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15/11/2022 | FRANCE | N°19/02413

France | France, Cour d'appel de Grenoble, 2ème chambre, 15 novembre 2022, 19/02413


N° RG 19/02413 - N° Portalis DBVM-V-B7D-KBCJ



N° Minute :





C1

























































Copie exécutoire délivrée

le :



à



Me Odile DELLENBACH



Me GRIMAUD - SELARL LEXAVOUE



Me Florence NERI - SELARL FTN



Me Pascale HAYS











AU NOM

DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



2ÈME CHAMBRE CIVILE



ARRÊT DU MARDI 15 NOVEMBRE 2022



Appel d'un Jugement (N° R.G. 16/00398) rendu par le Tribunal de Grande Instance de Valence en date du 11 avril 2019, suivant déclaration d'appel du 5 Juin 2019





APPELANTS :



M. [E] [V],

né le 28 Août 1961 à [Localité 19]

décédé le 24/01/2022


...

N° RG 19/02413 - N° Portalis DBVM-V-B7D-KBCJ

N° Minute :

C1

Copie exécutoire délivrée

le :

à

Me Odile DELLENBACH

Me GRIMAUD - SELARL LEXAVOUE

Me Florence NERI - SELARL FTN

Me Pascale HAYS

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

2ÈME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU MARDI 15 NOVEMBRE 2022

Appel d'un Jugement (N° R.G. 16/00398) rendu par le Tribunal de Grande Instance de Valence en date du 11 avril 2019, suivant déclaration d'appel du 5 Juin 2019

APPELANTS :

M. [E] [V],

né le 28 Août 1961 à [Localité 19]

décédé le 24/01/2022

Représenté par Me Odile DELLENBACH, avocat au barreau de VALENCE

M. [O] [V]

né le 11 Mars 1991 à [Localité 18]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représenté par Me Odile DELLENBACH, avocat au barreau de VALENCE

Mme [Z] [V]

née le 06 Août 1993 à [Localité 20]

de nationalité Française

[Adresse 8]

[Localité 6]

Représentée par Me Odile DELLENBACH, avocat au barreau de VALENCE

M. [C] [V]

né le 24 Juin 1995 à [Localité 20]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représenté par Me Odile DELLENBACH, avocat au barreau de VALENCE

Mme [G] [P], INTERVENANTE VOLONTAIRE

née le 13 Août 1958 à [Localité 19]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 19]

Représentée par Me Odile DELLENBACH, avocat au barreau de VALENCE

INTIMÉES :

SA LABORATOIRES SERVIER prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 10]

[Localité 15]

Représentée par Me Alexis GRIMAUD de la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE - CHAMBERY, avocat au barreau de GRENOBLE, avocat postulant, et Me Camille AUVERGNAS de l'ASSOCIATION PONS & CARRERE, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

Organisme CPAM prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 11]

[Localité 5]

Représentée par Me Florence NERI de la SELARL FTN, avocat au barreau de GRENOBLE

Société ACM IARD prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 7]

[Localité 12]

Société EOVI MCD MUTUELLE représentée par son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège de l'établissement

[Adresse 4]

[Localité 14]

Représentée par Me Pascale HAYS, avocat au barreau de GRENOBLE, avocat postulant, et Me Patrica VINCENT, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

Société AESIO MUTUELLE INTERVENANTE VOLONTAIRE, prise en la personne de son Président Directeur Général en exercice, venant aux droits de la mutuelle EOVI-MCD MUTUELLE ayant fait l'objet d'une fusion-absorption, selon avis paru au journal officiel du 31 décembre 2020

[Adresse 9]

[Localité 13]

représentée par Me Pascale HAYS, avocat au barreau de GRENOBLE, avocat postulant, et Me Patrica VINCENT, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

COMPOSITION DE LA COUR : LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Emmanuèle Cardona, présidente,

M. Laurent Grava, conseiller,

Mme Anne-Laure Pliskine, conseillère

DÉBATS :

A l'audience publique du 12 Septembre 2022, Laurent Grava, conseiller, qui a fait son rapport, et Anne-Laure Pliskine, conseillère, assistés de MmeValérie Renouf, Greffière, ont entendu les avocats en leurs conclusions et plaidoiries, les parties ne s'y étant pas opposées conformément aux dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile.

Il en a rendu compte à la Cour dans son délibéré et l'arrêt a été rendu à l'audience de ce jour.

EXPOSÉ DU LITIGE :

M. [E] [V] s'est vu prescrire du MEDIATOR®, médicament produit par la SA Les Laboratoires Servier (SA LLS) et ayant pour principe actif le benfluorex, par son médecin généraliste le docteur [M], du 12 août 2005 au 14 novembre 2008.

Le nom Benfluorex pourrait s'expliquer par la présence dans cette molécule d'un noyau benzène, portant un groupement fluoré et par les propriétés anorexigènes de la molécule.

Le benfluorex produit un métabolite, la norfenfluramine, dont la cardio-toxicité a conduit à la suspension de l'autorisation de commercialisation du Médiator, suivant décision de l'AFFSAPS en date du 25 novembre 2009, et à son retrait définitif du marché en 2010.

A la suite de la réalisation d'un électrocardiogramme (ECG) et d'un compte-rendu de consultation établi le 20 décembre 2010 par le docteur [L], cardiologue, attestant de l'existence d'une insuffisance mitro-aortique, M. [E] [V] a été hospitalisé le 7 février 2011 dans le service de cardiologie interventionnelle de la clinique [16] à [Localité 21] (38) pour la réalisation d'un cathétérisme gauche.

Il a ensuite été hospitalisé à de nombreuses reprises et notamment :

- du 13 mars au 4 avril 2011, dans le service chirurgical cardiovasculaire de la même clinique, pour un double remplacement valvulaire mitroaortique par prothèse mécanique ;

- du 8 au 19 avril 2011, dans la même clinique, pour un bilan étiologique d'une hémolyse postopératoire apparue dans les suites du double remplacement vasculaire ;

- du 23 mars au 19 avril 2012, dans la même clinique, pour une chirurgie de « remplacement valvulaire aortique redux pour mismatch » et suture d'une fuite paraprothétique mitrale ;

- du 10 au 12 mai 2012 dans le service des soins intensifs de la même clinique pour « réévaluation échographique suite à un doute sur une fistule entre l'aorte et l'oreillette » ;

- du 28 septembre au 12 octobre 2012 dans le service de cardiologie des hôpitaux Drôme Nord « pour la prise en charge d'une décompensation d'une insuffisance cardiaque droite avec congestion hépatique ainsi qu'un oedème des membres inférieurs » ;

- le 18 novembre 2012 dans le services des urgences des hôpitaux Drôme Nord, pour un épisode de palpitations ;

- du 23 juillet au 9 août 2013 dans le service de cardiologie du centre hospitalier universitaire de [Localité 17] pour la réalisation d'un cathétérisme cardiaque, et pour « équilibration de son traitement AVK suite au switch SINTROM par COUMADINE » ;

- en septembre 2013 au même Centre Hospitalier Universitaire pour épanchement pleural droit.

