N° RG 21/00764 - N° Portalis DBVM-V-B7F-KX4S
C6
N° Minute :
copie certifiée conforme délivrée
aux avocats le :
Copie Exécutoire délivrée
le :
aux parties (notifiée par LRAR)
aux avocats
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE DES AFFAIRES FAMILIALES
ARRET DU MERCREDI 9 NOVEMBRE 2022
APPEL
Jugement au fond, origine tribunal de grande instance de Grenoble, décision attaquée en date du 10 février 2020, enregistrée sous le n° 10/00521 suivant déclaration d'appel du 10 février 2021
APPELANTE :
Mme [A] [B] épouse [M]
née le 17 Avril 1969 à [Localité 9] (38)
de nationalité Française
[Adresse 5]
[Localité 3]
représentée par Me Xavier DELACHENAL Avocat de la SCP DELACHENAL - DELCROIX Avocats au Barreau de GRENOBLE, postulant
et plaidant par Me Christian HUON, avocat au barreau de PARIS
INTIMES :
Mme [S] [H] veuve [B]
née le 30 Septembre 1952 à [Localité 11]
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 4]
représentée par Me Johanna ABAD, avocat au barreau de GRENOBLE, postulante
et par Me Alain PIREDDU, avocat au barreau de PARIS
M. [O] [B]
né le 12 Avril 1978 à [Localité 9]
de nationalité Française
[Adresse 2] ' :
[Localité 6]
représenté par Me Johanna ABAD, avocat au barreau de GRENOBLE, postulante et par Me Alain PIREDDU, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DU DELIBERE :
Mme Anne BARRUOL, Présidente,
Mme Martine RIVIERE, Conseillère,
M. Philippe GREINER, Conseiller honoraire,
DEBATS :
A l'audience publique du 27 septembre 2022,M. Philippe Greiner, conseiller, chargé du rapport, assisté de Mme MC Ollierou greffière, a entendu les avocats en leurs conclusions et Me Huon en sa plaidoirie, les parties ne s'y étant pas opposées, conformément aux dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile. Il en a rendu compte à la cour dans son délibéré et l'arrêt a été rendu à l'audience de ce jour.
EXPOSÉ DU LITIGE
[D] [B] est décédé le 30/04/2008 à [Localité 11] (38) laissant pour lui succéder son épouse, Mme [H], instituée légataire universelle, et ses deux enfants, [A] [B], née d'une précédente union et [O] [B].
Mme [H] a opté pour le quart en pleine propriété et les trois quarts en usufruit des biens dépendant de la succession.
Un montant global de 1.068.110 euros placé sur des assurances vie par le défunt a été versé de la façon suivante :
- 640.867 euros au profit du conjoint survivant
- 213.622 euros au profit de M. [O] [B]
- 213.622 euros au profit de Mme [M].
Par jugement du 28 mars 2013, le juge aux affaires familiales de Grenoble a notamment :
- ordonné le partage de la succession,
- désigné le président de la chambre départementale des notaires de l'Isère ou son délégataire pour procéder aux opérations de comptes, liquidation et partage et le vice-président de la chambre chargée des successions du tribunal de Grenoble ou son délégataire pour faire un rapport en cas de difficultés,
- préalablement au partage et pour y parvenir, désigné M. [K] [L], expert près la cour d'appel de Grenoble, avec pour mission de :
convoquer les parties, les entendre en leurs explications, se faire remettre et consulter tous documents utiles,
rechercher, décrire et évaluer l'ensemble des biens (immeubles, parts de SCI et autres sociétés, comptes d'associé avoirs bancaires, meubles) composant1'actif de la succession, en s'adjoignant si nécessaire un commissaire-priseur pour évaluer les meubles,
donner tous éléments sur le passif,
dire si les biens indivis sont partageables en nature, eu égard aux droits des parties et dans l'affirmative composer des lots en vue d 'un tirage au sort, et dans la négative, proposer des mises à prix en vue d'une licitation,
visiter, décrire et évaluer l'immeuble propre de Mme [H] veuve [B] sis à [Localité 14] puis déterminer le montant de la créance de la succession au titre des sommes investies par le de cujus pour l'acquisition et la construction de ce bien,conformément aux dispositions de l'article 469 du code civil sur le profit subsistant,
rechercher :
avec quels deniers ont été acquis la propriété indivise de [Localité 8] revendue le 5 octobre 2006 et les deux garages propres de Mme [H] revendus le même jour,
ce qu'il est advenu du prix de vente et de l'indemnité d'immobilisation versée par le locataire,
si les parts sociales et droits de Mme [H] dans les diverses sociétés où son époux avait également des parts ont été réglées avec ses deniers ou avec ceux de son époux,
si les sommes versées sur le compte titre PEA HSBC et le compte espèce associé et sur le contrat d'assurance vie ABONDANCE 2 de Mme [H] proviennent de ressources ou deniers propres de celle-ci ou si elles ont eté versées ou données par le de cujus,
rechercher, au vu des justificatifs de versements effectués par le de cujus qui lui seront remis, si la succession dispose d'une créance sur Mme [A] [M] au titre de prêts ou si celle-ci a bénéficié de dons n'ayant pas le caractère de présents d'usage en considération du patrimoine du de cujus,
se faire communiquer par les assureurs, s'ils ne sont pas produits par les parties, les relevés des primes versées comportant la date de chaque versement sur chaque contrat d'assurance vie non racheté avant le décès et rechercher quels étaient les revenus du souscripteur à l'époque du versement des primes ainsi que les éléments de son patrimoine différents de celui qu'il possédait à son décès,
donner tous éléments sur les comptes à faire entre les indivisaires.
