C4
N° RG 21/00962
N° Portalis DBVM-V-B7F-KYOY
N° Minute :
Copie exécutoire délivrée le :
Me Anne NOBILI
la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE - CHAMBERY
Me Johanna ABAD
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
Ch. Sociale -Section A
ARRÊT DU MARDI 24 JANVIER 2023
Appel d'une décision (N° RG F 19/00095)
rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VALENCE
en date du 27 janvier 2021
suivant déclaration d'appel du 23 février 2021
APPELANT :
Monsieur [H] [R]
[Adresse 3]
[Localité 2]
représenté par Me Anne NOBILI, avocat au barreau de VALENCE,
INTIMEES :
S.A.S. SECURILOG, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège,
[Adresse 4]
[Localité 5]
représentée par Me Alexis GRIMAUD de la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE - CHAMBERY, avocat postulant inscrit au barreau de GRENOBLE,
et par Me Nicolas CHATAIGNIER de la SELAS MAZARS SOCIETE D'AVOCATS, avocat plaidant inscrit au barreau du HAVRE, substitué par Me Wolfgang FRAISSE, avocat au barreau de VALENCE,
S.A.S. CAPRISK DEVELOPMENT Prise en la personne de son représentant légal en exercice domiciliée en cette qualité audit siège
[Adresse 6]
[Localité 1]
représentée par Me Johanna ABAD, avocat postulant inscrit au barreau de GRENOBLE,
et par Me Christophe VINCENT, avocat pliadant inscrit au barreau D'AIX-EN-PROVENCE,
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Madame Valéry CHARBONNIER, Conseillère faisant fonction de Présidente,
Madame Gaëlle BARDOSSE, Conseillère,
Madame Isabelle DEFARGE, Conseillère,
DÉBATS :
A l'audience publique du 14 novembre 2022,
Mme Valéry CHARBONNIER, Conseillère faisant fonction de Présidente chargée du rapport, et Mme Gaëlle BARDOSSE, Conseillère, ont entendu les parties en leurs conclusions et plaidoiries, assistées de Mme Mériem CASTE-BELKADI, Greffière, conformément aux dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, les parties ne s'y étant pas opposées ;
Puis l'affaire a été mise en délibéré au 24 janvier 2023, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.
L'arrêt a été rendu le 24 janvier 2023.
Exposé du litige :
M. [R] a été embauché par la SAS CAPRISK DEVELOPPEMENT en qualité de coordinateur en contrat à durée indéterminée du 15 juillet 2014. Son précédent employeur était la SAS SECURILOG.
Par courrier du 12 mars 2018, M. [R] donne sa démission et sollicite de son employeur une réduction du temps de son préavis de trois à moins d'un mois. La SAS CAPRISK DEVELOPPEMENT refuse et fixe le terme de son contrat de travail au 7 juin 2018.
Dès le 25 mars 2018, M. [R] ne se présente plus à son poste de travail. Le 30 mars 2018, la SAS CAPRISK DEVELOPPEMENT le met en demeure de se présenter ou d'expliquer les raisons de son absence.
La SAS CAPRISK DEVELOPPEMENT a saisi le Conseil de prud'hommes de Valence en date du 12 mars 2019 aux fins d'indemnisation à la fois à l'encontre de M. [R], que de la SAS SECURILOG, nouvel employeur de M. [R].
Par jugement du 27 janvier 2021, le Conseil de prud'hommes de Valence :
S'est déclaré incompétent pour statuer sur le litige opposant la SAS CAPRISK DEVELOPPEMENT et la SAS SECURILOG , le renvoyant devant la juridiction compétente à savoir le Tribunal de commerce du Havre,
A condamné M. [R] à payer à la SAS CAPRISK DEVELOPPEMENT les sommes suivantes :
6 827 € au titre du solde de préavis
4 000 € en réparation du préjudice subi pour brusque rupture
500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile
Débouté la SAS SECURILOG de sa demande en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile
Condamné M. [R] aux éventuels dépens de l'instance.
La décision a été notifiée aux parties et M. [R] en a interjeté appel et la SAS CAPRISK DEVELOPPEMENT, appel incident.
