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10/01/2023 | FRANCE | N°19/04575

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Chbre des aff. familiales, 10 janvier 2023, 19/04575


N° RG 19/04575 - N° Portalis DBVM-V-B7D-KHRM



C6



N° Minute :



















































copie certifiée conforme délivrée

aux avocats le :









Copie Exécutoire délivrée

le :










aux parties (notifiée par LRAR)





aux avocats
















AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



CHAMBRE DES AFFAIRES FAMILIALES



ARRET DU MARDI 10 JANVIER 2023







APPEL

Jugement au fond, origine juge aux affaires familiales de Grenoble, décision attaquée en date du 14 octobre 2019, enregistrée sous le n° 08/04652

ordonnance au fond, origine juge de la mise en état de Grenoble, décision at...

N° RG 19/04575 - N° Portalis DBVM-V-B7D-KHRM

C6

N° Minute :

copie certifiée conforme délivrée

aux avocats le :

Copie Exécutoire délivrée

le :

aux parties (notifiée par LRAR)

aux avocats

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE DES AFFAIRES FAMILIALES

ARRET DU MARDI 10 JANVIER 2023

APPEL

Jugement au fond, origine juge aux affaires familiales de Grenoble, décision attaquée en date du 14 octobre 2019, enregistrée sous le n° 08/04652

ordonnance au fond, origine juge de la mise en état de Grenoble, décision attaquée en date du 17 mai 2018, enregistrée sous le n° 08/04652 suivant déclaration d'appel du 12 novembre 2019

APPELANT :

M. [R] [C]

né le 15 Mars 1956 à [Localité 14]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 4]

représenté et plaidant par Me Alexis GRIMAUD de la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE - CHAMBERY, avocat au barreau de GRENOBLE

INTIMEES :

Mme [I] [U] divorcée [C]

née le 04 Août 1957 à [Localité 13]

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Localité 2]

représentée par Me Magalie BARBIER de la SELARL FTN, avocat au barreau de GRENOBLE, postulant

et plaidant par Me Y. DIODORO, avocat au barreau de NICE

Société d'assurance MUTUELLE DE L'EST - LA BRESSE ASSURANCES agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège , immatriculée au répertoire SIRENE sous le numéro 779 307 271, dont le siège social est sis [Adresse 6]

représentée par Me Jean-luc MEDINA de la SELARL CDMF AVOCATS, avocat au barreau de GRENOBLE substituée par Me Alexis BANDOSZ, avocat au barreau de GRENOBLE

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DELIBERE :

Mme Anne BARRUOL, Présidente,

Mme Martine RIVIERE, Conseillère,

M. Philippe GREINER, Conseiller honoraire,

DEBATS :

A l'audience publique du 27 septembre 2022,M. Philippe Greiner, conseiller, chargé du rapport, assisté de Mme MC Ollierou greffière, a entendu les avocats en leurs conclusions et plaidoiries, les parties ne s'y étant pas opposées, conformément aux dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile. Il en a été rendu compte à la cour dans son délibéré et l'arrêt a été rendu à l'audience de ce jour.

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [R] [C] et Mme [I] [U] ont contracté mariage le 7 juillet 1979 devant l'officier d'état civil de [Localité 15] (34), sans contrat préalable.

Selon acte dressé par Maître [P], notaire à [Localité 18], le 17 mars 1986, les époux ont opté pour un régime de séparation de biens.

Leur changement de régime matrimonial a été homologué par le tribunal de grande instance de Grenoble par jugement du 29 juillet 1986.

Suivant acte du 7 octobre 1993, les époux ont acquis un bien immobilier à [Localité 19] (38).

Une instance en divorce ayant été introduite par M. [C] le 09/10/1999, une ordonnance de non-conciliation a été rendue le 23/06/2000.

Par jugement du 26 janvier 2004, confirmé par arrêt de la cour d'appel de Grenoble du 19 octobre 2005, le tribunal de grande instance de Grenoble a prononcé le divorce des époux et ordonné la liquidation de leurs intérêts patrimoniaux les invitant à procéder au partage amiable de leurs biens.

En l'absence de règlement amiable, par acte du 6 octobre 2008, M. [C] a alors fait assigner Mme [U] en partage judiciaire devant le tribunal de grande instance de Grenoble.

Par acte du 20 novembre 2009, Mme [U] a appelé en garantie la Bresse Assurance Mutuelle Est.

Les deux procédures ont été jointes sous le n° 08/04652.

