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25/05/2023 | FRANCE | N°21/03109

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Ch. sociale -section b, 25 mai 2023, 21/03109


C 2



N° RG 21/03109



N° Portalis DBVM-V-B7F-K6Z5



N° Minute :























































































Copie exécutoire délivrée le :





la SELARL ACQUIS DE DROIT



la SELARL BALESTAS-GRANDGONNET-MURIDI & ASS

OCIES

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



Ch. Sociale -Section B

ARRÊT DU JEUDI 25 MAI 2023





Appel d'une décision (N° RG F 20/00736)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de GRENOBLE

en date du 07 juin 2021

suivant déclaration d'appel du 07 juillet 2021





APPELANTE :



Madame [S] [A]

[Adresse 3]

[Localité 2]



représenté...

C 2

N° RG 21/03109

N° Portalis DBVM-V-B7F-K6Z5

N° Minute :

Copie exécutoire délivrée le :

la SELARL ACQUIS DE DROIT

la SELARL BALESTAS-GRANDGONNET-MURIDI & ASSOCIES

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

Ch. Sociale -Section B

ARRÊT DU JEUDI 25 MAI 2023

Appel d'une décision (N° RG F 20/00736)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de GRENOBLE

en date du 07 juin 2021

suivant déclaration d'appel du 07 juillet 2021

APPELANTE :

Madame [S] [A]

[Adresse 3]

[Localité 2]

représentée par Me Eïtan CARTA-LAG de la SELARL ACQUIS DE DROIT, avocat au barreau de GRENOBLE

(bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro 2022/00963 du 31/01/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de GRENOBLE)

INTIMES :

Association AGS CGEA D'[Localité 7]

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 4]

défaillante

Maître Me [T], ès qualités de liquidateur judiciaire de la SAS La PAPOTHEQUE

[Adresse 6]

[Localité 2]

défaillant

S.A.S. LA PAPOTHEQUE, prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié audit siège

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me Audrey GRANDGONNET de la SELARL BALESTAS-GRANDGONNET-MURIDI & ASSOCIES, avocat au barreau de GRENOBLE

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DÉLIBÉRÉ :

M. Frédéric BLANC, Conseiller faisant fonction de Président,

Mme Hélène BLONDEAU-PATISSIER, Conseillère,

M. Pascal VERGUCHT, Conseiller,

DÉBATS :

A l'audience publique du 29 mars 2023,

Mme Hélène BLONDEAU-PATISSIER, Conseillère chargée du rapport et M. Frédéric BLANC, Conseiller faisant fonction de Président, ont entendu les parties en leurs observations, assistés de Mme Carole COLAS, Greffière, conformément aux dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, les parties ne s'y étant pas opposées ;

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 25 mai 2023, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.

L'arrêt a été rendu le 25 mai 2023.

EXPOSE DU LITIGE

La société par actions simplifiée (SAS) La Papothèque est une société qui propose un lieu d'échange social fondé sur la solidarité et le partage, avec un espace dédié à la vente de boissons et de restauration.

Courant avril 2019, Mme [S] [A] est intervenue au sein de la société La Papothèque en qualité de cuisinière.

Le 15 mai 2019, à l'occasion d'un rendez-vous auprès de Pôle Emploi, Mme [S] [A] a appris que la SAS La Papothèque n'était pas éligible aux contrats aidés.

Mme [S] [A] a alors quitté ses fonctions de cuisinière.

Le 6 août 2019, la SAS La Papothèque a remis à Mme [S] [A] un chèque d'un montant de 445,94 euros.

Par requête en date du 21 août 2020, Mme [S] [A] a saisi le conseil de prud'hommes de Grenoble afin de faire requalifier la relation de travail en contrat à durée indéterminée à temps complet et de faire condamner la société La Papothèque à lui verser des rappels de salaire et des indemnités en lien avec l'exécution et la rupture du contrat de travail.

