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28/11/2022 | FRANCE | N°20/02749

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Ch.secu-fiva-cdas, 28 novembre 2022, 20/02749


C3



N° RG 20/02749 - N° Portalis DBVM-V-B7E-KRDB



N° Minute :





































































Notifié le :



Copie exécutoire délivrée le :









AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



CHAMBRE SOCIALE - PROTECTION SOCIALE

ARRÊT DU LUNDI 28 NOVEMBRE 2022





Appel d'une décision (N° RG 16/00531)

rendue par le Pole social du TJ de VIENNE

en date du 29 juillet 2020

suivant déclaration d'appel du 04 septembre 2020





APPELANTE :



Madame [U] [W] épouse [Z]

née le 16 Février 1967 à [Localité 7]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 1]



représentée par Me Laure...

C3

N° RG 20/02749 - N° Portalis DBVM-V-B7E-KRDB

N° Minute :

Notifié le :

Copie exécutoire délivrée le :

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE SOCIALE - PROTECTION SOCIALE

ARRÊT DU LUNDI 28 NOVEMBRE 2022

Appel d'une décision (N° RG 16/00531)

rendue par le Pole social du TJ de VIENNE

en date du 29 juillet 2020

suivant déclaration d'appel du 04 septembre 2020

APPELANTE :

Madame [U] [W] épouse [Z]

née le 16 Février 1967 à [Localité 7]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 1]

représentée par Me Laurent BELJEAN de l'AARPI AERYS AVOCATS, avocat au barreau de LYON substituée par Me Stéphane FREGNACQ, avocat au barreau de LYON

INTIMEE :

Organisme URSSAF RHONE ALPES prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 6]

[Localité 2]

représentée par Me Pierre-luc NISOL de la SELARL ACO, avocat au barreau de VIENNE substituée par Me Emmanuelle CLEMENT, avocat au barreau de LYON

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DEBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

M. Jean-Pierre DELAVENAY, Président,

Mme Isabelle DEFARGE, Conseiller,

M. Pascal VERGUCHT, Conseiller,

Assistés lors des débats de Mme Chrystel ROHRER, greffier,

DÉBATS :

A l'audience publique du 04 octobre 2022,

M. Jean-Pierre DELAVENAY chargé du rapport, Mme Isabelle DEFARGE, Conseiller et M. Pascal VERGUCHT, Conseiller ont entendu les représentants des parties en leurs conclusions et plaidoiries,

Et l'affaire a été mise en délibéré à la date de ce jour à laquelle l'arrêt a été rendu.

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Lors d'un contrôle diligenté dans le cadre de la lutte contre le travail illégal, le 15 janvier 2015 à 14h40, au [Adresse 4], les services de l'URSSAF Rhône-Alpes ont procédé à des vérifications au sein du commerce de maroquinerie exploité par Mme [U] [W].

Après avoir interrogé la personne présente derrière le comptoir servant une cliente et se présentant comme étant Mme [J]..., à la retraite, venue aider la gérante pour l'après-midi, les inspecteurs du recouvrement ont constaté que :

- une déclaration préalable à l'embauche concernant Mme [J].. a été effectuée à 15h50,

- Mme [W] possède un compte travailleur indépendant uniquement.

A l'issue de ce contrôle, une lettre d'observations a été notifiée à Mme [W] le 22 juin 2015 portant sur le constat de travail dissimulé entraînant un redressement forfaitaire de 3 896 euros.

En raison d'une erreur de procédure, une nouvelle lettre d'observations a été adressée à Mme [W] le 13 janvier 2016, annulant et remplaçant la précédente.

Le 08 juin 2016, une mise en demeure d'avoir à régler la somme totale de 5 298 euros, majorations de retard comprises, a été adressée à la gérante de ce commerce de maroquinerie.

Le 19 décembre 2016, Mme [W] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Vienne d'un recours à l'encontre de la décision de la commission de recours amiable de l'URSSAF Rhône-Alpes du 27 septembre 2016, notifiée le 20 octobre 2016, rejetant sa contestation de la mise en demeure du 8 juin 2016.

Par jugement du 29 juillet 2020, le pôle social du tribunal judiciaire de Vienne a :

- déclaré régulière la procédure diligentée par l'URSSAF Rhône-Alpes à l'encontre de Mme [W],

- rejeté la demande formée par Mme [W] d'annulation du redressement pour travail dissimulé ayant pour conséquence la mise en demeure du 8 juin 2016,

- condamné, en tant que de besoin, Mme [W] à payer à l'URSSAF Rhône-Alpes la somme de 5 298 euros sans préjudice des majorations de retard complémentaires,

- condamné Mme [W] à payer à l'URSSAF Rhône-Alpes la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le 4 septembre 2020, Mme [W] a interjeté appel de cette décision.