Par jugement en date du 15 septembre 2014, le tribunal de grande instance de Grenoble a dit que Mme [U] avait la qualité de coindivisaire pour moitié de l'immeuble sis à [Localité 19] et ordonné une expertise judiciaire.

L'expert a rendu son rapport le 12 mai 2017.

Par ordonnance du 17 mai 2018, le juge de la mise en état a rejeté la demande de complément d'expertise présentée par M. [C].

Par jugement contradictoire du 14 octobre 2019, le juge aux affaires familiales de Grenoble a principalement :

- dit que les opérations de liquidation peuvent être considérées comme complexes,

- ordonné l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage judiciaire,

- commis pour y procéder Maître [V], notaire, pour la surveillance des opérations de liquidation et de partage,

- dit qu'en cas d'empêchement du juge ou du notaire commis, il sera procédé à son remplacement par ordonnance sur requête,

- dit que M. [C] dispose d'une double créance à l'encontre de Mme [U] de 29.621,68 euros et 177.100 euros,

- dit que l'actif indivis est composé de :

la valeur vénale après sinistre de 516.000 euros augmentée de l'indemnité d'assurance,

l'indemnité de 21.838,50 euros perçue par Mme [U] de l'assurance,

l'indemnité d'occupation due par M. [C] du 1er septembre 2000 au 25 août 2009, sur une base mensuelle de 34.275 euros par an, soit après abattement de 15 % pour précarité une somme de 2.459,70 euros outre indexation,

les meubles meublants enlevés du domicile conjugal le 17 août 2000 et dont l'inventaire a été fait par Maître [G] le 22 août 2000, dans les conditions prévues aux présents motifs,

- dit que le passif indivis est composé :

des travaux réglés postérieurement au sinistre par M. [C] soit 32.923,95 euros, et la somme de 21.838,20 euros réglée par Me [V],

des taxes foncières, assurance habitation, factures de fuel et d'électricité payées par M. [C] depuis la date d'effet entre époux du divorce,

- attribué préférentiellement à M. [C] le bien immobilier à [Localité 19],

- rappelé que M. [C] n'en deviendrait propriétaire qu'une fois les opérations de partage achevées,

- donné acte à la compagnie d'assurance de ce qu'elle a versé sur le compte du notaire chargé de la liquidation 837.181 euros,

- dit qu'en sus de l'indemnisation proposée, la compagnie La Bresse devra régler les intérêts de retard visés par M. [C] à hauteur de 9.996 euros,

- débouté les parties de toutes autres demandes,

-débouté les parties de leur demande respective au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit que les dépens, en ce compris les frais d'expertise, seront tirés en frais privilégiés de partage et distraits au profit des avocats.

Le 12 novembre 2019, M. [C] a interjeté appel du jugement rendu le 14 octobre 2019, en ce qui concerne la commission de Me [V], la double créance, la composition de l'actif et du passif indivis, l'attribution préférentielle du bien immobilier sis à [Localité 19], les indemnités de retard dus par la compagnie Bresse Assurance, les demandes plus amples ou contraires, les frais irrépétibles et les dépens.

Il a en outre relevé appel de l'ordonnance du 17/05/2018 du juge de la mise en état.

Par ordonnance du 2 décembre 2019, le président de la chambre des affaires familiales de la cour d'appel de Grenoble a notamment ordonné le renvoi à la mise en état de la procédure enregistrée au greffe sous le numéro RG 19/04575 avec application des dispositions des articles 902 - 908 et 909 du code de procédure civile.

Suite au départ en retraite de Maître [V], Maître [T] a été désigné le 25/01/2020, pour être remplacé par Maître [J], par ordonnance du 09/03/2020 rendue par le vice-président du tribunal judiciaire.

Le 06/04/2021, ce notaire a établi un rapport relatant les difficultés rencontrées ainsi qu'un projet d'état liquidatif.

Par ordonnance juridictionnelle du 1er juillet 2021, le conseiller de la mise en état de la cour d'appel de Grenoble a notamment :

- débouté Mme [U] de sa demande de communication de pièces dans le cadre du présent incident,

- débouté M. [C] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- renvoyé l'affaire à la mise en état,

- dit que le sort des dépens de l'incident sera lié à celui des dépens de l'affaire à intervenir au fond.