La société La Papothèque s'est opposée aux prétentions adverses.

Par jugement en date du 7 juin 2021, le conseil de prud'hommes de Grenoble, en formation incomplète présidée par le juge départiteur, a':

Constaté l'existence d'un contrat de travail entre la SAS La Papothèque et Mme [S] [A] entre le 17 et le 24 avril 2019';

Dit que Mme [S] [A] a été intégralement rémunérée pour sa période de travail par la SAS La Papothèque et débouté Mme [S] [A] de sa demande de rappel de salaire';

Débouté Mme [S] [A] de sa demande formée au titre du travail dissimulé';

Condamné la SAS La Papothèque à verser à Mme [S] [A] la somme de 200,00 € de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail';

Dit que le départ de Mme [S] [A] est une prise d'acte qui s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse';

Condamné la SAS La Papothèque à verser à Mme [S] [A] la somme de 1 521 ,25 € brut, outre 152,12 € au titre des congés payés afférents au titre de l'indemnité compensatrice de préavis';

Débouté Mme [S] [A] de sa demande d'indemnité au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse';

Débouté Mme [S] [A] de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile cette dernière bénéficiant de l'aide juridictionnelle totale';

Rappelé que l'exécution provisoire est de droit';

Condamné la SAS La Papothèque au paiement des entiers dépens.

La décision a été notifiée par le greffe par lettres recommandées avec accusés de réception signés les 10 et 12 juin 2021.

Par déclaration en date du 7 juillet 2021, Mme [S] [A] a interjeté appel à l'encontre dudit jugement.

Par jugement du tribunal de commerce de Grenoble en date du 7 décembre 2021, la SAS La Papothèque a été placée en redressement judiciaire, la SELARL AJP étant désignée ès qualités d'administrateur judiciaire et Maître [L] [T] désigné ès qualités de mandataire judiciaire.

Par jugement en date du 10 mai 2022, le tribunal de commerce de Grenoble a converti la procédure en liquidation judiciaire et a mis fin à la mission de la SELARL AJP. Maître [L] [T] a été désigné ès qualités de liquidateur judiciaire.

Suivant acte d'huissier en date du 23 février 2022, la SELARL AJP, ès qualités d'administrateur judiciaire de la SAS La Papothèque, a été assignée en intervention forcée et a reçu signification de la déclaration d'appel et des conclusions de l'appelante.

Par acte d'huissier en date du 27 avril 2022, l'AGS-CGEA d'[Localité 7] a été assignée en intervention forcée. La déclaration d'appel et les conclusions de l'appelante lui ont été signifiées.

Par acte d'huissier en date du 9 juin 2022, Maître [L] [T], ès qualités de liquidateur judiciaire de la SAS La Papothèque, a été assigné en intervention forcée. La déclaration d'appel et les conclusions de l'appelante lui ont été signifiées.

Aux termes de ses conclusions notifiées le 9 juin 2022, Mme [S] [A] sollicite de la cour de':

Vu la législation suscitée ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu la jurisprudence citée ;

Vu les pièces produites ;

Infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Grenoble rendu le 7 juin 2021 en sa formation de départage, section activités diverse, en ce qu'il a :

- Constaté l'existence d'un contrat de travail entre la SAS La Papothèque et Mme [S] [A] uniquement du 17 avril au 24 avril 2019 ;

- Dit que Mme [S] [A] a été intégralement rémunérée pour sa période de travail par la SAS La Papothèque ;

- Débouté Mme [S] [A] de sa demande de rappel de salaire ;

- Débouté Mme [S] [A] de sa demande formée au titre du travail dissimulé ;

- Condamné la SAS La Papothèque à verser à Mme [S] [A] uniquement la somme de'200'euros de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;

- Débouté Mme [S] [A] de sa demande d'indemnité au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- Débouté Mme [S] [A] de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile, cette dernière bénéficiant de l'aide juridictionnelle totale.

