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10/11/2022 | FRANCE | N°21/00230

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Ch. sociale -section b, 10 novembre 2022, 21/00230


C2



N° RG 21/00230



N° Portalis DBVM-V-B7F-KWKP



N° Minute :





















































































Copie exécutoire délivrée le :





la SCP FESSLER JORQUERA & ASSOCIES



la SELARL LEGER ANDRE



SELARL

FTN

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



Ch. Sociale -Section B

ARRÊT DU JEUDI 10 NOVEMBRE 2022





Appel d'une décision (N° RG 18/00713)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de GRENOBLE

en date du 11 décembre 2020

suivant déclaration d'appel du 08 janvier 2021





APPELANT :



Monsieur [N] [J]

né le 24 Septembre 1957 à [Localité 5] (M...

C2

N° RG 21/00230

N° Portalis DBVM-V-B7F-KWKP

N° Minute :

Copie exécutoire délivrée le :

la SCP FESSLER JORQUERA & ASSOCIES

la SELARL LEGER ANDRE

SELARL FTN

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

Ch. Sociale -Section B

ARRÊT DU JEUDI 10 NOVEMBRE 2022

Appel d'une décision (N° RG 18/00713)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de GRENOBLE

en date du 11 décembre 2020

suivant déclaration d'appel du 08 janvier 2021

APPELANT :

Monsieur [N] [J]

né le 24 Septembre 1957 à [Localité 5] (MAROC)

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représenté par Me Flavien JORQUERA de la SCP FESSLER JORQUERA & ASSOCIES, avocat au barreau de GRENOBLE substitué par Me Audrey NAVAILLES, avocat au barreau de GRENOBLE

INTIMEES :

S.E.L.A.R.L. [I], prise en la personne de Maître [P] [I] ès qualités de liquidateur judiciaire de la société SINTERTECH

[Adresse 1]

[Adresse 1],

représentée par Me Delphine ANDRE de la SELARL LEGER ANDRE, avocat postulant au barreau de GRENOBLE

et par Me RICARD de la AARPI VATIER, avocat plaidant au barreau de PARIS

Association UNEDIC DÉLÉGATION AGS CGEA D'[Localité 4]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

représentée par Me Florence NERI de la SELARL FTN, avocat au barreau de GRENOBLE

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DÉLIBÉRÉ :

M. Frédéric BLANC, Conseiller faisant fonction de Président,

Mme Hélène BLONDEAU-PATISSIER, Conseillère,

M. Pascal VERGUCHT, Conseiller,

DÉBATS :

A l'audience publique du 07 septembre 2022,

M. Frédéric BLANC, Conseiller faisant fonction de Président, chargé du rapport, et Mme Hélène BLONDEAU-PATISSIER, Conseillère, ont entendu les parties en leurs observations, assistés de Mme Carole COLAS, Greffière, conformément aux dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, les parties ne s'y étant pas opposées ;

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 10 novembre 2022, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.

L'arrêt a été rendu le 10 novembre 2022.

EXPOSE DU LITIGE':

M. [N] [J], né le 24 septembre 1957, a été embauché par la société Sintertech en qualité de presseur par contrat de travail à durée indéterminée du 23'juillet 1979 avec effet au'28'août'1979 soumis à la convention collective des mensuels de l'industrie des métaux de l'Isère et des Hautes-Alpes.

Il occupait en dernier lieu des fonctions de technicien métrologue.

M. [N] [J] a été placé en arrêt de travail à compter du 11 mars 2013 en raison d'une pathologie lombaire, reconnue comme maladie professionnelle par la caisse primaire d'assurance maladie le 20 décembre 2013.

A compter de novembre 2013, M. [N] [J] a repris ses fonctions en mi-temps thérapeutique, puis, en juin 2014, a signé un avenant à son contrat de travail pour fixer son temps de travail à 20 heures hebdomadaires.

