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23/05/2023 | FRANCE | N°21/03811

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Chbre des aff. familiales, 23 mai 2023, 21/03811


N° RG 21/03811 - N° Portalis DBVM-V-B7F-LAUQ

C5

N° Minute :























































copie certifiée conforme délivrée

aux avocats le :









Copie Exécutoire délivrée

le :










aux parties (notifiée par LRAR)





aux avocats










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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



CHAMBRE DES AFFAIRES FAMILIALES



ARRET DU MARDI 23 MAI 2023





APPEL

Jugement au fond, origine juge aux affaires familiales de Grenoble, décision attaquée en date du 26 juillet 2021, enregistrée sous le n° suivant déclaration d'appel du 01 septembre 2021.





APPELANT :

M. [P] [Y]

né le 20 Juin 1...

N° RG 21/03811 - N° Portalis DBVM-V-B7F-LAUQ

C5

N° Minute :

copie certifiée conforme délivrée

aux avocats le :

Copie Exécutoire délivrée

le :

aux parties (notifiée par LRAR)

aux avocats

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE DES AFFAIRES FAMILIALES

ARRET DU MARDI 23 MAI 2023

APPEL

Jugement au fond, origine juge aux affaires familiales de Grenoble, décision attaquée en date du 26 juillet 2021, enregistrée sous le n° suivant déclaration d'appel du 01 septembre 2021.

APPELANT :

M. [P] [Y]

né le 20 Juin 1974 à [Localité 4] (ALGERIE)

de nationalité Algérienne

[Adresse 2]

[Localité 3]

représenté par Me Audrey GRANDGONNET de la SELARL BALESTAS-GRANDGONNET-MURIDI & ASSOCIES, avocat au barreau de GRENOBLE, substituée et plaidant par Me Camille GREMONT, avocat au barreau de GRENOBLE

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 21/11112 du 06/10/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de GRENOBLE)

INTIMEE :

Mme [M] [C]

née le 31 Janvier 1948 à [Localité 6] (ALGERIE)

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 5]

représentée et plaidant par Me Farida KHEDDAR, avocat au barreau de GRENOBLE

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats et du délibéré :

Mme Anne BARRUOL, Présidente,

Mme Martine RIVIERE, Conseillère,

Mme Christelle ROULIN, Conseillère,

Assistées lors des débats de Amélia Thuillot, greffière.

MINISTERE PUBLIC :

L'affaire a été régulièrement communiquée au ministère public qui a fait connaître son avis.

DEBATS :

A l'audience tenue en chambre du conseil du 21 février 2023, Mme Christelle Roulin, conseillère, a été entendue en son rapport. Les avocats ont été entendus en leurs conclusions et plaidoiries, puis l'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu à l'audience de ce jour, après prorogation du délibéré.

EXPOSE DU LITIGE

Mme [M] [C], de nationalité française, et M. [P] [Y], de nationalité algérienne, se sont mariés le 14 janvier 2017 devant l'officier d'état civil de la commune d'[Localité 5] (France) sans contrat de mariage préalable. Aucun enfant n'est issu de leur union.

Selon acte en date du 5 avril 2019, Mme [C] a fait assigner M. [Y] devant le juge aux affaires familiales de Grenoble aux fins de :

-constater qu'il était déjà marié à Mme [N] [D] depuis le 18 juillet 2000, lorsqu'il a épousé Mme [C] le 14 janvier 2017,

- dire et juger que Mme [C] a été trompée sur les qualités essentielles de l'époux, celui-ci étant déjà uni par les liens du mariage,

- constater par ailleurs que le but par M. [Y] était l'obtention d'un titre de séjour,

- dire et juger que le consentement de Mme [C] a été vicié,

- en conséquent dire et juger que le mariage célébré entre les époux [C]/[Y] le 14 janvier 2017 devant l'officier d'état civil d'[Localité 5] est nul,

- condamner M. [Y] à verser à Mme [C] la somme de 5000 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice moral subi,

- condamner M. [Y] aux dépens et à lui verser la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement contradictoire en date du 26 juillet 2021, le tribunal judiciaire de Grenoble a principalement :

- déclaré le tribunal judiciaire de Grenoble compétent avec application de la loi française ;