S'estimant victime d'un dommage imputable à son traitement par Médiator, M. [E] [V] a saisi l'Office National d'Indemnisation des Accidents Médicaux (ONIAM) le 8 février 2012, en vue d'obtenir la réparation des préjudices en résultant, dans les conditions prévues par les articles L. 1142-24-1 et suivants et R. 1142-63-1 et suivants du code de la santé publique, créant un dispositif spécifique d'indemnisation pour les victimes du benfluorex.

En application des dispositions combinées des articles L. 1142-24-4, L. 1142-24-5, R. 1142-63-10 à R. 1142-63-16 du code de la santé publique, le collège d'experts placé auprès de l'ONIAM a diligenté des opérations d'expertise, qui ont donné lieu a un « passage en réunion du collège » le 27 mars 2014, à des observations écrites des parties par lettres datées des 25 avril 2014 (pour M. [E] [V]) et 29 avril 2014 (pour la SA LLS), au dépôt d'un rapport d'expertise en date du 11 juin 2014 (prenant en compte les observations écrites des parties et notifié à celles-ci le 8 juillet 2014) et à un avis définitif du collège d'experts en date du 25 novembre 2014.

A la suite de la communication de cet avis,la SA LLS a adressé une offre d'indemnisation à M. [E] [V], qui l'a refusée.

Après diverses étapes procédurales, notamment en référés, la cour d'appel a ordonné une expertise médicale et le docteur [A] a déposé son rapport définitif le 25 septembre 2017.

Par jugement contradictoire en date du 11 avril 2019, le tribunal de grande instance de Valence a :

- déclaré la SA Les Laboratoires Servier responsable de l'intégralité du dommage subi par M. [E] [V], consécutif à la pathologie cardiaque dont il est atteint, résultant du caractère défectueux du MEDIATOR® pendant la période d'administration de ce médicament ;

- fixé à 677 245,99 euros le montant du dommage corporel total subi par M. [E] [V] en lien avec la prise de Médiator ;

- condamné la SA Les Laboratoires Servier à payer à M. [E] [V] la somme de 473 038,49 euros à titre de dommages-intérêts, en réparation de son dommage corporel, outre intérêts au taux légal à compter du présent jugement (dont à déduire, le cas échéant, les provisions déjà versées) ;

- dit n'y avoir lieu au prononcé d'une astreinte ;

- débouté M. [E] [V] du surplus de ses demandes ;

- condamné la SA Les Laboratoires Servier à payer :

- à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de la Drôme la somme totale de 218 852,77 euros, outre celle de 1 055 euros à titre d'indemnité forfaitaire en application des dispositions de l'article L. 376-1 du Code de la Sécurité Sociale,

- à la société EOVI-MCD Mutuelle la somme de 11 706,34 €,

- à la société ACM IARD la somme de 686,79 €,

outre intérêts au taux légal à compter du présent jugement ;

- condamné la SA Les Laboratoires Servier à payer :

- à M. [O] [V] la somme de 3 000,00 €,

- à Mme [Z] [V] la somme de 3 000,00 €,

- à M. [C] [V] la somme de 3 000,00 €,

- et à Mme [G] [P] la somme de 2 000,00 €,

outre intérêts au taux légal à compter du présent jugement ;

- condamné la SA Les Laboratoires Servier à payer, en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile :

- à M. [E] [V], M. [O] [V], Mme [Z] [V], M. [C] [V] et Mme [G] [P] unis d'intérêts la somme de 12 000,00 € au titre de leurs frais de défense ;

- à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de la Drôme la somme de 900,00 € au titre de ses frais de défense ;

- à la société EOVI-MCD Mutuelle la somme de 900,00 € au titre de ses frais de défense ;

- à la société ACM IARD la somme de 900,00 € au titre de ses frais de défense ;

- condamné la SA Les Laboratoires Servier aux entiers dépens, qui comprendront notamment les frais d'expertise judiciaire et autorise les avocats des consorts [V], de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de la Drôme et de la société ACM IARD à les recouvrer conformément aux dispositions de Particle 699 du codé de procédure civile ;

- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement à concurrence de la moitié des sommes allouées ci-dessus à M. [E] [V], M. [O] [V], Mme [Z] [V], M. [C] [V] et Mme [G] [P], à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de la Drôme, à la société EOVI-MCD Mutuelle et à la société ACM IARD.

Par déclaration en date du 5 juin 2019, M. [E] [V], M. [O] [V], Mme [Z] [V], M. [C] [V] et Mme [G] [P] ont interjeté appel de la décision (RG 19-2413).

Par déclaration en date du 11 juin 2019, les mêmes ont de nouveau interjeté appel de la décision (RG 19-2512).

Par ordonnance en date du 9 juillet 2019, cette seconde procédure a fait l'objet d'une jonction avec la première procédure 19-2413.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Par conclusions récapitulatives n° 3 et en intervention volontaire, notifiées par voie électronique le 30 août 2022, M. [O] [V], Mme [Z] [V], M. [C] [V] (intervenant tant à titre personnel qu'ès qualités d'ayants droit de feu [E] [V] décédé le 24 janvier 2022) et Mme [G] [P] demandent à la cour de :

- déclarer recevable et bien fondé l'appel interjeté par M. [E] [V], ses trois enfants [Z], [C] et [O] [V] et par la compagne de M. [V] [G] [P] ;

- déclarer recevable et bien fondée l'intervention volontaire de [O] , [Z] et [C] [V] , en leur qualité d'héritiers de leur père ;

Y faisant droit,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré la SA Les Laboratoires Servier responsable de l'intégralité du dommage subi par M. [E] [V], consécutif à la pathologie cardiaque dont il est atteint, résultant du caractère défectueux du MEDIATOR® pendant la période d'administration de ce médicament ;

En conséquence,

- dire et juger que la SA Les Laboratoires Servier sera condamnée à réparer intégralement, au profit de ses héritiers, les conséquences pour M. [E] [V] de la prise de benfluorex entre la période du 12 août 2005 au mois de novembre 2009 ;

- confirmer le jugement du tribunal de grande instance de Valence en ce qu'il a condamné la SA Les Laboratoires Servier à payer à M. [V], aux droits duquel viennent ses héritiers, les sommes suivantes :

Préjudices patrimoniaux

Temporaires

*Dépenses de santé actuelles : 164 € au titre des préjudices patrimoniaux temporaires

Permanents

* 394, 27 € au titre des dépenses de santé futures

Préjudices extra patrimoniaux

Temporaires

* au titre des Souffrances endurées : 40 000 €

* au titre du Préjudice esthétique permanent : 3 000 €

- dire que ces sommes produiront intérêt au taux légal avec effet rétroactif au 19 avril 2019 à compter de la signification de l'arrêt à intervenir ;

- infirmer sur les autres postes de préjudices et statuant à nouveau ;

- confirmer la SA Les Laboratoires Servier à verser à l'indivision successorale composée des trois enfants de M. [V] :

* préjudices pris en charge par les organismes sociaux 218 852,77 € (1°) sous réserve de l'actualisation de leurs débours en raison du décès de M. [V] ;

* préjudices restés à charge € (2 ° ) (sic)

Préjudices patrimoniaux

Temporaires ( avant consolidation )

* Dépenses de santé actuelles : 164 €

* Perte de gains professionnels actuels : 43 749,60 €

* Assistance temporaire par tierce personne : 5 188 €

Permanents ( après consolidation )

