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21/02/2023 | FRANCE | N°21/01486

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Ch.secu-fiva-cdas, 21 février 2023, 21/01486


C3



N° RG 21/01486



N° Portalis DBVM-V-B7F-KZZG



N° Minute :





































































Notifié le :



Copie exécutoire délivrée le :





La CAF DE L'ISERE



Me Cécile GABION





AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL

DE GRENOBLE



CHAMBRE SOCIALE - PROTECTION SOCIALE

ARRÊT DU MARDI 21 FEVRIER 2023





Appel d'une décision (N° RG 18/00717)

rendue par le pôle social du tribunal judiciaire de Grenoble

en date du 29 janvier 2021

suivant déclaration d'appel du 19 mars 2021





APPELANTE :



La Caisse d'Allocations Familiales - CAF - de l'Isère, prise en la personne de son représen...

C3

N° RG 21/01486

N° Portalis DBVM-V-B7F-KZZG

N° Minute :

Notifié le :

Copie exécutoire délivrée le :

La CAF DE L'ISERE

Me Cécile GABION

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE SOCIALE - PROTECTION SOCIALE

ARRÊT DU MARDI 21 FEVRIER 2023

Appel d'une décision (N° RG 18/00717)

rendue par le pôle social du tribunal judiciaire de Grenoble

en date du 29 janvier 2021

suivant déclaration d'appel du 19 mars 2021

APPELANTE :

La Caisse d'Allocations Familiales - CAF - de l'Isère, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité

[Adresse 1]

[Localité 2]

comparante en la personne de M. [U] [W], régulièrement muni d'un pouvoir

INTIMEE :

Mme [B] [L]

née le 1er janvier 1966 à [Localité 5] (Maroc)

[Adresse 3]

[Localité 2]

représentée par Me Cécile GABION, avocat au barreau de GRENOBLE substituée par Me Laure ARNAUD, avocat au barreau de GRENOBLE

(bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro 2021/006197 du 18/06/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de GRENOBLE)

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DEBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

M. Jean-Pierre DELAVENAY, président,

Mme Isabelle DEFARGE, conseillère,

M. Pascal VERGUCHT, conseiller,

Assistés lors des débats de M. Fabien OEUVRAY, greffier,

DÉBATS :

A l'audience publique du 08 décembre 2022,

M. Jean-Pierre DELAVENAY, président, chargé du rapport, Mme Isabelle DEFARGE, conseillère et M. Pascal VERGUCHT, conseiller ont entendu les représentants des parties en leurs observations,

Et l'affaire a été mise en délibéré à la date de ce jour à laquelle l'arrêt a été rendu.

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Le 22 mars 2017, la Caisse d'Allocations Familiales (CAF) de l'Isère a notifié à Mme [B] [L] un trop perçu de Revenu de Solidarité Active (RSA), d'Allocation de Soutien Familial (ASF), d'Allocation Personnalisée Logement (APL), de complément familial, de prime de Noël et d'allocation de rentrée scolaire pour un montant total de 32 949,99 euros au titre de la période du 1er août 2013 au 28 février 2017.

Une pénalité administrative de 200 euros a également été appliquée par la caisse au motif que Mme [L] a commis des man'uvres frauduleuses en ne déclarant pas sa vie commune avec M. Z. depuis le 1er août 2013.

Une notification rectificative d'indu a été adressée le 23 mars 2017 à Mme [L], portant le montant global à la somme de 33 801,60 euros.

Les 3 juillet 2018 et 13 septembre 2018, Mme [L] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Grenoble de deux recours distincts aux fins de contestation des décisions de la commission de recours amiable de la CAF de l'Isère des 14 mai et 18 mai 2018 maintenant les indus notifiés au titre de prestations familiales versées sur les périodes suivantes :

- du mois d'août 2013 au mois de janvier 2017 ; indu de 11 783,18 euros,

- pour la période de 2014, 2015 et 2016 ; indu de 1 006,17 euros.