La CPAM a déclaré M. [N] [J] consolidé en décembre 2016 au titre de cette pathologie.

M. [J] a été placé en arrêt de travail de droit commun le 21 décembre 2016 jusqu'au'31'décembre 2017.

Il s'est vu notifier une reconnaissance d'invalidité catégorie 2 à compter du 1er novembre 2017.

Le 15 janvier 2018 à l'issue d'une visite de reprise, le médecin du travail l'a déclaré inapte en précisant que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé, et que son état de santé faisait obstacle à tout reclassement.

La société Sintertech a convoqué M. [N] [J] à un entretien préalable qui s'est tenu le'7'février 2018, et qui a conduit à son licenciement pour inaptitude d'origine non professionnelle le 13 février 2018.

Demandant à voir reconnaître caractère professionnel de l'inaptitude, M. [N] [J] a saisi le conseil de prud'hommes de Grenoble par requête déposée le'13'août 2018.

Par jugement en date du 1er avril 2019, le tribunal de commerce de Grenoble a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société Sintertech, convertie, en liquidation judiciaire par jugement en date du 15 octobre 2019, la société [I], représentée par Me'[P] [I] étant désignée en qualité de liquidateur judiciaire.

Par jugement en date du 11 décembre 2020, le conseil de prud'hommes de Grenoble a':

Dit que l'inaptitude de M. [N] [J] est d'origine non professionnelle,

Débouté M. [N] [J] de l'ensemble de ses demandes,

Débouté Me [P] [I], liquidateur judiciaire de la SAS Sintertech, de sa demande reconventionnelle,

Condamné M. [N] [J] aux entiers dépens.

La décision a été notifiée par le greffe par lettres recommandées avec accusé de réception signés le 15 décembre 2020 par M. [N] [J], par Me [P] [I] et par l'Unedic délégation de l'AGS CGEA d'[Localité 4].

Par déclaration en date du 08 janvier 2021, M. [N] [J] a interjeté appel à l'encontre dudit jugement.

Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 17 mars 2021, M.'[N]'[J] sollicite de la cour de':

Juger l'appel de M. [N] [J] tant recevable que fondé ;

Infirmer la décision entreprise en ce qu'elle a :

- Dit que l'inaptitude de M. [N] [J] est d'origine non professionnelle,

- Débouté M. [N] [J] de l'ensemble de ses demandes,

- Condamné M. [N] [J] aux entiers dépens.

Réformer la décision entreprise.

Juger que le caractère professionnel de l'inaptitude de M. [N] [J] est établi.

En conséquence,

Fixer les créances salariales de M. [N] [J] aux sommes suivantes :

- 27.458,93 € net à titre de rappel de l'indemnité spéciale de licenciement';

- 2.757,68 € brut au titre de l'indemnité compensatrice de préavis ;

- 275,76 € brut au titre des congés payés afférents ;

Condamner la SELARL [I] es qualités de liquidateur de la société Sintertech à verser à M. [N] [J] la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 14 juin 2021, la Selarl'[I], représentée par Me [P] [I], es qualité de liquidateur judiciaire de la société Sintertech, sollicite de la cour de':

Confirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Grenoble le 11 décembre 2020 en ce qu'il a':

- Dit que de l'inaptitude de M. [N] [J] est d'origine non professionnelle

- Débouté M. [N] [J] de l'ensemble de ses demandes

- Condamné M. [N] [J] aux entiers dépens

Par conséquent,

- Débouter M. [N] [J] de l'ensemble de ses demandes

- Condamner M. [N] [J] à payer à la Selarl [I] prise en la personne de Me'[P] [I] es qualités de liquidateur judiciaire de la société Sintertech la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- Le condamner aux entiers dépens

Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 11 mai 2022, l'Unedic délégation de l'AGS CGEA d'[Localité 4] sollicite de la cour de':

Donner acte à l'AGS de ce qu'elle fait assomption de cause avec la SELARL [I], ès-qualités, en ce que celle-ci conclut - par des motifs pertinents - à la confirmation du jugement et au débouté intégral du salarié.

