N° RG 22/01854 - N° Portalis DBVM-V-B7G-LLNL
N° Minute :
C3
Copie exécutoire délivrée
le :
à
Me Jean-michel COLMANT
la SELARL DAUPHIN ET MIHAJLOVIC
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
2ÈME CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU MARDI 21 FEVRIER 2023
Appel d'une ordonnance (N° R.G. 21/00282) rendue par le Juge des contentieux de la protection de GAP en date du 01 février 2022, suivant déclaration d'appel du 09 Mai 2022
APPELANTE :
Mme [G] [C]
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 1]
Représentée et plaidant par Me Jean-Michel COLMANT, avocat au barreau de HAUTES-ALPES
INTIMÉ :
M. [L] [P]
né le 09 Octobre 1960 à [Localité 5] ([Localité 5])
de nationalité Française
[Adresse 4]
[Localité 1]
Représenté par Me Josette DAUPHIN de la SELARL DAUPHIN ET MIHAJLOVIC, avocat au barreau de GRENOBLE
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/01854 du 01/08/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de GRENOBLE)
COMPOSITION DE LA COUR : LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Mme Emmanuèle Cardona, présidente
M.Laurent Grava, conseiller,
Mme Anne-Laure Pliskine, conseillère
DÉBATS :
A l'audience publique du 06 décembre 2022, Anne-Laure Pliskine, conseillère, qui a fait son rapport, assistée de Caroline Bertolo, greffière, en présence de [H] [E], greffière stagiaire, a entendu seule les avocats en leurs conclusions et Me Colmant en sa plaidoirie, les parties ne s'y étant pas opposées conformément aux dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile.
Il en a rendu compte à la Cour dans son délibéré et l'arrêt a été rendu à l'audience de ce jour.
EXPOSÉ DU LITIGE
Par acte sous seing privé du 8 mars 2020 Mme [G] [C] a donné à bail à M.[L] [P] un studio sis au 1er étage, situé [Adresse 4], moyennant un loyer de 355 euros, outre une provision pour charges de 10 euros.
Par acte d'huissier en date du 9 mars 2021, elle lui a fait délivrer un commandement de payer visant la clause résolutoire, portant sur les échéances de loyer de février et mars 2021.
Mme [C] a saisi en référé le juge des contentieux de la protection de Gap aux fins notamment de voir constater l'acquisition de la clause résolutoire et d'ordonner l'expulsion de M.[P].
Par ordonnance du 1erfévrier 2022, le juge des contentieux de la protection de Gap a :
-dit que la pièce de Mme [C] intitulée 'décompte manuscrit établi par Mme [G] [C] des sommes dues actualisées' et communiquée en cours de délibéré est irrecevable,
-dit que l'action de Mme [C] est recevable,
-dit n'y avoir lieu à référé s'agissant des demandes tant principales que reconventionnelles, lesquelles relèvent du juge du fond, à l'exception de la demande de M. [P] relative à l'obtention de quittances de loyers,
-dit que Mme [C] doit fournir à M.[P] les quittances de loyer relatives à la période allant de mars 2020 à janvier 2021, dans un délai de 45 jours à compter de la présente décision,
-condamné Mme [C] aux dépens, recouvrés comme en matière d'aide juridictionnelle,
-rejeté les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
-rejeté toutes autres demandes,
-rappelé que la présente ordonnance est exécutoire à titre provisoire.
Par déclaration en date du 9 mai 2022, Mme [C] a interjeté appel de l'ordonnance.
Dans ses conclusions notifiées le 30 septembre 2022, Mme [C] demande à la cour de :
-juger l'appel du bailleur recevable et fondé et y faire droit,
-juger l'appel incident du locataire en date du 20 juin 2022 infondé et l'en débouter,
intégralement, et de même de toutes prétentions d'appel incident ultérieures, dont notamment celles de 25 juillet 2022 puis du 30 septembre 2022,
-dire n'y avoir lieu de condamner le bailleur à exécuter les travaux réclamés par le locataire,
Ce faisant, réformer et infirmer la décision querellée en ce qu'elle a dit et jugé que les demandes principales ne relevaient pas du juge des référés mais du seul juge du fond, a débouté intégralement Mme [C] de ses demandes et l'a condamnée au entiers dépens,
Et alors statuer à nouveau et faire droit aux prétentions de l'exposante devant le juge du 1er degré et, en tout état de cause,
-constater que le locataire a commis des manquements graves à ses obligations et le jeu de la clause résolutoire à compter du 9 mai 2021,
Vu le commandement de payer visant la clause résolutoire délivré au locataire le 9 mars 2021 et resté infructueux plus de 2 mois, ayant produit ses pleins effets,
Vu le fait que le locataire ne rapporte pas la preuve qui lui incombe au soutien de son allégation de paiement en espèces, allégation contredite par le bailleur.
En conséquence,
-constater la résiliation de plein droit par le jeu de la clause résolutoire du bail et prononcer la résiliation pure et simple, à ses torts, du bail qui lui a été consenti le 8 mars 2020.