L'expert commis a déposé son rapport le 28 janvier 2015.
Par ordonnance du 29 novembre 2016, le juge de la mise en état a enjoint Mme [S] [H] veuve [B] et M. [O] [B] de produire certains documents sous astreinte et ordonné un complément d'expertise confié à M. [K] [L] concernant les biens et avoirs de M. [D] [B] à l'île Maurice.
L'expert commis a déposé son second rapport le 11 octobre 2018.
Par jugement contradictoire du 10 février 2020, le juge aux affaires familiales de Grenoble a principalement :
- dit que figurent à l'actif successoral :
le bien immobilier sis [Localité 12] dont la valeur vénale pour les besoins du partage peut être fixée à 120.000 euros,
le bien immobilier sis à [Localité 10] dont la valeur vénale peut être fixée pour les besoins du partage à 334.000 euros,
la créance détenue sur Mme [S] [H] d'un montant de 303.431,18 euros au titre de la soulte versée pour l'acquisition du terrain de Montbonnot,
la créance détenue par Mme [S] [H] d'un montant de 418.697,90 euros au titre des travaux financés par feu [D] [B] pour la construction de la maison sise à [Localité 14],
la créance détenue sur Mme [S] [H] d'un montant de 89.466 euros au titre des droits payés pour la succession de feu [P] [H],
les 300 parts sociales de la SCI ETOILE 4 selon le calcul indiqué aux présents motifs,
les 2248/2250 parts sociales de la SCI IMMOBILIERE [D] [B] soit la somme de 80.928 euros,
la moitié indivise du prix de revente des biens immobiliers sis à [Localité 8] soit 277.500 euros,
les meubles meublants pour un montant global de 10.950 euros,
les soldes des comptes et livrets ouverts au nom de feu [D] [B] ou pour leur moitié indivise des comptes et livrets ouverts au nom des époux [B] à la date du décès,
la somme de 20.000 euros au titre des libéralités consenties à M. [O] [B],
les sommes de 35.000 euros et 139.299 euros au titre des libéralités consenties à Mme [A] [B],
la somme globale de 205.499,80 euros, versée à titre de primes entre 2001 et 2006, pour l'assurance-vie souscrite par Mme [S] [H],
- renvoyé les parties devant le notaire désigné dans les conditions fixées par le jugement du 28 mars 2013 pour établir l'acte de partage définitif, sous la surveillance du juge commis,
- dit qu'en cas d'empêchement du juge ou du notaire commis, il sera procédé à son remplacement par ordonnance sur requête de la partie la plus diligente,
- ordonné l'exécution provisoire de la décision,
- dit que chaque partie conservera la charge de ses propres frais irrépétibles,
- dit qu'il sera fait masse des dépens, lesquels seront tirés en frais privilégiés de partage et distraits au profit des avocats en la cause,
- débouté les parties de toute autre demande plus ample ou contraire.
Le 10 février 2021, Mme [A] [B] a interjeté appel du jugement rendu le 10 février 2020, en ce qui concerne l'actif successoral.
