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29/11/2022 | FRANCE | N°20/03072

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Ch.secu-fiva-cdas, 29 novembre 2022, 20/03072


C3



N° RG 20/03072



N° Portalis DBVM-V-B7E-KSD4



N° Minute :





































































Notifié le :



Copie exécutoire délivrée le :











AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



CHAMBRE SOCIALE - PROT

ECTION SOCIALE

ARRÊT DU MARDI 29 NOVEMBRE 2022





Appel d'une décision (N° RG 18/00231)

rendue par le pôle social du tribunal judiciaire de CHAMBERY

en date du 06 juillet 2020

suivant déclaration d'appel du 05 octobre 2020





APPELANTE :



SASU [3], prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

faisant électi...

C3

N° RG 20/03072

N° Portalis DBVM-V-B7E-KSD4

N° Minute :

Notifié le :

Copie exécutoire délivrée le :

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE SOCIALE - PROTECTION SOCIALE

ARRÊT DU MARDI 29 NOVEMBRE 2022

Appel d'une décision (N° RG 18/00231)

rendue par le pôle social du tribunal judiciaire de CHAMBERY

en date du 06 juillet 2020

suivant déclaration d'appel du 05 octobre 2020

APPELANTE :

SASU [3], prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

faisant élection de domicile au cabinet de Me Guy DE FORESTA

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Guy DE FORESTA de la SELAS DE FORESTA AVOCATS, avocat au barreau de LYON

INTIMEE :

La CPAM DU RHONE, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Adresse 2]

comparante en la personne de Mme [I] [Z], régulièrement munie d'un pouvoir

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DEBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

M. Jean-Pierre DELAVENAY, Président,

Mme Isabelle DEFARGE, Conseiller,

M. Pascal VERGUCHT, Conseiller,

Assistés lors des débats de M. Fabien OEUVRAY, Greffier, en présence de Mme Rima AL TAJAR, Greffier stagiaire

DÉBATS :

A l'audience publique du 06 octobre 2022,

M. Jean-Pierre DELAVENAY chargé du rapport, Mme Isabelle DEFARGE, Conseiller et M. Pascal VERGUCHT, Conseiller ont entendu les représentants des parties en leurs conclusions et plaidoiries,

Et l'affaire a été mise en délibéré à la date de ce jour à laquelle l'arrêt a été rendu.

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Le 23 mai 2008, la société [3] a établi une déclaration d'accident du travail pour des faits déclarés survenus la veille concernant M. [P] [X], conducteur routier depuis le 30 janvier 2008.

Il ressort de la déclaration qu'en descendant de la cabine du camion malaxeur, M. [X] a ressenti une vive douleur dans la jambe gauche.

Le certificat médical initial daté du jour des faits mentionne une lombalgie puis sciatalgie S1 gauche nécessitant un arrêt de travail jusqu'au 1er juin 2008.

Cet accident a été pris en charge, au titre de la législation professionnelle, par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie (CPAM) du Rhône.

L'état de santé de l'assuré a été déclaré consolidé avec séquelles indemnisables à la date du 30 août 2009.

Le taux d'IPP initialement fixé à 12 % a été ramené à 8 % par jugement du 05 juin 2014 du tribunal du contentieux de l'incapacité de Dijon saisi par l'employeur.

Lors de sa réunion du 28 septembre 2016, la commission de recours amiable a confirmé l'opposabilité à l'employeur de la prise en charge de l'accident dont a été victime M. [X].

Le 30 avril 2018, la société [3] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Chambéry d'un recours à l'encontre du rejet implicite par la commission de recours amiable de la caisse primaire du Rhône saisie le 26 mai 2015 de sa demande d'inopposabilité de la décision de prise en charge de l'accident et des conséquences financières subséquentes.

Par jugement du 6 juillet 2020, le pôle social du tribunal judiciaire de Chambéry a :

- confirmé la décision de prise en charge, au titre de la législation professionnelle, de l'accident dont a été victime M. [X] le 22 mai 2008,

- rejeté la demande d'expertise judiciaire,

- débouté la société [3] de son recours,

- condamné la société [3] aux dépens.

Le 5 octobre 2020, la société [3] a interjeté appel de cette décision qui lui a été notifiée par lettre recommandée avec accusé de réception le 9 septembre 2020.

Les débats ont eu lieu à l'audience du 6 octobre 2022 et les parties avisées de la mise à disposition au greffe de la présente décision le 29 novembre 2022.

EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Selon ses conclusions parvenues au greffe le 8 juin 2022 et reprises oralement à l'audience, la société [3] demande à la cour :

- de déclarer son recours recevable,

- d'infirmer le jugement rendu le 6 juillet 2020 par le tribunal judiciaire de Chambéry dans toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

Avant dire droit,

- de constater qu'il existe un litige d'ordre médical portant sur la réelle imputabilité des soins et arrêts de travail indemnisés au titre de l'accident du travail du 22 mai 2008 déclaré par M. [X],

En conséquence,

- d'ordonner une expertise médicale judiciaire, le litige intéressant les seuls rapports caisse/employeur, afin de vérifier la justification des arrêts de travail pris en charge par la CPAM du Rhône au titre de l'accident du travail du 22 mai 2008 déclaré par M. [X],

- de nommer tel expert avec pour mission en substance de :

- fixer la durée des arrêts de travail et des soins en relation directe et exclusive avec les lésions initiales rattachables à l'accident du travail,

- dire si l'accident du travail a seulement révélé ou s'il a temporairement aggravé un état indépendant à décrire et dans ce dernier cas, dire à partir de quelle date cet état est revenu au statu quo ante ou a recommencé à évoluer pour son propre compte,

- en tout état de cause, dire à partir de quelle date la prise en charge des soins et arrêts de travail au titre de la législation professionnelle n'est plus médicalement justifiée au regard de l'évolution du seul état consécutif à l'accident.

En tout état de cause,

- de surseoir à statuer et renvoyer l'affaire à une audience ultérieure pour qu'il soit débattu du contenu du rapport d'expertise,

- de juger inopposables à son encontre les prestations servies n'ayant pas de lien direct, certain et exclusif avec l'accident du travail du 22 mai 2008 déclaré par M. [X].

La société [3] soutient que la caisse primaire ne lui a pas transmis de document permettant de justifier du bien-fondé des prestations dont cette dernière a reconnu le caractère professionnel.

Elle ajoute que son consultant médical, le Dr [M], s'appuyant notamment sur les conclusions du Dr [W] désigné par le tribunal du contentieux de l'incapacité de Dijon, a estimé que « la date de consolidation retenue par le médecin conseil de la caisse est anormalement tardive » et que « la consolidation se devait d'être prononcée au plus tard à l'échéance de 14 jours d'évolution soit le 4 juin 2008 ».

Selon ses conclusions parvenues au greffe le 7 juillet 2022 et reprises oralement à l'audience, la caisse primaire d'assurance maladie du Rhône demande à la cour :

- de confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré,

Si par extraordinaire la cour devait avoir recours à une expertise médicale judiciaire pour trancher le litige,

- de déclarer irrecevable toute demande de fixation d'une nouvelle date de guérison/consolidation.

La CPAM du Rhône se prévaut, par la production des arrêts de travail, d'une continuité des soins et symptômes sur un même siège de lésions de sorte que la présomption d'imputabilité s'applique.

Elle estime que l'employeur ne justifie d'aucun élément ni même commencement de preuve pertinent de nature à exclure le rôle causal de l'accident du travail dans les soins et arrêts pris en charge ni même d'une interférence avec un état antérieur persistant. Elle en conclut que la société [3] ne renverse pas cette présomption.

Pour le surplus de l'exposé des moyens des parties au soutien de leurs prétentions il est renvoyé à leurs conclusions visées ci-dessus par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIVATION

La matérialité de l'accident du travail n'est pas contestée par la Société [3] mais seulement l'imputabilité des soins et arrêts de travail découlant de cet accident pour laquelle elle sollicite avant dire droit une mesure d'expertise médicale sur pièces.

Elle précise que la période d'incapacité de travail durant laquelle sont versées des indemnités journalières s'entend comme l'impossibilité de reprendre une activité professionnelle quelconque et non spécifiquement l'emploi occupé précédemment, tandis que la date de consolidation correspond à la date à laquelle les lésions n'évoluent plus et prennent un caractère permanent, sous réserve d'aggravation ultérieure.

Elle ajoute que la très grande majorité des dépenses imputées à son compte employeur correspondent à des indemnités journalières sans frais médicaux ou pharmaceutiques importants ni d'hospitalisation et s'interroge donc sur la légitimité de la longueur des arrêts de travail.

Elle se fonde également sur l'avis de son médecin consultant (Dr [M]) et l'avis du médecin désigné par le tribunal du contentieux de l'incapacité (Docteur [W]) qui avait estimé que le traitement d'une lombalgie aigue est d'ordinaire d'une quinzaine de jours.

Enfin elle conteste avoir eu communication du certificat médical initial.