Par dernières conclusions notifiées le 5 octobre 2021, M. [C] demande à la cour de:

- juger recevable et bien fondé son appel,

- réformer l'ordonnance et le jugement dont appel,

- écarter le rapport [E] tant sur l'évaluation retenue que sur les comptes de l'indivision,

- ordonner une expertise judicaire afin que soit évaluée la valeur vénale actuelle de la propriété,

- condamner Mme [U] à verser à l'indivision l'indemnité d'assurance perçue soit 21.838,50 euros,

- fixer la valeur vénale de la propriété de [Localité 19] immeuble indivis à 941.015,50 euros,

- juger que M. [C] n'est pas débiteur d'une indemnité d'occupation, subsidiairement si une indemnité devait être retenue, réduire de 20 % son montant,

- juger que Mme [U] est débitrice de l'indivision d'une indemnité d'occupation pour 38.011 euros,

- juger que Mme [U] est débitrice de l'indivision d'une indemnité de 80.000 euros ou à tout le moins supérieure à 50.000 euros pour s'être appropriée les biens meubles de l'indivision,

- juger que Mme [U] est débitrice de l'indivision d'une indemnité de jouissance au titre du mobilier indivis qu'elle a détourné à son profit soit 1.000 euros par an depuis 5 ans,

- juger que M. [C] est créancier de l'indivision pour les dépenses d'entretien que sont les frais d'électricité, taxes fiscales, assurances, et travaux justifiés depuis mai 2000, date de l'ordonnance de non-conciliation jusqu'à la date de partage,

- juger que M. [C] a financé 95 % des frais d'acquisition et de travaux de la propriété de [Localité 19] représentant un total de 1.134.511,62 euros,

- fixer la créance de M. [C] contre Mme [U] dans le compte entre les indivisaires selon la règle du profit subsistant à la somme de 423.457 euros, ou selon la règle de la dépense faite à 510.530,20 euros,

- condamner en tant que de besoin Mme [U] à payer à M. [C] en deniers ou quittance la somme de 423.457 euros, ou celle de 510.530,20 euros,

- désigner le président de la chambre départemental des notaires de l'Isère ou tout notaire en remplacement de Maître [J] afin qu'il procède aux opérations de compte liquidation et partage, et renvoyer les parties pour le suivi desdites opérations,

- juger que les frais ( débours et émoluments) de l'état liquidatif de Maître [J] en date du 6 avril 2021 ne seront pas employés en frais privilégiés de partage et qu'ils resteront donc à la charge exclusive de Mme [U],

- ordonner la licitation de la propriété de [Localité 19] située sur la commune [Localité 19], [Adresse 21] cadastrée section A5, sous le numéro [Cadastre 7], [Cadastre 8], [Cadastre 9], [Cadastre 10], [Cadastre 11], [Cadastre 12] et [Cadastre 3] résultant de l'acte notarié du 7.10.1993 enregistré au Service de Publicité Foncière de [Localité 16] le 20.10.1993 et fixer la mise à prix à 70.000 euros ou subsidiairement 25% de la valeur estimée par l'expert [E] soit 125.000 euros, avec possibilité de baisse d'un tiers en cas de défaut d'enchère,

- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la compagnie Bresse Assurance Mutuelle de l'Est à verser 9.996 euros à l'indivision [C] et [U], en tant que de besoin à hauteur de moitié à chacun,

- condamner Mme [U] à payer à M. [C] 12.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de première instance et d'appel.

Par ses dernières conclusions notifiées le 24 août 2020, Mme [U] demande à la cour de:

- confirmer le jugement du juge aux affaires familiales du 14 octobre 2019, à l'exception des dispositions relatives à la créance dont disposerait M. [C] à l'encontre de Mme [U] pour la somme de 29.621,68 euros et 177.100 euros et à l'encontre de l'indivision faute de justificatifs permettant de valider le principe de créance dont celui-ci disposerait,

- dire et juger que Mme [U] n'est redevable d'aucune somme tant vis-à-vis de l'indivision que de M. [C],

- débouter M. [C] du surplus de ses demandes en ce compris la demande de complément d'expertise,

- condamner M. [C] au paiement de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Par ses dernières conclusions notifiées le 11 mai 2020, La Mutuelle de l'Est ' La Bresse Assurance demande à la cour de :

- juger recevable et bien-fondée la société Mutuelle de l'Est - La Bresse Assurances en ses demandes,

- rejeter toutes les demandes de M. [C] mal-fondées,

- ainsi,

- confirmer le jugement du 14 octobre 2019 du juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance,

- en tout état de cause,

- condamner M. [C] à payer à la société Mutuelle de l'Est - La Bresse Assurances 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner conformément à l'article 696 du code de procédure civile, le même aux entiers dépens de l'instance, dont distraction sera faite au profit de la SELARL Cdmf-avocat, Me Jean-Luc Médina conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est expressément renvoyé, par application de l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions susvisées.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande de changement du notaire commis

L'appelant, pour solliciter la désignation d'un autre notaire que celui commis par le premier juge, fait valoir que Maître [J] n'a pas respecté le principe du contradictoire, et aurait oeuvré avec subjectivité et parti pris.

En l'espèce :

- la notaire a appliqué strictement les dispositions du jugement déféré et n'a pas manifesté ainsi de partialité lorsqu'il a établi son projet d'acte ;

- les parties étant en désaccord, elle a rédigé un rapport dressant la liste des points de contestation ;

- les pièces qui lui ont été communiquées ont été annexées à son rapport, la notaire prenant soin de vérifier qu'aucune pièce n'avait été communiquée par une partie sans que l'autre en ait été destinataire ;

- il ne peut être reproché enfin à la notaire d'avoir rédigé un projet, puisque le jugement entrepris avait ordonné l'exécution provisoire et que l'exécution de la décision avait été requise par une partie.

En conséquence, il n'y a pas lieu de décharger Maître [J] de sa mission.

Sur la licitation de la propriété de [Localité 19]

A la demande de M. [C], ce bien lui avait été attribué préférentiellement par le premier juge. En cours d'instance, M. [C] déclare renoncer à cette attribution, sollicitant la licitation du bien.

Selon l'article 815 du code civil, 'nul ne peut être contraint à demeurer dans l'indivision et le partage peut toujours être provoqué, à moins qu'il n'y ait été sursis par jugement ou convention'.

Dès lors, il y a lieu de faire droit à la demande et d'ordonner la licitation du bien devant le notaire commis.

Concernant la mise à prix, le bien en cause comprend un château construit en 1875, de 12 pièces, de 463 m² de surface habitable, gravement endommagé par un incendie le 25/08/2009, qui a détruit les deux étages et endommagé le rez-de-chaussée et quatre bâtiments plus récents, dans une propriété de 40.971 m², sise à [Localité 19] (38).

L'expert [E] a évalué en 2017 le bien ainsi ;

- 240.191 euros pour le terrain ;

- 75.900 euros pour le château (soit 150 euros/m²), compte tenu des travaux de reconstruction estimés à 933.839 euros outre honoraires de maîtrise d'oeuvre et divers ;

- 199.750 euros pour les dépendances ;

soit un total de 516.000 euros.

Par ailleurs, l'agence ImmoSquare a estimé le bien dans une fourchette de 100.000 à 150.000 euros, l'agence Klein Immobilier indiquant quant à elle que le bien pourrait se commercialiser entre 120.000 et 140.000 euros net vendeur, au motif que le château est difficilement réparable, les dépendances en mauvais état, avec des toitures en fibrociment amianté, et remplies d'encombrants, le terrain boisé présentant peu d'opportunités pour des constructions.

Afin que la mise à prix soit suffisamment attractive pour que des candidats acquéreurs se manifestent, elle sera fixée à un montant modéré, significativement en dessous du chiffrage de l'expert, soit une somme de 150.000 euros, avec possibilité de baisse en cas de carence d'enchères, du quart puis de la moitié.

Quant à l'ordonnance du juge de la mise en état du 17/05/2018, ayant rejeté la demande d'expertise formée par M. [C], celui-ci se verra débouté de son appel à l'encontre de cette décision, une nouvelle expertise s'avérant inutile, dès lors que le bien en cause doit être vendu, le prix en résultant s'imposant aux parties.

Sur l'actif indivis

* le bien immobilier

L'actif de l'indivision comprendra le prix de vente obtenu après enchères.

* les indemnités d'assurance

Le 25/10/2011, un protocole d'accord transactionnel a été conclu entre les parties (pièce 8 appelant) aux termes duquel :

- une indemnité immédiate doit être versée entre les mains du notaire pour un montant de 836.217 euros dès la signature de l'accord ;

- une autre indemnité de 131.138 euros est prévue, mais son versement est différé à la date de la réalisation des travaux de reprise du sinistre ;

- enfin, il est indiqué qu'une somme de 21.838 euros, faisant partie intégrante de l'indemnité immédiate, a déjà été versée à Maître [V], notaire, afin de régler les mesures conservatoires pour la sauvegarde du bâtiment sinistré.

