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15/11/2022 | FRANCE | N°20/02884

France | France, Cour d'appel de Grenoble, 2ème chambre, 15 novembre 2022, 20/02884


N° RG 20/02884 - N° Portalis DBVM-V-B7E-KRRV



N° Minute :





C3

























































Copie exécutoire délivrée

le :



à



la SELARLCHAPUIS et ASSOCIES



la SELARL DENIAU AVOCATS GRENOBLE



SELARL CLEMENT-CUZIN LEYRAUD [T]









AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS>


COUR D'APPEL DE GRENOBLE



2ÈME CHAMBRE CIVILE



ARRÊT DU MARDI 15 NOVEMBRE 2022



Appel d'un Jugement (N° R.G. 17/00481) rendu par le tribunal judiciaire de VIENNE en date du 16 juillet 2020, suivant déclaration d'appel du 22 Septembre 2020





APPELANTE :



S.A. ROUTIERE CHAMBARD prise en la personne de son représentant légal en exer...

N° RG 20/02884 - N° Portalis DBVM-V-B7E-KRRV

N° Minute :

C3

Copie exécutoire délivrée

le :

à

la SELARLCHAPUIS et ASSOCIES

la SELARL DENIAU AVOCATS GRENOBLE

SELARL CLEMENT-CUZIN LEYRAUD [T]

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

2ÈME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU MARDI 15 NOVEMBRE 2022

Appel d'un Jugement (N° R.G. 17/00481) rendu par le tribunal judiciaire de VIENNE en date du 16 juillet 2020, suivant déclaration d'appel du 22 Septembre 2020

APPELANTE :

S.A. ROUTIERE CHAMBARD prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 6]

[Localité 3]

Représentée par Me Josselin CHAPUIS de la SELARL AVOCATS CHAPUIS ASSOCIES (ACA), avocat au barreau de VIENNE, avocat postulant, et Me Sébastien BOURILLON de la SELARL URBAN CONSEIL, avocat au barreau de LYON, substitué par Me Cédric DROUIN, avocat au barreau de LYON

INTIMÉS :

M. [F] [C]

né le 23 Mars 1950 à [Localité 8] 4ème

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représenté par Me Mylène ROBERT de la SELARL DENIAU AVOCATS GRENOBLE, avocat au barreau de GRENOBLE

ORGANISME DE GESTION DE L'ENSEIGNEMENT CATHOLIQUE (OGEC) DE [Localité 7] Institution [Localité 9] prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Adresse 4] / FRANCE

Représentée par Me Charlotte DESCHEEMAKER de la SELARL CLEMENT-CUZIN LEYRAUD DESCHEEMAKER, avocat au barreau de GRENOBLE

COMPOSITION DE LA COUR : LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Emmanuèle Cardona, présidente

M. Laurent Grava, conseiller,

Mme Anne-Laure Pliskine, conseillère

DÉBATS :

A l'audience publique du 12 Septembre 2022, M. Laurent Grava, conseiller et Mme Anne-Laure Pliskine, conseillère qui a fait son rapport, assistés de Mme Valérie Renouf, Greffière,en présence de Céline Richard, greffière stagiaire en pré-affectation, ont entendu les avocats en leurs conclusions, les parties ne s'y étant pas opposées conformément aux dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile.

Il en a rendu compte à la Cour dans son délibéré et l'arrêt a été rendu à l'audience de ce jour.

EXPOSE DU LITIGE

Fin 2012, l'OGEC de [Localité 7] a lancé la rénovation du bâtiment des primaires de l'école qu'il exploite. A ce titre, il a confié une mission de maîtrise d''uvre à un groupement représenté par Monsieur [F] [C], architecte mandataire, suivant acte d'engagement du 10 janvier 2013.

Par contrat du 15 septembre 2014, l'OGEC de [Localité 7] a confié à l'entreprise ALP 7 travaux la réalisation du lot n°14 « VRD » pour un montant de 135 171,29 euros TTC.

Par acte spécial annexé, l'entreprise ALP 7 travaux indiquait qu'elle envisageait de sous-traiter la réalisation des enrobés prévus au lot pour un montant de 35 340,00 euros TTC. Elle précisait que le sous-traitant n'était pas encore déterminé au jour de la signature de l'acte.

Par contrat de sous-traitance du 17 août 2015, la société ALP 7 travaux a confié à la société Routière Chambard des prestations de « fourniture et mise en 'uvre d'enrobés » pour un montant de 31 715,70 euros.

