N° RG 22/01657 - N° Portalis DBVM-V-B7G-LK4E
C6
N° Minute :
copie certifiée conforme délivrée
aux avocats le :
Copie Exécutoire délivrée
le :
aux parties (notifiée par LRAR)
aux avocats
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE DES AFFAIRES FAMILIALES
ARRET DU MARDI 12 MARS 2024
APPEL
Jugement au fond, origine juge aux affaires familiales de Grenoble, décision attaquée en date du 28 mars 2022, enregistrée sous le n° 19/01758 suivant déclaration d'appel du 22 avril 2022
APPELANTE :
Mme [H] [J]
de nationalité Française
[Adresse 12]
[Localité 10]
représentée par Me Jean damien MERMILLOD-BLONDIN de la SELARL JURISTIA - AVOCATS, avocat au barreau de GRENOBLE
INTIME :
M. [B] [T]
né le [Date naissance 6] 1938 à [Localité 17]
de nationalité Française
[Adresse 19]
[Localité 11]
représenté par Me Marie-christine HARTEMANN-DE CICCO de la SELARL HDPR AVOCAT HARTEMANN-DE CICCO PICHOUD, avocat au barreau de GRENOBLE
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DU DELIBERE :
Mme Anne BARRUOL, Présidente,
Mme Martine RIVIERE, Conseillère,
M. Philippe GREINER, Conseiller honoraire,
DEBATS :
A l'audience publique du 28 novembre 2023,M. Philippe Greiner, conseiller, chargé du rapport, assisté de Abla Amari, greffière a entendu les avocats en leurs conclusions, les parties ne s'y étant pas opposées, conformément aux dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile. Il en a été rendu compte à la cour dans son délibéré et l'arrêt a été rendu à l'audience de ce jour, après prorogation du délibéré.
EXPOSE DU LITIGE
M. [B] [T] et Mme [H] [J] se sont mariés le [Date mariage 5] 1961sans contrat de mariage préalable et ont eu un fils né le [Date naissance 1]1964 et une fille, née le [Date naissance 2]/1966, décédée le [Date décès 3]/2007.
Suite à la requête en divorce de Mme [J] du 05/11/2013 et à l'ordonnance de non-conciliation du 22/04/2014, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Grenoble a prononcé par jugement du 6 février 2017 le divorce des époux qu'il a invités à procéder au partage amiable de leurs intérêts patrimoniaux.
En l'absence de règlement amiable, M. [T], par acte du 9 mai 2019, a fait assigner Mme [J] devant le juge aux affaires familiales aux fins de partage judiciaire de leurs intérêts patrimoniaux.
Par jugement du 28 mars 2022, le juge aux affaires familiales de Grenoble a notamment :
- ordonné l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage judiciaire de la communauté ayant existé et de l'indivision existante entre les parties,
- désigné en conséquence pour y procéder Maître [O],notaire, sous la surveillance du juge commis,
- dit que le bien de [Localité 10] est un propre de M. [T],
- dit que l'actif indivis est composé :
· du profit subsistant correspondant à la construction présente sur le terrain propre de M. [T] sis à [Localité 10], à arbitrer à dire d'expert,
· de l'indemnité d'occupation due par Mme [J] 1er mai 2014 à compter du jugement définitif de divorce, sur une base à évaluer à dire d'expert,
· du produit de la vente des véhicules Seat Ibiza et Nissan Patrol, respectivement immatriculés en 2003 et 1995,
· du compte-courant d'associe du [16] sur lequel les parties s'entendent pour 60.333,21 euros,
· des soldes des comptes et avoirs bancaires et assurances-vie des ex-époux à la date du 22 avril 2014, le notaire désigné étant autorisé, à défaut d'accord entre les parties, à consulter du chef des deux époux les [V] et [X],
· des 200 parts de la SARL [21] ainsi que du compte-courant d'associé; soit 56.000 euros pour les parts sociales et 51.658,90 euros pour le compte-courant d'associé,
· des matériels (agricoles et autres) pour la somme de 10.000 euros,
- dit que le passif indivis est composé :
· de la récompense due à Mme [J] pour la somme de 80.417,43 euros,
· de la récompense due à M. [T] pour la somme de 113.575,12 euros,
- ordonné préalablement et pour y parvenir une mesure d'expertise du biende [Localité 10],
- désigné à cette fin Mme [D], demeurant [Adresse 7], [Localité 9], expert près la cour d'Appel, avec mission de :
· convoquer les parties,
· consigner leurs explications et se faire remettre tous les documents utiles,
· décrire et évaluer le bien litigieux appartenant en propre à M. [T] en distinguant la valeur du terrain et celle de la construction,
· donner la valeur locative de la partie occupée par Mme [J] et proposer un calcul à compter du jugement définitif du divorce en retenant un coefficient de précarité de 15 %,
- fixé à 2.000 euros le montant de la provision à valoir sur les frais d'expertise qui seront partagés par moitié et à verser dans le mois de de ladécision à la régie du tribunal judiciaire,
- sursis à statuer dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise sur l'évaluation de l'actif à partager,
- réservé les dépens.
