C8
N° RG 21/00346
N° Portalis DBVM-V-B7F-KWTE
N° Minute :
Notifié le :
Copie exécutoire délivrée le :
Me Leïla BENAMOR
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE SOCIALE - PROTECTION SOCIALE
ARRÊT DU VENDREDI 27 JANVIER 2023
Ch.secu-fiva-cdas
Appel d'une décision (N° RG 20/00339)
rendue par le pôle social du tribunal judiciaire d'Annecy
en date du 17 décembre 2020
suivant déclaration d'appel du 22 janvier 2021
APPELANT :
M. [R] [B]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Localité 2]
représenté par Me Leïla BENAMOR, avocat au barreau d'ANNECY
(bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro 2021/001599 du 12/02/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de GRENOBLE)
INTIMEE :
La CPAM de Haute-Savoie, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité
[Adresse 1]
[Localité 2]
comparante en la personne de Mme [C] [Y], régulièrement munie d'un pouvoir
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Mme Isabelle DEFARGE, conseillère, faisant fonction de présidente,
M. Pascal VERGUCHT, conseiller,
Mme BLONDEAU-PATISSIER Hélène, conseillère,
DÉBATS :
A l'audience publique du 1er décembre 2022
Mme Isabelle DEFARGE, conseillère faisant fonction de présidente, en charge du rapport et M. Pascal VERGUCHT, conseiller, ont entendu les représentants des parties en leurs observations, assistés de M. Fabien OEUVRAY, Greffier, conformément aux dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, les parties ne s'y étant pas opposées ;
Puis l'affaire a été mise en délibéré au 27 janvier 2023, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la cour.
L'arrêt a été rendu le 27 janvier 2023.
Le 12 juin 2017 la SA [5] a déclaré à la CPAM de Haute-Savoie l'accident survenu le 07 juin 2017 à 10h20 à son salarié M. [R] [B] dans les circonstances suivantes : 'l'intérimaire utilisait un marteau-piqueur suite à cela il s'est fait mal au dos sur le chantier d'[Localité 4]. Selon ses dires, en utilisant un marteau-piqueur, l'outil s'est coincé dans l'enrobé, en voulant le secouer pour le sortir, son dos a craqué. Siège des lésions : région lombaire. Nature des lésions : douleur effort, lumbago'.
Le certificat médical initial établi le 08 juin 2017 à 10h15 mentionne 'trauma rachis lombaire, sciatalgie gauche. Radio demandée' et prescrit un arrêt de travail jusqu'au 14 juin 2017.
L'état de santé de M. [B] a été déclaré consolidé à la date du 08 mars 2019 et le 29 mars 2019 lui a été notifié à effet du 09 mars 2019 un taux d'incapacité permanente partielle de 8 % dont 0 % de taux socio-professionnel que la commission de recours amiable de la caisse a maintenu par décision du 06 février 2020.
Il a été licencié le 09 juin 2017 et a obtenu la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé le 13 décembre 2018 pour la période du 04 décembre 2018 au 03 décembre 2023.
Le 02 juillet 2020 M. [B] a saisi le tribunal judiciaire d'Annecy d'une contestation du taux d'incapacité notifié par la caisse et par jugement du 17 décembre 2020 ce tribunal l'a débouté de sa demande et condamné aux dépens.
Le 20 janvier 2021 M. [B] a interjeté appel de ce jugement qui lui a été notifié le 31 décembre 2020 et au terme de ses conclusions déposées le 21 juillet 2021 reprises oralement à l'audience il demande à la cour :
- d'infirmer le jugement,
- d'ordonner la mise en oeuvre d'un examen médical afin qu'il soit statué sur le taux (médical) d'incapacité permanente partielle ainsi que sur le taux socio-professionnel,
- de réserver les dépens.
Au terme de ses conclusions déposées et reprises oralement à l'audience la CPAM de Haute-Savoie demande à la cour :
- de confirmer le jugement
- de rejeter toute demande de nouvelle expertise médicale,
- de débouter en conséquence le demandeur de ses demandes.
