C3
N° RG 20/01466
N° Portalis DBVM-V-B7E-KNH4
N° Minute :
Notifié le :
Copie exécutoire délivrée le :
la SELARL ACO
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE SOCIALE - PROTECTION SOCIALE
ARRÊT DU VENDREDI 27 JANVIER 2023
Ch.secu-fiva-cdas
Appel d'une décision (N° RG 18/00114)
rendue par le pôle social du tribunal judiciaire de VALENCE
en date du 06 mars 2020
suivant déclaration d'appel du 04 avril 2020
APPELANTE :
L'URSSAF Rhône-Alpes, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité
[Adresse 6]
[Localité 3]
représentée par Me Pierre-Luc NISOL de la SELARL ACO, avocat au barreau de VIENNE substitué par Me Charlotte PICHELINGAT, avocat au barreau de LYON
INTIMEE :
La SAS [5], prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité
[Adresse 7]
[Localité 1]
représentée par Me Guillaume FORTUNET de la SCP FORTUNET ET ASSOCIES, avocat au barreau d'AVIGNON substitué par Me Melanie LETELLIER-TARDY, avocat au barreau d'AVIGNON
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DU DÉLIBÉRÉ :
M. Jean-Pierre DELAVENAY, président,
Mme Isabelle DEFARGE, conseillère,
Mme BLONDEAU-PATISSIER Hélène, conseillère,
DÉBATS :
A l'audience publique du 1er décembre 2022
M. Jean-Pierre DELAVENAY, président, en charge du rapport et Mme Isabelle DEFARGE, conseillère, ont entendu les représentants des parties en leurs conclusions et plaidoirie, assistés de M. Fabien OEUVRAY, greffier, conformément aux dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, les parties ne s'y étant pas opposées ;
Puis l'affaire a été mise en délibéré au 27 janvier 2023, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la cour.
L'arrêt a été rendu le 27 janvier 2023.
L'EURL DELTA SECURITE [Adresse 2] a fait l'objet de régularisations de cotisations sociales notamment pour travail dissimulé avec verbalisation (minoration des heures de travail - taxation forfaitaire).
Dans le cadre de la recherche d'infractions relatives au travail dissimulé, les inspecteurs de l'URSSAF ont procédé à la vérification exhaustive de la facturation 'clients' et 'sous-traitance' de cette société et adressé le 25 avril 2016 à son client la SAS [5], une demande de renseignements à laquelle celle-ci n'a pas satisfait.
Le 18 octobre 2016 lui a alors été adressé une lettre d'observations concernant la mise en oeuvre de la solidarité financière prévue aux articles L.8222-1 du code du travail emportant, au prorata des prestations effectuées par l'EURL [4] à son profit un redressement de cotisations et majorations d'un montant de 59 398 €.
Le 14 mars 2017 l'URSSAF a ensuite émis à son égard en qualité de débiteur solidaire de l'EURL [4] une mise en demeure d'avoir à payer la somme de 62 261 € au titre des cotisations et majorations dues pour les années 2012 à 2015.
Le 13 décembre 2017 la commission de recours amiable a rejeté le recours formé par la SAS [5] qui a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Valence et par jugement du 06 mars 2020 ce tribunal :
- a infirmé la décision de la commission de recours amiable du 29 septembre 2017,
- a annulé la lettre d'observations du 18 octobre 2016 adressée à la SAS [5] et la mise en demeure subséquente du 14 mars 2017,
- a débouté la SAS [5] de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- a condamné l'URSSAF aux éventuels dépens.