En tout état de cause,

Débouter le salarié de sa demande de condamnation à l'encontre de l'AGS, la décision à intervenir pouvant seulement lui être déclarée opposable (Cass. Soc. 26 janvier 2000 n° 494 P / Cass. Soc. 18 mars 2008 n° 554 FD), celle-ci étant attraite en la cause sur le fondement de l'article L.625-3 du code de commerce.

Débouter le salarié de toutes demandes de prise en charge par l'AGS excédant l'étendue de sa garantie, laquelle est plafonnée, toutes créances avancées pour le compte du salarié, à un des trois plafonds définis aux articles L. 3253-17 et D. 3253-5 du code du travail, lequel inclut les cotisations et contributions sociales et salariales d'origine légale ou d'origine conventionnelle imposée par la loi ainsi que la retenue à la source prévue à l'article 204A du code général des impôts.

Débouter le salarié de toute demande directe à l'encontre de l'AGS, l'obligation de l'AGS de faire l'avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pouvant s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire (Art. L. 3253-20 du code du travail), les intérêts légaux étant arrêtés au jour du jugement déclaratif (Art. L.621-48 du code de commerce).

Débouter le salarié de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile, cette créance ne constituant pas une créance découlant du contrat de travail et, partant, se situe hors le champ de garantie de l'AGS ce conformément aux dispositions de l'article L.253-6 du code du travail.

Débouter le salarié de sa demande de condamnation de l'AGS aux dépens

Déclarer la décision à intervenir opposable à l'UNEDIC Délégation AGS CGEA d'[Localité 4].

Pour un exposé complet des moyens et prétentions des parties, il convient au visa de l'article'455 du code de procédure civile de se reporter à leurs écritures sus-visées.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 30 juin 2022.

L'affaire, fixée pour être plaidée à l'audience du 7 septembre 2022, a été mise en délibérée au'10 novembre 2022.

EXPOSE DES MOTIFS':

1 ' Sur l'origine de l'inaptitude

Les règles protectrices applicables aux victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle prévues par les articles L. 1226-7 et suivants du code du travail, s'appliquent dès lors que l'inaptitude'du salarié, quel que soit le moment où elle est constatée ou invoquée, a au moins partiellement, pour origine cet accident ou cette maladie et que l'employeur avait connaissance de cette'origine professionnelle'au moment du licenciement.

Pour l'application des articles L.1226-7 et suivants du code du travail, le juge n'est pas lié par les décisions des organismes sociaux en ce qui concerne la qualification d'accident du travail ou de maladie professionnelle.

Le droit du travail étant autonome par rapport au droit de la sécurité sociale, l'application de ces dispositions protectrices n'est pas liée ou subordonnée à la reconnaissance par la caisse primaire d'assurance maladie ou un organisme de sécurité sociale, du caractère professionnel de la maladie ou d'un lien de causalité entre la maladie et l'inaptitude.

Les juges du fond ont l'obligation de rechercher eux-mêmes l'existence de ce lien de causalité et la connaissance qu'avait l'employeur de l'origine professionnelle de l'inaptitude et ils ne peuvent s'en rapporter aux seules décisions de la caisse primaire d'assurance maladie, qui ne constituent qu'un élément d'appréciation parmi d'autres.

Il appartient au salarié de rapporter la preuve de l'origine professionnelle de son inaptitude d'une part et de la connaissance par l'employeur de l'origine de l'inaptitude.

D'une première part, la cour observe que l'avis d'inaptitude du 15 janvier 2018 visé dans la lettre de licenciement énonce': «'Compte tenu de l'état de santé, le choix a porté sur l'utilisation de l'inaptitude, avec mention «'Tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé'» & «'l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi'» considérant que le salarié présente un état de santé non compatible avec la recherche d'un poste de travail'», sans se prononcer sur l'origine de l'inaptitude.