* Dépenses de santé futures 394,27 €

* Pertes de gains professionnels futurs : 143 565 €

* Perte de chance :

perte de chance de percevoir un certain nombre de primes liées à son statut d'ancien chauffeur routier international : 56 666,31 €

perte de chance de percevoir l'intégralité de la retraite si M. [E] [V] aurait perçu s'il avait continué à travailler jusqu'à 62 ans : 30 345,25 €

* assistance par tierce personne : 36 669,43 €

Total préjudices patrimoniaux : 316 741,86 €

Préjudices extra patrimoniaux

Temporaires

* Déficit fonctionnel temporaire : 18 180 €

* Souffrances endurées : 40 000 €

Permanents

* Déficit fonctionnel permanent : 82 446 €

* Préjudice d'agrément : 34 865 €

* Préjudice esthétique permanent : 3000 €

* Préjudice sexuel : 25 000 € (après application d'un partage de responsabilité de 50 %)

Total préjudices extra-patrimoniaux : 203 491 €,

Soit un total général de préjudices de 520 232,86 euros ;

En conséquence,

- condamner la SA Les Laboratoires Servier à payer la somme de 520 232,86 euros aux héritiers de M. [V] en réparation des préjudices subis par ce dernier de son vivant, en lien avec la prise de médiator outre intérêts légal au jour du jugement du tribunal de grande instance de Valence du 11 avril 2019 dont il conviendra de déduire les deux provisions déjà versées par les LLS d'un montant total de 350 019,24 euros ;

- confirmer le jugement en ce qu'il a fait droit au recours subrogatoire de la CPAM à hauteur de € (sic) sauf à ramener celles-ci à 215 282,46 euros car il convient de déduire la somme de 3 570,31 euros (capital viager calculé à partir du 13/04/2018 correspondant aux soins médicaux viagers capitalisés ne pourra qu'être rejeté, faute d'avoir été recalculé prorata temporis au jour du décès) ;

Outre une somme de 1 055,00 € au titre de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ;

- confirmer le jugement en ce qu'il a fait droit aux recours subrogatoires d'EOVIE mutuelle à hauteur de 11 706,34 euros ;

- juger irrecevable la demande de la société ACM IARD à hauteur de 689,76 €, cette dernière n'ayant pas constitué avocat devant la cour d'appel ;

Concernant les enfants de M. [V] (agissant en qualité de victimes indirectes),

- infirmer le jugement du 11 avril 2019 en ce qu'il a condamné les LLS à payer à [O], [Z], [C] [V] les sommes de 3 000 euros ;

Statuant à nouveau,

- les condamner à payer à :

* [Z] [V]

* [C] [V]

* [O] [V]

la somme de 40 000 euros chacun (étant précisé qu'une somme de 1 500 euros chacun a été versée par la SA LLS) ;

- infirmer le jugement du 11 avril 2019 en ce qu'il a condamné les LLS à payer à Mme [G] [P] compagne de M. [V] la somme de 2 000 euros ;

Statuant à nouveau,

- les condamner à payer la somme de 15 000 € à cette dernière dont il conviendra de déduire la provision de 1 000 € déjà versée ;

- confirmer la somme accordée par le jugement du tribunal de Valence au titre de l'article 700 du code de procédure civile à savoir 12 000 € (en ce compris les frais du médecin conseil de M. [V] de 1 800 €) pour la procédure de première instance ;

- condamner la SA LLS à verser aux ayants droit de M. [V] la somme de 12 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel ;

- condamner la SA LLS à verser à l'indivision successorale composée des trois héritiers de M. [V] la somme de 5 224,99 € ;

- confirmer le jugement du tribunal de grande instance de Valence qui a condamné les LLS aux entiers dépens et qui a autorisé Me Dellenbach qui en a fait l'avance à les recouvrer conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

- condamner la SA LLS aux dépens d'appel et autoriser Me Dellenbach qui en a fait l'avance à les recouvrer conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile .

Ils exposent les éléments principaux suivants au soutien de leurs écritures :

- ils rappellent les faits et la procédure ;

- M. [V] qui souffrait de surcharge pondérale a pris pendant de nombreuses années du Médiator 150 mg ;

- par un jugement du 29 mars 2021 qui est versé aux débats (pièce 299) et dont le tribunal de Valence n'a pas eu connaissance, puisque postérieur au prononcé du jugement en avril 2019, le tribunal correctionnel de Paris a condamné la SA LLS pour délit de tromperie commis au préjudice de M. [V] qui était alors encore en vie et de ses trois enfants ;

- ils détaillent leurs préjudices et ceux de leur auteur ;

- sur l'exonération pour risque de développement, la question a été tranchée par la Cour de cassation ;

- dans une affaire impliquant LLS, la Cour de cassation a confirmé l'arrêt de la cour d'appel de Versailles de 2016 en ce qu'il avait écarté l'exonération pour risque de développement invoqué par les Laboratoires Servier sur la base de l'article 1386-11 qui dispose que le producteur est responsable de plein droit à moins qu'il ne prouve que l'état des connaissances scientifiques et techniques, au moment où il a mis le produit en circulation, n'a pas permis de déceler l'existence d'un défaut ;

- malgré les divergences au sein de la communauté scientifique et la discordance des résultats de certaines études, notamment celles diligentées à la demande des Laboratoires Servier, il apparaît que la publication des études internationales qui ont progressivement mis en évidence les effets toxiques du benfluorex et la confirmation de ces études avec le signalement de cas d'HTAP et de valvulopathies associés à l'usage de benfluorex, initialement peu nombreux mais en constante augmentation ensuite, permettent de considérer qu'entre 2005 et 2008, période pendant laquelle le Médiator a été administré, l'état des connaissances scientifiques ne permettait pas d'ignorer les risques d'HTAP et de valvulopathies induits par le benfluorex ;

- en tout état de cause, dans la mesure où elle était sérieusement documentée, la seule suspicion de ces risques obligeait LLS, producteur, à en informer les patients et les professionnels de santé, notamment en les mentionnant dans la notice d'utilisation du médicament ;

- par conséquent, la responsabilité des Laboratoires Servier est engagée en application des articles 1386-1 et suivants anciens du code civil et ils doivent être tenus à l'indemnisation des préjudices subis du fait de l'exposition au Médiator ;

- sur le partage de responsabilité à 50 % invoqué par les LLS, l'état antérieur ayant été écarté par l'expert judiciaire [A].