Par jugement du 29 janvier 2021, le pôle social du tribunal judiciaire de Grenoble a :

- ordonné la jonction des affaires des affaires RG n° 18/00717 et 18/01062 sous le RG n° 18/00717,

- annulé la procédure de contrôle engagée par la CAF de l'Isère ayant conduit à la notification d'un indu de prestations notifié le 23 mars 2017,

- annulé l'indu de prestations notifié le 23 mars 2017 par la CAF de l'Isère à l'encontre de Mme [L] ainsi que toute pénalité subséquente,

- condamné la CAF de l'Isère à verser à Me Gabion la somme de 1 200 euros en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991,

- condamné la CAF de l'Isère aux dépens de l'instance.

Le 19 mars 2021, la CAF de l'Isère a interjeté appel de cette décision.

Les débats ont eu lieu à l'audience du 08 décembre 2022 et les parties avisées de la mise à disposition au greffe de la présente décision le 21 février 2023.

EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

La caisse d'allocations familiales de l'Isère selon ses conclusions d'appel parvenues le 22 septembre 2021 reprises à l'audience demande à la cour de :

- réformer le jugement déféré,

- lui allouer le bénéfice de ses écritures et pièces de première instance, datées pour ses conclusions initiales du 16 septembre 2020 et pour ses conclusions complémentaires du 23 novembre 2020,

- à titre reconventionnel, condamner Mme [L] au remboursement de la somme de 9 329,32 euros représentant le solde des prestations litigieuses soumises à condition de ressources et d'isolement relatives à la période d'août 2013 à janvier 2017.

La CAF soutient que la procédure de contrôle et l'indu de prestations qui en découle sont réguliers dès lors qu'elle a régulièrement informé Mme [L], avant la notification de cet indu, de ce qu'elle avait fait usage de son droit de communication en lui adressant deux courriers des 06 juillet et 09 septembre 2016 qu'elle verse aux débats en cause d'appel. Elle observe que l'allocataire n'a donné aucune suite à ces deux courriers.

Mme [B] [L] au terme de ses conclusions d'intimée notifiées par RPVA le 28 juillet 2022 reprises à l'audience demande à la cour de :

A titre principal,

- juger que la CAF de l'Isère ne rapporte pas la preuve de la régularité du contrôle diligenté et ayant donné lieu à l'établissement du rapport du 13 juin 2016,

En conséquence,

- annuler le contrôle effectué par la CAF de l'Isère et de ce fait, l'indu de prestations familiales et la pénalité subséquente,

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel,

A titre subsidiaire,

- juger que la CAF de l'Isère ne rapporte pas la preuve d'une vie maritale entre elle et M. Z..sur la période du 1er août 2013 au 28 février 2017,

En conséquence,

- annuler l'indu de prestations familiales notifié le 13 mars 2017 et la pénalité notifiée le 03 juillet 2017,

En tout état de cause,

- condamner la CAF de l'Isère à lui rembourser les retenues effectuées sur ses prestations en remboursement partiel de l'indu annulé,

- condamner la CAF de l'Isère à verser à son conseil une somme de 2.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 à charge pour elle de renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale,

- condamner la CAF de l'Isère aux entiers dépens.

Sur l'indu de prestations familiales elle soutient que le rapport de contrôle du 13 juin 2016 fondant l'indu notifié le 23 mars 2017 n'a jamais été porté à sa connaissance avant la présente procédure et qu'en outre, la période d'indu notifié va jusqu'au mois de février 2017, soit au delà de la période objet du contrôle réalisé en juin 2016.

Elle conteste avoir reçu les courriers de la caisse d'allocations familiales des 06 juillet et 09 septembre 2016 par lesquels elle aurait été informée de l'exercice par la caisse de son droit de communication.

Enfin elle soutient qu'il n'est pas justifié que le rapport de contrôle soit signé par un agent assermenté, agréé et compétent ou ayant reçu délégation.

Sur le fond elle dénie l'existence d'une vie maritale avec M. [Z] qui, interdit bancaire, a pu utiliser ponctuellement son compte par commodité qu'elle lui a consenti.

