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17/01/2023 | FRANCE | N°20/00729

France | France, Cour d'appel de Grenoble, 2ème chambre, 17 janvier 2023, 20/00729


N° RG 20/00729 - N° Portalis DBVM-V-B7E-KLKP



N° Minute :





C4

























































Copie exécutoire délivrée

le :



à



la S.A.R.L. ANAÉ AVOCATS



Me Cindy BOSC















AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE

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2ÈME CHAMBRE CIVILE



ARRÊT DU MARDI 17 JANVIER 2023



Appel d'un Jugement (N° R.G. 17/01198) rendu par le Tribunal de Grande Instance de VIENNE en date du 30 janvier 2020, suivant déclaration d'appel du 12 Février 2020





APPELANTE :



Mme [I] [L]

née le 08 Août 1944 à [Localité 9]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 3]



Représentée par Me Thi...

N° RG 20/00729 - N° Portalis DBVM-V-B7E-KLKP

N° Minute :

C4

Copie exécutoire délivrée

le :

à

la S.A.R.L. ANAÉ AVOCATS

Me Cindy BOSC

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

2ÈME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU MARDI 17 JANVIER 2023

Appel d'un Jugement (N° R.G. 17/01198) rendu par le Tribunal de Grande Instance de VIENNE en date du 30 janvier 2020, suivant déclaration d'appel du 12 Février 2020

APPELANTE :

Mme [I] [L]

née le 08 Août 1944 à [Localité 9]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Thibault LORIN de la S.A.R.L. ANAÉ AVOCATS, avocat au barreau de GRENOBLE

INTIMÉES :

S.A.S. SAGS SERVICES prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 5]

S.A. GAN ASSURANCES prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 7]

[Localité 6]

Représentées par Me Cindy BOSC, avocat au barreau de VIENNE, avocat postulant, et par Me Kelly MONTEIRO, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

C.P.A.M. DE L'ISERE prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 11]

[Localité 4]

Non représentée

COMPOSITION DE LA COUR : LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Emmanuèle Cardona, présidente,

M. Frédéric Dumas, vice-président placé, en vertu d'une ordonnance en date du 29 juin 2022 rendue par la première présidente de la cour d'appel de Grenoble,

Mme Anne-Laure Pliskine, conseillère,

DÉBATS :

A l'audience publique du 20 Septembre 2022, Frédéric Dumas, vice-président placé, qui a fait son rapport, assisté de Frédéric Sticker, Greffier, en présence de [U] [Y], greffière stagiaire, a entendu seul Me Lorin en ses conclusions et plaidoirie, les parties ne s'y étant pas opposées conformément aux dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile.

Il en a rendu compte à la Cour dans son délibéré et l'arrêt a été rendu à l'audience de ce jour.

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Le 25 mars 2016 Mme [L], qui accédait au parking aérien payant de [Localité 8] exploité par la société par actions simplifiée SAGS Services a été blessée par la barrière automatique qui s'est abaissée sur elle et la projetée au sol.

A la suite de cet accident Mme [L] a présenté une fracture comminutive du poignet droit et une fracture de la tête radiale non déplacée.

Par exploit du 19 octobre 2017 elle a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Vienne la société SAGS Services et la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère (la CPAM) aux fins notamment, sur le fondement de l'ancien article 1147 du code civil, de voir juger l'exploitante responsable de ses préjudices et par suite d'obtenir sa condamnation à les indemniser ainsi qu'une expertise aux frais avancés de la défenderesse, outre sa condamnation à lui verser une provision de 10 000 euros à valoir sur son préjudice définitif et une provision ad litem de 2 000 euros.

La société anonyme Gan Assurances, assureur de la société SAGS Services, est intervenue volontairement à l'instance par conclusions transmises le 5 janvier 2018.

Suivant jugement du 30 janvier 2020 le tribunal a :

- déclaré la société GAN Assurances recevable en son action.