Les débats ont eu lieu à l'audience du 4 octobre 2022 et les parties avisées de la mise à disposition au greffe de la présente décision le 28 novembre 2022.

EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Au terme de ses conclusions déposées au greffe les 30 juin et 16 septembre 2022, reprises oralement à l'audience, Mme [U] [W] demande à la cour de :

- infirmer le jugement déféré,

- prononcer l'annulation de l'ensemble des chefs de redressement,

- ordonner le cas échéant la restitution des sommes versées indûment à ce titre,

En tout état de cause,

- procéder à l'annulation des majorations de retard,

- ordonner le cas échéant la restitution des sommes versées indûment,

- condamner l'URSSAF au paiement de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur la forme, Mme [W] soutient que le contrôle diligenté par l'URSSAF Rhône-Alpes ne respecte pas les prescriptions de l'article R. 243-59 du code de la sécurité sociale au motif qu'aucune mention relative au recueil préalable du consentement à l'audition de Mme [J].. ne figure sur les deux lettres d'observations en date des 22 juin 2015 et 13 janvier 2016. Elle en conclut que l'ensemble du contrôle et le redressement pour travail dissimulé sont entachés d'un vice.

Sur le fond, elle fait valoir qu'aucune situation de travail dissimulé n'est caractérisée. Elle soutient que Mme [J].. l'a aidée amicalement de manière spontanée et occasionnelle (seulement 10 jours au cours du mois de janvier 2015 durant la fermeture définitive de son magasin) et ce, en l'absence de toute rémunération et de toute contrainte de sa part.

Au terme de ses conclusions déposées au greffe le 2 septembre 2022, reprises oralement à l'audience, l'URSSAF Rhône-Alpes demande à la cour de :

Statuant à nouveau,

- débouter Mme [W] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

- condamner Mme [W] à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur la forme, l'URSSAF Rhône-Alpes soutient que Mme [J]... qui était seule lors du contrôle, a attesté de manière détaillée, dans le cadre de la présente procédure, qu'elle venait assister bénévolement Mme [W] plusieurs heures par semaine et qu'elle ne mentionne à aucun moment ne pas avoir donné son consentement aux inspecteurs du recouvrement.

Elle précise que le redressement est fondé sur l'absence de déclaration préalable à l'embauche et non sur les déclarations de Mme [J]...

Sur le fond, elle fait valoir que le redressement forfaitaire doit être maintenu dès lors que Mme [W] reconnaît d'une part que Mme [J]... était bien en situation de travail lors du contrôle, sans avoir été déclarée et que, d'autre part, la gérante ne rapporte pas la preuve d'une rémunération versée, ni des heures effectuées.

Pour le surplus de l'exposé des moyens des parties au soutien de leurs prétentions il est renvoyé à leurs conclusions visées ci-dessus par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIVATION

1. En la forme Mme [W] se prévaut des dispositions des articles R. 243-59 du code de la sécurité sociale et L. 8271-11 du code du travail ou plutôt celles de l'article L. 8271-6-1, l'article L. 8271-11 ayant été abrogé au 30 septembre 2011 selon lesquelles :

- article R. 243-59-II : ' (...) Ces agents peuvent interroger les personnes rémunérées, notamment pour connaître leurs nom et adresse ainsi que la nature des activités exercées et le montant des rémunérations y afférentes, y compris les avantages en nature.

Lorsqu'il est fait application des dispositions de l'article L. 8271-6-1 du code du travail, il est fait mention au procès-verbal d'audition du consentement de la personne entendue. La signature du procès-verbal d'audition par la personne entendue vaut consentement de sa part à l'audition' ;

- article L. 8271-6-1 du code du travail : 'Les agents de contrôle mentionnés à l'article L. 8271-1-2 sont habilités à entendre, en quelque lieu que ce soit et avec son consentement, tout employeur ou son représentant et toute personne rémunérée, ayant été rémunérée ou présumée être ou avoir été rémunérée par l'employeur ou par un travailleur indépendant, afin de connaître la nature des activités de cette personne, ses conditions d'emploi et le montant des rémunérations s'y rapportant, y compris les avantages en nature. De même, ils peuvent entendre toute personne susceptible de fournir des informations utiles à l'accomplissement de leur mission de lutte contre le travail illégal'.