En conséquence,
-prononcer l'expulsion de M. [L] [P] des lieux qu'il occupe au [Adresse 3] à [Localité 1], ainsi que de tous occupants de son chef, en la forme ordinaire et avec l'assistance du commissaire de police et de la force publique si besoin est, outre astreinte d'un montant de 50 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir, et ce jusqu'au jour de la complète libération des lieux,
-ordonner la séquestration des meubles et objets mobiliers garnissant les lieux en tel garde-meubles qu'il plaira au tribunal de désigner, aux frais, risques et périls de M. [L] [P],
-le condamner au paiement d'une provision de montant de 448 euros, APL déduite, au titre des loyers impayés de février à mai 2021 inclus,
-fixer à titre provisionnel le montant de l'indemnité d'occupation à la somme de 400 euros par mois,
-condamner M. [L] [P] au paiement d'une somme de 400 euros mensuelle hors charges de la date du 9 mai 2021, soit à Août 2021, une somme de 1.200 euros, à parfaire jusqu'à la parfaite libération des lieux à titre de provision d'indemnité d'occupation.
Conformément aux articles 696, 699 [éventuellement, 697, 698] et 700 du code de procédure civile :
-condamner M. [L] [P], en sa qualité de défendeur, aux entiers dépens de l'instance conformément à l'article 696 du code de procédure civile,
-dire que les dépens seront recouvrés directement par conformément à l'article 699 du code de procédure civile ;
-condamner M. [L] [P] à la somme de 500 euros, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de frais irrépétibles de 1ère instance et référé.
Et y ajoutant à titre additionnel en appel
-condamner l'intimé au paiement d'une somme de 700 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de frais irrépétibles d'appel et aux entiers dépens d'appel.
Au soutien de ses demandes, Mme [C] énonce que le premier juge a renversé la charge de la preuve et qu'il a suffi au locataire débiteur d'invoquer de prétendus paiements en espèces, contestés par le créancier, pour que la contestation devienne sérieuse, et conduise à faire débouter le bailleur de sa demande de constatation du jeu de la clause résolutoire du bail.
Elle déclare que M. [P] n'a jamais repris le paiement des loyers, qui restent impayés depuis le mois de février 2021.
Elle conteste les désordres allégués par l'intimé.
Dans ses conclusions notifiées le 27 septembre 2022, M.[P] demande à la cour de :
-ordonner à Madame [C] de justifier des sommes perçues par l'administrateur ad hoc.
-confirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a débouté Madame [C] de sa demande concernant la résiliation de plein droit du bail, ainsi que de toutes ses demandes, fins et conclusions.
-confirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a ordonné à Madame [C] de fournir à Monsieur [P] des quittances de loyers.
-infirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a débouté Monsieur [P] de ses demandes reconventionnelle de travaux.
-condamner Madame [C] à exécuter à ses frais les travaux et remplacements nécessaires incombant au bailleur (remplacement du chauffe-eau, travaux de mise aux normes de l'installation électrique, travaux de plomberie nécessaires à la reprise des fuites d'eau et de remise en état).
-condamner Madame [C] à verser à Monsieur [P] la somme de 2 500 euros ainsi que 5 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices subis.
-condamner Madame [C] [G] à verser la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.
M.[P] indique qu'il a a été placé le 19 juillet 2022 sous sauvegarde de justice pour une durée de 18 mois et qu'un administrateur ad hoc a été désigné, chargé de régler ses loyers mensuels et de régulariser la situation locative de ce dernier avec le bailleur.
Il énonce qu' en l'absence de décompte depuis l'origine mentionnant au débit les loyers et charges dus et au crédit (à leur exacte date de réception) les versements effectués, la cour n'est pas en mesure de vérifier si les causes du commandement ont été apurées dans le délai de deux mois, ni le montant exact des sommes réclamées à titre de provision, qu'en tout état de cause, il paie ses loyers en liquide.
Il déclare que le bailleur refuse d'effectuer des travaux pourtant nécessaires sur des équipements vétustes, ce qui a aggravé son état de santé.
La clôture a été prononcée le 16 novembre 2022.
MOTIFS
Sur la demande de constat de la clause résolutoire
Selon l'article 834 du code de procédure civile, dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence, peuvent ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.
Selon l'article 24 de la loi du 6 juillet 1989, toute clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges aux termes convenus ou pour non-versement du dépôt de garantie ne produit effet que deux mois après un commandement de payer demeuré infructueux.
En l'espèce, si Mme [C] verse bien aux débats le commandement de payer, force est de constater qu'elle ne produit toujours pas en cause d'appel un décompte de nature à permettre de vérifier les sommes réellement dues par M.[P], et ce alors que le premier juge avait indiqué qu'une telle pièce était indispensable.
Contrairement à ce qu'allègue Mme [C], le premier juge n'a opéré aucun renversement de la charge de la preuve et n'a nullement pris en compte les dires de M.[P] quant à d'éventuels paiements en liquide, non prouvés.
Faute de pouvoir apprécier le montant exact de la créance et de vérifier si les conditions posées par la loi du 6 juillet 1989 étaient remplies, c'est à juste titre que le premier juge a débouté Mme [C] de ses demandes.
Sur les demandes reconventionnelles
Les demandes de M.[P] quant aux travaux éventuels à effectuer ne relèvent pas de la compétence du juge des référés, juge de l'évidence.
Il n'appartient pas à à Madame [C] de justifier des sommes perçues par l'administrateur ad hoc, mais au contraire, en application de l'article 1353 alinéa 2 du code civil, au débiteur de justifier du paiement des loyers, ce que M.[P] ne fait pas.
Il sera débouté de ses demandes.
Chaque partie conservera la charge de ses dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement et contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Confirme l'ordonnance déférée ;
Y ajoutant ;
Dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;
Dit que chaque partie conservera la charge de ses dépens d'appel.
Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Arrêt signé par Mme Emmanuèle Cardona, Présidente de la deuxième chambre civile et par la Greffière,Caroline Bertolo, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE