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29/11/2022 | FRANCE | N°20/03085

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Ch.secu-fiva-cdas, 29 novembre 2022, 20/03085


C3



N° RG 20/03085



N° Portalis DBVM-V-B7E-KSFK



N° Minute :





































































Notifié le :



Copie exécutoire délivrée le :









AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



CHAMBRE SOCIALE - PROTECTION S

OCIALE

ARRÊT DU MARDI 29 NOVEMBRE 2022





Appel d'une décision (N° RG 17/00204)

rendue par le pôle social du tribunal judiciaire de VIENNE

en date du 16 septembre 2020

suivant déclaration d'appel du 05 octobre 2020





APPELANTE :



La CIPAV - caisse interprofessionelle de prévoyance et d'assurance vieillesse, prise en la personne de son représentant légal ...

C3

N° RG 20/03085

N° Portalis DBVM-V-B7E-KSFK

N° Minute :

Notifié le :

Copie exécutoire délivrée le :

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE SOCIALE - PROTECTION SOCIALE

ARRÊT DU MARDI 29 NOVEMBRE 2022

Appel d'une décision (N° RG 17/00204)

rendue par le pôle social du tribunal judiciaire de VIENNE

en date du 16 septembre 2020

suivant déclaration d'appel du 05 octobre 2020

APPELANTE :

La CIPAV - caisse interprofessionelle de prévoyance et d'assurance vieillesse, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 3]

représentée par Me Marion SIMONET de la SELAS EPILOGUE AVOCATS, avocat au barreau de LYON substituée par Me Cécile GABION, avocat au barreau de GRENOBLE

INTIMEE :

Madame [M] [R]

de nationalité Française

[Adresse 6]

[Adresse 6]

[Localité 1]

représentée par Me Alexine GRIFFAULT de la SELAS AGIS, avocat au barreau de VIENNE

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DEBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

M. Jean-Pierre DELAVENAY, Président,

Mme Isabelle DEFARGE, Conseiller,

M. Pascal VERGUCHT, Conseiller,

Assistés lors des débats de M. Fabien OEUVRAY, Greffier, en présence de Mme Rima AL TAJAR, Greffier stagiaire lors de l'appel des causes

DÉBATS :

A l'audience publique du 06 octobre 2022,

M. Jean-Pierre DELAVENAY chargé du rapport, Mme Isabelle DEFARGE, Conseiller et M. Pascal VERGUCHT, Conseiller ont entendu les représentants des parties en leurs conclusions et plaidoiries,

Et l'affaire a été mise en délibéré à la date de ce jour à laquelle l'arrêt a été rendu.

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Mme [M] [R] a été affiliée du 1er octobre 2005 au 30 septembre 2010 à la Caisse Interprofessionnelle de Prévoyance et d'Assurance Vieillesse (CIPAV) au titre de son activité de conseil exercée à titre libéral.

Le 20 juillet 2017, Mme [R] a formé opposition devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de Vienne à une contrainte émise par la CIPAV le 27 mai 2014 pour la somme de 56 726,41 euros, signifiée le 7 juillet 2017 pour un montant ramené à 14 474,09 euros, frais de signification compris, se rapportant aux cotisations et majorations de retard des exercices 2010, 2011 et 2012.

Par jugement du 16 septembre 2020, le pôle social du tribunal judiciaire de Vienne a :

- déclaré prescrite la contrainte émise le 27 mai 2017 et signifiée le 7 juillet 2017,

- débouté Mme [R] du surplus de ses prétentions,

- dit que les frais de signification resteront à la charge de la CIPAV,

- dit n'y avoir lieu à statuer sur les dépens (ndr : en considération de la date d'introduction de l'instance).

Le 5 octobre 2020, la CIPAV a interjeté appel de cette décision.

Les débats ont eu lieu à l'audience du 6 octobre 2022 et les parties avisées de la mise à disposition au greffe de la présente décision le 29 novembre 2022.

EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Selon ses conclusions n° 2 parvenues au greffe le 3 octobre 2022 et reprises oralement à l'audience, la CIPAV demande à la Cour de :

- infirmer le jugement rendu le 16 septembre 2020 par le pôle social du tribunal judiciaire de Vienne,

Statuant à nouveau,

- valider la contrainte à hauteur de 14 216,89 euros (cotisations 11 438,50 euros ; majorations 2 778,39 euros),

- condamner Mme [R] au paiement de cette somme outre les frais de recouvrement nécessaires à la bonne exécution de la contrainte,

- débouter Mme [R] de toutes ses demandes et prétentions plus amples ou contraires,

- condamner Mme [R] à lui verser la somme de 300 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mme [R] aux dépens.