Par conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 1er août 2022, la SA Les Laboratoires Servier (SA LLS) demande à la cour de :

A titre principal,

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que la responsabilité de la SA LLS est engagée ;

Statuant à nouveau,

- juger que l'état des connaissances scientifiques et techniques, au moment de la mise en circulation du produit, n'a pas permis de déceler l'existence d'un défaut ;

En conséquence,

- juger que les conditions de mise en jeu de la responsabilité de la SA LLS ne sont pas réunies ;

- débouter les consorts [V] de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions ;

- condamner les consorts [V] à restituer la provision de 202 000,00 € versée le 8 octobre 2016 en exécution de l'ordonnance du Juge de la mise en état du 15 juillet 2016 ;

- condamner les consorts [V] aux entiers dépens de la procédure de première instance et d'appel ;

A titre subsidiaire,

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que la pathologie est imputable en totalité au traitement par MEDIATOR® ;

Et statuant à nouveau,

- juger que la pathologie n'est que partiellement imputable au traitement incriminé, dans la limite de 50%, la valvulopathie mitrale ayant été diagnostiquée 4 ans avant l'instauration du traitement ;

- juger que ce pourcentage est à appliquer à chacun des postes de préjudice ci-après ;

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la SA LLS à verser les sommes suivantes :

* à M. [E] [V] la somme de 473 038,49 € à titre de dommages-intérêts, en réparation de son dommage corporel, outre intérêts au taux légal à compter du présent jugement,

* à la CPAM de la Drôme la somme totale de 218 852,77 € outre celle de 1 055,00 € à titre d'indemnité forfaitaire en application des dispositions de l'article L. 376-l du code de la sécurité sociale,

* à la société EOVI-MCD Mutuelle la somme de 11 706,34 €,

* à la société ACM LARD la somme de 686,79 € outre les intérêts au taux légal à compter du jugement,

* à chacun des trois enfants de M. [V] la somme de 3 000,00 €,

* à Mme [G] [P] la somme de 2 000,00 €

* outre les intérêts au taux légal à compter du jugement ;

* aux consorts [V], unis d'intérêts, la somme de 12 000,00 € au titre de leurs frais de défense ;

* à la CPAM de la Drôme, la somme de 900,00 € au titre de ses frais de défense ;

* à la société EOVI-MCD Mutuelle la somme de 900,00 € au titre de ses frais de défense;

* à la société ACM IARD la somme de 900,00 € au titre de ses frais de défense;

* les entiers dépens, qui comprendront notamment les frais d'expertise judiciaire ;

Et, statuant à nouveau,

- fixer comme suit les préjudices

Préjudices de M. [E] [V]

Préjudices temporaires :

Tierce personne temporaire : 2 072,00 € soit pour 50 %, 1 036,00 €

DFT : 17 197,00 € soit, pour 50 %, 8 598,50 €

Souffrances endurées : 40 000,00 € soit, pour 50 %, 20 000,00 €

Débouté de la demande au titre des dépenses de santé actuelles

Débouté de la demande au titre de la PGPA

Préjudices permanents :

Tierce personne : 36 669,44 € soit, pour 50 %, 18 334,72 €

DFP : 96 650,00 € soit, pour 50 %, 48 575,00 €

Préjudice esthétique : 2 000,00 € soit, pour 50 %, 1 000,00 €

Préjudice sexuel : 2 000,00 € soit, pour 50 %, 1 000,00 €

Préjudice d'agrément : 5 110,00 € soit, pour 50 %, 2 555,00 €

Débouté de la demande au titre des dépenses de santé futures

Débouté de la demande de perte de gains professionnels futurs

Préjudices des victimes indirectes :

Préjudice d'affection des enfants de M. [V] : 11 000,00 € à chacun

Préjudice d'affection et sexuel de Mme [P] : 2 000,00 €

- débouter les consorts [V] de leurs demandes plus amples ou contraires ;

- dire et juger que la CPAM n'apporte pas la preuve des prestations servies à M. [V] en lien avec le fait dommageable ;

- débouter la CPAM, en l'état, de ses demandes, fins et prétentions ;

- dire et juger que les pièces produites par la société AESIO Mutuelle ne permettent pas d'affirmer que les dépenses exposées sont en lien avec la pathologie cardiaque ;

- débouter la société AESIO Mutuelle, en l'état, de ses demandes, fins et prétentions ;

En tout état de cause,

- débouter la société AESIO Mutuelle de ses demandes de remboursement des prestations servies à M. [V] antérieurement au 12 mars 2005, date du début du traitement par MEDIATOR® ;

- dire et juger que les pièces produites par la société ACM IARD ne permettent pas d'affirmer que les dépenses exposées sont en lien avec la pathologie cardiaque ;

- débouter la société ACM IARD, en l'état, de ses demandes, fins et prétentions.

Elle expose les éléments principaux suivants au soutien de ses écritures :

- elle rappelle les faits et les procédures ;

- elle précise le rapport du professeur [A] ;

- le tribunal a retenu la responsabilité de la société LLS sur le fondement des articles 1245 et suivants du code civil ;

- la mise en jeu de la responsabilité du fait des produits défectueux impose que deux conditions soient réunies :

* l'imputabilité du dommage allégué au traitement en cause,

* l'existence d'un fait générateur de responsabilité à l'origine du dommage, en l'espèce un défaut du produit ;

- la fuite mitrale a été constatée dès 2001 chez [E] [V] soit avant le début du traitement en cause, le Médiator® ayant été prescrit à compter du 12 août 2005 ;

- la fuite mitrale ayant bien été constatée en 2001, 4 ans avant l'instauration, en 2005, du traitement critiqué, elle préexistait à celui-ci, de sorte que les lésions mitrales ne peuvent en être exclusivement la conséquence ;

- dès lors que le dossier médical produit établit l'existence, antérieurement à l'instauration du traitement, d'une fuite mitrale, la cour ne pourra retenir que cette fuite est la conséquence du traitement ;

- la date d'apparition de la fuite aortique n'est pas rapportée ;

- la seule absence d'autre cause connue, au regard du dossier incomplet de M. [V] et de la chronologie ne permettait pas au tribunal de conclure à l'imputabilité de la pathologie valvulaire au traitement critiqué ;

- si, par impossible, la cour devait considérer que cette preuve est suffisamment rapportée, il y aurait lieu de retenir que la valvulopathie mitrale a été diagnostiquée avant l'instauration du traitement, de sorte que les conséquences dommageables de la maladie ne peuvent être imputées dans leur totalité à celui-ci, mais, seulement, dans la limite de 50 % ;

- il y a aussi une exonération pour risque de développement ;

- l'article 1245-10 du code civil dispose expressément que « Le producteur est responsable de plein droit à moins qu'il ne prouve : (') 4° que l'état des connaissances scientifiques et techniques, au moment où il a mis le produit en circulation, n'a pas permis de déceler l'existence du défaut » ;

- un auteur a pu écrire que « cette cause d'exonération (') permet ainsi au producteur d'échapper à sa responsabilité en prouvant qu'il ignorait, au moment de la mise en circulation du produit, l'existence du défaut et que cette ignorance était inéluctable, compte tenu de l'état des connaissances scientifiques en vigueur à cette date » ;

- selon d'autres auteurs, l'exemple caractéristique du risque de développement serait le cas d'un médicament dont un effet indésirable serait découvert postérieurement à sa commercialisation et après utilisation dans la population ;

- tel est bien le cas en l'espèce ;

- si le MEDIATOR® présente, en effet, une parenté chimique et un métabolite commun avec l'Isoméride® et le Pondéral®, retirés du marché en 1997, les molécules ne sont pas, pour autant, identiques dans leur mécanisme d'action et leurs effets ;

- la décision d'interdiction de Benfluorex dans les préparations magistrales a été prise afin d'éviter le risque de report de prescription sur ces préparations partageant des particularités avec les anorexigènes ;

- il ne saurait être déduit de cette interdiction la connaissance d'un sur-risque de développement de valvulopathies associé à l'usage du Benfluorex ;

- en Suisse, le médicament n'a pas fait l'objet d'un retrait de la part de l'Agence de santé suisse ;