En réalité, la compagnie La Bresse a versé sur le compte du notaire 837.181 euros, la somme de 21.838 euros ne venant pas s'y ajouter, étant déjà incluse.

Par ailleurs, le 02/03/2011, M. [C] a demandé au notaire d'affecter la fraction de l'indemnisation lui revenant au solde d'un prêt souscrit auprès de la Banque Rhône Alpes. Le notaire a ainsi versé à la banque 233.300,59 euros le 21/12/2012.

En outre, il a réglé à la société Espace Gaïa, architecte,32.923,95 euros TTC au titre d' honoraires pour une mission de reconstruction à l'identique du château.

Enfin, l'assureur ne conteste pas devoir des intérêts de retard de 9.996 euros, comme fixé par le premier juge.

L'indemnité à prendre en compte pour le calcul des droits de chacune des parties sera ainsi de (837.181 € + 9.996 € - 32.923,95 €) soit 814.253,05 euros, outre les intérêts sur la somme déposée à la Caisse des Dépôts et Consignations.

Cette indemnité est indivise, car versée aux deux époux, en leur qualité de propriétaires du bien assuré.

* l'indemnité d'occupation réclamée à M. [C]

C'est par une exacte appréciation des circonstances de la cause que le premier juge a relevé que l'ordonnance de non-conciliation du 23/06/2000 ayant attribué à M. [C] le domicile conjugal de [Localité 19] et octroyé à Mme [U] un délai jusqu'au 31/08/2000 pour le quitter, l'attribution de la propriété de [Localité 19] à M. [C] était nécessairement à titre onéreux à compter du 01/09/2000.

A cette date, la prescription encourue était celle de droit commun, à savoir celle trentenaire de l'ancien article 2262 du code civil. Ce delai a été ramené à cinq ans à compter du 23/06/2006, par l'article 815-10 du code civil, son point de départ étant la date du divorce le 26/01/2004, la prescription ne courrant pas entre époux par application de l'article 2236 du même code.

Mme [U] a réclamé le paiement de l'indemnité d'occupation, par dire de son avocat du 22/02/2008, adressé à Maître [V], notaire, délégataire du président de la chambre des notaires de l'Isère, lui-même désigné par jugement du tribunal de grande instance du 26/01/2004 pour procéder aux opérations de liquidation des droits pécunaires des parties.

En effet, suivant acte authentique du 25/02/2008, a été dressé un procès-verbal de difficultés où est indiqué que M. [C], dans le point 8 de ses dires, conteste l'indemnité d'occupation qui lui est réclamée.Ainsi, cette réclamation a été nécessairement formulée par Mme [U].

Toutefois, cette réclamation n'a pu interrompre le délai de prescription, un procès-verbal de difficultés n'étant pas un acte interruptif. Toutefois, comme l'a exactement relevé le premier juge sans être utilement contredit, Mme [U] a conclu au fond dans le cadre de l'assignation en partage délivrée par M. [C] le 06/10/2008, dans les cinq ans de la date où le divorce est passé en force de chose jugée, ce qui rend sa demande recevable.

Il résulte des éléments du dossier que :

- M. [C] a occupé la partie château ainsi que le parc de façon exclusive du 1er septembre 2000 au mois d'août 2001 ;

- à partir de cette date, il a déménagé, pour habiter en location dans un appartement à [Adresse 17], comme cela est indiqué dans le jugement du tribunal de grande instance du 10/06/2002 et arrêt de la cour d'appel de Grenoble du 01/09/2003, et comme le montrent les quittances de loyers produites ;

- Mme [A], garde municipal de la ville de [Localité 20], atteste le 07/02/2022, s'être rendue dans la propriété et avoir constaté qu'elle était vide de meubles ;

- du reste, Mme [U] avait dans des conclusions du 27/06/2002 déposées au greffe de la cour, indiqué que son mari avait 'préféré quitter le domicile qui lui a été attribué par l'ordonnance de non-conciliation et régler un loyer substantiel de 7.800 FF' ;

- depuis cette date, M. [C] n'est pas revenu s'installer dans les lieux, un constat dressé le 21/04/2008 par Maître [W], huissier de justice, montrant un bâtiment totalement vide et inoccupé, les sols étant jonchés de mouches ;