Il s'en déduit que la formalité substantielle du recueil par sa signature du consentement de la personne entendue ne vaut que lorsque le contrôle inopiné a donné lieu à l'établissement par l'agent de contrôle d'un procès-verbal relevant une des infractions constitutives de travail illégal mentionnées aux 1° à 4° de l'article L. 8211-1 du code du travail et transmis au procureur de la République, ce qui a été le cas puisqu'il est indiqué dans la lettre d'observations l'établissement d'un procès verbal de travail dissimulé adressé au procureur de la République près le tribunal de Vienne le 17 juin 2015.

Pour autant, le redressement notifié par lettre d'observations du 13 janvier 2016 ne repose pas sur les déclarations de Mme [J].. mais sur le constat fait par l'agent assermenté de l'URSSAF que cette dame le 15 janvier 2015 à 14 h 40 se trouvait assise en situation de travail derrière le comptoir du commerce de maroquinerie servant une cliente, en l'absence de la gérante en titre de ce magasin.

Dès lors l'exception de nullité de la lettre d'observations puis de la mise en demeure ne peut être accueillie.

2. Au fond l'article L. 311-2 du code de la sécurité sociale dispose que :

'Sont affiliées obligatoirement aux assurances sociales du régime général, quel que soit leur âge et même si elles sont titulaires d'une pension, toutes les personnes quelle que soit leur nationalité, de l'un ou de l'autre sexe, salariées ou travaillant à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs et quels que soient le montant et la nature de leur rémunération, la forme, la nature et la validité de leur contrat'.

Quant à l'article L. 8221-5 du code du travail, il répute travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche.

Lors du contrôle réalisé le 15 janvier 2015, l'agent de l'URSSAF a constaté la présence de Mme [J]... en situation de travail assurant la tenue du commerce de Mme [W], l'ouverture du magasin et le service de la clientèle.

Dans sa réponse à la lettre d'observations, Mme [W] a précisé qu'elle avait repris son emploi administratif à la ville de [Localité 5] depuis le 31 décembre 2014 et avait maintenu son commerce ouvert en janvier 2015 pour permettre la liquidation de son stock en vue d'une cessation de son activité indépendante. Elle concédait avoir eu recours à Mme [J]... pour tenir son commerce depuis le 07 janvier 2015 jusqu'à 16 h 30, heure à laquelle elle avait fini son travail à la ville de [Localité 5] et prenait le relais et sauf les samedis soit une quarantaine d'heures. Cette dame a par ailleurs attesté en faveur de Mme [W] pour confirmer les horaires et préciser que le dépannage de son amie était bénévole, sans aucune contrepartie financière de quelque sorte que ce soit.

Cette attestation est insuffisante à rapporter la preuve contraire du constat objectif par l'agent assermenté d'une personne en situation d'emploi avec un horaire à respecter, soit la caractérisation d'un lien de subordination.

Elle l'est d'autant moins que dans l'heure qui a suivi le contrôle, Mme [M] a régularisé une déclaration préalable à l'embauche de Mme [J].. en tant que salariée ce qui est en contradiction avec le bénévolat prétendu.

Enfin l'URSSAF n'a pas à rapporter la preuve de la rémunération ou contrepartie versée ; celle-ci est présumée et évaluée de façon forfaitaire par les dispositions de l'article L. 242-1-2 du code de la sécurité sociale à six fois la rémunération mensuelle minimale dans sa rédaction applicable aux constats de travail dissimulé réalisés avant le 1er janvier 2016.

En conséquence le redressement ne peut être que confirmé.

3. Mme [W] n'a pas précisé dans ses écritures ou à l'audience par quel motif juridique la juridiction de céans pourrait prononcer l'annulation des majorations de retard or la cour n'est tenue qu'à répondre aux moyens invoqués, soit l'énonciation par une partie d'un fait, d'un acte dont la preuve est offerte ou d'une règle de droit et dont un raisonnement juridique utile à la solution du litige est tiré au soutien d'une prétention.

En conséquence le jugement déféré sera confirmé en son intégralité.

Les dépens seront supportés par Mme [W] qui succombe.

Il serait cependant inéquitable de lui faire supporter les frais irrépétibles exposés par l'Urssaf en cause d'appel, en sus de sa condamnation sur ce fondement en première instance.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme le jugement RG n° 16/00531 rendu le 29 juillet 2020 par le pôle social du tribunal judiciaire de VIENNE.

Y ajoutant,

Condamne Mme [U] [W] aux dépens d'appel.

Déboute l'URSSAF Rhône-Alpes de sa demande par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par M. Jean-Pierre Delavenay, président et par Mme Chrystel Rohrer, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Ch.secu-fiva-cdas
Numéro d'arrêt : 20/02749
Date de la décision : 28/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-28;20.02749 ?
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