Par conclusions du 23 février 2021, M. [R] demande à la cour d'appel de :
Réformer le jugement rendu par le Conseil de Prud'hommes de Valence le 27 janvier 2021,
A titre principal, Débouter la société SAS CAPRISK DEVELOPPEMENT de ses demandes,
A titre subsidiaire, Dire que la société SECURILOG devra être tenue solidairement responsable du préjudice qui serait retenu ;
En tout état de cause, Condamner la société CAPRISK à lui payer la somme de 1.000,00 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, et la condamner en tous les dépens.
Par conclusions en date du 28 juillet 2021, la SAS CAPRISK DEVELOPPEMENT demande à la cour d'appel de :
Confirmer le jugement du Conseil de Prud'hommes de Valence en date du 27 janvier 2021 en ce qu'il a condamné M. [R] à lui verser les sommes suivantes :
6.827,00 euros au titre du solde du préavis,
4.000 euros en réparation du préjudice subi pour brusque rupture,
500 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Y ajoutant,
Dire et juger recevables les demandes de la société CAPRISK DEVELOPMENT à l'encontre de M. [R] ainsi que de la société SECURILOG suite à sa démission en date du 12 mars 2018,
Condamner solidairement M. [R] et la société SECURILOG à verser à la société CAPRISK DEVELOPMENT les sommes de :
6.827,00 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis non exécuté du 25 mars 2018 au 11 juin 2018,
10.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi pour brusque rupture,
Condamner solidairement M. [R] et la société SECURILOG à verser à la société CAPRISK DEVELOPEMENT la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
Condamner solidairement M. [R] et la société SECURILOG aux entiers dépens.
Par conclusions récapitulatives en date du 19 septembre 2022, la SAS SECURILOG demande à la cour d'appel de :
à titre principal,
déclarer irrecevable l'appel incident de la SAS CAPRISK DEVELOPEMENT
en toute hypothèse, confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré le conseil de prud'hommes incompétent pour statuer sur le litige opposant la SAS CAPRISK DEVELOPEMENT à la SAS SECURILOG et a renvoyé les parties devant la juridiction compétente, c'est-à-dire le tribunal de commerce du Havre
déclarer irrecevable la demande subsidiaire nouvelle de M. [R] tendant à voir dire que la SAS SECURILOG devra être solidairement responsable du préjudice qui serait retenu
à titre subsidiaire
déclarer mal fondée la demande de M. [R] tendant à voir dire que la SAS SECURILOG devrait être tenu solidairement responsable du préjudice qui serait retenu et en conséquence l'en débouter
déclarer irrecevables et à titre subsidiaire, mal fondées les demandes de la SAS CAPRISK DEVELOPEMENT dirigé contre la SAS SECURILOG et en conséquence les rejeter
à titre infiniment subsidiaire,
réduire le montant des demandes dirigées contre la SAS SECURILOG à de plus justes proportions
si par impossible une condamnation solidaire ou in solidum était prononcée entre les co-dédendeurs à l'action principale statuer au stade de la contribution à la dette, sur l'éventuelle part contributive de chaque défendeur
en toute hypothèse,
condamner la SAS CAPRISK DEVELOPEMENT à payer à la SAS SECURILOG la somme de 3000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
condamner toute partie succombant au paiement des dépens.
Par ordonnance juridictionnelle en date du 29 mars 2022, le Conseiller de la mise en état de le chambre sociale a :
dit qu'il n'était saisi d'aucune demande de la part de M. [R] dans le cadre de la procédure d'incident,
dit que la prétention de la SAS SECURILOG tendant à juger recevables comme nouvelle la demande en appel de M. [R] selon laquelle « la SAS SECURILOG devra être tenue responsable du préjudice qui serait retenu » est irrecevable comme n'entrant pas dans les pouvoirs du conseiller de la mise en état,
débouté la SAS SECURILOG de sa demande tendant à l'irrecevabilité des demandes de la société CAPRISK DEVELOPPEMENT comme n'entrant pas dans les pouvoirs du conseiller de la mise en état,
réservé les dépens de l'incident qui suivront ceux de l'instance au fond.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 11 octobre 2022.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère à la décision attaquée et aux dernières conclusions déposées.