Les travaux ont été effectués par la société Routière Chambard durant les mois d'août et de septembre 2015.

Par courrier recommandé du 27 janvier 2016, la société Routière Chambard a mis en demeure la société ALP 7 travaux d'avoir à lui régler la somme totale de 97 495,20 euros, somme qui intégrait notamment les factures d'enrobés relatives au chantier de l'OGEC de [Localité 7].

Par courriers en date du 18 novembre et du 9 décembre 2016, la société Routière Chambard a mis en demeure l'OGEC de [Localité 7] de l'indemniser de son préjudice, résultant de sa carence, au regard des dispositions de l'article 14-1 de la loi du 31 décembre 1975.

Du fait du placement en redressement judiciaire de la société ALP 7 travaux, la société Routière Chambard a procédé à la déclaration de sa créance d'un montant de 100 883,83 euros auprès de Me [X], mandataire judiciaire. Celui-ci formait toutefois contestation pour un montant de 16 513,56 euros suivant courrier recommandé du 20 octobre 2016.

Par ordonnance du 11 avril 2017, le juge-commissaire du tribunal de commerce de Grenoble a prononcé l'admission des créances de la société Routière Chambard pour un montant de 99  358,03 euros incluant notamment les factures relatives au chantier litigieux.

La société ALP 7 travaux a ensuite été placée en liquidation judiciaire.

Suivant exploit du 11 avril 2017, la société Routière Chambard a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Vienne l'OGEC de [Localité 7] aux fins de :

-dire et juger l'OGEC de [Localité 7] responsable d'un manquement résultant de la méconnaissance de l'article 14-1 de la loi du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance ;

-dire et juger que ce manquement est à l'origine directe du préjudice subi par l'entreprise Routière Chambard, entreprise sous-traitante, et résultant du non-paiement de ses prestations par l'entreprise titulaire du marché ;

-condamner en conséquence l'OGEC de [Localité 7] au paiement de la somme de 46 118,70 euros à la société Routière Chambard au titre de dommages-intérêts ;

- condamner l'OGEC de [Localité 7] aux entiers dépens de l'instance, distraits au profit de la SELARL Urban conseil sur son affirmation de droit, ainsi qu'au versement d'une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par acte d'huissier du 26 janvier 2018, l'OGEC de [Localité 7] a assigné en appel en cause et garantie Monsieur [F] [C], maître d''uvre.

Par jugement du 16 juillet 2020, le tribunal judiciaire de Vienne a :

-rejeté la demande de la société Routière Chambard tendant, sur le fondement de la responsabilité civile extra-contractuelle, à la condamnation de l'OGEC de [Localité 7] au paiement de la somme de 46 118,70 euros ;

-rejeté, comme sans objet, la demande de l'OGEC de [Localité 7] à être relevé et garanti par M. [F] [C] de sa condamnation à l'égard de la société Routière Chambard ;

-rejeté la demande formulée par l'OGEC de [Localité 7], sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile contre la société Routière Chambard ;

-rejeté la demande formulée par Monsieur [F] [C] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, contre la société Routière Chambard ;

-rejeté la demande formulée par l'OGEC de [Localité 7] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, contre M. [F] [C],

-rejeté la demande formulée par M. [F] [C] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, contre l'OGEC de [Localité 7] ;

-condamné la société Routière Chambard aux entiers dépens de l'instance ;

-accordé à la SCP Pyramide avocats et à la SELARL Deniau avocats le droit reconnu par l'article 699 du code de procédure civile de recouvrer directement contre la société Routière Chambard ceux des dépens dont elles ont fait l'avance sans avoir reçu provision.

Par déclaration en date du 23 septembre 2020, la société Routière Chambard a interjeté appel du jugement en ce qu'il a :

-rejeté la demande de la société Routière Chambard tendant, sur le fondement de la responsabilité civile extra-contractuelle, à la condamnation de l'OGEC de [Localité 7] au paiement de la somme de 46 118,70 euros ;

-rejeté, comme sans objet, la demande de l'OGEC de [Localité 7] à être relevé et garanti par M. [F] [C] de sa condamnation à l'égard de la société Routière Chambard ;

-rejeté la demande formulée par l'OGEC de [Localité 7], sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile contre la société Routière Chambard ;

-rejeté la demande formulée par Monsieur [F] [C] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, contre la société Routière Chambard ;

-rejeté la demande formulée par l'OGEC de [Localité 7] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, contre M. [F] [C], o Rejeté la demande formulée par M. [F] [C] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, contre l'OGEC de [Localité 7] ;

-condamné la société Routière Chambard aux entiers dépens de l'instance ;

-accordé à la SCP Pyramide avocats et à la SELARL Deniau avocats le droit reconnu par l'article 699 du code de procédure civile de recouvrer directement contre la société Routière Chambard ceux des dépens dont elles ont fait l'avance sans avoir reçu provision.