Pour le surplus de l'exposé des moyens des parties au soutien de leurs prétentions il est renvoyé à leurs conclusions visées ci-dessus par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIVATION

L'article R. 133-9-2 du code de la sécurité sociale applicable au litige dispose que :

'L'action en recouvrement de prestations indues s'ouvre par l'envoi au débiteur par le directeur de l'organisme compétent d'une notification de payer le montant réclamé par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception. Cette lettre précise le motif, la nature et le montant des sommes réclamées et la date du ou des versements donnant lieu à répétition. Elle mentionne l'existence d'un délai de deux mois imparti au débiteur pour s'acquitter des sommes réclamées et les modalités selon lesquelles les indus de prestations pourront être récupérés, le cas échéant, par retenues sur les prestations à venir. Elle indique les voies et délais de recours ainsi que les conditions dans lesquelles le débiteur peut, dans le délai mentionné au deuxième alinéa de l'article R 142-1 présenter ses observations écrites ou orales.

A l'expiration du délai de forclusion prévu à l'article R. 142-1 ou après notification de la décision de la commission instituée à ce même article, le directeur de l'organisme créancier compétent, en cas de refus du débiteur de payer, lui adresse par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception une mise en demeure de payer dans le délai d'un mois qui comporte le motif, la nature et le montant des sommes demeurant réclamées, la date du ou des versements indus donnant lieu à recouvrement, les voies et délais de recours et le motif qui, le cas échéant, a conduit à rejeter totalement ou partiellement les observations présentées'.

Au cas présent la date de mise en recouvrement doit être fixée au 23 mars 2017, date de la notification d'indu rectificative par la caisse d'allocations familiales à Mme [L].

L'article L. 114-21 dans sa rédaction antérieure au 23 décembre 2018 applicable au litige prévoit que :

'L'organisme ayant usé du droit de communication en application de l'article L. 114-19 est tenu d'informer la personne physique ou morale à l'encontre de laquelle est prise la décision de supprimer le service d'une prestation ou de mettre des sommes en recouvrement, de la teneur et de l'origine des informations et documents obtenus auprès de tiers sur lesquels il s'est fondé pour prendre cette décision. Il communique, avant la mise en recouvrement ou la suppression du service de la prestation, une copie des documents susmentionnés à la personne qui en fait la demande'.

Il doit être satisfait à cette obligation d'information, qui constitue une formalité substantielle dont le non respect entraîne la nullité de la procédure de contrôle, avec une précision suffisante pour mettre la personne contrôlée en mesure de disposer d'un accès effectif, avant la mise en recouvrement de l'indu, à ces informations et documents.

Cette obligation a pour objet de permettre à l'allocataire, notamment, de discuter utilement leur provenance ou de demander que les documents qui, le cas échéant, contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition avant la récupération de l'indu ou la suppression du service de la prestation, afin qu'il puisse vérifier l'authenticité de ces documents et en discuter la teneur ou la portée.

La circulaire DSS n° 2011-323 du 21 juillet 2011 relative aux conditions d'application par les organismes de sécurité sociale du droit de communication institué aux articles L. 114-19 et suivants du code de la sécurité sociale précise que

'L'intéressé doit être informé par lettre recommandée avec demande d'avis de réception :

- que l'organisme de sécurité sociale a, dans le cadre des pouvoirs qui lui sont dévolus, fait usage du droit de communication ;

- que l'organisme de sécurité sociale souhaite recueillir les explications de l'intéressé sur les informations obtenues dès lors qu'elles sont de nature à remettre en cause le service d'une prestation ;

- que l'intéressé dispose du droit d'obtenir communication des informations recueillies par l'organisme.

L'intéressé disposera alors d'un délai qui ne saurait excéder quinze jours pour apporter à la fois ses explications et obtenir, dans le même délai, s'il en fait la demande, les informations détenues par l'organisme'.

Même s'il s'agit d'une recommandation de preuve qui peut être palliée par tout autre moyen admissible, la caisse d'allocations familiales doit justifier avoir délivré cette information à l'allocataire avant la mise en recouvrement.