En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile il est expressément référé aux dernières écritures des parties pour plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.
SUR CE
Selon l'article L. 434-2 du code de la sécurité sociale le taux de l'incapacité permanente est déterminé d'après la nature de l'infirmité, l'état général, l'âge, les facultés physiques et mentales de la victime ainsi que d'après ses aptitudes et sa qualification professionnelle, compte tenu d'un barème indicatif d'invalidité.
M. [B] né le 25 novembre 1971 exerçait au jour de l'accident la profession de maçon VRD au salaire de base de 1 668,37 €.
Selon le rapport médical d'évaluation de son taux d'incapacité permanente partielle suite à l'accident du 07 juin 2017 et sur la base du certificat médical initial du 08 juin 2017 et d'un certificat du 21 juillet 2017 mentionnant une lésion nouvelle, le médecin conseil de la caisse à estimé que celle-ci ne constituait pas une rechute, fixé au 08 mars 2019 la date de consolidation de l'état de M. [B] et à 8 % son taux d'incapacité permanente, dont 0 % de taux socio-professionnel.
La commission médicale de recours amiable ayant rejeté son recours le 06 février 2020, c'est à cette date au plus tard que le taux d'incapacité permanente partielle de M. [B] doit être apprécié.
L'appelant estime que le taux qui lui a été notifié ne reflète pas la gêne qu'il ressent du fait de sa maladie professionnelle (ndr : de son accident du travail), qu'il n'est pas à la mesure de son dossier médical et de son aptitude physique après ce sinistre et il excipe d'une aggravation de son état.
Le certificat du Dr [F] du 13 janvier 2020 (pièce 5) indique qu'à cette date l'état de santé de M. [B] n'était pas compatible avec un poste dans le BTP ou un poste avec un travail de force, charges lourdes et station orthostatique prolongée.
Le 14 septembre 2020 le même médecin décrit une discopathie dégénérative en L5/S1 à type de protrusion associée à une hypertrophie articulaire potentiellement contraignante sur la racine S1 gauche. (pièce 8) et les pièces suivantes évoquent toutes une aggravation de l'état de M. [B].
Selon le § 3.2 RACHIS DORSO-LOMBAIRE du barème indicatif d'invalidité (accidents du travail) pris en application de l'article R. 434-32 du code de la sécurité sociale,
'si le rachis dorsal est un segment pratiquement rigide et participant peu aux mouvements, la pathologie traumatique du rachis lombaire est fréquente. Aussi, est-il indispensable de tenir compte des données rhumatologiques les plus récentes de la pathologie discale et non discale lombaire.
Pour éviter les interprétations erronées basées sur une fausse conception de l'image radiologique, il faut définir avec soin les données objectives de l'examen clinique et, notamment, différencier les constatations faites selon qu'elles l'ont été au repos ou après un effort.
L'état antérieur (arthroses lombaires ou toute autre anomalie radiologique que l'accident révèle et qui n'ont jamais été traitées antérieurement), ne doit en aucune façon être retenu dans la génèse des troubles découlant de l'accident.
Normalement, la flexion à laquelle participent les vertèbres dorsales et surtout lombaires est d'environ 60°. L'hyperextension est d'environ 30°, et les inclinaisons latérales de 70°. Les rotations atteignent 30° de chaque côté.
C'est l'observation de la flexion qui donne les meilleurs renseignements sur la raideur lombaire. La mesure de la distance doigts-sol ne donne qu'une appréciation relative, les coxo-fémorales intervenant dans les mouvements vers le bas. L'appréciation de la raideur peut se faire par d'autres moyens, le test de Schober-Lasserre peut être utile. Deux points distants de 15 cm (le point inférieur correspondant à l'épineuse de L 5), s'écartent jusqu'à 20 dans la flexion antérieure. Toute réduction de cette différence au-dessous de 5 cm atteste une raideur lombaire réelle.'