- en Espagne, ce sont LLS qui, pour des raisons économiques, n'ont pas sollicité le renouvellement de l'AMM du produit qui y était commercialisé sous le nom de Modulator ;

- en Italie, le produit n'a plus été commercialisé à partir de 2003 pour des raisons également économiques ;

- ce n'est pas la possible implication du MEDIATOR® dans le développement des valvulopathies cardiaques qui aurait conduit au retrait de ce médicament en Suisse en 1998, en Espagne en 2003 et en Italie en 2005, mais c'est la société LLS a renoncé à poursuivre la commercialisation du médicament dans ces trois pays à raison de considérations strictement commerciales et économiques ;

- le rapport de l'IGAS a, depuis sa publication, intervenue quelques semaines seulement après le retrait du médicament, appelé de vives critiques ;

- le rapport de l'IGAS, visiblement orienté, a été établi dans des conditions non contradictoires, sans que ses auteurs aient même jugé utile de recueillir les explications de la société LLS, comme ils en avaient pourtant la faculté, et comme il est d'usage ;

- chargé par la société LLS d'en faire une étude approfondie, le Pr [B] [T] a établi un rapport qui en souligne les incohérences et les inexactitudes scientifiques ;

- s'il est admis que le caractère anormalement dangereux d'un produit peut être déduit de l'insuffisance des informations et mises en garde figurant sur le produit, le défaut n'est pas caractérisé si, lors de la mise en circulation du produit, les données acquises de la science ne permettaient pas de porter à la connaissance du public un risque qui s'est pourtant révélé ultérieurement ;

- s'il n'est pas contesté que le risque de survenance de valvulopathies liées au benfluorex n'a jamais été mentionné par la société LLS dans la présentation du MEDIATOR® jusqu'à son retrait du marché, l'état des connaissances scientifiques et techniques ne permettait pas de déceler l'existence d'un risque avant 2009 et donc, de là, d'informer les patients et professionnels de santé de l'existence de ce risque ;

- la commercialisation du produit a commencé, en France, le 27 août 1976 ;

- ce n'est qu'en juillet 2009 que la Commission Nationale de Pharmacovigilance a considéré qu'il existait un signal fort qu'il convenait d'explorer ;

- c'est en 2009 que les données recueillies ont permis d'identifier le signal d'alerte qui conduira au retrait, ce, alors qu'une enquête de pharmacovigilance avait été mise en place, impliquant un suivi particulièrement attentif des notifications qui pouvaient parvenir à l'Agence ;

- de nombreux scientifiques vont dans ce sens ;

- M. [V] a été exposé au MEDIATOR® entre août 2005 et novembre 2008 ;

- il résulte des pièces ci-dessus analysées qu'avant 2009 :

* malgré le nombre important de patients traités par MEDIATOR® depuis 1976, les très rares cas rapportés de valvulopathies sous benfluorex sont restés isolés jusqu'en 2009,

* les autorités de santé ont considéré, à plusieurs reprises, jusqu'en 2009, qu'il n'existait pas de signal d'alerte significatif en pharmacovigilance permettant d'identifier l'existence d'un risque lié à l'utilisation du benfluorex, alors même qu'une surveillance renforcée avait été mise en place,

* la communauté scientifique considérait, également, en 2009 et 2011 encore, que peu de cas de troubles cardiaques étaient rapportés, qui plus est sans lien causal démontré, et que de nouvelles études étaient nécessaires ;

- l'ensemble de ces éléments est de nature à démontrer que, lors de la mise en circulation du produit, le producteur du médicament n'avait pas connaissance de l'existence d'un risque lié à son administration, et ne pouvait donc, en l'état des connaissances scientifiques, en informer les patients ;

- c'est au regard de cette connaissance progressive du risque associé à l'exposition au MEDIATOR® qu'il convient d'apprécier la question du risque de développement ;

- à plusieurs reprises, le tribunal de grande instance de Nanterre, tribunal du siège de la SA LLS, lui a accordé le bénéfice de l'exonération pour risque de développement ;

- subsidiairement, elle développe une argumentation quant aux préjudices de feu [E] [V], poste par poste, ainsi qu'une argumentation relative au préjudice des proches ;

- le cas des organismes sociaux est envisagé.

Par conclusions en intervention volontaire notifiées par voie électronique le 27 janvier 2022, la société mutuelle AESIO Mutuelle, venant aux droits de la mutuelle EOVI-MCD Mutuelle (n° 317 442 176) ayant fait l'objet d'une fusion-absorption, demande à la cour de :

- confirmer le jugement rendu le 11 avril 2019 en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

- condamner LLS à payer en outre à AESIO Mutuelle la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner LLS aux entiers dépens.

Elle expose les éléments principaux suivants au soutien de ses écritures :

- elle est bien fondée à exercer son recours subrogatoire et à solliciter des tiers responsables du déficit fonctionnel dont souffre M. [E] [V], le remboursement des prestations qu'elle a été amenée à verser à celui-ci ou pour son compte, soit la somme définitivement arrêtée au 23 juillet 2013 de 11 706,34 euros ;

- cette somme se décompose en deux postes de préjudices distincts ;

- le premier poste correspond aux dépenses de santé avant consolidation (DSA) et s'élèvent à la somme de 11 462,40 euros et le second correspond aux frais divers composé exclusivement de frais de transport et qui s'élèvent à 243,94 euros ;

- l'ensemble des prestations dont le remboursement est sollicité par AESIO Mutuelle est en lien direct avec la pathologie cardiaque de M. [V].

Par conclusions n° 3 notifiées par voie électronique le 2 avril 2021, la CPAM de la Drôme demande à la cour de :

- confirmer en toutes ses dispositions la décision entreprise ;

Pour les raisons précédemment développées, y ajoutant,

- condamner les mêmes, la société LLS à régler une somme de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Elle expose les éléments principaux suivants au soutien de ses écritures :

- elle demande le remboursement de ses débours ;

- le médecin conseil de la CPAM a pu établir une attestation d'imputabilité des prestations servies par la CPAM au regard du seul acte médical du 1er janvier 2011 ;

- bien évidemment, seules les prestations liées à l'accident en cause ont été retenues ;

- il ressort de l'attestation d'imputabilité que la CPAM a servi du chef de cet accident, une somme de 218 852,77 euros dont elle est légitimement en droit de réclamer le remboursement à la SA LLS ;

- il s'agit de débours définitifs actualisés au 13 avril 2018 ;

- la CPAM n'a pas à produire l'intégralité des factures afférentes à chaque acte médical.

La déclaration d'appel et les conclusions des appelants ont été signifiées le 5 septembre 2019 à la SA ACM IARD par remise à Mme [S] [W], employée, qui a déclaré être habilitée à recevoir l'acte.

Les conclusions de la SA Les Laboratoires Servier ont été signifiées le 6 décembre 2019 à la SA ACM IARD par remise à Mme [X] [Y], qui a déclaré être habilitée à recevoir l'acte.

La SA ACM IARD n'a pas constitué avocat.

La clôture de l'instruction est intervenue le 7 septembre 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

À titre liminaire :

Il convient de rappeler qu'en application de l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des dernières conclusions des parties.

Par prétention, il faut entendre une demande en justice tendant à ce qu'il soit tranché un point litigieux.