Par ses dernières conclusions notifiées le 8 octobre 2021, Mme [A] [B] demande à la cour de :
- déclarer Mme [S] [H] et M. [O] [B] irrecevables en leur appel incident,
- subsidiairement, si par impossible la cour admettait la recevabilité de1'appel incident, il y aurait lieu de prononcer 1'irrecevabilité des demandes s'agissant d'une demande nouvelle conformément aux dispositions de l'article 567 du code de procédure civile,
- et, plus subsidiairement,
- débouter Mme [S] [H] et M. [O] [B] de toutes leurs demandes fins et conclusions,
- confirmer 1e jugement du tribunal judiciaire de Grenoble du 10 février 2020 en ce qu'il a dit que figurent à l'actif successoral :
le bien immobilier sis [Localité 12] dont la valeur vénale pour les besoins du partage peut être fixée à la somme de 120.000 euros,
le bien immobilier sis à [Localité 10] dont la valeur vénale peut être fixée pour les besoins du partage à la somme de 334.000 euros,
la créance détenue sur Mme [S] [H] d'un montant de 303.431,18 euros au titre de la soulte versée pour l'acquisition du terrain de Montbonnot,
la créance détenue par Mme [S] [H] d'un montant de 418.697,90 euros au titre des travaux financés par feu [D] [B] pour la construction de la maison sise à [Localité 14],
la créance détenue sur Mme [S] [H] d'un montant de 89.466 euros au titre des droits payés pour la succession de feu [P] [H],
les 300 parts sociales de la SCI ETOILE 4 selon le calcul indiqué aux présents motifs,
les 2248/2250 parts sociales de la SCI IMMOBILIERE [D] [B] soit la somme de 80.928 euros,
la moitié indivise du prix de revente des biens immobiliers sis à [Localité 8] soit 277.500 euros,
les meubles meublants pour un montant global de 10.950 euros,
les soldes des comptes et livrets ouverts au nom de feu [D] [B] ou pour leur moitié indivise des comptes et livrets ouverts au nom des époux [B] à la date du décès
- infirmer le jugement du tribunal judiciaire de Grenoble du 10 février 2020 en ce qu'il a :
dit que figurent à l'actif successoral :
la somme de 20.000 euros au titre des libéralités consenties à M. [O] [B],
les sommes de 35.000 euros et 139.299 euros au titre des libéralités consenties à Mme [A] [B],
débouté les parties de toute autre demande plus ample ou contraire,
- statuant à nouveau,
- juger que les sommes perçues par Mme [A] [M] constituent des présents d'usage non soumis à rapport,
- débouter les défendeurs de leurs demandes de ce chef,
- juger que M. [O] [B] doit rapporter à la succession 486.666 euros au titre des libéralités consenties par son père,
- ordonner le rapport à la succession par M. [O] [B] d'une somme de 486.666 euros,
- juger que M. [O] [B] s'est rendu coupable de recel successoral de ce montant,
- en conséquence,
- juger que M. [O] [B] sera privé de ses droits sur cette somme,
- juger que les droits d'usufruit seront déterminés à la date la plus proche du partage,
- juger que la valeur des actifs successoraux ainsi que celle des soultes dues par Mme [S] [H] sera déterminée à la date la plus proche du partage,
- condamner in solidum Mme [S] [H] et M. [O] [B] à verser à Mme [A] [M] 60.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du grave préjudice matériel et financier,
- condamner in solidum Mme [S] [H] et M. [O] [B] à verser à Mme [A] [M] 10.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonner l'emploi des dépens en frais de partage et dire que chacun des avocats pourra les recouvrer conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
Par leurs dernières conclusions notifiées le 6 octobre 2021, M. [O] [B] et Mme [S] [H] demandent à la cour de :
- confirmer le jugement dans toutes ses dispositions,
- y ajoutant,
- condamner Mme [A] [M] à payer à Mme [S] [H] une somme à titre de dommages et intérêts correspondant à la différence entre la somme résultant de la conversion de son usufruit au taux de 40% et celle résultant de la conversion de son usufruit tel qu'il sera fixé lors du partage,
- condamner Mme [A] [M] à payer à chacun des concluants la somme de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,
- condamner Mme [A] [M] à payer à chacun des concluants la somme de 15.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- dire que la conversion de l'usufruit dont bénéficie Mme [S] [H] s'effectuera au taux de 40 % quelle que soit la date à laquelle intervient le partage.
- condamner Mme [A] [M] au paiement des dépens qui comprendront le coût des expertises.
Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est expressément renvoyé, par application de l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions susvisées.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur le rapport des libéralités à la succession par Mme [M]
Selon l'article 843 du code civil, 'tout héritier, même ayant accepté à concurrence de l'actif, venant à une succession, doit rapporter à ses cohéritiers tout ce qu'il a reçu du défunt, par donations entre vifs, directement ou indirectement ; il ne peut retenir les dons à lui faits par le défunt, à moins qu'ils ne lui aient été faits expressément hors part successorale'.
Toutefois, selon l'article 852 du code civil, les présents d'usage ne doivent pas être rapportés, le caractère de présent d'usage s'appréciant à la date où il est consenti et compte tenu de la fortune du disposant.
En l'espèce, concernant la fortune de [D] [B] :
- le patrimoine du défunt a toujours été important, puisqu' il résulte des déclarations faites pour l'impôt de solidarité sur la fortune qu'il était de plus de 15 millions de francs en 1998, 1999, de 14.839.200 francs en 2000, et a toujours été supérieur à 2,1 millions d'euros ensuite, pour atteindre 2,8 millions d'euros en 2008 ;
- [D] [B] a toujours détenu beaucoup de liquidités, soit 1,6 millions en 2006 ;
- à cette date, son revenu fiscal de référence était de 90.023 euros.