L'OGEC a interjeté appel incident.

Dans ses conclusions notifiées le 15 février 2021, la société Routière Chambard demande à la cour de :

Vu le code civil, notamment son article 1240,

Vu la loi n°75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance,

Vu le code de procédure civile, notamment son article 700,

Vu les pièces produites,

-infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Vienne le 16 juillet 2020 sous le n°RG17/00481.

Statuant de nouveau :

A titre principal,

-condamner in solidum l'OGEC de [Localité 7] et Monsieur [F] [C] à payer à la société Routière Chambard la somme de 46 118,70 euros à titre de dommages et intérêts avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir et dire que les intérêts pourront être capitalisés dans les conditions prévues par l'article 1154 du code civil,

A titre subsidiaire,

-condamner l'OGEC de [Localité 7] à payer à la société Routière Chambard la somme de 46 118,70 euros à titre de dommages et intérêts avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir et dire que les intérêts pourront être capitalisés dans les conditions prévues par l'article 1154 du code civil,

En tout état de cause,

-condamner tous succombant aux entiers dépens de l'instance, distraits au profit de Maître [E] sur son affirmation de droit, ainsi qu'au versement à l'exposante d'une somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

Au soutien de ses demandes, la société Routière Chambard se fonde sur l'existence de fautes délictuelles commises par le maître d'ouvrage, soulignant que même si la société ALP7 Travaux n'avait pas informé la maîtrise d''uvre et la maîtrise d'ouvrage de la présence d'un sous-traitant avant le 27 août 2015, ces dernières ne pouvaient ignorer l'intervention de la société Routière Chambard à compter de cette date, que la maîtrise d'ouvrage aurait donc dû mettre en demeure, dès ce moment, l'entreprise ALP7 Travaux de déclarer ce sous-traitant et de faire agréer ses conditions de paiements dans les conditions de la loi de 1975.

Elle déclare que l'acte spécial de sous-traitance du 4 août 2014, joint à l'acte d'engagement d'ALP 7 travaux est très clair quant à son périmètre, que les échanges de mails précités portent donc bien sur le chantier litigieux sans erreur possible.

Elle ajoute qu'il revenait nécessairement à M. [C] d'alerter son maître d'ouvrage de la présence sur le chantier d'un sous-traitant non-déclaré mais aussi d'inviter l'entrepreneur principal à régulariser cette situation.

Elle réfute toute responsabilité, rappelant qu'aucune disposition de la loi du 31 décembre 1975 n'oblige le sous-traitant à se manifester auprès du maître d'ouvrage.

Elle ajoute qu'il ressort notamment de l'article 1128 du code civil qu'un contrat n'a pas nécessairement à être écrit et comporter la signature de ses parties pour être parfaitement valable, et qu'il est admis par la jurisprudence que la réalité et le quantum de la créance du sous-traitant puissent être démontrés par la présentation des factures émises à destination du titulaire du marché.

Enfin, elle fait valoir son impossibilité de recouvrer les sommes dues auprès d'ALP 7 travaux compte tenu du certificat d'irrécouvrabilité en date du 23 juillet 2020 émis par Me [X], mandataire judiciaire.