Le 22 avril 2022, Mme [J] a interjeté appel du jugement en ce qui concerne les opérations de comptes, liquidation et partage, la propriété du bien situé à [Localité 10], la composition de l'actif et du passif indivis, la mesure d'expertise ainsi que les dépens.
Par conclusions notifiées le 17 octobre 2022, dans le délai de trois mois suivant la notification des premières conclusions de l'appelante, M. [T] a fait appel incident du jugement rendu le 28 mars 2022 en ce qu'il a porté à l'actif indivis le compte courant d'associés du [16] pour 60 333, 21 euros.
Par ses dernières conclusions notifiées le 16 janvier 2023, Mme [J] demande à la cour :
- d'infirmer le jugement rendu le 28 mars 2022 , en ce qu'il a dit que le bien de [Localité 10] est un propre de M. [T],
- que l'actif indivis est composé :
- du profit subsistant correspondant à la construction présente sur le terrain propre de M. [T] sis à [Localité 10], à arbitrer à dire d'expert,
- de l'indemnité d'occupation due par Mme [J] à compter du jugement définitif de divorce, sur une base à évaluer à dire d'expert,
- du produit de la vente des véhicules Seat Ibiza et Nissan Patrol immatriculés en 2003 et 1995,
- du compte courant d'associé du [16] sur lequel les parties s'entendent pour une somme de 60.333,21 euros,
- des soldes des comptes et avoirs bancaires et assurances-vie des ex-époux à la date du 22 avril 2014, le notaire désigné étant autorisé, à défaut d'accord , à consulter du chef des deux époux les [V] et [X],
- des 200 parts de la SARL [21] ainsi que du compte courant d'associé ; soit 56.000 euros pour les parts sociales et 51.658,90 euros pour le compte courant d'associé,
- des matériels (agricoles et autres), pour la somme de 10.000 euros,
- infirmer le jugement en ce qu'il a dit que le passif indivis est composé :
- de la récompense due à Mme [J] pour 80.417,43 euros,
- de la récompense due à M. [T] pour 113.575,12 euros,
- confirmer le surplus du jugement,
- statuant de nouveau,
- juger et déclarer que le terrain sur lequel est construit la maison sise à [Localité 10] est un bien commun,
- juger et déclarer que l'actif indivis est composé:
- du profit subsistant correspondant à la construction présente sise à [Localité 10], à arbitrer à dire d'expert,
- des loyers perçus par M. [T] pour la location de la partie de la maison présente sise à [Localité 10] non occupée par Mme [J], à arbitrer à dire d'expert,
- de l'indemnité d'occupation due par Mme [J] 1er mai 2014 à compter du jugement définitif de divorce, sur une base à évaluer à dire d'expert,
- du produit de la vente des véhicules Seat Ibiza, Nissan Patrol et Citroën Berlingo, immatriculés en 2003 et 1995,
- de 1.500 parts du [16],
- du compte courant d'associé du [16] sur lequel les parties s'entendent pour une somme de 60.333,21 euros,
- des soldes des comptes et avoirs bancaires et assurances-vie des ex-époux à la date du 22 avril 2014, le notaire désigné étant autorisé, à défaut d'accord, à consulter du chef des deux époux les [V] et [X],
- des 200 parts de la SARL [21] ainsi que du compte courant d'associé ; soit 56.000 euros pour les parts sociales et 51.658,90 euros pour le compte courant d'associé,
- des matériels (agricoles et autres) qu'il conviendra de déterminer et de chiffrer à dire d'expert,
- juger et déclarer que le passif indivis devra être déterminé à dire d'expert, ou par le notaire désigné,
- débouter M. [T] de son appel incident,
- en tout état de cause,
- débouter M. [T] de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions contraires,