- le fait que M. [C] ait conservé les clés du château est inopérant, dès lors que le domaine était occupé par d'autres personnes : la fille du couple logeait dans une maison, le père de Mme [U] habitait dans une autre maison, tandis que le fils du couple utilisait un local préfabriqué à titre d'entrepôt ; quant à Mme [U], elle avait elle aussi les clés, puisqu'elle a fait déménager une partie des meubles du château comme l'atteste un constat d'huissier du 29/08/2000 ;

- enfin, M. [C] a fait connaître très tôt sa volonté de céder le bien, et a été autorisé par jugement du 10/06/2002 à le vendre seul au prix de 914.694,10 euros, cette décision ayant été infirmée par arrêt de la cour d'appel de Grenoble du 01/09/2003, au motif que M. [C] avait pu régler les emprunts immobiliers. Postérieurement à son déménagement de la propriété, il n'a donc jamais eu l'intention, ni de la réintégrer, ni de continuer à l'utiliser ne serait-ce que ponctuellement.

Dès lors, M. [C] justifie n'avoir pas usé ou joui privativement de la chose indivise, et n'est ainsi pas redevable d'une indemnité d'occupation postérieure au 01/09/2001. L'indemnité due sera calculée d'après l'estimation de l'expert, non utilement critiquée par les parties, soit 523 euros par mois, soit 6.276 euros dus à l'indivision.

* l'indemnité d'occupation réclamée à Mme [U]

Le fait que les enfants du couple ou le père de Mme [U] aient pu occuper une partie des lieux ne peut être à l'origine d'une indemnité due par Mme [U], celle-ci n'ayant pas occupé personnellement les lieux et n'étant pas à l'origine de l'usage des lieux par sa famille, le père de Mme [U] étant entré dans les lieux en 1993. M. [C] avait donc donné son accord sur cette situation.

Le jugement déféré sera confirmé de ce chef.

* les meubles meublants

Mme [U] a fait déménager une partie des meubles du château, qui ont été séquestrés entre les mains de la société Contignon Déménagements Transports, à la demande de M. [C], suite à une ordonnance rendue sur requête du président du tribunal de grande instance du 30/08/2000.

Il en résulte que Mme [U] n'a pu en avoir la libre disposition et que ces meubles sont toujours à la disposition des parties, leur description ayant fait l'objet d'un constat d'huissier du 29/08/2000.

C'est donc exactement que le premier juge a débouté M. [C] de sa demande en paiement d'une indemnité correspondant à la valeur des meubles et d'une indemnité de jouissance, étant observé que l'habitabilité du château n'a pas été compromise, puisque l'appelant a pu continuer à y résider pendant une année.

Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il appartiendra à la notaire d'estimer la valeur des meubles, sauf pour elle à faire intervenir un sachant pour ce faire, et de procéder à leur partage en nature, par tirage au sort des lots, sauf accord amiable des parties.

Sur le passif indivis

Les frais engagés par M. [C] postérieurement à l'ordonnance de non-conciliation du 23/06/2000 pour conserver le bien indivis devront être supportés par l'indivision, à savoir, au vu des pièces produites :

- devis élagage Comte Floret du 12/03/2002, retenu comme faisant suite à la demande de la commune du 15/01/2002, soit 2.735,25 euros ; en revanche, l'occupation d'une personne à domicile ayant donné lieu à réduction d'impôt pour des salaires et cotisations de 2.575,14 euros en 2000 ne sera pas prise en compte, s'agissant d'une période où M. [C] a occupé la propriété ;

- les frais d'électricité de 2002 à 2009, soit 2.727,87 euros ;

- le fuel pour mise hors gel de octobre 2000 à décembre 2006, soit 8.201 euros ;

- les taxes foncières de 2000 à 2007, pour 16.931 euros,

- assurance multirisque, pour 28.073 euros

soit un total de 55.932,87 euros.

Sur les créances entre époux

* l'apport de Mme [U]

La propriété de [Localité 19] a été acquise au moyen d'un prêt de 1.000.000 FF contracté par les deux époux, et par un apport personnel de 194.305,50 francs chacun soit 29.621,70 euros, l'acte des 7/10 et 24/09/1993 stipulant que 'à ce jour, l'apport personnel que devait effectuer Mme [C] est avancé par M. [C] ce qu'elle reconnaît ; en conséquence, elle s'oblige à son remboursement par tout moyen à sa convenance et dans le délai de son choix. Si ce paiement n'était pas effectué avant la dissolution du mariage (..) pour cause de divorce, M. [C] serait alors créancier de son épouse à due concurrence des sommes non payées. Par le calcul de cette créance, il sera fait appel à la théorie du profit subsistant, ce qui signifie qu'elle ne pourra être moindre que la valeur de la proportion de la propriété qui aurait été acquise au moyen de ces fonds s'ils avaient été acquittés , au jour de la dissolution du mariage'.