- rejeté l'intégralité des demandes formées par Mme [L] à l'encontre de la société SAGS Services,

- condamné Mme [L] à payer à la société SAGS Services la somme de 2 000 euros en application des dispositions de I'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,

- accordé à maître Monteiro le droit prévu à l'article 699 du code de procédure civile.

Le 12 février 2020 Mme [L] a interjeté appel du jugement à l'égard de l'ensemble des parties sauf en ce qui concerne la recevabilité de l'action de la société Gan Assurances.

Aux termes de ses dernières conclusions, dont le dispositif doit être expurgé de toutes mentions qui ne constituent pas des demandes mais reprennent les moyens soutenus dans les motifs, l'appelante demande à la cour d'infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau, de :

- condamner la société SAGS Services à l'indemniser de son préjudice induit par l'accident du 25 mars 2016,

- surseoir à statuer sur la liquidation du préjudice et renvoyer l'affaire à la mise en état,

- ordonner une expertise selon mission proposée dans le corps de l'assignation aux frais avancés du défendeur,

- lui allouer une provision de 10 000 euros à valoir sur son préjudice définitif,

- lui allouer une provision ad litem de 2 000 euros à valoir sur les frais futurs de procédure,

- condamner la société SAGS à lui payer une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel en ce compris les frais de signification et d'exécution de l'arrêt à intervenir.

Au soutien de ses prétentions Mme [L] fait valoir que :

- lorsqu'elle et son mari se sont garés sur le parking [Adresse 10] de [Localité 8] le distributeur automatique de tickets était placé très bas, légèrement à portée de voiture mais non à celle du camping-car qu'ils occupaient,

- M. [L] étant au volant il pouvait difficilement man'uvrer tout en prenant le ticket et a demandé à sa femme de sortir le prendre,

- le conducteur devant avancer rapidement afin de franchir la barrière, sa femme suivait le camping-car sur le parking quand la barrière automatique est retombée soudainement sur elle la blessant à la tête et la précipitant au sol,

- le constat d'huissier établi le 13 juillet 2017 permet de relever que la configuration des lieux a changé puisque l'entrée du parking n'est plus en virage mais en ligne droite afin de faciliter la circulation des véhicules et que la barrière automatique descend de manière très brusque de sorte que plusieurs accidents sont survenus,

- s'agissant d'un parking payant pour lequel l'usager doit retirer un ticket un contrat est conclu entre l'exploitant et les passagers du véhicule, l'accident ayant eu lieu après le retrait du ticket seule la responsabilité contractuelle de l'exploitant peut être engagée, ce dernier étant débiteur d'une obligation de sécurité de résultat en ce qu'il incombe à l'exploitant de mettre à la disposition de ses utilisateurs un matériel sécurisé et non dangereux,

- la faute de la société SAGS Services est donc présumée établie et l'accident suffit à lui seul à engager sa responsabilité sauf à démontrer qu'elle n'a pas commis de faute sur l'entretien de la barrière,

- dans la mesure où, l'accident étant survenu à l'entrée où les occupants de véhicules imposants étaient contraints par l'étroitesse des lieux de descendre pour appréhender le ticket, leur participation active ne découlaient pas de l'essence de la prestation et n'était pas généralisée, l'obligation de sécurité étant nécessairement de moyen renforcé renversant la charge de la preuve,

- en ce qui concerne son obligation de sécurité de résultat la société SAGS Services ne parvient pas à démontrer la parfaite sécurité de ladite barrière puisqu'elle verse au dossier des documents relatifs à un dispositif autre que la barrière 'peapark' qui est en cause, alors au surplus qu'elle savait pouvoir régler sa vitesse,

- s'agissant de son obligation de sécurité de moyen renforcé relative à la configuration des lieux la société SAGS Services a commis une faute en ce que, du fait du virage, les gros véhicules ne pouvaient accéder au parking sans que l'un des occupants ne descende prendre le ticket au distributeur,

- le moyen adverse, selon lequel Mme [L] en tant que piétonne se serait introduite dans le couloir des véhicules malgré un panneau, ne saurait prospérer dans la mesure où la victime n'était pas piétonne mais passagère d'un véhicule souhaitant s'engager dans parking, son intention étend de sortir du véhicule une fois celui-ci garé,

- elle n'a donc commis aucune faute exonératoire ou limitative de responsabilité.