- condamner M. [T] à verser à Mme [J] une indemnité de 4.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
Par ses dernières conclusions notifiées le 17 octobre 2022, M. [T] demande à la cour de :
- confirmer le jugement en toutes ses dispositions à l'exception du compte courant d'associés du [16] en ce qu'il a été porté à l'actif indivis,
- faire droit à l'appel incident de M. [T] et réformer le jugement en ce qu'il a porté à l'actif indivis le compte courant d'associés du [16] pour un montant de 60 333, 21 euros,
- dire qu'il s'agit d'un propre de M. [T],
- condamner Mme [J] à payer à M. [T] 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est expressément renvoyé, par application de l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions susvisées.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la maison de [Localité 10]
* le statut de la maison
Les époux mariés sans avoir établi de contrat de mariage avant le 1er février 1966 et qui n'ont pas fait de déclaration conjointe devant notaire en vue d'adopter le nouveau régime légal de communauté d' acquêts, comme en l'espèce, sont soumis aux règles applicables à la communauté conventionnelle de meubles et acquêts en vertu de l'article 58 de la loi du 23 décembre 1985.
Il en résulte que tous les meubles, qu'ils soient acquis avant ou pendant le mariage, à titre onéreux ou gratuit, et les immeubles acquis à titre onéreux pendant le régime entrent en communauté.
Toutefois, ce principe souffre une exception en cas d'emploi, c'est à dire lorsque un époux acquiert un bien, meuble ou immeuble, grâce à des deniers propres provenant d'une donation, de telle sorte que le bien ainsi acquis reste propre.
Le 28/01/1971, M. [T] a acquis ce bien pour le prix de 56.000 francs, au moyen de fonds donnés par ses parents, sous condition qu'ils soient exclus de la communauté. Ils sont donc des propres.
L'acte stipule par ailleurs que Mme [J] reconnaît l'exactitude des stipulations relatives au remploi concernant l'origine des deniers ayant servi pour le paiement du prix de telle sorte que l'immeuble acquis sera propre à M. [T], Mme [J] acceptant purement et simplement ce remploi.
Il en résulte qu'aux termes de l'acte, les parties ont entendu conférer au bien acquis le statut de propre à M. [T].
Certes, l'article 1436 §2 du code civil, reprenant la jurisprudence antérieure, dispose que "si la contribution de la communauté est supérieure à celle de l'époux acquéreur, le bien acquis tombe en communauté, sauf la récompense due à l'époux".
Pour soutenir qu'en réalité, les fonds ayant servi à l'acquisition ont été versés par la communauté, l'appelante invoque la stipulation dans l'acte d'achat du bien litigieux d'une rente viagère à verser par M. [T], fils unique, à ses parents jusqu'au décès du dernier vivant d'entre eux d'un montant annuel de 5.400 francs, une hypothèque étant inscrite sur le bien en garantie. Le père de l'intimé est décédé le [Date décès 8]/1981 et sa mère le [Date décès 4]/1995.
Toutefois, il est de principe que la contribution de la communauté ne comprend que les sommes ayant servi à régler partie du prix et des frais de l'acquisition, c'est à dire celles versées au jour de l'acte. Concernant les arrérages de la rente viagère, versés postérieurement, ils ne peuvent être pris en compte, à les supposer versés, ce qui n'est pas démontré, étant relevé en outre qu'ils constituent une charge de la jouissance d'un propre supportée par la communauté, comme pourraient l'être les intérêts d'un emprunt, ce qui ne donne pas lieu à récompense.
C'est donc exactement que le premier juge a dit que la maison était un propre à M. [T].