Par voie de conséquence, les expressions telles que « juger », « dire et juger », « déclarer », « dégager » ou « constater » ne constituent pas de véritables prétentions, mais en réalité des moyens qui ont leur place dans le corps des écritures, plus précisément dans la partie consacrée à l'examen des griefs formulés contre la décision entreprise et dans la discussion des prétentions et moyens, mais pas dans le dispositif même des conclusions.

En conséquence, il n'y a pas lieu de statuer sur celles-ci.

Sur le décès de [E] [V] :

[E] [V] est décédé le 24 janvier 2022 et a laissé pour lui succéder ses trois enfants [O] [V], [Z] [V] et [C] [V], lesquels interviennent volontairement ès qualités d'héritiers de feu leur père.

Cette intervention volontaire sera déclarée recevable.

Sur la question de l'état des connaissances scientifiques et techniques au moment de la mise en circulation des produits (l'exonération pour risque de développement) et sur l'imputabilité de la pathologie au traitement :

La charge de la preuve du caractère direct et certain du lien de causalité entre le dommage (pathologie) et le fait générateur (prise du médicament) pèse sur le demandeur ([E] [V]).

Il revient à ce dernier de démontrer que, sans ce fait générateur, le dommage ne se serait pas produit.

Les actuels articles 1245 à 1245-17 du code civil (reprenant à l'identique les dispositions des anciens articles 1386-1 à 1386-18 anciens du même code), relatifs à la responsabilité du fait des produits défectueux, et applicables à la réparation du dommage qui résulte d'une atteinte à la personne, prévoient notamment que :

« Le producteur est responsable du dommage causé par un défaut de son produit, qu'il soit ou non lié par un contrat avec la victime. (article 1245)

Un produit est défectueux (..) lorsqu 'il n'offre pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre.

Dans l'appréciation de la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre, il doit être tenu compte de toutes les circonstances et notamment de la présentation du produit, de l'usage qui peut en être raisonnablement attendu et du moment de sa mise en circulation. (article 1245-3)

Le demandeur doit prouver le dommage, le défaut et le lien de causalité entre le défaut et le dommage. (Article 1245-8)

Le producteur peut être responsable du défaut alors même que le produit a été fabriqué dans le respect des règles de l'art ou de normes existantes ou qu'il a fait l'objet d'une autorisation administrative. (Article 1245-9)

Le producteur est responsable de plein droit à moins qu 'il ne prouve (...) que l'état des connaissances scientifiques et techniques, au moment où il a mis le produit en circulation, n'a pas permis de déceler l'existence du défaut. (article 1245-40-4°) ».

La preuve du caractère défectueux d'un produit peut être rapportée par des présomptions graves, précises et concordantes.

Dans le présent dossier, les documents versés aux débats permettent de retenir les éléments suivants :

- le benfluorex, principe actif du Médiator, est un médicament commercialisé en France depuis 1976 ;

- ce médicament a pour métabolite la norfenfluramine ;

- ce métabolite a pour effet d'exposer les personnes soumises à un traitement à un grave risque cardio-toxique ;

- la norfenfluramine a des propriétés anorexigènes puissantes et représente l'amine de base qui a servi au développement des autres composés, notamment les fenfluramines ;

- Les Laboratoires Servier ont, après avoir reconnu que le benfluorex ne serait qu'un précurseur (c'est-à-dire une molécule n'ayant en elle-même aucune activité pharmacologique), sciemment retiré une phrase évoquant cette caractéristique d'un document communiqué à l'AFSSAPS en 1999 ;

- le benfluorex doit être considéré comme le précurseur de la seule substance véritablement active, la norfenfluramine ;

- ainsi, pendant 33 ans, de 1976 à 2009, tous les patients traités par le MEDIATOR® ont en réalité absorbé de facto de la norfenfluramine à des doses efficaces ;

- ce risque cardio-toxique a conduit à la suspension de son autorisation de commercialisation (décision de l'AFFSAPS du 25 novembre 2009) et à son retrait définitif du marché en 2010 ;

- la cardio-toxicité de la norfenfluramine avait été fortement suspectée dès 1995 (sans que les mécanismes d'implication de cette substance sur les valves cardiaques ne soient immédiatement explicités), puis confirmée par diverses études au cours des années 2000 ;

- la Direction générale de la santé avait interdit l'ensemble des anorexigènes, en ce compris le benfluorex, dans l'exécution et la délivrance des préparations magistrales dès 1995 ;

- la mise en évidence de graves effets indésirables, de type hypertension artério-pulmonaire (HTAP) et de valvulopathies, a conduit l'Agence du Médicament à suspendre, le 15 septembre 1997, l'autorisation de mise sur le marché (AMM) d'autres médicaments (Isoméride et Pondéral), également produits par la SA Les Laboratoires Servier, présentant une parenté chimique et contenant le même métabolite, la norfenfluramine ;

- la possible implication du Médiator dans le développement des valvulopathies cardiaques, confirmée par le signalement de cas d'hypertensions artérielles pulmonaires et de valvulopathies associées à l'usage du benfluorex, a été mise en évidence par plusieurs études internationales ;

- ce médicament a été retiré en Suisse en 1998, en Espagne en 2003 et en Italie en 2005 ;

- la société Les Laboratoires Servier explique que ces retraits sont uniquement motivés par des raisons économiques ;

- l'autorité suisse de contrôle des médicaments avait néanmoins exprimé, auprès des Laboratoires Servier, des craintes théoriques dues à la parenté chimique entre certaines substances sont le benfluorex ;

- Les Laboratoires Servier, titulaire de l'autorisation de mise sur le marché, ayant décidé en 1998 de renoncer à la distribution de ce produit en Suisse, aucune investigation supplémentaire n'a été menée ;

- un rapport de l'IGAS conclut que les éléments recueillis par les autorités de santé entre 1995 et 2005 (notamment les rapports italiens sur la toxicité de la norfenfluramine et le signalement le 3 octobre 2003 d'un cas de valvulopathie cardiaque par l'agence du médicament espagnole et les cas signalés en France) auraient dû conduire à une évaluation défavorable de la balance bénéfice/risque du Médiator antérieurement à 2009 ;

- le risque de survenance de valvulopathies liées au benfluorex n'a jamais été mentionné par la société LLS dans la présentation du Médiator jusqu'à son retrait du marché ;

- [E] [V] a suivi pendant plusieurs années un traitement par MEDIATOR® (au minimum du 12 août 2005 au 14 novembre 2008, selon les indications de l'expert judiciaire le docteur [A]) ;

- [E] [V] a produit divers documents devant le 'collège d'experts benfluorex' attestant d'une insuffisance mitro-aortique, à l'origine d'un double remplacement valvulaire mitro-aortique par prothèse mécanique, puis d'une reprise chirurgicale et d'un traitement anticoagulant à vie ;

- ce collège d'experts, après avoir pris en compte les observations de la SA LLS a donné l'avis suivant sur l'origine des troubles cardiaques de [E] [V] 'le collège d'expert estime qu 'aucun élément médical présent en particulier lors du diagnostic de valvulopathie, ne permet de retenir d'autre origine possible pour l'atteinte par le demandeurs que la prise de benfluorex. Il rappelle qu'au vu du compte-rendu opératoire du 15 mars 2011 et de l'analyse anatomo-pathologique du professeur [J] et compte tenu de l'âge du demandeur au jour de l'apparition des atteintes, les pathologies valvulaires présentées par le demandeur sont en lien avec la prise de benfluorex. S 'agissant de la prise d'autres substances valvulotoxiques, le collège observe que les pièces médicales produites n'établissent pas, à ce titre, la prise d 'un traitement potentiellement inducteur de valvulopathie autre que le benfluorex' (page 17 du rapport d'expertise du 11 juin 2014) ;