Le 04 avril 2020 l'URSSAF Rhône-Alpes a interjeté appel de ce jugement et au terme de ses conclusions déposées le 18 janvier 2022 reprises oralement elle demande à la cour :
- d'infirmer le jugement,
Statuant à nouveau
- de confirmer le bien-fondé de la mise en oeuvre de la solidarité financière,
- de condamner en conséquence la SAS [5] à lui verser la somme de 53 859 € au titre des rappels de cotisations augmentées des majorations de retard et de redressement sans préjudice des majorations de retard complémentaires,
- de débouter la SAS [5] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,
- de la condamner à lui verser la somme de 3 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Au terme de ses conclusions déposées le 20 mai 2022 reprises oralement à l' audience la SAS [5] demande à la cour :
A titre principal
- de confirmer le jugement en toutes ses dispositions,
- de prononcer la nullité de la lettre d'observations du 18 octobre 2016 et de la mise en demeure subséquente du 14 mars 2017,
A titre subsidiaire
- de déclarer prescrites les réclamations financières formulées pour les années 2012 et 2013 au visa de l'article L.244-3 du code de la sécurité sociale,
- de dire et juger que le montant de la créance de l'URSSAF au titre de la solidarité financière des cotisations et majorations de redressement de l'EURL [4] sera fixé selon le tableau justificatif du calcul de l'URSSAF annexé à la lettre d'observations du 18 octobre 2016,
- de fixer le montant de la créance de l'URSSAF à la somme de 21 310 € et, à défaut d'application de la prescription, à la somme de 35 299 €,
En tout état de cause de condamner l'URSSAF à lui verser la somme de 3 000 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile outre entiers dépens.
En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile il est expressément référé aux dernières écritures des parties pour plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.
SUR CE
* Sur le défaut de communication du procès-verbal de travail dissimulé
C'est au motif de l'absence de justification du procès-verbal de travail dissimulé auquel mention est seulement faite à la lettre d'observations que le tribunal a annulé celle-ci.
En cause d'appel l'URSSAF Rhône-Alpes produit le procès-verbal n°2015/6089147 du 27 août 2015 relevant le délit de travail dissimulé constaté le 21 mai 2015 à l'encontre de la SARL [4], donneur d'ordre de la SAS [5], procès-verbal signé par les inspecteurs agréés et assermentés M.V. et Mme V. ainsi qu'un projet de procès-verbal daté du 07 juillet 2015 mais non signé.
La SAS [5] soutient qu'aucun de ces procès-verbaux ne constitue le procès-verbal visé à la lettre d'observations du 18 octobre 2016 comme 'clos le 03 septembre 2015'.
Mais d'une part la date de clôture d'un procès-verbal de l'URSSAF ne se confond pas nécessairement avec la date de son établissement, d'autre part la SAS [5], qui n'a pas fait l'objet des poursuites pénales ensuite engagées devant le tribunal correctionnel de Bourgoin-Jallieu à l'encontre de la seule SARL [4] sur le fondement de ce procès-verbal n'a pas qualité à se prévaloir d'une irrégularité formelle de celui-ci devant la juridiction sociale.
Ce moyen sera donc écarté et le jugement infirmé sur ce point.
* Sur la nullité de la lettre d'observations
Selon les dispositions de l'article R. 243-59 du code de la sécurité sociale dans sa version en vigueur du 1er janvier 2014 au 11 juillet 2016 ici applicable, tout contrôle est précédé de l'envoi par l'organisme chargé du recouvrement des cotisations d'un avis adressé à l'employeur ou au travailleur indépendant par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception, sauf dans le cas où le contrôle est effectué pour rechercher des infractions aux interdictions mentionnées à l'article L. 8221-1 du code du travail.(...)
A l'issue du contrôle, les inspecteurs du recouvrement communiquent à l'employeur ou au travailleur indépendant un document daté et signé par eux mentionnant l'objet du contrôle, les documents consultés, la période vérifiée et la date de la fin du contrôle.
Ce document mentionne, s'il y a lieu, les observations faites au cours du contrôle, assorties de l'indication de la nature, du mode de calcul et du montant des redressements et des éventuelles majorations et pénalités définies aux articles L. 243-7-2, L. 243-7-6 et L. 243-7-7 envisagés. (...)