- constaté que lors de son mariage avec Mme [C], M. [Y] était encore lié par les liens du mariage avec Mme [D],

- déclaré en conséquence le mariage célébré entre M. [Y] et Mme [C] le 14 janvier 2017 devant l'officier d'état civil d'[Localité 5], nul et de nul effet,

- ordonné les mesures de publicité légale,

- ordonner qu'il soit fait mention du jugement en marge de l'acte de mariage transcrit sur les registres de la commune d'[Localité 5] ainsi qu'en marge de l'acte de naissance de Mme [C] devant l'officier d'état civil du ministère des affaires étrangères à [Localité 7],

- condamné M. [Y] à verser à Mme [C] la somme de 1000 euros à titre de dommages et intérêts,

- condamner M. [Y] à verser à Mme [C] la somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [Y] aux dépens, avec distraction au profit des avocats en la cause et application des règles en matière d'aide juridictionnelle.

Le 1er septembre 2021, M. [Y] a relevé appel de cette décision en toutes ses dispositions expressément visées dans la déclaration d'appel, sauf en ce que le tribunal judiciaire de Grenoble s'est déclaré compétent avec application de la loi française.

Dans ses premières conclusions notifiées le 9 février 2022, dans les trois mois suivant la notification des premières conclusions de l'appelant, Mme [C] a interjeté appel incident sur le montant des dommages-intérêts qui lui ont été alloués.

Dans ses dernières conclusions notifiées le 11 mars 2022, M. [Y] demande à la cour de:

à titre principal

- déclarer recevable l'appel de M. [Y] ;

- infirmer le jugement du tribunal judiciaire de Grenoble en date du 26 juillet 2021 ;

- déclarer les juridictions françaises compétentes ;

- déclarer la loi française applicable ;

- constater que M. [Y] n'était pas marié au moment de son union avec Mme [C] ;

- dire et juger que Mme [C] n'a pas été trompée ;

- dire et juger que le consentement de Mme [C] n'a pas été vicié ;

- rejeter l'appel incident de Mme [C] ;

par conséquent,

- dire et juger que le mariage de M. [Y] et Mme [C] est valable ;

- débouter Mme [C] de l'ensemble de ses demandes ;

à titre subsidiaire

- déclarer recevable l'appel de M. [Y] ;

- infirmer le jugement du tribunal judiciaire de Grenoble en date du 26 juillet 2021 ;

- déclarer les juridictions françaises compétentes ;

- déclarer la loi française applicable ;

- ramener la demande de dommages et intérêts de Mme [C] à de plus justes proportions ;

- débouter Mme [C] aux surplus de ses demandes ;

en tout état de cause

- condamner Mme [C] au versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner Mme [C] aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions notifiées le 9 février 2022, Mme [C] demande à la cour de :

- dire et juger mal fondé l'appel formé par M. [Y] ;

- débouter M. [Y] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions ;

- dire et juger recevable et bien fondé l'appel incident formé par Mme [C] sur les chefs de jugement fixant le montant des dommages intérêts en réparation du préjudice subi sur la nullité du mariage ;

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a jugé que le mariage de Mme [C] et M. [Y] était nul et de nul effet ;

- dire et juger que M. [Y] était déjà marié avec Mme [D] depuis le 18 juillet 2000, lorsqu'il a épousé Mme [C] le 14 janvier 2017 ;

- dire et juger que le jugement de divorce algérien versé au débat par M. [Y] est daté du 7 juillet 2019, et qu'il est donc postérieur au mariage célébré en France ;

- dire et juger que conformément aux dispositions de l'article 147 du code civil, M. [Y] ne pouvait contracter mariage avec Mme [C], sa première union en Algérie n'étant pas dissoute ;

- dire et juger également que M. [Y] a produit un acte de naissance irrégulier lors du dépôt de dossier de mariage auprès de l'officier d'état civil de la mairie d'[Localité 5], cet acte ne portant aucune mention marginale faisant référence à son premier mariage en Algérie avec Mme [D] ;

- dire et juger que Mme [C] a été trompée sur les qualités essentielles de l'époux, celui-ci étant déjà uni par les liens du mariage ;

- voir constater par ailleurs que le but recherché par M. [Y] était l'obtention d'un titre de séjour ;