D'une seconde part, il résulte des pièces versées aux débats que M. [N] [J] souffrait depuis 2013 de lombalgies, prises en charge au titre de la législation professionnelle, le certificat de maladie professionnel établi le 13 mars 2013 précisant qu'il s'agissait de : «'lombalgie depuis 2000. Aggravation depuis 2010. [']. Juillet 2016': hernie discale ['] discopathie ['] 09.2012': dissectomie ['] recalibrage canal lombaire » et la décision de reconnaissance de la maladie professionnelle du'20'décembre'2013 visant spécifiquement la maladie suivante : «'sciatique par hernie discale L4-L5'» relevant des «'affections chroniques du rachis lombaire provoquées par la manutention manuelle de charges lourdes'».

Aussi, après sa reprise en mi-temps thérapeutique, en novembre 2013, M. [N] [J] a été placé en arrêt de travail pour maladie professionnelle du 4 août'2014 au 20 décembre 2016. Finalement au terme de cet arrêt, il a été placé en arrêt de travail pour maladie de droit commun dès le lendemain du 21 décembre 2016 et ce jusqu'au 31 décembre 2017, sans interruption ni reprise avant l'avis d'inaptitude du'15'janvier'2018. Cette période d'un an suivant la consolidation fixée au 20 décembre 2016 ne saurait éluder la période de dix-huit mois ayant justifié son arrêt pour maladie professionnelle.

Et la circonstance que le salarié ait été, au moment de son licenciement, déclaré consolidé de sa maladie professionnelle du travail par la CPAM n'est pas de nature à faire perdre le bénéfice de la législation protectrice des accidents du travail.

D'une troisième part, la poursuite ininterrompue des arrêts de travail conjuguée à la description des symptômes subis, démontre que le salarié présentait des affections similaires avant le'20'décembre'2016 et après la déclaration de consolidation.

Ainsi, un certificat médical du docteur [B], du 3 juin 2019, atteste que M. [N] [J] l'a consulté à partir du'22'septembre'2016 pour des «'cervicalgies sur canal cervical étroit aggravé par une cervicathrose ['] et douleurs d'épaules se rajoutant à sa pathologie lombaire douloureuse rachidienne chronique persistante invalidante (consolidée du fait de la stabilité de son état à ce niveau)'».

Le Dr [O], spécialisé en rhumatologie, confirme le cumul de plusieurs symptômes dans un courrier du 14 mai 2018, adressé au médecin traitant, en décrivant des «'phénomènes diffus à la fois rachidiens, lombaires, mais également cervicaux sur canal cervical rétréci'».

Il s'en déduit que les arrêts de travail délivrés après le 20 décembre 2016 étaient au moins partiellement liés aux mêmes affections que les arrêts de travail antérieurs.

D'une quatrième part, c'est par un moyen inopérant que Me [I] objecte que la déclaration de consolidation n'a pas fait l'objet de contestation de la part du salarié.

D'une cinquième part, les éléments versés aux débats ne révèlent pas que l'inaptitude serait exclusivement liée à une affection distincte de la maladie professionnelle.

Un courriel du médecin du travail, en date du 7 novembre 2016, évoque certes l'existence de problèmes de santé distincts en indiquant à l'employeur «'J'ai reçu en visite de pré reprise le salarié. Avec l'accord du salarié je vous tiens au courant de ses possibilités de reprise de travail. Il pourrait être consolidé pour sa Maladie Pro mais il continuera cependant son arrêt, avec l'accord de la Sécurité Sociale pour d'autres soucis de santé'», sans toutefois exclure un lien avec la persistance des lombalgies invalidantes.

Au contraire, M. [N] [J] produit la copie de son dossier médical du service de santé au travail dont il ressort que le médecin du travail a relevé, le 15 janvier 2018, «'événements médicaux = consolidation lombaire MP98 (toujours sensible) + cervicalgie (infiltration C6-C7'['] » et démontre ainsi que le médecin du travail a pris en compte, au moins partiellement, les conséquences de la maladie professionnelle du salarié affectant les lombaires.