À ce titre il ressort des pièces versées aux débats par l'appelante (pièce n° 3) qu'une précédente procédure l'a opposée à la caisse primaire d'assurance maladie de Lyon devant le tribunal du contentieux de l'incapacité de Dijon, à l'occasion de laquelle la Société [3] avait désigné le Dr [N] pour être destinataire des pièces médicales (cf jugement du TCI du 5 juin 2014 page 2).

Le Dr [M] mandaté par la Société [3] pour les besoins de la présente instance cite dans son rapport de consultation médicale (pièce appelante n° 8) le mémoire rédigé par le Dr [N] le 22 mai 2014 ' dont il est possible d'établir que le certificat médical initial rapporte la constatation d'une lombalgie puis sciatalgie L5 gauche '.

En conséquence, la Société [3] a bien eu connaissance de ce certificat médical initial par l'intermédiaire du médecin qu'elle avait désigné, contrairement à ce qu'elle soutient.

Les barèmes de la Haute Autorité de Santé relatifs à la durée commune de traitement d'une pathologie donnée ne constituent qu'une moyenne et, au cas présent, la pathologie lombalgie est associée à une sciatalgie.

Quant au Dr [W] désigné par le tribunal du contentieux et de l'incapacité, sa mission portait sur l'évaluation du taux d'incapacité permanente après consolidation, non sur la détermination de la date de celle-ci.

Ceci étant, il découle des dispositions de l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale au terme d'une jurisprudence constante (Ch. réunies, 7 avril 1921) une présomption d'imputabilité au travail des lésions apparues à la suite d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle.

Dès lors qu'un arrêt de travail a été initialement prescrit ou que le certificat médical initial d'accident du travail est assorti d'un arrêt de travail, cette présomption s'étend à toute la durée d'incapacité de travail précédant soit la guérison complète, soit la consolidation de l'état de la victime.

L'absence de continuité de symptômes et soins jusqu'à la date de consolidation n'est pas de nature à faire écarter la présomption d'imputabilité à l'accident du travail des soins et arrêts de travail contestés par l'employeur.

Il appartient à l'employeur de renverser cette présomption et de rapporter la preuve contraire en démontrant que les lésions, soins et arrêts de travail litigieux ont, en totalité ou pour partie, une cause totalement étrangère au travail distincte d'un état pathologique antérieur révélé ou aggravé par l'accident du travail qui affecterait l'articulation ou l'organe lésé par ledit accident.

En l'occurrence, la prescription immédiate d'un arrêt n'est pas contestée puisque l'objet de la contestation de la Société [3] porte précisément sur les 405 jours d'indemnités journalières qui ont été imputés à son compte employeur dont elle a fourni les extraits pour les années 2008 et 2009 (sa pièce n° 2).

Ces prescriptions d'arrêts de travail continus entre le 23 mai 2008 et le 30 août 2009 sont en outre confirmées en tant que de besoin par les captures d'écran des archives numériques que la caisse a conservées, ainsi que par les quatre fiches de contrôle de la durée de ces arrêts de travail par le médecin conseil de la caisse effectués les 16 juin 2008, 15 décembre 2008, 15 mai 2009 et 24 août 2009 (pièces de la caisse n° 6 et 7).

Dès lors la présomption d'imputabilité jusqu'à la date de consolidation déjà fixée dans les rapports entre la caisse et l'assuré a vocation à s'appliquer.

Pour contester cette présomption et rapporter la preuve d'une cause totalement étrangère, la Société [3] ne s'appuie que sur l'avis médico-légal d'un médecin qu'elle a mandaté à cet effet et celui du Dr [W] désigné par le tribunal du contentieux de l'incapacité dont ce n'était pas la mission, estimant tous deux anormalement longue la durée des arrêts de travail prescrits en l'absence de gravité particulière de l'accident, d'intervention chirurgicale, de complications survenues, soins et traitements particuliers.

Ces considérations générales sont insuffisantes à rapporter tant cette preuve qui incombait à l'appelante, qu' un commencement de preuve qui rendrait légitime sa demande d'expertise, d'une cause totalement étrangère au travail de tout ou partie des soins et arrêts de travail présumés imputés à l'accident de travail du 22 mai 2008.

Le jugement sera donc confirmé et l'appelante succombante condamnée aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme le jugement RG n° 18/00231 rendu le 6 juillet 2020 par le pôle social du tribunal judiciaire de Chambéry.

Y ajoutant,

Condamne la société [3] aux dépens d'appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par M. Jean-Pierre Delavenay, président et par Mme Chrystel Rohrer, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Ch.secu-fiva-cdas
Numéro d'arrêt : 20/03072
Date de la décision : 29/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-29;20.03072 ?
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