- l'expert judiciaire le docteur [A] a donné son avis sur le lien causal entre le traitement par MEDIATOR® et la pathologie mitrale de [E] [V] dans les termes suivants 'antérieurement au traitement incriminé, M. [V] ne présentait pas de symptôme cardiaque. Il était effectivement décrit une insuffisance mitrale mais sans aucune documentation en 2001. Le seul facteur de risque majeur était représenté par une obésité de 120 kg. (...) Avant la prise de MEDIATOR®, il n ' y avait aucune pathologie authentifiée clairement si l'on fait abstraction de ce souffle mitral bien banal et noté de manière très allusive. Après la prise de MEDIATOR® qui a été en durée compatible avec une atteinte valvulaire, les lésions décrites sont tout à fait typiques à la fois par le chirurgien mais aussi lors de l'analyse antomopathologique. Il n 'y a pas d'autre étiologie potentielle pouvant conduire à une telle valvulopathie et en particulier la maladie de Barlow, qui a été un temps évoquée, donne des lésions totalement différentes et il n'est pas possible qu'il y ait confusion.

En clair, il existe une très forte probabilité pour que le MEDIATOR® soit la cause directe et exclusive, sans cofacteur (selon les éléments du dossier) à l'origine de la valvulopathie. (...).

(Il n'existe) pas de trouble préexistants qui auraient pu entraîner un déficit ou aggravé celui qui est secondaire à la prise de Médiator.' ;

- l'insuffisance mitrale de [E] [V] a été constatée en 2001, soit 4 ans avant l'instauration en 2005 du traitement MEDIATOR® ;

- si cette insuffisance préexistait effectivement, force est de constater qu'elle était contenue dans des limites parfaitement acceptables et que l'anomalie mitrale ne s'est manifestée dans toute son ampleur et toutes ses conséquences qu'en raison de la prise du médicament MEDIATOR qui a potentialisé et fait dégénérer une pathologie stabilisée.

Au vu de l'ensemble de ces éléments (expertises, publications scientifiques, décisions administratives étrangères et même française, il existe des présomptions graves, précises et concordantes qui permettent de retenir tant le caractère défectueux du MEDIATOR® (élément non contesté par la SA LLS) que le lien de causalité direct et certain entre la pathologie cardiaque présentée par [E] [V] et la prise prolongée de ce médicament pendant la période comprise entre le mois d'août 2005 et le mois de novembre 2008.

L'état des connaissances scientifiques et techniques au moment de la mise en circulation des produits administrés à [E] [V], et en particulier la publication de plusieurs études internationales alarmantes mettant en évidence la possible implication du benfluorex dans le développement de valvulopathies cardiaques, ainsi le retrait de la commercialisation du MEDIATOR® dans plusieurs pays intervenu chronologiquement à la suite de ces publications, permettait à la SA Les Laboratoires Servier de déceler l'existence d'un défaut affectant le MEDIATOR® et d'en suspendre la commercialisation dans l'attente de nouvelles études, ou à tout le moins d'informer précisément les patients et les professionnels de santé des risques existants en les mentionnant dans la notice d'utilisation.

Une telle précaution, au demeurant la plus minimale qui soit, n'ayant pas été prise par la SA LLS, cette dernière sera reconnue responsable de l'intégralité du dommage subi par [E] [V] des suites de la pathologie cardiaque dont il est atteint en raison de la prise prolongée de MEDIATOR®.

De même les préjudices des proches devront être indemnisés sur ce même fondement de la responsabilité des Laboratoires Servier.

Le jugement entrepris sera confirmé de ces chefs.

Sur le recours subrogatoire des organismes sociaux :

En raison de la responsabilité de la SA LLS dans la survenance des préjudices de [E] [V], la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de la Drôme, la société AESIO Mutuelle et la société ACM IARD ne peuvent qu'être admises à exercer le recours subrogatoire qui leur est reconnu par les articles 28 et suivants de la loi n°85-677 du 5 juillet 1985, pour les prestations versées à [E] [V] entrant dans la liste limitative prévue par l'article 29 de la loi et justifié par les décomptes reçus des organismes sociaux.

Le jugement entrepris sera confirmé de ce chef (principe du recours subrogatoire et montant dû).

Sur la liquidation des préjudices :

Le rapport d'expertise sur dossier rendu le 11 juin 2014 par le 'collège d'experts Benfluorex' et le rapport d'expertise définitif déposé le 25 septembre 2017 par M. [U] [A], désigné en qualité d'expert judiciaire par arrêt de la cour d'appel de Grenoble en date du 14 mars 2017, serviront de fondements à l'indemnisation des préjudices, étant rappelé que la consolidation a été fixée au 23 juillet 2013.

Lors de l'expertise judiciaire, il a été procédé à l'examen de la victime dans le respect du principe du contradictoire et des règles de procédure civile et l'expert a répondu aux dires déposés par les conseils des parties.

1) Le préjudice de [E] [V] (aujourd'hui décédé) :

En l'espèce, les principaux éléments pris en compte par le premier juge pour déterminer et indemniser les préjudice de [E] [V] sont les suivants :

- les documents des organismes sociaux relatifs aux soins sont pris en compte ;

- les DSA seront donc indemnisées à hauteur de 164 euros ;

- les indemnités journalières et compléments de salaire viennent réduire les PGPA ;

- les PGPA ne seront indemnisées qu'à hauteur de 23 174,98 euros ;

- les FD concernent les sommes dues aux organismes sociaux concernant les frais de transport ;

- l'ATP temporaire sera fixée à 4 144 €, sur une base de 4 heures par semaine sur 50 semaines au taux horaire moyen de 20,72 euros ;

- après prise en charge de la CPAM, il ne reste à charge que la somme de 394,27 euros, s'agissant des DSF ;

- les PGPF seront indemnisées en prenant en compte l'âge théorique de départ à la retraite (62 ans), le revenu fiscal moyen perçu sur les années 2008 et 2009, la déduction du revenu de substitution (IJ), soit une perte de gains annuelle de 5 278,50 euros sur 10 ans, soit une somme de 52 785 euros ;

- l'incidence professionnelle (IP) sera indemnisée par une somme de 50 000 euros, prenant en compte l'exercice de la profession de chauffeur routier à l'international pendant 28 ans, la perte de chance de continuer à percevoir les divers avantages et la retraite y afférents ;

- l'ATP définitive après capitalisation sera fixée à la somme viagère de 116 980,74 euros, sur la base de 4 heures par semaine ;

- les souffrances endurées (SE), évaluées à 6/7 par l'expert, seront indemnisées à hauteur de 40 000 euros ;

- le DFT total et partiel, sur une base de 23 euros par jour, permet une indemnisation de 15 433 euros ;

- le déficit fonctionnel permanent (DFP) sera indemnisé sur la base d'un taux de 51,25 %, par une somme de 51,25 % x 2770 (valeur du point) = 141 962,50 euros ;