La SAS [5] soutient que la lettre d'observations qui mentionne 4 chefs de redressement ne contient pas les considérations de droit et de fait constituant leur fondement, que les montants annoncés ne correspondent à aucun calcul sérieux et que le montant réclamé ne correspond pas au montant développé dans le tableau annexé à cette lettre d'observations, tant en ce qui concerne les cotisations que les majorations réclamées.
Mais la lettre d'observations datée du 18 octobre 2016 a pour objet
'Travail dissimulé
Lettre d'observations concernant la mise en oeuvre de la SOLIDARITE FINANCIERE prévue aux articles L. 8222-1 et suivants du code du travail'.
Elle mentionne au titre de la liste des documents consultés, outre le PV n°2015/6089147 déjà évoqué, les factures clients de l'EURL [4] et précise :
Au titre du chef de redressement :
1. Travail dissimulé avec verbalisation : minoration des heures de travail - taxation forfaitaire :
'Nous avons procédé à une vérification exhaustive de la facturation 'clients' ainsi que de la facturation 'sous-traitance' de l'EURL [4]. L'examen de la facturation a permis de déterminer le nombre d'heures de prestations de gardiennage réalisées par l'EURL [4] et les entreprises travaillant dans le cadre d'un contrat de sous-traitance.
Il a été constaté
- de gros écarts entre le nombre d'heures facturées et le nombre d'heures déclarés ou sous-traitées
- un ratio masse salariale déclarée/ chiffre d'affaires faible par rapport à la moyenne constatée dans la profession
(...)
Conformément aux dispositions de l'article R.242-5 du code de la sécurité sociale il a été procédé à une régularisation des cotisations au titre des heures de travail non déclarées sur la base d'une taxation forfaitaire.
Les heures de travail dissimulées ont été évaluées en fonction des divergences horaires relevées (heures facturées et heures déclarées ou sous-traitées). Un procès-verbal de travail dissimulé n° 2015/6089147 clos le 03/09/2015 a été établi par l'URSSAF Rhône-Alpes
Soit une régularisation de cotisations de
- année 2012 : 266 746€
- année 2013 : 221 128€
- année 2014 : 452 487€
- année 2015 : 102 476€
soit une majoration de redressement complémentaires pour infraction de travail dissimulé de 417 138€
2.Rémunérations occultes versées à des salariés administratifs
Sur la période contrôlée, certains salariés occupant des fonctions administratives ou de contrôle ont bénéficié de remboursement de frais professionnels (indemnités kilométriques, remboursement de frais de péage, remboursement de téléphone, frais de repas, indemnités dites 'de chien').
En l'absence de pièces justificatives, les montants payés, non justifiés, ont été intégrés dans l'assiette des cotisations car ils sont considérés commes des rémunérations occultes qui ont fait l'objet du procès-verbal de travail dissimulé n° 2015/6089147 clos le 03/09/2015 établi par l'URSSAF
Soit une régularisation de cotisations de
- année 2012 : 13 366€
- année 2013 : 15 324€
- année 2014 : 30 124€
- année 2015 : 13 395€
Soit une majoration de redressement complémentaire pour infraction de travail dissimulé de 28 884€.
II. Obligation de vigilance de la SAS [5] art L8222-1 et suivants du code du travail
Le 25/04/2016 nous vous avons adressé un courrier vous demandant de nous communiquer les documents prévus par l'article D8222-5 du code du travail que vous deviez détenir pour satisfaire à l'obligation prévue par les articles L.8222-1 et suivant du même code à savoir :
- les attestations de fournitures des déclarations sociales et de paiement des cotisations et contributions de sécurité sociale prévues à l'article L.243-15 exigibles tous les 6 mois et produites par l'EURL [4]
- un extrait Kbis ou une carte d'identification de l'inscription au répertoire des métiers de cette EURL
Nous n'avons reçu en date du 18/10/2016 aucune réponse de votre part à nouvtre courrier du 25/04/2016.