SUR QUOI :
Sur l'exception d'irrecevabilité des demandes de la SAS SECURILOG à l'encontre de la SAS CAPRISK DEVELOPPEMENT :
La SAS SECURILOG soutient que l'appel incident de la SAS CAPRISK DEVELOPEMENT à son encontre est irrecevable. Elle allègue que :
La SAS CAPRISK DEVELOPEMENT ne critique pas expressément le chef de dispositif par lequel le Conseil de prud'hommes s'est déclaré incompétent pour connaître des demandes de la SAS CAPRISK DEVELOPEMENT à son encontre
dans les rapports entre la SAS CAPRISK DEVELOPEMENT et la SAS SECURILOG, le Conseil de prud'hommes a statué uniquement sur sa compétence, de sorte qu'il appartenait à la SAS CAPRISK DEVELOPEMENT de respecter les dispositions des articles 83 et suivants du code de procédure civile (déclaration d'appel motivé dans un délai de 15 jours à compter de la notification du jugement, avec saisine du premier président en vue selon le cas d'être autorisé à assigner à jour fixe ou de bénéficier d'une fixation prioritaire de l'affaire')
la SAS CAPRISK DEVELOPEMENT n'a pas sollicité dans le dispositif de ses conclusions d'appel incident l'infirmation ou la réformation du jugement.
La SAS CAPRISK DEVELOPPEMENT ne conclut pas sur ces points et affirme que sa demande à l'encontre de la SAS SECURILOG n'est pas nouvelle en cause d'appel puisqu'elle a demandé la condamnation solidaire de la SAS SECURILOG et M. [R] depuis l'introduction de l'instance et qu'elle a démontré son intérêt à agir tant à l'encontre de M. [R] que de la SAS SECURILOG.
Sur ce,
Selon les dispositions des articles 83 et suivants du code de procédure civile, l'appel à l'encontre des décisions qui se prononce exclusivement sur la compétence de la juridiction, suppose le dépôt dans le délai de 15 jours, d'une déclaration d'appel motivée soit dans la déclaration elle-même, soit dans des conclusions jointes à la déclaration. Cette déclaration d'appel doit préciser qu'elle est dirigée contre un jugement statuant sur la compétence. L'appelant doit à peine de caducité de la déclaration d'appel, saisir dans le délai d'appel, le premier président aux fins d'être autorisé à assigner à jour fixe conformément aux dispositions de l'article 918 du code de procédure civile.
En l'espèce, il ressort du jugement déféré que la juridiction prud'homale de première instance s'est déclarée incompétente matériellement pour statuer sur le litige opposant la SAS CAPRISK DEVELOPPEMENT et la SAS SECURILOG.
Suite à l'appel de M. [R], la SAS CAPRISK DEVELOPPEMENT en sa qualité d'intimée a, le 28 juillet 2021 par RPVA, déposé des conclusions aux termes desquelles elle demandait non seulement la confirmation du jugement déféré s'agissant de M. [R], mais également, la condamnation solidaire de la SAS SECURILOG à lui verser la somme de 6 827€ à titre d'indemnité compensatrice de préavis non exécuté du 25/03/2018 au 11/06/2018 outre 10 000 à titre de dommages et intérêts pour brusque rupture et 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Faute d'avoir, conformément aux dispositions susvisées, saisi le Premier Président de la Cour d'appel du jugement d'incompétence matérielle déféré concernant ses demandes à l'encontre de la SAS SECURILOG, conformément aux dispositions légales susvisées, les demandes de SAS CAPRISK DEVELOPPEMENT à l'encontre de la SAS SECURILOG sont irrecevables.
Sur la demande au titre du préavis de démission :
Moyens des parties :
La SAS CAPRISK DEVELOPEMENT soutient que l'article 2 du contrat de travail de M. [R] du 15 juillet 2014, prévoyait expressément un préavis de démission en référence aux dispositions légales et conventionnelles et que la convention collective applicable le fixait à une durée de trois mois. M. [R] indiquant lui-même dans sa lettre de démission qu'il était tenu d'exécuter un préavis de trois mois et donc du 12 mars au 11 juin 2018. Il a sollicité une autorisation de ramener son préavis de trois à un mois mais la SAS CAPRISK DEVELOPPEMENT a refusé. Or, M. [R] n'a effectué son préavis après sa démission que jusqu'au 24 mars 2018 et ensuite a refusé de l'exécuter sans motif légitime. L'inobservation de ce préavis exposant le salarié à une indemnité compensatrice voire à des dommages et intérêts. Le salarié ne peut décider seul de ne plus effectuer son préavis. De plus, M. [R] a, à compter du 25 mars 2018, soit pendant la durée du préavis, travaillait pour le compte de la SAS SECURILOG. La SAS CAPRISK DEVELOPEMENT sollicite la condamnation de M. [R] de la somme de 6 827 € à titre d'une indemnité de préavis non exécuté.