- ce taux de 51,25 % prend en compte le taux initial de 60 % du 'collège d'experts Benfluorex' ;

- le docteur [A], expert judiciaire, avait estimé ce taux à 35 % dans son pré-rapport en tenant compte de la seule limitation fonctionnelle ;

- il a cependant précisé, en réponse à un dire du conseil médical de [E] [V] qu'il ne revenait pas sur les chiffrages retenus dans son pré-rapport 'qui sont conformes aux barèmes à l'exception du préjudice psychologique qui n 'avait effectivement pas été décrit' 

- ceci sous-entend nécessairement, même si l'expert n'a pas pris le soin de modifier le taux du DFP, que le taux de 35 % est sous-estimé et ne peut être retenu, en ce qu'il n'intègre pas le préjudice psychologique décrit ;

- le préjudice d'agrément (PA), caractérisé par l'impossibilité d'exercer l'activité de garde-chasse, sera indemnisé par une somme de 10 000 euros ;

- le préjudice esthétique permanent (PET) évalué à 1,5/7 sera indemnisé à hauteur de 3 000 euros ;

- le préjudice sexuel (PS) est lié à la perte de libido et à la limitation de l'acte sexuel du fait de troubles de l'érection, imputables pour moitié à un état antérieur (sur-poids significatif et intoxication tabagique jusqu'à l'âge de 39 ans) et pour moitié à la pathologie cardiaque) ;

- ce PS sera indemnisé de la façon suivante : 30 000 x 50 % = 15 000 euros ;

- les préjudices pris en charge par les organismes sociaux sont chiffrés à 204 207,50 euros ;

- les préjudices restés à charge sont, quant à eux, évalués à 473 038,49 euros ;

- le total des préjudices est donc de 677 245,99 euros ;

- il convient de rappeler que la subrogation ne peut pas nuire à la victime subrogeante, créancière de l'indemnisation, lorsqu'elle n'a été prise en charge que partiellement par les prestations sociales ;

- en ce cas, l'assuré social peut exercer ses droits contre le responsable, par préférence à la caisse subrogée ;

- la SA LLS devra donc payer aux ayants droit de feu [E] [V] la somme totale de 473 038,49 euros à titre de dommages-intérêts, en réparation du dommage corporel de leur auteur en lien avec la prise de MEDIATOR®, outre intérêts au taux légal à compter de la date de la décision de première instance.

S'agissant donc de la détermination et de l'indemnisation des préjudices de feu [E] [V], en l'absence de nouveaux moyens et de nouvelles preuves présentés par les parties, c'est par des motifs pertinents au vu des justificatifs qui lui étaient soumis, que le tribunal s'est livré à une exacte analyse des faits et à une juste application des règles de droit.

La cour, adoptant cette motivation, confirmera le jugement entrepris par adoption de motifs quant à la détermination et à l'indemnisation des préjudices de feu [E] [V].

2) Le préjudice des proches (victimes indirectes) :

Le préjudice d'affection des proches de la victime directe est celui que subissent certains proches à la suite de la survie handicapée de la victime directe. Il s'agit du préjudice moral subi par ces personnes à la vue de la douleur, de la déchéance et de la souffrance de la victime directe.

Il convient d'y inclure le retentissement pathologique avéré que la perception du handicap de la victime survivante a pu entraîner chez certains proches.

En pratique, il y a lieu d'indemniser quasi-automatiquement.

Le préjudice d'affection des parents les plus proches de la victime directe (ses enfants), ainsi que le préjudice du partenaire de vie de la victime doivent être indemnisés dès lors que la preuve d'un lien affectif réel avec la victime est rapporté.

En l'espèce, M. [O] [V] (fils de [E] [V]) était âgé de 20 ans au moment la première opération de son père. Il sera indemnisé à hauteur de 10 000 euros.

Quant à Mme [Z] [V] (fille de [E] [V]) elle était âgée de 17 ans au moment la première opération de son père ) et elle sera indemnisée à hauteur de 10 000 euros.

S'agissant de M. [C] [V] (fils de [E] [V]) il était âgé de 15 ans au moment la première opération de son père) et il sera indemnisé à hauteur de 10 000 euros.

Enfin, concernant Mme [G] [P], elle était la compagne de [E] [V] depuis le mois de mai 2014, soit plus de trois années après la première opération de la victime directe. Néanmoins, elle a accompagné [E] [V] au quotidien durant sa fin de vie et sera donc indemnisée à hauteur de 6 000 euros.

Le jugement entrepris sera infirmé de ces chefs indemnitaires (préjudices des proches).

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

La SA Les Laboratoires Servier, qui est condamnée en cause d'appel, supportera les dépens d'appel avec distraction, ceux de première instance étant confirmés.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de M. [O] [V], de Mme [Z] [V], de M. [C] [V] et de Mme [G] [P] les frais engagés pour la défense de leurs intérêts en cause d'appel. La SA Les Laboratoires Servier sera condamnée leur payer la somme unique complémentaire de 6 000 euros (six mille euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de la société mutuelle AESIO Mutuelle les frais engagés pour la défense de ses intérêts en cause d'appel. La SA Les Laboratoires Servier sera condamnée lui payer la somme complémentaire de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de la CPAM de la Drôme les frais engagés pour la défense de ses intérêts en cause d'appel. La SA Les Laboratoires Servier sera condamnée lui payer la somme complémentaire de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et après en avoir délibéré conformément à la loi :

Déclare recevable l'intervention volontaire de M. [O] [V], de Mme [Z] [V] et de M. [C] [V], ès qualités d'héritiers de feu leur père [E] [V], décédé le 24 janvier 2022 ;

Infirme le jugement entrepris quant à l'indemnisation des proches de feu [E] [V] ;

Confirme le jugement entrepris pour le surplus ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Condamne la SA Les Laboratoires Servier à payer à M. [O] [V] la somme de 10 000 euros (dix mille euros) au titre de son préjudice d'affection ;

Condamne la SA Les Laboratoires Servier à payer à M. [C] [V] la somme de 10 000 euros (dix mille euros) au titre de son préjudice d'affection ;

Condamne la SA Les Laboratoires Servier à payer à Mme [Z] [V] la somme de 10 000 euros (dix mille euros) au titre de son préjudice d'affection ;

Condamne la SA Les Laboratoires Servier à payer à Mme [G] [P] la somme de 6 000 euros (six mille euros) au titre de son préjudice d'affection ;

Condamne la SA Les Laboratoires Servier à payer à la CPAM de la Drôme la somme complémentaire de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

Condamne la SA Les Laboratoires Servier à payer à la société mutuelle AESIO Mutuelle la somme complémentaire de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

Condamne la SA Les Laboratoires Servier à payer à M. [O] [V], Mme [Z] [V], M. [C] [V] et Mme [G] [P], unis d'intérêts, la somme unique complémentaire de 6 000 euros (six mille euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

Condamne la SA Les Laboratoires Servier aux dépens, avec application, au profit des avocats qui en ont fait la demande, des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Arrêt signé par Emmanuèle Cardona, Présidente de la deuxième chambre civile et par la Greffière Caroline Bertolo, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19/02413
Date de la décision : 15/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-15;19.02413 ?
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