Dans ses conclusions notifiées le 7 septembre 2021, l'OGEC de [Localité 7] demande à la cour de :

Vu les dispositions de l'article 14-1 de la loi n°75-1334 du 31 décembre 1975 relatives à la sous-traitance,

Vu l'article 1231-1 du code civil,

Vu la jurisprudence citée,

Vu les pièces,

-infirmer le jugement en ce qu'il a retenu la responsabilité de l'OGEC de [Localité 7] et en ce qu'il l'a débouté de toutes ses demandes,

Et, statuant à nouveau,

-constater l'absence de connaissance par l'OGEC de [Localité 7], maître d'ouvrage, de l'existence de la société Routière Chambard en qualité de sous-traitant,

-dire et juger que la responsabilité de l'OGEC de [Localité 7] ne peut être engagée,

-débouter la société Routière Chambard de toute action au visa de l'article 14-1 de la loi n°75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance,

A titre subsidiaire,

-dire et juger que la société Routière Chambard ne justifie pas des travaux réalisés, et de leur coût,

-la débouter de sa demande de règlement,

-dire et juger que la société Routière Chambard est responsable de son préjudice, faute d'avoir transmis ses factures au maître d'ouvrage, conformément au contrat dont il se prévaut.

-la débouter, compte tenu de l'absence de lien de causalité entre les prétendus manquements reprochés au maître de l'ouvrage et sa perte de chance d'être payée,

A titre subsdiaire,

-dire que le coût de l'enrobé pour le chantier de l'OGEC de [Localité 7] s'élève à 29.450 euros H.T. , et limiter le montant des demandes au prix du marché des travaux à cette somme,

A titre subsidiaire,

-dire et juger que la responsabilité de Monsieur [F] [C] se trouve engagée du fait de son manquement à son obligation de conseil,

En conséquence,

-condamner Monsieur [F] [C] à relever et garantir l'OGEC de [Localité 7] de toute condamnation mise à sa charge,

En tout état de cause,

-débouter la société Routière Chambard de toute autre demande,

-condamner solidairement la société Routière Chambard et Monsieur [F] [C] au paiement de la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance, et de la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de l'appel, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction au bénéfice de Me [K] [T], sur son affirmation de droit.

-débouter la société Routière Chambard et Monsieur [F] [C] de toutes autres demandes à l'encontre de l'OGEC de [Localité 7].

L'OGEC énonce que le tribunal a estimé, à tort, que le maître d'ouvrage connaissait le sous-traitant, alors qu'il ne suivait pas les travaux puisqu'il avait mandaté une maîtrise d''uvre à cet effet, qu'en outre, la préoccupation principale le 27 août 2015 était de pouvoir ouvrir l'établissement dans de bonnes conditions pour la rentrée scolaire.

Il fait valoir qu'il n'a pas été destinataire d'un contrat conclu entre ALP7 et Routière Chambard ni de l'existence de factures émanant de ce sous-traitant, sachant que les comptes rendus de chantier ne font pas mention d'un sous-traitant.

Il conclut à l'irrégularité de l'acte d'engagement au motif que l'« acte spécial » annexé ne comporte aucune indication sur le nom d'un sous-traitant, et qu'aucune « déclarations et attestations » des sous-traitants n'est annexée à l'acte d'engagement.

Subsidiairement, il demande à être relevé et garanti par son maître d'oeuvre qui avait une mission d'organisation du chantier, et qui devait s'assurer que les travaux étaient réalisés conformément aux contrats, et donc par les entreprises contractuellement choisies.

S'agissant du quantum des demandes, il énonce que l'acte d'engagement signé sans la mention d'un quelconque sous-traitant, et plus d'une année avant la mise en place de l'enrobé, prévoyait une prestation hors taxes maximum de 29.450 euros soit une somme bien moindre que les factures produites.

Dans ses conclusions notifiées le 19 mai 2021, M.[F] [C] demande à la cour de :

Vu les causes sus énoncées,

Vu l'article 14-1 de la loi n°75-1334 du 31 décembre 1975,

Vu l'article 1240 du code civil,

Vu l'article 1231-1 du code civil,

Vu l'article 564 du code de procédure civile

A titre principal,

-confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Vienne le 16 juillet 2020 en ce qu'il n'est pas entré en voie de condamnation contre Monsieur [C]

-juger irrecevables les demandes formulées par la société Routière Chambard contre Monsieur [C] comme nouvelles en cause d'appel

-juger que la société Routière Chambard ne justifie pas de son intervention en qualité de sous-traitant de la société ALP 7 travaux,

En conséquence,

-débouter la société Routière Chambard de l'ensemble de ses demandes,

A titre subsidiaire,

Si par impossible, la Cour devait accorder à la société Routière Chambard la qualité de sous-traitant

-juger que Monsieur [C] n'a pas été informé de l'intervention de la société Routière Chambard en qualité de sous-traitant de la société ALP 7 travaux,

-juger que Monsieur [C] n'a commis aucune faute dans l'exercice de ses missions de maîtrise d''uvre,

En conséquence,

-débouter la société Routière Chambard de l'ensemble de ses demandes dirigées contre M. [F] [C],

-débouter le cas échéant l'OGEC de [Localité 7] s'il devait reprendre ses demandes devant la cour d'appel

A titre infiniment subsidiaire,

Si par impossible, la Cour devait entrer en voie de condamnation à l'encontre de M. [C],

-limiter le montant des demandes au prix du marché des travaux prétendument réalisés, soit 29 450 euros HT.