Les taux médicaux d'incapacité prévus à ce barème sont les suivants :
En cas de persistance de douleurs notamment et gêne fonctionnelle (qu'il y ait ou non séquelles de fracture) :
- Discrètes 5 à 15,
- Importantes 15 à 25,
- Très importantes séquelles fonctionnelles et anatomiques 25 à 40
A ces taux s'ajouteront éventuellement les taux estimés pour les séquelles nerveuses coexistantes.
Anomalies congénitales ou acquises : lombosciatiques.
Notamment : hernie discale, spondylolisthésis, etc. opérées ou non. L'I.P.P. sera calculée selon les perturbations fonctionnelles constatées.
En l'espèce M. [B] qui ne produit que la 1ère page du rapport d'évaluation médicale du médecin conseil, a présenté dès le 12 juin 2017 date du premier examen radiographique effectué après l'accident, une lombosciatique gauche, et le 21 décembre 2017 à l'occasion d'une infiltration scannoguidée à été décrite une lombosciatique S1 gauche depuis un accident du travail il y a 6 mois, ainsi qu'une discopathie protrusive L5S1 paramédiane gauche.
Le 23 novembre 2018 et le 24 janvier 2019 ont été décrites un point douloureux paralombaire droit et des douleurs paralombaires droites irradiant sur la partie supérieure de la fesse.
Mais ces douleurs à droite ne sont pas imputées à la lésion initiale résultant de l'accident.
Le taux médical de 8 % retenu par la caisse ne peut donc être réévalué.
La demande d'expertise médicale n'est justifiée par aucun des éléments produits antérieurs à la date de l'évaluation de ce taux.
S'agissant du taux socio-professionnel, il s'agit d'un élément médico-social qu'il appartient au médecin chargé de l'évaluation, lorsque les séquelles de l'accident ou de la maladie professionnelle lui paraissent devoir entraîner une modification dans la situation professionnelle de l'intéressé, ou un changement d'emploi, de bien mettre en relief.
La notion de qualification professionnelle se rapporte aux possibilités d'exercice d'une profession déterminée.
Quant aux aptitudes, il s'agit des facultés que peut avoir une victime d'accident du travail ou de maladie professionnelle de se reclasser ou de réapprendre un métier compatible avec son état de santé.
En l'espèce, M. [B], maçon de profession, a été licencié le 09 juin 2017 ; il a été indemnisé au titre de l'allocation de retour à l'emploi le 18 mars 2019 et a bénéficié de 543 allocations journalières ; il a été déclaré éligible au revenu de solidarité active à compter du mois de mai 2021et justifie avoir intégré une formation de pré-orientation du 11 octobre 2022 auprès de l'Association pour l'Insertion Socio-Professionnelle pour une durée prévisionnelle de 12 semaines.
Compte-tenu de la perte d'emploi effective consécutive à l'accident du 07 juin 2017, du fait que M. [B] était âgé de 49 ans en février 2020 et des faibles perspectives de retour à l'emploi ainsi démontrées, il lui sera alloué un taux socio-professionnel de 5 % en sus du taux médical de 8 % maintenu soit au total un taux d'incapacité permanente partielle de 13 %.
Le jugement sera en conséquence confirmé sauf en ce qu'il n'a attribué aucun pourcentage de taux socio-professionnel à l'appelant.
Les dépens seront mis à la charge de la CPAM de Haute-Savoie.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire, en dernier ressort après en avoir délibéré conformément à la loi,
Confirme le jugement sauf en ce qu'il n'a attribué aucun pourcentage de taux socio-professionnel à M. [R] [B] des suites de l'accident du travail dont celui-ci a été victime le 07 juin 2017,
Statuant à nouveau,
Fixe à 5 % le taux socio-professionnel d'incapacité permanente partielle de M. [R] [B] résultant de l'accident du travail du 07 juin 2017,
Y ajoutant,
Condamne la CPAM de Haute-Savoie aux dépens.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Mme Isabelle DEFARGE, conseillère faisant fonction de présidente et par M. Fabien OEUVRAY, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier La conseillère