La CIPAV soutient en réponse aux moyens adverses :

- que les cotisations de l'exercice 2010 n'étaient pas prescrites au moment de la délivrance de la contrainte du 27 mai 2017, rappelant qu'une mise en demeure a été adressée à Mme [R] le 20 décembre 2013, soit dans le délai de prescription triennale expirant le 30 juin 2014 ; qu'elle disposait ensuite d'un délai de cinq ans pour signifier la contrainte selon les dispositions de l'article L. 244-11 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction antérieure à la loi du 23décembre 2016 ;

- que seules sont dues les cotisations antérieures à la radiation au 30 septembre 2010 de Mme [R] et qu'en conséquence, les appels à cotisations concernant les exercices 2011 et 2012 ont été annulés ;

- qu'elle n'a eu connaissance de la cessation d'activité de Mme [R] qu'après l'émission de la contrainte, d'où la réduction du montant pour lequel elle a été signifiée ;

- qu'il incombait à l'affiliée de porter à la connaissance de la CIPAV son nouveau domicile ;

- que la réception effective de la mise en demeure ne conditionne pas la validité de la contrainte ;

- que les cotisations sont portables et non quérables ;

- qu'à l'occasion d'une procédure d'opposition à contrainte, la juridiction ne peut ordonner la remise des majorations de retard qui doit être préalablement demandée au directeur de la caisse (R. 243-20 du code de la sécurité sociale ) ;

- que les cotisations ont été calculées :

* à titre provisionnel pour la retraite de base sur le revenu N-2 de 2008 inconnu avec un prorata pour tenir compte de la radiation au 30 septembre 2010 soit 4 830 euros x 9/12ème = 3 622,50euros ;

* à titre définitif pour la retraite complémentaire sur la base du revenu N-2 de 2008 inconnu soit en classe 10 maximale (revenu supérieur à 81 666 euros / an) avec application du même prorata ;

* en classe minimale A pour l'invalidité décès (76 euros) et sans prorata.

Selon ses conclusions d'intimée n° 2 transmises par voie électronique le 5 octobre 2022 et reprises oralement à l'audience, Mme [M] [R] demande à la Cour de :

A titre principal,

- prononcer la nullité de la contrainte du 7 juillet 2017,

A titre subsidiaire,

- déclarer prescrite la contrainte du 27 mai 2014, signifiée 7 juillet 2017 et confirmer le jugement entrepris,

A titre infiniment subsidiaire,

- débouter la CIPAV de sa demande en paiement de la somme de 14 216,89 euros,

A défaut, juger qu'elle n'est redevable que de la somme de 1 260 euros et lui accorder des délais de paiement sur 10 mois,

- débouter la CIPAV de sa demande en paiement des majorations de retard,

En tout état de cause,

- condamner la CIPAV au paiement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la CIPAV aux entiers dépens de l'instance.

A titre principal, elle soutient que la contrainte est nulle dès lors l'acte de signification ne comporte aucun décompte susceptible de justifier la différence entre les deux montants successivement réclamés à savoir 14 474,09 euros sur cet acte et 56 726,41 euros sur la contrainte.

A titre subsidiaire, elle fait valoir :

- que la contrainte litigieuse est nulle en raison de l'irrégularité de la mise en demeure préalable du 20 décembre 2013 envoyée à l'ancienne adresse de son établissement (avant son déménagement à compter du 1er avril 2009) alors que la CIPAV ne pouvait ignorer cette information communiquée par le Centre de Formalités des Entreprises (CFE) ;

- que l'action en recouvrement de cette contrainte du 27 mai 2014 signifiée le 7 juillet 2017 plus de trois années après est prescrite en application des dispositions de l'article L. 244-9 du code de la sécurité sociale.

Au fond elle estime ne pas devoir de cotisations car la CIPAV ne les lui a jamais réclamées et a manqué à son devoir d'information, ne répondant pas à ses multiples courriers.

Elle a cessé son activité le 1er août 2010 et son revenu 2008 a été de 112 euros. En prenant pour base ce revenu pour le calcul de ses cotisations 2010, elle estime n'être redevable que d'une somme de 1 260 euros de cotisations en principal et sollicite la décharge des majorations de retard en raison des manquements de la CIPAV.

Pour le surplus de l'exposé des moyens des parties au soutien de leurs prétentions il est renvoyé à leurs conclusions visées ci-dessus par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIVATION

Le litige porte sur le recouvrement des cotisations 2010-2011-2012 par une contrainte du 27 mai 2014, signifiée le 7 juillet 2017, qui avait été précédée d'une mise en demeure du 20 décembre 2013.

À titre principal, Mme [R] se prévaut de la nullité de la contrainte au motif qu'elle a été décernée le 27 mai 2014 pour une somme de 56 726,41 euros et qu'elle lui a été signifiée trois ans plus tard pour un montant ramené à 14 216,89 euros, sans explication dans l'acte de signification de cette diminution.

La contrainte délivrée pour une somme supérieure aux cotisations réellement dues n'en est pas nulle pour autant.

L'irrégularité éventuelle de la signification d'un acte ne peut emporter que la nullité de cette signification le cas échéant qui n'a pas été demandée par Mme [R], mais non la nullité de l'acte signifié en lui-même, de sorte que le moyen ne peut être accueilli.