Confirmer le jugement précité en ce qu'il a débouté la SAS La Papothèque de sa demande reconventionnelle et condamné au paiement des entiers dépens ;

Et, statuant de nouveau,

Juger que Mme [S] [A] a été engagée en contrat de travail à durée indéterminée par la SAS La Papothèque du 17 avril au 16 mai 2019 ;

Constater que Mme [S] [A] n'a pas perçu la rémunération afférente à ses heures de travail';

Juger que Mme [S] [A] a été placée dans une situation de travail dissimulé par la SAS La Papothèque;

Juger que la SAS La Papothèque n'a pas respecté son obligation d'exécution loyale du contrat de travail;

Juger que la démission de Mme [S] [A] est équivoque en raison des manquements de l'employeur;

En conséquence,

Requalifier la démission de Mme [S] [A] en date du 16 mai 2019 en prise d'acte de la rupture du contrat de travail ;

Juger que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail par Mme [S] [A] est justifiée par des manquements suffisamment graves de l'employeur;

En conséquence,

Fixer la créance de Madame [S] [A] au passif de la liquidation judiciaire de la SAS La Papothèque à hauteur des sommes suivantes :

- 1.521,25 euros brut à titre de rappel de salaire pour la période du 17 avril 2019 au 16 mai 2019, outre 152,13 euros brut au titre des congés payés afférents ;

- 9.127,50 euros net à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé ;

euros net à titre de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation d'exécution loyale du contrat de travail ;

- 1.521,25 euros net à titre de dommages et intérêts pour licenciement injustifié ;

- 1.521,25 euros brut au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, outre 152,13 euros brut au titre des congés payés afférents ;

- 2'640'euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile dans le cadre de la procédure de première instance';

En tout état de cause,

Fixer la créance de Madame [S] [A] au passif de la liquidation judiciaire de la SAS La Papothèque à hauteur de 2'400'euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile dans le cadre de la procédure d'appel, ainsi qu'aux entiers dépens.

Déclarer le jugement à intervenir opposable à l'AGS CGEA d'[Localité 7].

Pour un exposé complet des moyens et prétentions des parties, il convient au visa de l'article'455 du code de procédure civile de se reporter aux conclusions de Mme'[S]'[U] et au jugement de première instance pour Me [T], ès qualités, et l'AGS CGEA d'[Localité 7].

La clôture de l'instruction a été prononcée le 23 février 2023. L'affaire, fixée pour être plaidée à l'audience du 29 mars 2023, a été mise en délibéré au'25 mai 2023.

MOTIFS DE L'ARRÊT

1 ' Sur l'existence du contrat de travail

Il résulte des dispositions de l'article 1779 du code civil que le contrat de travail est une convention par laquelle une personne s'engage à travailler pour le compte d'une autre et sous sa subordination moyennant une rémunération.

Il appartient à celui qui se prévaut d'un contrat de travail de rapporter la preuve de l'existence d'une activité rémunérée accomplie sous la subordination de l'employeur conformément aux dispositions des articles L.1221-1 et suivants du code du travail, le lien de subordination étant caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.

Dès lors, l'existence d'une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu'elles ont donnée à leur convention mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité professionnelle.

En présence d'un contrat de travail apparent, il incombe à celui qui invoque son caractère fictif d'en rapporter la preuve.

En l'absence d'écrit ou d'apparence de contrat, il appartient à celui qui invoque un contrat de travail d'en rapporter la preuve.

La preuve du contrat de travail est libre. Tous les procédés de preuve peuvent donc être utilisés et tout élément matériel peut être pris en compte.

En l'espèce, Mme [S] [A] soutient avoir travaillé du 17 avril au 16 mai 2019 en qualité de cuisinière au sein de La Papothèque sans avoir jamais été bénévole.

La salariée produit le planning de la Papothèque d'avril 2019 qui indique pour le 17 avril «'Entretien individuel [S] B': Cuisine'» et sur lequel son nom apparaît à plusieurs reprises jusqu'au 24 avril.