M. [C] expose que l'apport de Mme [U] correspond à 15,40% de l'acquisition, et que l'actif à retenir est de 941.015 euros, soit une créance de 144.916,39 euros.

Mme [U] fait valoir que cette créance est prescrite.

La prescription étant suspendue durant le mariage, son point de départ est celle de l'arrêt de la cour d'appel de Grenoble du 19 octobre 2005, date à laquelle le jugement est passé en force de chose jugée, un pourvoi ayant au surplus fait l'objet d'un arrêt de non-admission du 30/04/2007.

M. [C] a sollicité paiement de cette somme dès le 25/02/2008, date du procès-verbal de difficultés dressé par Maître [V], notaire, qui en fait état et a assigné Mme [C] le 06/10/2008, soit dans le délai de la prescription quinquennale.

Dès lors, cette demande n'est pas prescrite.

Il sera fait droit à la demande de M. [C], Mme [U] étant redevable de la somme réclamée, soit 144.916,39 euros.

* sur le financement de l'achat du bien immobilier et des travaux

L'acquisition a été financée par un prêt contracté auprès de la Société Lyonnaise de Banque, prêt qui a été refinancé par un prêt souscrit auprès de la BNP en 1995, le nouveau prêt incluant le financement de travaux. Ce prêt a été réaménagé à deux reprises, au moyen de deux crédits, souscrits l'un par M. [C] seul, l'autre, au nom de l'indivision. Ce dernier prêt a été remboursé par M. [C] en 2002.

En outre, les époux ont contracté auprès de la société Cofica un prêt personnel le 15/06/1996 de 1.200.000 francs. L'appelant expose, sans être utilement contredit, que cette somme a servi à financer des travaux d'aménagement du château.

Pour le calcul des sommes effectivement réglées par M. [C], il ne convient pas d'additionner chacun des prêts, mais de soustraire du montant du prêt le capital restant dû, lors de chaque refinancement, pour connaître le montant payé, comme l'a fait exactement l'expert.

Ainsi, M. [C] a réglé pour le compte de l'indivision les sommes suivantes :

- 81.803 euros au titre des deux premiers prêts BNP de 1993 et 1995

- 287.100 euros au titre des prêts réaménagés en 1998 et 1999

- 113.543,41 euros au titre du prêt souscrit par M. [C] en 2006

- 182.939 euros au titre du prêt Cofica

soit un total de 665.385,41 euros.

En outre, le 31/07/2006, M. [C] a souscrit seul auprès de la Banque Rhône Alpes un prêt de 346.844 euros, au titre d'un 'rachat de prêt, endettement lié à la maison de [Localité 19]', qui a été soldé le 27/11/2012 par le versement de la somme de 233.300,59 euros, réglée au moyen de l'indemnité d'assurance. Ce versement est ainsi venu en déduction des prêts souscrits énumérés ci-avant, s'agissant d'une restructuration de l'endettement et non d'une dette nouvelle.

M. [C] a ainsi réglé seul le prêt du 16/11/2006 au 16/11/2012, tandis qu'il résulte du rapport d'expertise que Mme [U] a réglé 75.869 euros au titre des travaux.

Toutefois, selon l'article 1537 du code civil, 'les époux contribuent aux charges du mariage suivant les conventions contenues en leur contrat ; et, s'il n'en existe point à cet égard, dans la proportion déterminée à l'article 214'.

L'article 2 du contrat de mariage stipule à ce sujet que 'les époux contribueront aux charges du ménage à proportion de leurs revenus et gains respectifs, sans être assujettis à aucun compte entre eux, ni à recevoir des quittances l'un de l'autre. A titre principal, néanmoins, ces charges incombent au mari. Il sera obligé de fournir à son épouse ce qui sera nécessaire pour les besoins de la vie, selon ses facultés et son état. L'épouse s'acquittera de sa contribution en la prélevant sur les ressources dont elle a l'administration et la jouissance et par son action au foyer. Ces charges seront réputées avoir été réglées jour par jour'.