Par conséquent, nous considérons que vous ne vous êtes pas assuré de la régularité de la situation en vous faisant remettre tous les 6 mois les documents mentionnés à l'article L.8222-1 du code du travail notamment les attestations de fourniture des déclarations sociales et de paiement des cotisations dont la durée de validité est de 6 mois pour les périodes suivantes : du 01/01/2012 au 31/03/2015.
Pour ces périodes les cotisations et majorations non réglées par l'EURL [4] qui a fait l'objet d'un procès-verbal de travail dissimulé établi par notre organisme le 03/09/2015 et enregistré sous le n° 2015/6089147, sont en partie mises à votre charge au titre de la solidarité financière prévue par les articles L. 8222-1 et suivants du code du travail.
Conformément aux dispositions de l'article L. 8222-3 du code du travail, les montants de cotisations et majorations de redressement dues par l'EURL [4] mises à la charge de la SAS [5] ont été calculées au prorata des prestations effectuées par l'EURL [4] au bénéfice de la SAS [5] pendant ces périodes (chiffre d'affaire SA [5]/chiffre d'affaires total EURL [4]). Le détail du calcul est joint en annexe.
Soit un total de cotisations et majorations de redressement de 59 398€..
Ces mentions indiquent clairement l'assiette et les montants des cotisations réclamées par année, et le tableau annexé détaille les modalités du calcul effectué en indiquant le taux des cotisations réclamées pour arriver au même montant de 59 398 €.
La lettre d'observations est donc parfaitement régulière et ce moyen sera écarté.
* Sur la nullité de la mise en demeure
Selon les dispositions des articles L.244-2 du code de la sécurité sociale dans sa version en vigueur du 1er janvier 2017 au 23 décembre 2018 et R.244-1 du même code dans sa version en vigueur du 1er janvier 2017 au 16 décembre 2018 ici applicables toute action en recouvrement de cotisations sociales est obligatoirement précédée d'une mise en demeure adressée par lettre recommandée à l'employeur ou au travailleur indépendant dont le contenu doit être précis et motivé, et préciserla cause, la nature et le montant des sommes réclamées, les majorations et pénalités qui s'y appliquent ainsi que la période à laquelle elles se rapportent.
La SAS [5] soutient que la mise en demeure qui lui a été adressée le 14 mars 2017 pour un montant de 62 261€ ne lui a pas permis d'apprécier la nature des cotisations sollicités ni le fondement des différentes majorations appliquées dès lors qu'elle se présente sous la forme du tableau suivant :
Période
Cotisations
Majorations de 25%
Majorations
Pénalités
2012
10 286
2 334
2 612
2013
10 120
1 897
2 085
2014
22 920
5 390
3 621
2015
766
146
84
Total
44 092
9 767
8 402
soit un total de 62 261€ se décomposant en (44 902 + 9 767 = 53 859 + 8 402).
L'URSSAF justifie de la différence entre la somme mentionnée à la lettre d'observations (59 398€) et la somme ainsi réclamée par :
- le fait que le montant initial du redressement a été ramené de 59 398 € à 53 859 € suite à la fourniture par la SAS [5] d'une attestation datée du 16 janvier 2015, selon courrier du 27 février 2017 produit par elle-même (pièce 9),
- le montant des majorations de retard a été recalculé en conséquence en application des dispositions de l'article R. 243-18 du code de la sécurité sociale dans sa version en vigueur jusqu'au 19 juin 2019 de la manière suivante : il est appliqué une majoration de retard de 5 % du montant des cotisations et contributions qui n'ont pas été versées aux dates limites d'exigibilité fixées aux articles R. 243-6, R. 243-6-1, R. 243-7 et R. 243-9 à R. 243-11 ; à cette majoration s'ajoute une majoration complémentaire de 0,4 % du montant des cotisations et contributions dues, par mois ou fraction de mois écoulé, à compter de la date d'exigibilité des cotisations et contributions.
La mise en demeure était donc parfaitement régulière et ce moyen sera encore écarté.