Aussi, elle verse aux débats plusieurs attestations de clients.

Ainsi, M.'Nourdine [X] atteste que «'Mme [S] [A] était la cuisinière. Elle venait le lundi, mardi, jeudi et vendredi, puis elle [n'est] pas rester longtemps car Madame [Y] ne [voulait] pas lui faire un contrat de travail'».

M. [V] [E] indique «'J'ai fait quelques mois plus tard vers le mois de mars la connaissance des Mme [J] [P] et de Mme [A] [S], ce sont elles qui faisait à manger'».

Mme [H] [W] précise «'avoir vu lors mon activité de sophrologue au sein de la papothèque de mai à juin 2019': [S] [A] lundi, mardi, mercredi 9h à 16h (une semaine)'».

M. [D] [C] atteste qu'elle est «'arrivé plus tard vers le mois de mars-avril'» et qu'elle était «'chargé de l'accueil et de la cuisine. On a sympathisé avec le temps. Mme [A] a fini aussi par partir faute de contrat'».

Par ailleurs, Mme [A] justifie de la remise de chèque d'un montant de 445,99'euros de la part de la SAS La Papothèque, celle-ci l'ayant reconnu en première instance.

Il résulte de ces éléments que Mme [S] [A] établit suffisamment qu'elle a exécuté une prestation de travail dans le cadre d'un rapport de subordination caractérisé par la définition d'un planning, et qu'elle a perçu une rémunération versée par la société La Papothèque.

Au regard du planning produit, il convient de considérer que Mme [A] a commencé à travailler pour la SAS La Papothèque à compter du 17 avril 2016.

Quant à son départ, il ressort de l'attestation de Mme [W] que Mme [A] a également travaillé au cours du mois de mai de sorte qu'il convient de considérer qu'elle a arrêté de travailler, tel qu'elle le soutient, à compter du 16 mai 2019 pour la SAS La Papothèque.

Par conséquent, par infirmation du jugement entrepris, il convient de déclarer qu'un contrat de travail a existé entre Mme [S] [A] et la SAS La Papothèque entre le 17 avril 2019 et le'16'mai 2019, date de sa démission.

2 - Sur la demande de rappel de salaire

Il résulte de l'article 1353 du code civil que celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

Ainsi, il appartient au salarié d'établir que tel élément de rémunération lui était dû, à charge pour l'employeur de justifier le cas échéant, qu'il s'est acquitté du paiement.

Au visa des dispositions des articles L.'1221-1 du code du travail et 1353 du code civil, la charge de la preuve du paiement des salaires incombe à l'employeur qui se prétend libéré de son obligation.

Si cette obligation de paiement du salaire disparaît lorsque le travail confié n'a pas été exécuté, il incombe néanmoins à l'employeur de prouver que le salarié a refusé d'exécuter son travail ou qu'il ne s'est pas tenu à sa disposition.

En l'espèce, en l'absence de contrat écrit, il convient de fixer le salaire minimum de la salariée à hauteur du SMIC en 2019, soit 1'521,25'euros bruts.

Par conséquent, la salariée reconnaissant avoir déjà perçu la somme de 445,94'euros nets, il convient d'ordonner à Me [T] de fixer au passif de la SAS La Papothèque, au bénéfice de Mme [S] [A] la somme de 1'521,25'euros bruts au titre de rappel de salaire sur la période travaillée, outre 152,12'euros bruts au titre de congés payés afférents, dont doit être déduite la somme de 445,94 euros nets d'ores et déjà perçue.

Le jugement entrepris est donc infirmé de ce chef.

3 ' Sur le travail dissimulé

Aux termes de l'article L.'8223-1 du code du travail, le salarié auquel l'employeur a recours dans les conditions de l'article L.'8221-3 ou en commettant les faits relatifs au travail dissimulé prévus à l'article L.8221-5 du même code a droit, en cas de rupture de la relation de travail, à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

L'article L.'8221-5 du code du travail dispose notamment qu'est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour un employeur de mentionner sur les bulletins de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli.