En tout état de cause,

-condamner la société Routière Chambard ou tout autre succombant à payer à Monsieur [C] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamner la société Routière Chambard ou tout autre succombant aux entiers dépens dont distraction au profit de la SELARL Deniau avocats Grenoble.

M.[C] énonce qu'aucune demande n'a été formulée par l'appelante en première instance à son encontre, qu'elle est donc irrecevable à former des demandes nouvelles à son encontre en cause d'appel en application de l'article 564 du code de procédure civile.

Sur le fond, il déclare que le mail du 27 août 2015 est insuffisant pour connaître la qualité de sous-traitant de la société Routière Chambard, sachant qu'en l'absence de tout document contractuel, la société Routière Chambard ne démontre pas être intervenue à l'opération de rénovation, à quelque titre que ce soit.

Il réfute toute responsabilité, arguant de ce qu'il ne s'est pas vu confier les missions d'organisation, de pilotage et de surveillance du chantier, qu'à défaut de justifier les avoir confiées à un autre intervenant, ces missions sont demeurées entre les mains du maître de l'ouvrage, qu'il avait certes une mission DET mais non OPC, laquelle implique l'ordonnancement du chantier et consiste à l'organiser et le planifier préalablement à son exécution.

Il rappelle l'existence d'un acte d'agrément d'un contrat de sous-traitance signé avec la société ALP 7 travaux, mentionnant l'intervention d'un sous-traitant «non sélectionné à ce jour », que lui-même n'a pas signé.

La clôture a été prononcée le 18 mai 2022.

MOTIFS

Sur la recevabilité des demandes de la société Routière Chambard à l'encontre de M.[C]

Aux termes de l'article 564 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.

En l'espèce, aucune demande n'a été formulée par la société Routière Chambard à l'encontre de M.[C] en première instance, elle est donc irrecevable à en formuler en cause d'appel en l'absence d'évolution du litige.

Sur la demande en paiement

Selon l'article 12 de la loi du 31 décembre 1975, le sous-traitant a une action directe contre le maître de l'ouvrage si l'entrepreneur principal ne paie pas, un mois après en avoir été mis en demeure, les sommes qui sont dues en vertu du contrat de sous-traitance ; copie de cette mise en demeure est adressée au maître de l'ouvrage.Toute renonciation à l'action directe est réputée non écrite.

Cette action directe subsiste même si l'entrepreneur principal est en état de liquidation des biens, de règlement judiciaire ou de suspension provisoire des poursuites.

Selon l'article 14-1 de la loi du 31 décembre 1975, pour les contrats de travaux de bâtiment et de travaux publics, le maître de l'ouvrage doit, s'il a connaissance de la présence sur le chantier d'un sous-traitant n'ayant pas fait l'objet des obligations définies à l'article 3 ou à l'article 6, ainsi que celles définies à l'article 5, mettre l'entrepreneur principal ou le sous-traitant en demeure de s'acquitter de ces obligations. Ces dispositions s'appliquent aux marchés publics et privés.

L'acte d'engagement signé avec la société ALP 7 travaux le 4 août 2014 indiquait explicitement en page 4 : « j'envisage de faire exécuter par un sous-traitant » divers travaux, le montant de ces derniers étant évalué à la somme de 35 340 euros TTC.

Cette mention était de nature à rendre le maître d'ouvrage vigilant, aucun nom n'étant encore fourni.

Ledit nom a été communiqué par mail du 27 août 2015, lorsque l'entreprise ALP 7 travaux a écrit, notamment aux responsables de l'OGEC que les travaux du sous-traitant étaient décalés d'une journée, message qui a au demeurant fait l'objet d'observations puisque les dates coïncidaient avec la rentrée et que ce retard avait des répercussions en termes d'organisation.