Il s'agit là d'une présomption simple, un époux pouvant agir contre son conjoint dès lors qu'il démontre qu'il a sur-contribué aux charges du mariage. En l'espèce, le bien financé par M. [C] constituait le domicile familial, et il disposait de revenus plus importants, en sa qualité de dirigeant de sociétés, que son épouse.

Celle-ci a assuré la gestion du ménage et a participé à la direction du foyer, ce qui a constitué la cause des versements effectués pour son compte.

Dès lors, c'est par une exacte appréciation des circonstances de la cause que le premier juge a rejeté cette créance de M. [C] sur Mme [U]. Le jugement déféré sera confirmé de ce chef.

Sur les frais de partage

M. [C] fait valoir que Mme [U] a saisi le notaire prématurément, sans attendre l'issue de l'appel, afin que celui-ci établisse un projet d'acte liquidatif et considère que les frais afférents à cet acte ne soient supportés que par l'intimée.

L'intervention de la notaire a permis de clarifier les positions de chacune des parties et de faciliter le règlement du litige. Dans ces conditions, ces frais seront supportés par les deux parties.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Compte tenu du sort partagé du litige, l'équité ne commande pas l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Enfin, les dépens de première instance et d'appel seront employés en frais privilégiés de partage.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a :

- dit que les opérations de liquidation peuvent être considérées complexes,

- ordonné l'ouverture des opérations de compte, liquidation, et partage judiciaire,

- commis pour y procéder Maître [V], notaire, remplacée par Maître [J], pour la surveillance des opérations de liquidation et de partage,

- dit qu'en cas d'empêchement du juge ou du notaire commis, il sera procédé à son remplacement par ordonnance sur requête,

- condamné la compagnie Bresse Assurance Mutuelle de l'Est au paiement à l'indivision [C]/[U] de la somme de 9.996 euros ;

- rejeté la demande de paiement d'une indemnité d'occupation à l'encontre de Mme [U] ;

- rejeté la créance de M. [C] sur Mme [U] au titre des remboursements d'emprunt et de travaux ;

Le réforme pour le surplus et statuant à nouveau,

Dit n'y avoir lieu à procéder au remplacement de Maître [J], notaire, désignée en remplacement de Maître [V] ;

Ordonne la licitation par devant Maître [J], de l'immeuble de [Adresse 21], cadastré section A5, n° [Cadastre 7], [Cadastre 8], [Cadastre 9], [Cadastre 10], [Cadastre 11], [Cadastre 12] et [Cadastre 3], ayant fait l'objet d'un acte de vente du 07/10/1993 enregistré au service de publicité foncière de [Localité 16] le 20/10/1993, sur la mise à prix de 150.000 euros, avec possibilité de baisse d'un quart puis de moité en cas de carence d'enchères ;

Confirme l'ordonnance du juge de la mise en état du 17/05/2018 ayant rejeté la demande d'expertise formée par M. [C] ;

Dit que le prix de vente provenant de la licitation fera partie de l'actif indivis ;

Dit en conséquence que l'indemnité d'assurance, partie de l'actif indivis est de 814.253,05 euros, les sommes versées pour le compte de l'indivision étant à déduire ;

Dit que l'indemnité d'occupation due par M. [C] à l'indivision est de 6.276 euros ;

Dit qu'il sera procédé au partage en nature des meubles meublants, le notaire commis étant chargé de les répartir en deux lots de valeur égale, qui seront tirés au sort pour être attribués à M. [C] et à Mme [U], sauf meilleur accord des parties ;

Dit que l'indivision est redevable envers M. [C] de 55.932,87 euros au titre de la conservation du bien indivis ;

Dit que Mme [U] est redevable envers M. [C] de 144.916,39 euros euros au titre de son apport personnel pour l'acquisition du bien de [Localité 19] ;

Dit que le notaire commis procédera aux opérations de compte, liquidation et partage en prenant en compte les dispositions du présent arrêt ;

Dit que les frais de l'état liquidatif établi par Maître [J] feront partie intégrante des frais de partage, qui seront supportés par moitié entre les parties ;

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Dit que les dépens de première instance et d'appel seront employés en frais privilégiés de partage ;

PRONONÇÉ par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

SIGNÉ par la présidente Anne Barruol et par M.C. Ollierou, greffière présente lors de la mise à disposition, à laquelle la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.

La greffière La Présidente

M.C. OLLIEROU, A. BARRUOL


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Chbre des aff. familiales
Numéro d'arrêt : 19/04575
Date de la décision : 10/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-10;19.04575 ?
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