À titre subsidiaire mais toujours liminaire, Mme [R] invoque la nullité de la mise en demeure et partant soutient que l'action en recouvrement des cotisations est prescrite.

Dans sa rédaction applicable au litige l'article, L . 244-2 du code de la sécurité sociale prévoyait que toute action effectuée en application de l'article L. 244-11 (ndr : recouvrement de cotisations) était obligatoirement précédée d'une mise en demeure adressée par lettre recommandée à l'employeur ou au travailleur indépendant d'avoir à régulariser sa situation dans le mois, l'article R. 244-1 du code de la sécurité sociale précisant que 'l'envoi par l'organisme de recouvrement ou par le service mentionné à l'article R. 155-1 de l'avertissement ou de la mise en demeure prévus à l'article L. 244-2 est effectué par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. L'avertissement ou la mise en demeure précise la cause, la nature et le montant des sommes réclamées ainsi que la période à laquelle elles se rapportent'.

Cette mise en demeure selon l'article L. 244-3 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction applicable ne peut concerner que les cotisations exigibles au cours des trois années civiles qui précèdent l'année de son envoi, ainsi que les cotisations exigibles au cours de l'année de son envoi.

L'article L. 244-11 du code de la sécurité sociale prévoyait ensuite que l'action civile en recouvrement des cotisations ou des majorations de retard se prescrivait par cinq ans à compter du délai imparti par la mise en demeure prévue aux articles L. 244-2 et L. 244-3, soit au cas présent à partir du 20 janvier 2014 (mise en demeure du 20 décembre 2013 + un mois) pour expirer le 20 janvier 2019 (+ 5 ans).

Si le défaut de réception effective de la mise en demeure par le cotisant n'affecte pas la validité de la mise en demeure, elle doit cependant être envoyée à l'adresse du redevable des cotisations avant l'expiration du délai de prescription de la dette.

À ce titre dans sa rédaction applicable au litige, l'article R. 613-26 du code de la sécurité sociale disposait que 'toute personne doit, dans un délai de trente jours, faire connaître tout changement de résidence et toute modification intervenue dans ses activités professionnelles ou sa situation à l'égard des régimes légaux ou réglementaires d'assurance vieillesse ou d'assurance invalidité, qui peuvent soit entraîner son rattachement à une autre caisse de base ou son affiliation à un autre organisme conventionné, soit lui ouvrir droit aux prestations du régime institué par le présent titre, soit entraîner sa radiation de ce régime'.

Au cas d'espèce Mme [R] a été affiliée à la CIPAV en octobre 2005 et a été radiée à effet au 30 septembre 2010.

Son adresse lors de son affiliation était [Adresse 2] où la mise en demeure du 20 décembre 2013 a été expédiée et a été retournée à la CIPAV avec la mention 'destinataire inconnu à l'adresse'.

Elle justifie (pièce 5) d'un courrier du 22 février 2009 adressé à l'Urssaf de Vienne hébergeant le centre de formalité des entreprises informant l'Urssaf de son intention de radier prochainement son entreprise individuelle et de son changement d'adresse à compter du 1er avril 2009 qui sera désormais '[Adresse 5], soit celle où la contrainte lui a été signifiée le 7 juillet 2017.

Si elle ne justifie pas de l'envoi en recommandé de ce courrier, elle justifie cependant bien de sa réception au centre de formalité des entreprises par un courrier de la direction générale des finances publiques du 10 novembre 2009 (sa pièce 6) lui écrivant à cette nouvelle adresse : 'le centre de formalité des entreprises (CFE) vient de m'informer du transfert de votre activité (...)'.

Ce centre recevant par une déclaration unique pour l'ensemble des organismes sociaux concernés toutes les formalités de modification des entreprises pour les professions libérales et notamment les changements d'adresse ou transferts de siège social, Mme [R] justifie donc bien avoir informé la CIPAV de son changement d'adresse.

Dès lors la mise en demeure de la Cipav du 20 décembre 2013 expédiée à l'ancienne adresse de la cotisante est irrégulière et n'a pas eu l'effet interruptif de prescription des cotisations prévu par l'article L. 244-3 du code de la sécurité sociale précité, dans sa rédaction applicable aux faits de l'espèce.

La CIPAV ne pouvait donc par voie de contrainte du 27 mai 2014 recouvrer des cotisations prescrites et sans mise en demeure régulière préalable de sorte que le jugement déféré doit être confirmé.

La CIPAV succombant supportera les dépens d'appel.

Il ne parait pas inéquitable de laisser à Mme [R] la charge de ses frais irrépétibles d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme le jugement RG n° 17/00204 rendu le 16 septembre 2020 par le pôle social du tribunal judiciaire de Vienne.

Y ajoutant,

Condamne la CIPAV aux dépens d'appel.

Déboute Mme [M] [R] de sa demande par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par M. Jean-Pierre Delavenay, président et par Mme Chrystel Rohrer, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Ch.secu-fiva-cdas
Numéro d'arrêt : 20/03085
Date de la décision : 29/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-29;20.03085 ?
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