* la récompense due par M. [T] à la communauté
Concernant les travaux de démolition de la maison en ruine se trouvant sur le terrain acquis et la construction d'une villa, ils ont été financés par la communauté, par les revenus des époux, et par des emprunts bancaires souscrits auprès du [15], de 50.000 francs et de 23.000 euros.
Ainsi, en vertu de l'article 1437 du code civil, la communauté bénéficie d'une récompense due par M. [T], qui ne peut être moindre que le profit subsistant, par application de l'article 1469.
Le jugement sera confirmé de ce chef, et en ce qu'il a ordonné une expertise pour chiffrer le profit subsistant.
* les loyers perçus par M. [T]
Au sein de la villa, se trouve un appartement composé d'un séjour, d'une chambre et d'un bureau, de 78,68 m² avec une cave de 26 m². Ce bien a été donné en location par M. [T], qui en a perçu les fruits. Ceux-ci sont donc communs. Pour autant, ils ne peuvent donner lieu à récompense.
En effet, depuis l'ordonnance de non-conciliation, à partir de laquelle le divorce a pris effet entre les époux, ils ne sont plus communs.
Quant à la période antérieure au 22/04/2014, ces revenus ont été soit employés au profit de la communauté au titre de la contribution aux charges du ménage, soit ont donné lieu à de l'épargne. Or, le solde des comptes bancaires (15.049,80 euros) et des placements opérés par M. [T] (30.412,25 euros d'assurances-vie) font déjà partie intégrante de l'actif commun.
C'est donc exactement que le premier juge a rejeté cette demande en considérant que les avoirs financiers de chacune des parties au 22/04/2014 devaient figurer à l'actif et a autorisé le notaire commis à consulter les fichiers [V] et [X] pour les deux époux.
Le jugement déféré sera confirmé sur ce point.
Sur l'encaissement par la communauté de fonds propres à Mme [J]
Aux termes de l'article 1433 du code civil, " la communauté doit récompense à l'époux propriétaire toutes les fois qu'elle a tiré profit de biens propres. Il en est ainsi, notamment, quand elle a encaissé des deniers propres ou provenant de la vente d'un propre, sans qu'il en ait été fait emploi ou remploi. Si une contestation est élevée, la preuve que la communauté a tiré profit de biens propres peut être administrée par tous les moyens, même par témoignages et présomptions".
Mme [J] expose qu'elle a versé au profit de la communauté la somme de 159.585,43 euros, provenant de la vente de titres.
Il résulte du décompte établi par Mme [J] (pièce n° 21) que celle-ci a reçu de ses parents des bons CNCA et PTT outre des fonds provenant de la succession de son père représentant la somme de 288.523,16 francs, soit 43.985,07 euros, entre 1982 et 2003, versés sur le compte bancaire commun. Les titres en question ont le caractère de meubles et ont donc vocation à être intégrés à l'actif de la communauté.
En tout état de cause, la fin de la construction de la maison familiale datant de la fin de l'année 1975, comme indiqué dans les conclusions de l'appelante, soit avant la vente des titres, ceux-ci ont servi aux besoins de la vie courante, leur montant n'étant pas tel qu'il puisse être considéré comme une surcontribution aux charges du ménage. Enfin, il est de principe que n'ouvre pas droit à récompense l'industrie personnelle déployée par l'un des époux au service d'un bien propre de son conjoint.C'est donc exactement que le premier juge a rejeté ce chef de demande, relevant en outre qu'à supposer exister un emploi des fonds pour améliorer le bien immobilier, la communauté en est indemnisée par sa participation au profit subsistant.
Le jugement déféré sera ainsi confirmé de ce chef.
Sur l'indemnité d'occupation due par Mme [J]
Mme [J] occupant un bien appartenant à M. [T], est ainsi débitrice envers celui-ci d'une indemnité d'occupation depuis la date à laquelle le jugement de divorce est devenu définitif. Il s'agit donc d'une créance entre époux, comme l'a relevé exactement le premier juge dans les motifs de son jugement. En revanche, dans le dispositif, il est indiqué que cette créance fait partie de l'actif indivis. Il convient donc de rectifier cette erreur, en infirmant le jugement attaqué.
