunal judiciaire de Gap, saisi d'un recours de Mme [T] contre la CPAM des Hautes Alpes, a par jugement du 29 juin 2022':
- débouté Mme [T] de ses demandes,
- condamné Mme [T] à payer la somme de 19.815,25 euros à la CPAM,
- débouté Mme [T] de sa demande de délais de paiement,
- invité Mme [T] à se rapprocher de la caisse pour demander un échéancier sur une durée supérieure à deux ans,
- condamné Mme [T] aux dépens.
Par déclaration du 27 juillet 2022, Mme [T] a relevé appel de cette décision.
Par conclusions du 26 janvier 2023 reprises oralement à l'audience devant la cour, Mme [T] demande':
- la réformation du jugement,
- qu'il soit jugé que la créance de la caisse est prescrite,
- subsidiairement le débouté de la demande de remboursement de la caisse, ou qu'il lui soit accordé les plus larges délais de remboursement de l'indu.
Selon Mme [T], la créance de la caisse devait être considérée comme prescrite en l'état de la prescription biennale prévue par l'article L. 332-1 du code de la sécurité sociale, alors que le jugement a reconnu que l'organisme a agi dans un délai de deux ans et un trimestre à compter du 5 octobre 2018, soit à l'issue du délai de deux ans.
Mme [T] fait également valoir que le décès de l'employeur ne met pas fin au contrat de travail du salarié, le décès ne dispensant pas les héritiers de procéder à un certain nombre de formalités comme la notification de la rupture et le versement des indemnités.
Mme [T] reproche enfin au tribunal de ne pas lui avoir accordé de délais de paiement au regard d'une retraite modeste et de la jurisprudence de la Cour de cassation.
Par conclusions déposées le 22 novembre 2023 et reprises oralement à l'audience devant la cour, la CPAM des hautes Alpes demande':
- la confirmation du jugement,
- le rejet des demandes de Mme [T],
- la condamnation de Mme [T] à rembourser la somme de 19.815,25 euros, majorée des intérêts de droit et de tous frais d'exécution éventuels,
- la condamnation de Mme [T] aux dépens.
La caisse rappelle qu'elle a demandé le 28 janvier 2021 à Mme [T] de justifier du nombre d'employeurs sous contrat avec elle au moment de son arrêt de travail du 3 avril 2018, et que l'assurée a attesté le 31 janvier 2021 n'avoir eu qu'un seul employeur en la personne de [Y] [V], qui est décédée le 4 octobre 2018.
Dans la mesure où Mme [T] bénéficiait d'une pension vieillesse à titre personnel depuis le 1er septembre 2009, était salariée de Mme [V] depuis le 1er septembre 2017, n'avait qu'un seul particulier employeur à la date de son arrêt du 3 avril 2018 prolongé sans discontinuité jusqu'au 30 avril 2021, la caisse a considéré que le contrat de travail avait pris fin au décès de l'employeur en vertu de l'article 13 de la Convention collective nationale des salariés de particuliers employeurs du 24 novembre 1999, soit le 4 octobre 2018, et qu'aucun maintien de droit n'était possible dès lors que Mme [T] bénéficiait de sa pension de vieillesse et n'était plus une active salariée pouvant relever encore du régime général des salariés.
Sur la question de la prescription, la caisse considère avoir notifié l'indu le 15 février 2021 dans le délai de deux ans et un trimestre à compter du paiement des indemnités journalières sans discontinuité du 5 octobre 2018 au 26 janvier 2021, en application de l'article L. 332-1 du code de la sécurité sociale.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément référé aux dernières conclusions des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.
MOTIVATION
1. - L'article L. 332-1 du code de la sécurité sociale prévoit que': «'L'action de l'assuré pour le paiement des prestations en espèces de l'assurance maladie se prescrit par deux ans, à compter du premier jour du trimestre suivant celui auquel se rapportent lesdites prestations'; (')
Cette prescription est également applicable, à compter du paiement des prestations entre les mains du bénéficiaire, à l'action intentée par un organisme payeur en recouvrement des prestations indûment payées, sauf en cas de fraude ou fausse déclaration.'».
Le délai de prescription opposable à la caisse primaire recouvrant un indu n'est donc pas de deux ans et un trimestre à compter du paiement, délai prévu pour l'action en paiement de prestations en espèces des assurés, mais de deux ans à compter du paiement des prestations, au regard du dernier alinéa de l'article L. 332-1.
Par conséquent, en l'espèce, la notification d'indu du 15 février 2021 ne pouvait pas réclamer des indemnités journalières payées avant le 15 février 2019, et les sommes réclamées au titre de la période de paiement courant du 5 octobre 2018 au 14 février 2019 sont prescrites.
2. - Les pièces produites au débat ne permettent pas de recalculer l'indu d'indemnités journalières, la CPAM justifiant de trois séries d'images de décompte faisant apparaître des indemnités journalières, pour les mêmes périodes, de 17,83, 6,01 et 1,30 euros, avec des montants de décompte récapitulatif par page qui ne sont pas systématiquement repris dans les opérations comptables figurant dans les cinq historiques synthétisant le passage en contentieux du dossier de Mme [T], l'indu réclamé ne représentant pas, en outre, la totalité des sommes figurant dans ces historiques.
Les parties n'ont pas discuté du détail de ces pièces et des sommes devant être prises en compte pour le calcul des indemnités journalières versées.
3. - Par conséquent, il convient de rouvrir les débats sur le calcul des indus d'indemnités journalières non prescrits au regard de la période retenue ci-dessus et des pièces versées au débat.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant contradictoirement et publiquement, après en avoir délibéré conformément à la loi':
Ordonne la réouverture des débats sur le calcul du montant de l'indu d'indemnités journalières entre le 15 février 2019 au 26 janvier 2021,
Convoque les parties à l'audience du mardi 25 juin 2024 à 9 h00 et dit qu'elles devront avoir communiqué contradictoirement leurs écritures et nouvelles pièces éventuelles, limitées à l'objet de la réouverture des débats, avant le 16 mai 2024.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par M. Jean-Pierre Delavenay, président et par Mme Chrystel Rohrer, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier Le président