En conséquence, il est démontré que la décision d'inaptitude émise par le médecin du travail a bien pour origine, au moins partielle, la maladie professionnelle de M. [N] [J].

Par ailleurs, il est également établi que la société Sintertech avait connaissance de l'origine professionnelle de l'inaptitude au moment du licenciement.

En effet il n'est pas contesté que l'employeur avait été destinataire de la déclaration de maladie professionnelle souscrite par le salarié en mars 2013, de la décision de reconnaissance de maladie professionnelle en décembre 2013, et de l'avis du médecin du travail du'4'novembre'2013 qui avait certes déclaré M. [N] [J] apte à la reprise mais en émettant la restriction d'un travail en «'mi-temps définitif'».

Il n'est pas davantage contesté que l'employeur a été destinataire des arrêts de travail pour maladie professionnelle, puis des arrêts de travail pour maladie de droit commun renouvelés jusqu'à la visite de reprise et l'avis d'inaptitude du médecin du travail.

Et la reconnaissance du taux d'incapacité de 13% fixé par la CPAM, selon décision du'21'décembre 2016, avait été notifiée à la société Sintertech le 15 février 2017.

En considération des éléments déjà en sa possession, l'employeur ne pouvait se retrancher derrière la fixation de la consolidation au 20 décembre 2016 et le courriel du médecin du travail du 7 novembre 2017 visant «'d'autres soucis de santé'» pour occulter les conséquences des séquelles invalidantes des lombalgies sur l'état de santé du salarié et l'avis d'inaptitude.

ll est ainsi suffisamment démontré que l'inaptitude du salarié était d'origine professionnelle, et que l'employeur était informé, lorsqu'il a mis en oeuvre la procédure de licenciement, de l'origine au moins en partie professionnelle de cette inaptitude.

Conformément à l'article L. 1226-14 du code du travail, la rupture du contrat de travail pour inaptitude à l'emploi suite à une maladie professionnelle, tel que prévu au deuxième alinéa de l'article L. 1226-12, ouvre droit, pour le salarié, à une indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis prévue à l'article L.1234-5 ainsi qu'à une indemnité spéciale de licenciement qui, sauf dispositions conventionnelles plus favorables, est égale au double de l'indemnité prévue par l'article L.1234-9.

Dès lors que le licenciement a été prononcé à la suite d'une inaptitude d'origine professionnelle, M. [N] [J] revendique à juste titre l'application de l'article L. 1226-14 du code du travail et le paiement d'une indemnité équivalente à l'indemnité compensatrice de préavis.

En application de l'article L. 3123-5 du code du travail qui énonce que l'indemnité de licenciement du salarié ayant été occupé à temps complet et à temps partiel dans la même entreprise sont calculés proportionnellement aux périodes d'emploi accomplies selon l'une et l'autre de ces deux modalités depuis son entrée dans l'entreprise, une erreur a affecté le calcul de l'indemnité légale de licenciement.

Il résulte des calculs détaillés par M. [N] [J] que le salaire de référence s'établit à'2'276,86 euros de sorte qu'avec une ancienneté de 38,68 ans sur la période du 1er août 1979 au 13 avril 2018 incluant le préavis de deux mois, dont 33,61 ans à temps complet et 5,07 années à temps partiel, l'indemnité légale de licenciement se chiffre à 27'458,93 euros.

Tenant compte de l'indemnité de licenciement versée à hauteur de 19'209,22 euros et de la régularisation opérée en cours de procédure à hauteur de 8'249,71 euros, la créance de M.'[N]'[J] au titre du reliquat de l'indemnité spéciale de licenciement doit être fixée à'27'458,93'euros (27'458,93 x 2 ' 19'209,22 ' 8'249,71) par infirmation du jugement déféré.