Par ailleurs, c'est à juste titre qu'une expertise a été ordonnée. Le jugement sera confirmé sur ce point, hormis sur le montant de l'abattement pour précarité qui sera rehaussé à 20% de la valeur locative du bien,
Sur les parts sociales détenues par M. [T]
Aux termes de l'article 1498 §1 du code civil,"lorsque les époux conviennent qu'il y aura entre eux communauté de meubles et acquêts, l'actif commun comprend, outre les biens qui en feraient partie sous le régime de la communauté légale, les biens meubles dont les époux avaient la propriété ou la possession au jour du mariage ou qui leur sont échus depuis par succession ou libéralité, à moins que le donateur ou testateur n'ait stipulé le contraire".
* le [16]
Le 15/04/1991, M. [T], sa mère et sa fille [U] ont constitué un groupement foncier agricole destiné à acquérir un terrain de 20 hectares sis à [Localité 11] (38) lieudit [Localité 22], Mme veuve [T] étant titulaire de 2000 parts n° 1501 à 3500, avec un apport de 200.000 francs, M. [T] de 1.000 parts n° 1 à 1.000, son apport étant de 100.000 francs et [U] [T] de 500 parts n° 1001 à 1500 avec un apport de 50.000 francs.
Le 22/05/1991, le groupement foncier agricole a acquis le terrain au prix de 500.000 francs au moyen de ses fonds propres et d'un prêt de 200.000 francs contracté auprès du [15].
Mme veuve [T] est décédée le [Date décès 4]/1995, son fils héritant des parts numérotées de 1501 à 3.500.
Par acte du 04/03/2003, M. [T] et Mme [J] les ont données à leur fils [N]. M. [T] est donc resté propriétaire des parts numérotées de 0 à 1.000 et de 3.001 à 3.500, soit 1.500 parts.
Le 15/04/2003, le groupement foncier agricole a acquis d'autres parcelles au moyen d'un prêt de 68.600 euros.
Dès lors, parce que les parts dont M. [T] est propriétaire sont des meubles et non des immeubles, elles sont communes et doivent être intégrées à l'actif de la communauté, et non seul le compte courant d'associé d'un montant de 60.233,21 euros comme l'a dit le premier juge.
Il sera donné mission complémentaire à l'expert de renseigner tous éléments de nature à permettre l'évaluation de ces parts.
* la société civile immobilière [18]
Aucune contestation n'a été émise par l'appelante. En tout état de cause cette société a été constituée entre M. [T] et sa mère le 03/08/1990, soit pendant le mariage. Suite au décès de Mme veuve [T], son fils, nu-propriétaire des parts, en est devenu titulaire en pleine propriété.
Ces parts sont des meubles. Pour autant, la société civile immobilière [18] a été constituée par apport de biens immobiliers sis à [Localité 13]. Dès lors, les parts sociales sont en réalité un emploi représentatif de ces biens, et par subrogation, constituent un propre à M. [T]. Elles ne font donc pas partie de l'actif de la communauté.
* la société [21]
Elle a été constituée le 30/12/1993 entre M. [T] et ses deux enfants. Les parts détenues par M. [T] sont des biens meubles et entrent ainsi dans la communauté, pour une valeur non contestée de 56.000 euros de même que le compte courant d'associé d'un montant de 51.658,90 euros. Le jugement déféré sera confirmé de ce chef.
Sur les autres demandes
* le matériel agricole
C'est par des motifs pertinents que la cour adopte que le premier juge a fixé la valeur du matériel agricole commun à 10.000 euros, s'agissant d'un matériel ancien, le jugement entrepris étant confirmé de ce chef.
* les véhicules
Un véhicule Seat Ibiza immatriculé en 2003 a été vendu par Mme [J] le 24/01/2021 au prix de 1.500 euros.
Un véhicule Nissan Patrol, acquis le 19/06/1995 a lui aussi été revendu par M. [T] de même qu'un véhicule Citroën Berlingo, acquis le 30/08/2004 et cédé le 29/08/2010.
Le jugement attaqué sera confirmé, en ce que les prix de vente des véhicules Seat et Nissan doivent être réintégrés à l'actif, et sera complété en ce que le prix du Citroën Berlingo doit aussi être ajouté à la masse active. Faute pour M. [T] de donner tout justificatif utile quant à la revente des automobiles, la valeur du Nissan Patrol sera fixée à 3.000 euros, comme indiqué par l'intimé dans ses conclusions de première instance page 14.