- dire et juger que le consentement de Mme [C] a été vicié ;

en conséquence,

- dire et juger que le mariage célébré entre les époux le 14 janvier 2017 devant l'officier d'état-civil d'[Localité 5] est nul ;

- ordonner les mesures de publicité prévues par la loi ;

- dire et juger que Mme [C] a subi un préjudice moral qui doit être réparé par l'allocation de justes dommages et intérêts ;

- réformer le jugement dont appel en ce qu'il a alloué à Mme [C] une somme de 1000 euros à titre de dommages intérêts ;

- condamner M. [Y] à lui verser la somme de 5000 euros à titre de dommages et intérêts ;

- confirmer le jugement en ce qu'il a alloué à Mme [C] la somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner M. [Y] à verser à Mme [C] la somme de 2500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure devant la cour d'appel ;

- condamner le même aux entiers dépens de l'instance.

Le dossier a été communiqué au procureur général près la cour d'appel de Grenoble, qui a conclu le 29 septembre 2022 à la confirmation de la décision. Ces conclusions ont été notifiées aux parties par RPVA à la même date.

Les parties ont été invitées à l'audience de plaidoirie à déposer une note en délibéré sur la compétence des juridictions françaises et la législation applicable.

Par note en délibéré notifiée par RPVA le 6 mars 2023, M. [Y] a conclu que la validité de l'union s'apprécie pour chaque époux au regard de sa loi nationale, soit la loi algérienne s'agissant de son propre consentement et de sa capacité et la loi française pour le consentement de Mme [C].

Par note en délibéré notifiée par RPVA le 15 mars 2023, Mme [C] a conclu à la compétence des juridictions françaises et à l'application de la loi française interdisant la bigamie.

Pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est expressément renvoyé, par application de l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions susvisées.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la juridiction compétente et la loi applicable

M. [Y] est de nationalité algérienne. Mme [C] est de nationalité française. Les deux époux résidaient ensemble en France depuis leur mariage en 2017 et y résident toujours habituellement.

S'agissant du divorce, de la séparation de corps et de l'annulation du mariage des époux, l'article 3 1. a) du règlement n 2201/2003 (dit Bruxelles II bis) dispose qu'est compétente pour statuer la juridiction de l'Etat membre sur le territoire duquel se trouve la résidence habituelle des époux, ou la dernière résidence habituelle des époux dans la mesure où l'un d'eux y réside encore, ou la résidence habituelle du défendeur. La dernière résidence habituelle des époux étant en France, Etat dans lequel ils résident toujours, les juridictions françaises sont donc compétentes pour connaître de la demande en annulation de mariage de Mme [C].

En application de l'article 202-1 du code civil, dans sa version en vigueur depuis le 6 août 2014, les qualités et conditions requises pour pouvoir contracter mariage sont régies, pour chacun des époux, par sa loi personnelle. Quelle que soit la loi personnelle applicable, le mariage requiert le consentement des époux au sens de l'article 146 et du premier alinéa de l'article 180. Ces dispositions sont applicables au cas d'espèce, le mariage ayant été contracté postérieurement à leur entrée en vigueur.

Il convient dès lors d'apprécier la validité du mariage au regard de la loi personnelle de chaque époux, soit en l'espèce la loi française s'agissant du consentement de Mme [C] et la loi algérienne s'agissant de l'appréciation du consentement et de la capacité de M. [Y], de nationalité algérienne.

Sur la nullité du mariage

L'article 146 du code civil français dispose qu'il n'y a pas de mariage lorsqu'il n'y a point de consentement et l'article 180 du même code que le mariage qui a été contracté sans le consentement libre des deux époux, ou de l'un d'eux, ne peut être attaqué que par les époux, ou par celui des deux dont le consentement n'a pas été libre ou par le ministère public. S'il y a eu erreur dans la personne, ou sur des qualités essentielles de la personne, l'autre époux peut demander la nullité du mariage.

Il résulte des dispositions de l'article 4 du code de la famille algérien modifié par l'ordonnance n°05-02 du 27 février 2005, que le mariage est un contrat passé entre un homme et une femme dans les formes légales et a entre autres buts de fonder une famille basée sur l'affection, la mansuétude et l'entraide, de protéger moralement les deux conjoints et de préserver les liens de famille, les articles 9 et 33 du même code disposant que le contrat de mariage est conclu par l'échange du consentement des époux et est déclaré nul si le consentement est vicié.