En réplique les intimées concluent à ce que la cour confirme le jugement dont appel, condamne Mme [L] à leur payer la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance, distraits au profit de maître Monteiro.

Les sociétés SAGS Services et Gan Assurances exposent que :

- l'obligation de sécurité, dont est débiteur l'exploitant d'un parking, est une obligation de moyens dans la mesure où l'usager doit se déplacer au sein du parking tant à pied qu'au volant de son véhicule et n'a pas un rôle purement passif,

- en conséquence il appartient à l'usager qui entend engager la responsabilité de l'exploitant de démontrer l'existence d'une faute,

- contrairement aux affirmations adverses la configuration des lieux est celle qu'elle a connue lors de l'accident ainsi qu'en atteste le procès-verbal de réception des travaux établit un mois avant le sinistre,

' l'entrée du parking ne présentait aucune difficulté et de plus le commerçant attestant que de nombreux accidents surviendraient lors de l'accès au parking n'a aucune visibilité sur l'entrée de celui-ci alors au surplus qu'aucune déclaration de sinistre n'a été formalisée auprès de l'assureur de l'exploitant,

- le constat d'huissier produit par Mme [L] n'établit pas que la vitesse de la barrière serait trop rapide au regard de la réglementation applicable ou que la configuration de l'entrée du parking correspond à celle décrite par l'appelante,

- la conformité de l'installation à la réglementation est justifiée par la production de la déclaration CE de conformité,

- de surcroît Mme [L] a commis une faute totalement exonératoire dès lors que des panneaux de signalisation interdisaient aux piétons d'emprunter le passage, et ce alors qu'un cheminement réservé à ceux-ci leur est réservé entre les barrières.

La CPAM, à laquelle la déclaration d'appel a été signifiée à personne le 9 septembre 2020, n'a pas constitué avocat.

L'instruction a été clôturée suivant ordonnance du 9 février 2022.

MOTIFS

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère à la décision attaquée et aux conclusions déposées.

Sur les demandes principales

Aux termes de l'ancien article 1147 du code civil, en vigueur jusqu'au 30 septembre 2016, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au payement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part et sous certaines conditions édictées aux anciens articles 1149, 1150 et 1151.

Dans la mesure où l'utilisation d'un parking automobile requiert une part active de la clientèle circulant à pied ou à bord d'un véhicule l'obligation de sécurité dont l'exploitant est débiteur à l'égard de ses cocontractants ne peut être qu'une obligation de moyens.

En l'espèce il appartient en conséquence à Mme [L], en application de l'article 9 du code de procédure civile selon lequel il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention, d'établir que la société SAGS Services a failli à ses obligations.

Les principaux éléments pris en compte par le premier juge pour écarter la responsabilité de la société SAGS Services sont les suivants :

- Mme [L] recherche la responsabilité contractuelle de la société SAGS Services en sa qualité d'exploitante du parking, faisant valoir qu'il existe un contrat entre elles dès lors qu'il s'agit d'un parking payant et que l'accident a eu lieu après le retrait à la borne du ticket d'entrée alors qu'elle était sortie du véhicule camping car conduit par son époux pour précisément prendre le ticket à la borne et qu'elle suivait à pied le véhicule pour entrer dans le parking,