* Sur l'obligation de la SAS [5]
Selon les dispositions de l'article L. 8222-2 du code du travail en vigueur depuis le 1er mai 2008 toute personne qui méconnaît les dispositions de l'article L. 8222-1, (...) est tenue solidairement avec celui qui a fait l'objet d'un procès-verbal pour délit de travail dissimulé :
1° Au paiement des impôts, taxes et cotisations obligatoires ainsi que des pénalités et majorations dus par celui-ci au Trésor ou aux organismes de protection sociale ; (...).
Selon les dispositions de l'article L. 8222-1 du code du travail en vigueur depuis le 18 juin 2011 ici applicables toute personne vérifie lors de la conclusion d'un contrat dont l'objet porte sur une obligation d'un montant minimum (ndr : 3000 € à l'époque des faits) en vue de l'exécution d'un travail, de la fourniture d'une prestation de services ou de l'accomplissement d'un acte de commerce, et périodiquement jusqu'à la fin de l'exécution du contrat, que son cocontractant s'acquitte :
1° des formalités mentionnées aux articles L. 8221-3 et L. 8221-5 ; (...)
Les modalités selon lesquelles sont opérées les vérifications imposées par le présent article sont précisées par décret.
Selon les dispositions de l'article L. 8221-3 du code du travail en vigueur du 23 décembre 2011 au 1er janvier 2018 ici applicable est réputé travail dissimulé par dissimulation d'activité, l'exercice à but lucratif d'une activité de production, de transformation, de réparation ou de prestation de services ou l'accomplissement d'actes de commerce par toute personne qui, se soustrayant intentionnellement à ses obligations :
1° Soit n'a pas demandé son immatriculation au répertoire des métiers ou au registre du commerce et des sociétés, lorsque celle-ci est obligatoire, ou a poursuivi son activité après refus d'immatriculation, ou postérieurement à une radiation ;
2° Soit n'a pas procédé aux déclarations qui doivent être faites aux organismes de protection sociale ou à l'administration fiscale en vertu des dispositions légales en vigueur. Cette situation peut notamment résulter de la non-déclaration d'une partie de son chiffre d'affaires ou de ses revenus ou de la continuation d'activité après avoir été radié par les organismes de protection sociale en application de l'article L. 133-6-7-1 du code de la sécurité sociale.
Et selon les dispositions de l'article L. 8221-5 du code du travail en vigueur du 18 juin 2011 au 10 août 2016 ici applicable est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :
(...)
2° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 3243-2, relatif à la délivrance d'un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;
3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales.
La SAS [5] soutient qu'elle a respecté les obligations mises à sa charge par l'article L. 8222-1 du code du travail dès lors qu'elle a vérifié que l'EURL [4] était régulièrement enregistrée au Registre du Commerce et des Sociétés, et s'est fait délivrer par cette société l'attestation de vigilance requise en application des dispositions de l'article D. 8222-5 du code du travail qui dispose depuis le 1er janvier 2012 que :
' La personne qui contracte, lorsqu'elle n'est pas un particulier (...) est considérée comme ayant procédé aux vérifications imposées par l'article L. 8222-1 si elle se fait remettre par son cocontractant, lors de la conclusion et tous les six mois jusqu'à la fin de son exécution :
1° Une attestation de fourniture des déclarations sociales et de paiement des cotisations et contributions de sécurité sociale prévue à l'article L. 243-15 émanant de l'organisme de protection sociale chargé du recouvrement des cotisations et des contributions datant de moins de six mois dont elle s'assure de l'authenticité auprès de l'organisme de recouvrement des cotisations de sécurité sociale.
2° Lorsque l'immatriculation du cocontractant au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers est obligatoire ou lorsqu'il s'agit d'une profession réglementée, l'un des documents suivants :
a) Un extrait de l'inscription au registre du commerce et des sociétés (K ou K bis) ;
b) Une carte d'identification justifiant de l'inscription au répertoire des métiers ;
c) Un devis, un document publicitaire ou une correspondance professionnelle, à condition qu'y soient mentionnés le nom ou la dénomination sociale, l'adresse complète et le numéro d'immatriculation au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers ou à une liste ou un tableau d'un ordre professionnel, ou la référence de l'agrément délivré par l'autorité compétente ;
d) Un récépissé du dépôt de déclaration auprès d'un centre de formalités des entreprises pour les personnes en cours d'inscription'.