Dès lors, et ainsi que l'a justement relevé le premier juge, l'OGEC ne saurait sérieusement prétendre ne pas être au courant de l'existence d'un sous-traitant et les dispositions précitées auraient dû s'appliquer.

Le premier juge a débouté la société Routière Chambard de ses demandes en paiement au motif qu'elle ne rapportait pas la preuve du dommage qu'elle disait avoir subi.

En cause d'appel, la société Routière Chambard communique la mise en demeure qu'elle a adressée à la société ALP 7 travaux, le fait qu'elle a déclaré sa créance et surtout, elle produit un certificat d'irrécouvrabilité émis par le mandataire judiciaire en date du 23 juillet 2020.

Elle justifie donc d'une réelle perte de chance de se voir payer les travaux effectués.

S'agissant du montant, la société ALP 7 travaux et la société Routière Chambard ont signé un contrat portant sur la somme de 31715, 70 euros. En l'absence de précisions, il sera considéré que cette somme est hors taxes, en application de la jurisprudence habituelle s'agissant d'un contrat entre deux entreprises (Cass com 09 janvier 2001 n°97-22212). En revanche, il était clairement indiqué que cette somme était « globale et forfaitaire », et la société Routière Chambard ne rapporte pas la preuve de l'existence de travaux supplémentaires validés. En conséquence, seule cette somme peut être retenue, ce qui correspond à une somme de 38 058, 84 euros TTC.

Si le maître d'ouvrage avait fait preuve de vigilance, il aurait sollicité la communication du contrat entre la société ALP 7 travaux et l'appelante et vu le montant dudit contrat. C'est donc bien cette somme qui doit être retenue.

Compte tenu de ce qui précède, cette perte de chance doit être estimée à 80% et l'OGEC sera condamné à verser à la société Routière Chambard la somme de 30 447, 07 euros TTC, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt. La capitalisation sera ordonnée.

Sur la demande de garantie de M.[C]

L'acte d'engagement signé avec M.[C] mentionnait que le maître d'oeuvre avait notamment une mission ACT : assistance du maître d'ouvrage dans la passation des contrats de travaux, et une mission DET : direction de l'exécution des contrats de travaux.

Or au titre de cette dernière mission, le maître d'oeuvre doit notamment s'assurer que l'exécution des travaux est conforme aux prescriptions du ou des contrats de travaux, et en l'espèce, il lui incombait d'appeler l'attention du maître d'ouvrage, qui n'est pas un professionnel de la construction, sur les dispositions relatives à la sous-traitance puisqu'il est manifeste que celles-ci s'appliquaient.

M.[C] a donc failli à sa mission de conseil et il sera condamné à relever et garantir l'OGEC de la totalité des condamnations prononcées à son encontre, incluant les frais irrépétibles et les dépens.

L'OGEC et M.[C] succombant à l'instance, ils seront condamnés in solidum aux dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Déclare irrecevables les demandes formées par la société Routière Chambard à l'encontre de M.[C],

Infirme le jugement déféré en ce qu'il a:

-rejeté la demande de la société Routière Chambard tendant, sur le fondement de la responsabilité civile extra-contractuelle, à la condamnation de l'OGEC de [Localité 7] au paiement de la somme de 46 118,70 euros ;

-rejeté, comme sans objet, la demande de l'OGEC de [Localité 7] à être relevé et garanti par M. [F] [C] de sa condamnation à l'égard de la société Routière Chambard ;

-condamné la société Routière Chambard aux entiers dépens de l'instance ;

-accordé à la SCP Pyramide avocats et à la SELARL Deniau avocats le droit reconnu par l'article 699 du code de procédure civile de recouvrer directement contre la société Routière Chambard ceux des dépens dont elles ont fait l'avance sans avoir reçu provision,

et statuant de nouveau,

Condamne l'OGEC de [Localité 7] à payer à la société Routière Chambard la somme de 30447, 07 euros TTC avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

Prononce la capitalisation des intérêts,

Condamne M.[C] à relever et garantir l'OGEC de [Localité 7] de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre,

Condamne l'OGEC de [Localité 7] à payer à la société Routière Chambard la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne in solidum l'OGEC de [Localité 7] et M.[C] aux entiers dépens

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Arrêt signé par Mme Emmanuèle Cardona, Présidente de la deuxième chambre civile et par la Greffière Caroline Bertolo, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20/02884
Date de la décision : 15/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-15;20.02884 ?
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