Toutefois, la dissimulation d'emploi salarié prévue par ces textes n'est caractérisée que s'il est établi que l'employeur a agi de manière intentionnelle. Le caractère intentionnel du travail dissimulé est caractérisé lorsqu'il est établi que l'employeur a, de manière intentionnelle, mentionné sur le bulletin de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué. L'intention ne peut être déduite du seul recours à un contrat inapproprié.

En l'espèce, il ressort des pièces produites par la salariée qu'elle était mentionnée sur le planning du mois d'avril et qu'elle a perçu une rémunération par la SAS La Papothèque par chèque en date du 6 août 2019 sans que ne soit édité un bulletin de salaire.

Il ressort également du jugement entrepris que l'employeur avait effectué des démarches pour bénéficier du dispositif des contrats aidés à l'égard de Mme [A].

Il s'ensuit que la SAS La Papothèque avait connaissance du statut de salariée de Mme [A] et qu'elle a donc délibérément dissimulé son emploi, peu importe que la salariée ne soit intervenue que pendant un mois.

Par conséquent, par infirmation du jugement entrepris, il convient de fixer au passif de la SAS La Papothèque, au bénéfice de Mme [S] [A], de la somme de'9'127,50'euros nets au titre du travail dissimulé.

4 ' Sur l'exécution déloyale du contrat de travail

Conformément à l'article L. 1222-1 du code de travail, le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi. La bonne foi se présumant, la charge de la preuve de l'exécution déloyale du contrat de travail par l'employeur incombe au salarié.

En l'espèce, Mme [S] [A] établit suffisamment n'avoir été payée que partiellement de sa prestation de travail et seulement au mois d'août 2019, alors que la relation de travail s'est terminée le'16'mai 2019, sans bulletin de salaire ni documents de fin de contrat, de sorte qu'elle a subi un préjudice financier certain.

En outre, même s'il ressort du jugement entrepris que la société avait entrepris les démarches auprès de Pôle Emploi pour obtenir le bénéfice des contrats aidés, ce qui lui a été refusé, il demeure qu'elle a manqué d'établir un contrat écrit en dépit des demandes de Mme [S] [A].

Par conséquent, par confirmation du jugement entrepris, il convient de fixer au passif de la SAS La Papothèque au bénéfice de Mme [S] [A] la somme de 300'euros au titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail.

5 - Sur la rupture du contrat de travail

La démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail.

Lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de sa démission, la remet en cause en raison de faits ou de manquements imputables à son employeur, il appartient à la cour d'apprécier s'il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu'à la date à laquelle a été donnée celle-ci était équivoque.

Dans cette hypothèse, la démission s'analyse en une prise d'acte de la rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient et dans le cas contraire une démission.

Pour que la remise en cause de la démission soit accueillie, il faut que le salarié justifié qu'un différend antérieur ou contemporain de la démission l'avait opposé à son employeur.

L'existence d'un lien de causalité entre les manquements imputés à l'employeur et l'acte de démission est nécessaire. Ce lien sera établi si lesdits manquements sont antérieurs ou au moins contemporains de la démission, et s'ils avaient donné lieu à une réclamation, directe ou indirecte du salarié afin que l'employeur puisse rectifier la situation.

Ainsi, même émise sans réserve, une démission est nécessairement équivoque si le salarié parvient à démontrer qu'elle trouve sa cause dans des manquements antérieurs ou concomitants de l'employeur.

En principe, sous la réserve de règles probatoires spécifiques à certains manquements allégués de l'employeur, il incombe au salarié, et à lui seul, d'établir les faits allégués à l'encontre de l'employeur.

En l'espèce, Mme [S] [A] a démissionné oralement le 16 mai 2019 en raison de l'absence de paiement de sa rémunération en avril et du refus par Pôle Emploi du bénéfice des contrats aidés pour la société.