- ces points ne sont pas discutés par les parties,

- sans qu'il soit besoin de s'engager sur le débat de la nature (résultat, moyens renforcée ou moyens) de l'obligation de sécurité pesant sur la société SAGS Services, il convient de retenir que l'accident n'est pas imputable au fonctionnement de la barrière automatique du parking dont l'objet est de s'ouvrir après retrait du ticket d'entrée pour permettre le passage d'un véhicule et non d'un piéton,

- si la barrière automatique s'est fermée de manière rapide et brutale comme le soutient Mme [L], elle s'est fermée après le passage du véhicule conduit par son époux lequel a pénétré dans le parking sans subir de dommage matériel,

- la barrière automatique du parking s'est abattue sur Mme [L] alors que cette dernière empruntait pour entrer dans le parking un passage réservé à la circulation automobile adoptant ce faisant un comportement dangereux et contraire à la destination des lieux, étant ici relevé qu'il ressort des clichés photographiques produits qu'il est implanté parallèlement à la voie de circulation comportant la barrière d'entrée sur le parking un passage piéton protégé qui permettait d'éviter de s'engager dangereusement sur la voie de circulation réservée aux véhicules et donc sous la barrière après le passage du véhicule.

Ainsi que l'a justement souligné le tribunal le comportement adopté par la victime était dangereux et contraire à la destination des lieux. En outre, comme le montrent les photographies du constat d'huissier du 13 juillet 2017 et le précise ce dernier, les supports des barrières automatiques présentes à l'entrée et à la sortie du parking 'comportent de chaque côté un petit autocollant représentant un panneau d'interdiction aux piétons, situé à environ 80 cm du sol.'

A cet égard la cour ne s'arrêtera pas aux arguties de Mme [L] qui ne saurait sérieusement prétendre que lors de l'accident elle n'était pas une piétonne mais passagère du camping car dont elle avait dû s'extraire pour récupérer le ticket d'entrée. En franchissant à pied l'accès emprunté par les véhicules elle avait la qualité de piéton, ne serait-ce que temporairement.

Pour autant, et contrairement à la motivation du tribunal selon laquelle l'obligation de sécurité pesant sur la société SAGS Services n'est pas en cause dans l'accident, la faute commise par la victime n'est exonératoire de la responsabilité de l'exploitant qu'autant que celui-ci n'a pas manqué à son obligation de sécurité de moyen et contribué au comportement fautif, à la production ou l'aggravation du préjudice subi par Mme [L].

Or l'appelante procède par affirmations d'une part en soutenant que la configuration des lieux aurait changé depuis l'accident, nulle pièce ne venant étayer ses dires, et d'autre part, en l'absence d'expertise ou de consultation technique, elle ne parvient pas à démontrer le fonctionnement anormal de la barrière automatique dont le seul constat par l'officier ministériel d'une redescente 'de manière très brusque' ne saurait à lui seul établir la non-conformité du dispositif et une entorse aux règles de sécurité.

Par conséquent Mme [L] échoue à démontrer que la configuration de l'accès audit parking l'aurait non seulement contrainte à descendre du véhicule avant le franchissement de la barrière pour retirer le ticket d'entrée mais surtout l'aurait empêchée d'y pénétrer différemment.

Dans ces conditions il conviendra de rejeter l'ensemble des demandes présentées par Mme [L] à l'encontre des sociétés SAGS Services et Gan Assurances et de confirmer le jugement déféré.

Sur les demandes annexes

Il n'est pas inéquitable de laisser à la charge des parties les frais exposés pour faire valoir leurs droits devant la cour.

L'appelante qui succombe sera condamnée aux entiers dépens en application de l'article 699 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement et par arrêt réputé contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme le jugement du 30 janvier 2020 du tribunal judiciaire de Vienne en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Déboute les parties de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Mme [L] aux entiers dépens de la procédure d'appel en application de l'article 699 du code de procédure civile.

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Arrêt signé par Mme Emmanuèle Cardona, Présidente de la deuxième chambre civile et par la Greffière, Caroline Bertolo, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20/00729
Date de la décision : 17/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-17;20.00729 ?
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