En l'absence d'éléments concernant le Berlingo, il sera donné mission au notaire commis de rechercher la valeur "Argus" de ce dernier au moment de sa vente, sur la base des éléments suivants :
- achat neuf le 16/09/2004 ;
- vente le 29/08/2010 ;
- kilométrage : 107.099 km.
Sur la masse passive
* la récompense due par la communauté à Mme [J]
Celle-ci justifie avoir vendu un bien immobilier sis à [Localité 20] (71) au prix de 80.417,43 euros. S'agissant du prix d'un immeuble, les dispositions de l'article 1498 ne s'appliquent pas, l'intimé ne contestant pas que les sommes encaissées par la communauté l'ont été à titre de remploi et doivent donner lieu à récompense.
M. [T] concluant à la confirmation de ce chef du jugement déféré, la contestation de l'appelante sera rejetée, en ce que le montant de la récompense qui lui est due sera limitée au montant fixé dans le jugement.
* la récompense due par la communauté à M. [T]
La communauté a encaissé le produit de la vente des biens immobiliers appartenant à M. [T], soit :
- 37.350,62 euros euros au titre de la vente d'un appartement sis [Adresse 14], intervenue le 28/04/1997 ;
- 22.867,35 euros au titre de la vente d'une parcelle à [Localité 13] le 06/03/1991;
- 30.489,80 euros au titre de la vente d'une parcelle à [Localité 13] le 15/03/1991;
- 22.867,35 euros au titre de la vente d'une parcelle à [Localité 13] le 06/11/1991
soit un total de 113.575,12 euros.
Le jugement déféré sera confirmé de ce chef.
Sur les autres demandes
Compte tenu du sort partagé du litige, il n'y a pas lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile, concernant les frais irrépétibles exposés par les parties tant en première instance qu'en cause d'appel.
Enfin, les dépens seront employés en frais privilégiés de partage.
PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant publiquement, contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Confirme le jugement déféré sauf pour :
- le montant de l'abattement de précarité sur la valeur locative concernant le calcul de l'indemnité d'occupation due par Mme [J] ;
- les parts détenues par M. [T] au sein du [16] ;
- la valorisation du véhicule Seat Ibiza ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Dit que l'abattement pour précarité sur la valeur locative pour le calcul de l'indemnité d'occupation due par Mme [J] sera fixé à 20% ;
Dit que la valeur du véhicule Seat Ibiza sera réintégrée à l'actif de la communauté pour un montant de 1.500 euros ;
Dit qu'il appartiendra à M. [T] de justifier du prix de vente des véhicules Nissan Patrol et Citroën Berlingo ;
Dit qu'à défaut :
- la valeur du véhicule Nissan Patrol sera fixée à 3.000 euros ;
- le notaire commis recherchera la valeur "Argus" du Citroën Berlingo, en se fondant sur les éléments indiqués dans le présent arrêt ;
Dit que l'actif de la communauté comprend la valeur de 1.500 parts du [16] ;
Complète la mission de l'expert commis en ce qu'il donnera au tribunal tous éléments permettant de chiffrer la valeur de ces parts, à la date la plus proche de l'expertise, mais en prenant en compte la situation du groupement au jour de l'ordonnance de non-conciliation du 22/04/2014 sous la surveillance du juge chargé du contrôle des expertises du tribunal judiciaire de Grenoble ;
Ordonne une consignation complémentaire de 3.000 euros à verser par moitié entre les parties dans les deux mois du présent arrêt à la régie du tribunal judiciaire de Grenoble ;
Renvoie les parties devant le notaire commis après le dépôt du rapport d'expertise, aux fins de procéder aux opérations de comptes, liquidation et partage de la communauté et de l'indivision post divorce existante entre
M. [T] et Mme [J] sous la surveillance du juge commis du tribunal judiciaire de Grenoble ;
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Dit que les dépens de première instance et d'appel seront employés en frais privilégiés de partage ;
PRONONCÉ par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile .
SIGNÉ par la présidente, Anne Barruol, et par la greffière, Abla Amari, à laquelle la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.
La greffière La Présidente