La SAS CAPRISK DEVELOPEMENT fait également valoir que compte tenu de la brusque rupture de la relation contractuelle, elle s'est trouvée contrainte d'embaucher en urgence un autre salarié puis de le former afin que soit effectuée la prestation sur laquelle M. [R] devait initialement intervenir. La rupture du contrat de travail par M. [R] étant abusive au sens de l'article L. 1237-2 du code du travail, elle sollicite des dommages-intérêts à ce titre.
La SAS CAPRISK DEVELOPEMENT conteste le caractère nouveau de cette demande de condamnation solidaire, rappelant qu'elle sollicite cette condamnation solidaire depuis l'introduction de l'instance. Elle indique démontrer son intérêt à agir tant en ce qui concerne son ancien salarié qu'à l'encontre de la SAS SECURILOG qui a embauché celui-ci, alors qu'elle avait parfaitement connaissance de ce qu'il n'était pas dégagé de ses obligations contractuelles envers elle.
Enfin elle fait valoir que, si la convention collective applicable prévoit effectivement la possibilité pour un salarié lors de la rupture de son contrat de travail de s'absenter 6 jours afin de trouver du travail, cette disposition ne l'autorise nullement à s'abstenir d'exécuter son préavis.
M. [R] ayant par ailleurs déjà retrouvé un emploi lors de sa démission et la SAS SECURILOG ayant eu un rôle actif dans la non-exécution du préavis. La SAS SECURILOG a commis une faute à l'égard de la SAS CAPRISK DEVELOPEMENT en embauchant le salarié en pleine connaissance alors qu'il n'était pas libéré de son obligation contractuelle, M. [R] ayant précisé que la SAS SECURILOG a insisté pour qu'il soit présent dans ses effectifs dès le 1er avril 2018, lui assurant qu'il ne craignait rien de rompre son préavis. De plus, la SAS CAPRISK DEVELOPEMENT soutient avoir subi un préjudice dans la mesure où elle a été contrainte d'embaucher en urgence un autre salarié et de le former afin que la prestation soit effectuée.
M. [R] soutient pour sa part qu'il n'est pas démontré de sa part, ni une intention de nuire ni un abus manifeste et que la SAS CAPRISK DEVELOPEMENT ne justifie pas d'un préjudice ni d'avoir perdu du chiffre d'affaires et encore qu'elle était dans l'impossibilité de le remplacer ou avoir été déstabilisée.
Subsidiairement, M. [R] sollicite que la SAS SECURILOG soit condamnée solidairement sur le fondement des dispositions de l'article 1235-1 du code du travail à indemniser le préjudice causé à son ancien employeur. Il explique que c'est la SAS SECURILOG qui a insisté pour qu'il soit présent dans les effectifs le 1er avril 2018 assurant qu'il ne craignait rien de rompre son préavis avant son terme.
La SAS SECURILOG estime que la demande à son encontre de M. [R], qu'elle soit tenue solidairement responsable de la réparation du préjudice qui serait retenu au profit de la SAS CAPRISK DEVELOPPEMENT, se heurte à plusieurs fins de non-recevoir :
Cette demande est nouvelle, M. [R] n'ayant pas comparu en première instance, peu important que la SAS CAPRISK DEVELOPPEMENT ait sollicité cette condamnation en première instance,
M. [R] n'a pas d'intérêt à agir en demandant la condamnation solidaire de la SAS,
SECURILOG au profit de la SAS CAPRISK DEVELOPPEMENT.