Mais elle produit à l'appui de ses allégations seulement l'extrait Kbis de l'EURL [4] à jour au 8 mai 2017 alors que le constat de travail dissimulé a été fait le 21 mai 2015, l'attestation de fourniture des déclarations sociales et paiement des cotisations délivrée à l'EURL [4] par l'URSSAF dont elle ne démontre pas qu'elle lui a été remise par celle-ci à l'époque des faits, ainsi qu'une copie de la plaquette publicitaire de la SARL [4] non datée dont elle ne démontre pas qu'elle lui a été remise comme elle le soutient ' au titre de chaque période contrôlée', ainsi que deux contrats de partenariat de 2014 et 2015 et un plan de prévention de 2014, tous documents qui ne démontrent nullement qu'elle a satisfait à ses obligations 'lors de la conclusion du contrat et tous les six mois jusqu'à la fin de son exécution' comme exigé par le texte dont elle excipe elle-même.
N'ayant pas démontré avoir rempli l'obligation de vigilance qui lui incombait, le redressement était justifié.
* Sur la prescription
Enfin, en présence d'un constat de travail dissimulé d'ailleurs suivi d'une condamnation pénale de l'EURL [4], s'appliquent ici les dispositions de l'article L. 244-3 al 1 du code de la sécurité sociale dans sa version en vigueur du 23 décembre 2011 au 1er janvier 2017 ici applicable, selon lesquelles en cas de constatation d'une infraction de travail illégal par procès-verbal établi par un agent verbalisateur, la mise en demeure peut concerner les cotisations exigibles au cours des cinq années civiles qui précèdent l'année de leur envoi ainsi que les cotisations exigibles au cours de l'année de leur envoi, et la mise en demeure qui concerne le recouvrement des majorations de retard correspondant aux cotisations payées ou aux cotisations exigibles dans le délai fixé au premier alinéa doit être adressée avant l'expiration d'un délai de deux ans à compter du paiement des cotisations qui ont donné lieu à l'application desdites majorations.
De sorte que ni les cotisations réclamées ni les majorations de redressement complémentaire et de retard réclamées au titre des années 2012 à 2015 ne sont prescrites.
Le jugement sera en conséquence infirmé et la SAS [5] condamnée dans les termes du dispositif.
La SAS [5] devra supporter les entiers dépens de première instance et d'appel.
Il sera alloué à l'URSSAF Rhône-Alpes la somme de 3 000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire, en dernier ressort après en avoir délibéré conformément à la loi,
Infirme le jugement,
Statuant à nouveau,
Valide la lettre d'observations du 18 octobre 2016 délivrée à la SAS [5] par l'URSSAF Rhône-Alpes portant redressement pour travail dissimulé au titre de la mise en oeuvre de la solidarité financière prévue aux articles L. 8222-1 et suivants du code du travail,
Valide la mise en demeure du 14 mars 2017 délivrée à la SAS [5] par l'URSSAF Rhône-Alpes pour son entier montant de 62 261 € soit 53 859 € de cotisations et majorations de redressement pour travail dissimulé et 8 402 € de majorations de retard,
Condamne en tant que de besoin la SAS [5] à payer à l'URSSAF Rhône-Alpes la somme de 62 261 € à ce titre, sans préjudice des majorations de retard complémentaire,
Déboute la SAS [5] de toutes ses autres demandes,
Condamne la SAS [5] aux entiers dépens de l'instance,
Condamne la SAS [5] à payer à l'URSSAF Rhône-Alpes la somme de 3 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par M. DELAVENAY, président et par M. OEUVRAY, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier Le président