La loi algérienne vise donc, dans des termes identiques à ceux de la loi française, la nécessité du consentement des époux pour que le mariage soit valide, ce consentement faisant défaut en l'absence d'intention matrimoniale de l'un des époux ou des deux. Il appartient à celui qui se prévaut de l'absence d'intention matrimoniale d'en rapporter la preuve.

M. [Y] sollicite l'infirmation du jugement déféré en ce qu'il a déclaré le mariage célébré avec Mme [C] nul et de nul effet. Il considère que c'est à tort que le juge de première instance a constaté une situation de bigamie le concernant. S'il reconnaît s'être marié en Algérie avec Mme [D] en 2000, il soutient avoir divorcé en date du 12 septembre 2016 et en prend pour preuve les mentions présentes sur les actes d'état civil algériens. Il fait valoir que le jugement en date du 7 juillet 2019 ne fait qu'entériner le divorce précédemment intervenu prenant acte d'un divorce par consentement mutuel et se prévaut, à ce titre, de l'article 48 du code de la famille algérien selon lequel le divorce intervient par la volonté de l'époux. M. [Y] conteste ainsi les accusations de mensonge portées par Mme [C], soulignant qu'il n'est pas le rédacteur de l'acte d'état civil produit lors du mariage et ne peut être accusé de l'avoir manipulé. Il soutient que le consentement de Mme [C] n'a jamais été vicié, leur mariage étant par conséquent valable. Il ajoute qu'elle aurait des problèmes de santé causant des disputes récurrentes dans le couple et qu'elle l'a menacé de tout faire pour que ses papiers lui soient retirés et qu'il soit renvoyé en Algérie.

Mme [C] demande la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a déclaré le mariage nul et de nul effet. Elle fait valoir le caractère polygame du mariage contracté avec M. [Y], au motif que ce dernier était toujours marié avec son ex-femme à la date de leur mariage en 2017. Elle indique qu'elle a pu obtenir en 2018 une copie intégrale de l'acte de naissance de M. [Y] faisant état de son précédent mariage sans la mention de dissolution et que les actes d'état civil produits par M. [Y] sont irréguliers à raison de la contradiction et la variation de leurs mentions. Elle soutient que M. [Y] a sciemment versé pour le dossier de mariage un acte d'état civil ne portant aucune mention de son premier mariage et qu'il a ainsi menti sur sa qualité de célibataire lors du mariage avec Mme [C] viciant dès lors le consentement de cette dernière. Elle ajoute que M. [Y] n'a jamais eu d'intention matrimoniale à son égard et n'a contracté mariage avec elle que dans le but d'obtenir un titre de séjour, qu'il a toujours refusé toute relation physique avec elle, ne l'a pas soutenue lorsqu'elle a eu des problèmes de santé et a finalement quitté le domicile commun dès l'obtention de sa carte de résident.

Il est constant que M. [Y] s'est marié le 18 juillet 2000 avec Mme [N] [D], dont il a divorcé le "12/09/2016 [par] jugement du 07/07/2019 Tribunal de Mazouna ", selon les mentions figurant sur la copie de son acte de naissance datée du 18 septembre 2019 et celle de la même date de son acte de mariage avec Mme [D]. M. [Y] produit également une copie du jugement de divorce rendu le 11 juillet 2019 par le tribunal de Mazouna en Algérie, dont le dispositif " entérine le divorce coutumier survenu le 12.09.2016 à [Localité 4] ".

Or, il ressort de la copie de l'acte de naissance, datée du 26 octobre 2016, fournie par M. [Y] lors du dépôt du dossier de mariage avec Mme [C] qu'il n'y a mention ni de son précédent mariage avec Mme [D], ni de son divorce, pourtant mentionnés sur les copies plus récentes versées au dossier.