La SAS SECURILOG soutient par ailleurs que les demandes de la SAS CAPRISK DEVELOPPEMENT sont prescrites et mal fondées à son encontre, faute pour la SAS CAPRISK DEVELOPPEMENT de démontrer qu'elle a subi un préjudice du fait de la non-exécution du préavis dans son intégralité par M. [R], et qu'il n'est pas démontré l'existence d'une faute lourde à l'encontre du salarié pouvant entrainer sa responsabilité pécuniaire. Elle soutient également que la clause d'exclusivité était nulle, car rédigée en des termes imprécis et illicites, et que le salarié est au surplus autorisé à s'absenter durant l'exécution du préavis pour rechercher un emploi. Elle allègue enfin il n'y a pas eu de brusque rupture, M. [R] ayant exécuté une partie de son préavis.
Sur ce,
Sur les demandes de la SAS CAPRISK DEVELOPPEMENT à l'encontre de M. [R] :
Il résulte des dispositions de l'article L. 1231-1 du code du travail que le contrat de travail peut être rompu par la démission du salarié.
Le préavis est un délai de prévenance dû réciproquement par l'employeur et le salarié si l'un et l'autre souhaite mettre fin au contrat de travail. C'est une période travaillée au cours de laquelle salarié exécute ses fonctions antérieures dans les mêmes conditions. Si le préavis n'est pas exécuté par le salarié, il se traduit par le versement d'une indemnité compensatrice de préavis de la part du salarié qui refuse de l'exécuter sans motif valable. Il est de jurisprudence constante que suite à sa démission, le salarié, non dispensé par son employeur de son exécution et qui n'a pas exécuté le préavis prévu, est redevable de l'indemnité compensatrice de préavis quel que soit le préjudice subi pour l'employeur.
L'article L. 1237 ' 1 du code du travail dispose qu'en cas de démission, l'existence et la durée du préavis sont fixées par la loi, ou par convention ou accord collectif de travail.
En l'absence de dispositions légales, de convention ou accord collectif de travail relatifs au préavis, son existence et sa durée résultent des usages pratiqués dans la localité et dans la profession.
En l'espèce, M. [R] a signé un contrat à durée indéterminée à temps complet le 15 juillet 2014 soumis 'Le délai de préavis dû par la société ou par M. [R] en cas de rupture du contrat de travail est fixé par les articles L.122-5 et L.122-6 du code du travail ainsi que par la convention collective applicable dans l'entreprise en fonction de l'ancienneté que M. [R] aura acquis au moment de son départ »
Il est constant que M. [R] a démissionné par courrier reçu le 12 mars 2018 par la SAS CAPRISK DEVELOPPEMENT et qu'il a indiqué que « par dérogation aux dispositions de mon contrat de travail, je vous remercie de bien vouloir me dispenser de mon préavis de 3 mois étant statut cadre à 1 mois afin que mon départ devienne effectif le 31/03/2018 'pour info une autre proposition m'a été faite qui est pour moi très intéressante avec une augmentation de salaire de 50% sur mon brut ».
Par courrier recommandé avec accusé de réception en réponse du 20/03/2018, la SAS CAPRISK DEVELOPPEMENT a informé M. [R] que pour des raisons d'organisation de travail, elle ne pouvait répondre favorablement à sa demande de réduction de préavis et que la fin de son contrat de travail serait effective au 09/06/2018 au soir.
M. [R] ne conteste pas qu'il devait exécuter un préavis de trois mois et qu'il a quitté l'entreprise avant la fin de celui-ci, le 25/03/2018 au lieu du 09/06/2018.
L'intention de nuire et l'abus manifeste n'ayant pas à être démontrés par l'employeur, l'indemnité compensatrice de préavis est due par M. [R] du seul fait du non- respect de ses obligations relatives à l'exécution de son préavis. M. [R] doit donc être condamné à verser à la SAS CAPRISK DEVELOPPEMENT la somme de 6 827 euros à ce titre par voie de confirmation du jugement déféré.