La caisse d'allocations familiales de l'Isère soutient avoir informé Mme [L] de l'exercice de son droit de communication par le courrier du 06 juillet 2016 puisque celui qu'elle invoque également du 09 septembre 2016 ne contient aucune mention se rapportant à l'exercice de cette faculté ('Je fais suite au contrôle domicilaire du 13 juin 2016. Après vérification il apparaît que M. [X] [Z] est domicilié chez vous (...) Vous voudrez bien sous quinzaine apporter les précisions suivantes (...) Joindre tout justificatif de domiciliation de M. [X] [Z] (..) Ces informations seront vérifiées').

Or Mme [L] conteste avoir reçu ce courrier du 06 juillet 2016 dont la caisse d'allocations familiales ne justifie ni de la réception, ni même de l'envoi.

La caisse d'allocations familiales se réfère également au rapport du 26 octobre 2016 établi après le contrôle du 13 juin 2016 au domicile de Mme [L] dans lequel il est fait état (pages 4 et 5) de l'exercice d'un droit de communication auprès de la [4] et du recueil des mouvements du compte bancaire de Mme [L] entre juillet 2014 et mars 2016 avec la mention suivante en dernière page (7) :

'L'allocataire a été informé(e) de la faculté, pour la Caf, de mettre en oeuvre le droit de communication prévu aux articles L 114-19 et suivants du code de la sécurité sociale, dans le cadre du contrôle et de son droit à obtenir la communication des documents obtenus auprès des tiers, si le contrôle aboutit à un recouvrement ou à la suppression de la prestation.

Oralement lors de l'entretien : Non

Sera informé(e) par écrit : Oui'.

Mme [L] conteste aussi avoir été destinataire de ce rapport avant la mise en recouvrement et la caisse d'allocations familiales n'a pas rapporté la preuve contraire.

La procédure de contrôle n'a donc pas été effectuée contradictoirement, de sorte qu'elle est entachée de nullité, de même que la procédure de recouvrement en découlant.

Le jugement qui a annulé la procédure de contrôle, l'indu de prestations notifié le 23 mars 2017, condamné la caisse d'allocations familiales aux dépens et à verser au conseil de Mme [L] une somme de 1 200 euros par application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, devra donc être confirmé.

La demande de Mme [L] de condamner la CAF de l'Isère à lui rembourser les retenues effectuées sur ses prestations en remboursement partiel de l'indu annulé avait bien été présentée devant la juridiction de première instance qui l'avait prise en compte dans les motifs de son jugement (cf page 4 : 'Il convient en conséquence d'annuler la procédure de contrôle ainsi que l'indu de prestations, d'une part, et la pénalité administrative, d'autre part, sur lequel ils reposent. La caisse sera ainsi condamnée à rembourser à Madame [B] [L] les sommes retenues, de manière indue, sur ses prestations en remboursement partiel de l'indu annulé'), mais pas reprise au dispositif ayant seul force exécutoire.

Le jugement déféré sera donc confirmé, sauf à rectifier l'erreur matérielle qu'il contient dans son dispositif en condamnant la caisse d'allocations familiales de l'Isère à rembourser à Mme [L] les retenues effectuées sur ses prestations en remboursement partiel de l'indu annulé

La caisse d'allocations familiales succombant supportera les dépens d'appel.

Il serait inéquitable de condamner la caisse d'allocations familiales à une somme supplémentaire à celle précédemment allouée par le jugement déféré au conseil de l'appelante, sur le fondement des dispositions de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire, en dernier ressort après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme le jugement n° RG 18/00717 rendu le 29 janvier 2021 par le pôle social du tribunal judiciaire de Grenoble, sauf à rectifier l'erreur matérielle qu'il contient,

Y ajoutant,

Condamne la caisse d'allocations familiales de l'Isère à rembourser à Mme [B] [L] les retenues effectuées sur ses prestations en remboursement partiel de l'indu annulé.

Condamne la caisse d'allocations familiales de l'Isère aux dépens d'appel.

Déboute Me Cécile Gabion de sa demande par application des dispositions de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par M. DELAVENAY, président et par M. OEUVRAY, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Ch.secu-fiva-cdas
Numéro d'arrêt : 21/01486
Date de la décision : 21/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-21;21.01486 ?
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