Ainsi, ces éléments sont suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail de Mme [S] [A].

Par conséquent, la démission de Mme [S] [A] en date du 16 mai 2019 s'analyse en une prise d'acte de la rupture aux torts exclusifs de la SAS La Papothèque qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Ainsi, par confirmation du jugement entrepris, Mme [S] [A] est fondée à solliciter la fixation au passif de la SAS La Papothèque de la somme de 1'521,25'euros bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, outre 152,12'euros bruts au titre des congés payés afférents.

Au visa de l'article L.'1235-3 du code du travail, Mme [S] [A] ayant moins d'un an d'ancienneté et compte tenu qu'elle s'abstient de produire les pièces justifiant de sa situation au regard de l'emploi ensuite de la rupture, il convient de fixer au passif de la SAS La Papothèque la somme de 1 000'euros bruts à titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement entrepris est donc infirmé de ce chef.

6 ' Sur la garantie de l'AGS

Il y a lieu de déclarer le jugement commun et opposable à l'AGS et de dire que l'UNEDIC délégation de l'AGS CGEA d'[Localité 7] doit sa garantie selon les modalités précisées au dispositif du présent arrêt étant ajouté qu'en application de l'article L 3253-17 du code du travail tel que modifié par loi n°2016-1917 du 29 décembre 2016, le plafond de garantie de l'AGS s'entend en montants bruts et retenue à la source, de l'article 204 A du code général des impôts, incluse.

7 ' Sur les demandes accessoires':

La SAS La Papothèque, partie perdante à l'instance au sens des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile, doit être tenue d'en supporter les entiers dépens de première instance et d'appel.

L'équité et les situations économiques des parties commandent de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS':

La cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire, dans les limites de l'appel et après en avoir délibéré conformément à la loi';

CONFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a':

- Dit que la démission de Mme [S] [A] s'analyse comme une prise d'acte produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse';

- Condamné la SAS La Papothèque aux entiers dépens';

L'INFIRME pour le surplus';

Statuant à nouveau des chefs du jugement infirmés et y ajoutant,

DÉCLARE qu'un contrat de travail a lié Mme [S] [A] à la SAS La Papothèque entre le'17'avril 2019 et le 16 mai 2019';

FIXE la créance de Mme [S] [A] au passif de la procédure collective suivie contre la SAS La Papothèque aux sommes suivantes':

- 1'521,25'euros bruts (mille cinq cent vingt-et-un euros et vingt-cinq centimes) au titre de rappel de salaire du 17 avril au 16 mai 2019, outre 152,12'euros bruts (cent cinquante-deux euros et douze centimes) au titre des congés payés afférents, dont doit être déduite la somme de 445,94 euros nets (quatre cent quarante-cinq euros et quatre-vingt-quatorze centimes) d'ores et déjà perçue,

- 300'euros nets (trois cents euros) au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail,

- 9'127,50'euros nets (neuf mille cent vingt-sept euros et cinquante centimes) au titre du travail dissimulé,

- 1'521,25'euros bruts (mille cinq cent vingt-et-un euros et vingt-cinq centimes) au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, outre 152,12'euros bruts (cent cinquante-deux euros et douze centimes) au titre des congés payés afférents,

- 1 000'euros bruts (mille euros) au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

DÉCLARE l'arrêt commun et opposable à l'UNEDIC Délégation de l'AGS CGEA d'[Localité 7]';

DÉBOUTE Mme [S] [A] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile';

CONDAMNE la SAS La Papothèque, représentée par Me [T], ès qualités de liquidateur judiciaire, aux dépens d'appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par M. Frédéric BLANC, Conseiller faisant fonction de Président de section, et par Mme Carole COLAS, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Ch. sociale -section b
Numéro d'arrêt : 21/03109
Date de la décision : 25/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-25;21.03109 ?
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