S'agissant de l'indemnisation réclamée par la SAS CAPRISK DEVELOPPEMENT au titre de « la brusque rupture », la SAS CAPRISK DEVELOPPEMENT justifie avoir embauché M. [V] en qualité de coordinateur HSE à la suite de la démission de M. [R] mais ne justifie pas d'un préjudice distinct de celui compensé par l'indemnité compensatrice de préavis, sauf celui résultant du paiement des formations de « sauveteur secouriste du travail » du 12 au 13 avril 2018 (294 €) et de « coordinateur travaux » le 29 mai 2018 auxquelles M. [V] a toutefois participé à l'instar de huit autres salariés de l'entreprise. Il convient par conséquent de condamner M. [R] à réparer le préjudice subi par la SAS CAPRISK DEVELOPPEMENT à ce titre à hauteur de 300 euros par voie d'infirmation du jugement déféré sur le quantum.
Sur la demande de M. [R] à l'encontre de la SAS SECURILOG :
Il résulte des dispositions de l'article 564 code de procédure civile qu'à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.
Toutefois l'application des dispositions susvisées suppose que la partie à laquelle on l'oppose ait été constituée en première instance et il ne peut être reproché à une partie d'avoir présenté une prétention nouvelle en appel au sens de l'article 564 du Code de procédure civile alors qu'étant non comparante en première instance, elle n'en avait présenté aucune devant le premier juge.
Par conséquent, il ne peut être reproché à M. [R], défaillant en première instance, de présenter en cause d'appel une prétention nouvelle, à savoir que la SAS SECURILOG soit tenu responsable solidairement du préjudice qui serait retenu à son encontre.
Selon les dispositions de 31 du code de procédure civile, l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès d'une prétention sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir seule personne qu'elle qualifie pour combattre une prétention, pour défendre un intérêt déterminé.
L'article 122 du code de procédure civile dispose que constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.
M. [R] qui sollicite la condamnation (solidaire) de la SAS SECURILOG à l'encontre de la SAS CAPRISK DEVELOPPEMENT ne justifie pas d'un intérêt à agir dont seule la SAS CAPRISK DEVELOPPEMENT dispose. Sa demande est par conséquent irrecevable.
Sur les demandes accessoires :
Il convient de confirmer la décision de première instance s'agissant des dépens et des frais irrépétibles sauf en ce qu'elle a débouté la SAS SECURILOG de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Il convient de condamner M. [R] et la SAS CAPRISK DEVELOPPEMENT à payer à la SAS SECURILOG la somme de 500 € chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre de l'instance.
La SAS CAPRISK DEVELOPPEMENT et M. [R] ayant été partiellement déboutés de leurs demandes dans le cadre de l'instance d'appel, l'équité commande de les débouter de leurs demandes au titre de leurs frais irrépétibles en cause d'appel et de dire qu'elles supporteront chacune la charge des frais et dépens qu'elles ont engagés en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant contradictoirement après en avoir délibéré conformément à la loi,
DECLARE M. [R] recevable en son appel,
DIT que les demandes relevant de l'appel incident de la SAS CAPRISK DEVELOPPEMENT à l'encontre de la SAS SECURILOG sont irrecevables,
DIT que la demande de M. [R] de condamnation solidaire de la SAS SECURILOG est irrecevable,
CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il :
S'est déclaré incompétent pour statuer sur le litige opposant la SAS CAPRISK DEVELOPPEMENT et la SAS SECURILOG, le renvoyant devant la juridiction compétente à savoir le Tribunal de commerce du Havre,
A condamné M. [R] à payer à la SAS CAPRISK DEVELOPPEMENT les sommes suivantes :
6 827 € au titre du solde de préavis,
500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
A Condamné M. [R] aux éventuels dépens de l'instance.
L'INFIRME, pour le surplus,
STATUANT à nouveau sur les chefs d'infirmation,
Y ajoutant,
CONDAMNE M. [R] à payer à la SAS CAPRISK DEVELOPPEMENT la somme de 300 € en réparation du préjudice subi pour brusque rupture,
CONDAMNE M. [R] et la SAS CAPRISK DEVELOPPEMENT à payer à la SAS SECURILOG la somme de 500 € chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
DIT que M. [R] et la SAS CAPRISK DEVELOPPEMENT supporteront la charge des frais et dépens qu'elles ont engagé en cause d'appel.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Valéry Charbonnier, Conseillère faisant fonction de Présidente, et par Madame Mériem Caste-Belkadi, Greffière, à qui la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.
La Greffière, La Conseillère faisant fonction de Présidente,