En outre, il convient de fixer la créance de M. [N] [J] à la somme de 2'757,68 euros bruts au titre de l'indemnité équivalente à l'indemnité compensatrice de préavis, par infirmation du jugement dont appel.

En revanche, cette indemnité compensatrice n'a pas la nature de créance salariale de sorte qu'elle n'ouvre pas droit à une indemnité pour congés payés si bien que le salarié est débouté de ses prétentions au titre des congés payés, confirmant le jugement entrepris par substitution de motif.

2 ' Sur la garantie de l'AGS

Infirmant le jugement déféré, la présente décision est commune et opposable à l'Unedic délégation de l'AGS CGEA d'[Localité 4] laquelle doit sa garantie dans les conditions des articles'L.'3253-6 et suivants et D. 3253-5 du code du travail, étant précisé que les plafonds de garantie de l'AGS s'entendent en sommes brutes.

Conformément aux dispositions de L. 3253-17 issues de sa version modifiée par la loi N°2016-1917 du'29 décembre 2016, la garantie inclut les cotisations et contributions sociales et salariales d'origine légale, ou d'origine conventionnelle imposée par la loi, ainsi que la retenue à la source prévue à l'article'204 A du code général des impôts.

3 ' Sur les demandes accessoires

Au visa de l'article 696 du code de procédure civile, infirmant le jugement entrepris, il convient de dire que les dépens de première instance, y ajoutant les dépens de l'appel, seront réglés en frais privilégiés de procédure collective suivie contre la société Sintertech, partie perdante.

En conséquence, la Selarl'[I], représentée par Me [P] [I], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Sintertech, est déboutée de sa demande indemnitaire fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Compte tenu de la procédure collective de la société Sintertech, l'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés en première instance, par confirmation du jugement entrepris, ainsi qu'en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement et après en avoir délibéré conformément à la loi,

CONFIRME l'arrêt déféré en ce qu'il a':

- Débouté M. [N] [J] de sa demande au titre des congés payés afférents à l'indemnité équivalente à l'indemnité compensatrice de préavis';

- Débouté Me [P] [I], liquidateur judiciaire de la SAS Sintertech de sa demande reconventionnelle,

- Rejeté la demande d'indemnisation de M. [N] [J] au titre des frais irrépétibles';

L'INFIRME pour le surplus,

Statuant à nouveau des chefs de jugement infirmés et y ajoutant,

FIXE au passif de la procédure collective suivie contre la société Sintertech au bénéfice de M.'[N] [J] les sommes suivantes :

- 27.458,93 euros (vingt-sept mille quatre cent cinquante-huit euros et quatre-vingt-treize centimes) à titre de reliquat de l'indemnité spéciale de licenciement';

- 2.757,68 euros (deux mille sept cent cinquante-sept euros et soixante-huit centimes) au titre de l'indemnité équivalente à l'indemnité compensatrice de préavis

DÉCLARE commun et opposable la présente décision à l'Unedic délégation de l'AGS CGEA d'[Localité 4]';

DIT que l'UNEDIC délégation de l'AGS CGEA d'[Localité 4] doit sa garantie dans les conditions des articles L 3253-6 et suivants et D 3253-5 du code du travail, étant précisé que les plafonds de garantie de l'AGS s'entendent en sommes brutes et retenue à la source de l'impôt sur le revenu de l'article 204 du code général des impôts incluse

REJETTE la demande d'indemnisation de M. [N] [J] au titre des dispositions de l'article'700 du code de procédure civile';

DIT que les dépens de première instance et d'appel seront réglés en frais privilégiés de procédure collective suivie contre la société Sintertech.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par M. Frédéric BLANC, Conseiller faisant fonction de Président de section, et par Mme Carole COLAS, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Ch. sociale -section b
Numéro d'arrêt : 21/00230
Date de la décision : 10/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-10;21.00230 ?
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