L'acte de naissance fourni lors du mariage ne faisant pas mention de cette précédente union en Algérie, Mme [C] est bien fondée à déclarer qu'elle a été trompée sur les qualités essentielles de son époux et que son consentement a par conséquent été vicié. Il convient donc d'annuler pour vice de consentement le mariage prononcé le 14 janvier 2017, sans qu'il y ait besoin de rechercher s'il était également contraire à l'ordre public français prohibant la polygamie et si M. [Y] était animé d'une intention matrimoniale. Le jugement déféré sera en conséquence confirmé en ce qu'il a prononcé l'annulation du mariage et ordonné les mesures de publicité de cette décision.

Sur la demande de dommages intérêts

Aux termes l'article 1240 du code civil, celui qui, par sa faute, cause à autrui un dommage est tenu de le réparer.

M. [Y] sollicite l'infirmation du jugement déféré en ce qu'il l'a condamné à verser à Mme [C] la somme de 1000 euros à titre de dommages et intérêts. Il fait valoir que n'étant pas marié au moment de son union avec Mme [C], cette dernière n'a subi aucun préjudice justifiant l'allocation de dommages et intérêts. A titre subsidiaire, il demande que le montant des dommages et intérêts soit ramené à de plus justes proportions arguant qu'il était, en tout état de cause, séparé de fait avec sa première femme et que le préjudice subi par Mme [C] ne pouvait dès lors qu'être très limité.

Mme [C] forme un appel incident sur le montant des dommages intérêts lui étant alloués, qu'elle souhaite voir porter à 5000 euros. Elle soutient que M. [Y] l'a délibérément trompée sur son intention matrimoniale et en se présentant comme célibataire. Elle déclare qu'elle pensait véritablement fonder un foyer avec lui et a été particulièrement affectée lorsqu'elle a appris que son mariage n'était en réalité qu'une mascarade en vue de l'obtention d'un titre de séjour et sollicite la réparation du préjudice moral subi du fait du comportement fautif de M. [Y].

S'il ressort des pièces versées au dossier que Mme [C] a été trompée sur les qualités essentielles de M. [Y], n'ayant pas connaissance qu'il avait été préalablement marié en Algérie, elle ne justifie pas qu'il l'a épousée sans intention matrimoniale dans le seul but d'obtenir un titre de séjour. Elle ne fournit à ce titre qu'un courrier qu'elle a elle-même envoyé au Préfet de l'Isère en date du 12 août 2018 ne faisant que reprendre ses propres déclarations, sans élément de nature à les appuyer. La seule faute pouvant être imputée à M. [Y] est donc d'avoir caché son précédent mariage.

Ce comportement fautif ayant entraîné l'annulation du mariage avec Mme [C], celle-ci est bien fondée à solliciter l'allocation de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral subi. Le jugement sera confirmé en ce qu'il lui a alloué la somme de 1000 euros à ce titre.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

M. [Y] sollicite la condamnation de Mme [C] à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Mme [C] sollicite la condamnation de M. [Y] à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel ainsi qu'aux entiers dépens, outre la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a condamné celui-ci à lui verser la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

M. [Y], succombant en ses prétentions en première instance et en appel, le jugement sera confirmé en ce qu'il l'a condamné à verser 1000 euros à Mme [C] au titre de l'article 700 du code de procédure civile et il sera condamné à lui verser 1000 euros supplémentaires sur le même fondement à hauteur d'appel. Il sera aussi condamné aux entiers dépens d'appel et le jugement sera également confirmé en ce qu'il l'a condamné aux dépens de première instance avec distraction au profit des avocats en la cause et application des règles en matière d'aide juridictionnelle.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Déclare la juridiction française compétente et applique la loi française à l'égard de Mme [C] et la loi algérienne à l'égard de M. [Y],

Confirme le jugement rendu le 26 juillet 2021 par le tribunal judiciaire de Grenoble en toutes ses dispositions frappées d'appel,

Y ajoutant,

Condamne M. [Y] à verser à Mme [C] la somme de 1000 euros en appel en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

Condamne M. [Y] aux entiers dépens d'appel, qui seront recouvrés conformément à la loi sur l'aide juridictionnelle.

PRONONCÉ par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

SIGNÉ par la présidente Anne Barruol et par Amélia Thuillot, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.

La greffière                                                                                      La Présidente

 

A. THUILLOT                                                                           A. BARRUOL


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Chbre des aff. familiales
Numéro d'arrêt : 21/03811
Date de la décision : 23/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-23;21.03811 ?
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