Il en résulte que les sommes en cause n'ont pu affecter sa situation patrimoniale.
Concernant sa fille, les intimés se fondent sur un récapitulatif des sommes versées à celle-ci depuis septembre 1996 établi par le défunt aux dates des 17/04/2002 et 15/04/2004, pour aboutir à un montant de 139.299 euros de libéralités, somme retenue par le premier juge.
Ce document sera pris en compte car suffisamment détaillé, puisque les versements qui y sont mentionnés correspondent aux relevés de compte de [D] [B].
En revanche, les sommes agrégées, non détaillées et les dépenses indiquées non chiffrées ne constituent pas de preuves suffisantes pour que l'on puisse caractériser des libéralités rapportables, étant rappelé que si des versements ont eu lieu au profit d'autres personnes que l'appelante, ils ne sont pas soumis au rapport qui incombe aux seuls successibles.Or, les talons de chèques produits révèlent que plusieurs versements n'ont pas eu lieu au bénéfice de Mme [M].
Ne seront ainsi pas pris en considération les postes suivants mentionnés dans le décompte, car non étayés par des éléments extrinsèques, comme des virements :
- liquidation de placements de 256.813 francs;
- prêts Cognin de 75.000 francs;
- 'papa au fil du temps' : 246.100 francs.
En revanche, le poste 'Papa oct 2001 au feu!'ne peut être considéré comme présent d'usage en raison de son montant.
Sont donc rapportables les sommes suivantes:
- 50.000 francs soit 7.622,45 euros versés le 28/09/2001 ;
- 4.000 francs soit 609,80 euros versés le 05/10/2001 ;
- 10.000 francs soit 1.524,49 euros versés le 09/10/2001 ;
- 10.000 francs soit 1.524,49 euros versés le 16/10/2001 ;
- 4.000 francs soit 609,80 euros le 05/11/2001 ;
- 15.000 francs ou 2.286,74 euros versés le 09/11/2001, soit une somme de 85.000 francs réglée en l'espace de 6 semaines , étant relevé que la mention 'papa octobre 2001 au feu!' montre que l'appelante a connu un besoin urgent de trésorerie à cette époque, comblé par son père, soit un total de 19.513 euros. Ces versements sont confirmés par les relevés du compte bancaire de [D] [B] et par les justificatifs des virements afférents.
Seront aussi pris en compte cinq réglements intervenus en 2003 pour un total de 9.750 euros. En revanche, un versement en espèces de 500 euros le 21/06/2003 et le paiement de billet d'avion de 1.000 euros sont de simples présents d'usage.
En 2004, neuf versements sont mentionnéspour un total de 13.819 euros.
Concernant la somme de 35.000 francs soit 5.335,71 euros, versée le 28/07/1998qui correspond à un prêt sans intérêts consenti par les époux [B] à M. et Mme [M] le 03/03/2003, enregistré le 13/03/2003, pour l'achat d'un bien immobilier à [Localité 7] (30), le prêt étant remboursable au jour de sa revente, dans la mesure où ce prêt a été consenti par les deux époux [B], seule la moitié du capital à rembourser doit être intégrée à l'actif de la succession, soit 2.667,85 euros. L'autre moitié est donc étrangère au présent litige s'agissant d'une créance personnelle de la veuve du défunt .
Dès lors, le montant total des libéralités à rapporter s'élève à 40.414 euros, le poste 'opérations du coeur au fil du temps' indiqué sur le relevé manuscrit n'étant pas toujours chiffré et par trop imprécis, car insuffisamment documenté ('voyage New York, voitures, cuisine, équipement [Localité 15]').
Sur le rapport des libéralités reçues par M. [O] [B]
L'article 564 du code de procédure civile prohibe les prétentions nouvelles en cause d'appel, sauf si elles ont pour objet de faire écarter celles adverses.
En matière de partage, les parties étant respectivement demanderesses et défenderesses quant à l'établissement de l'actif et du passif, toute demande doit être considérée comme une défense à une prétention adverse. Est donc recevable, en application de l'alinéa 2 de l'article 910-4 du code de procédure civile, la demande relative au rapport d'une somme de 486.666 euros.
L'appelante fait valoir que M. [O] [B] a acquis un appartement sis à [Localité 13], d'une valeur de 700.000 euros, alors qu'il justifie n'avoir financé qu'une partie de cette somme.
En réalité, comme indiqué dans l'acte d'acquisition produit par l'appelante, l'offre de crédit immobilier de la société Barclays du 14/04/2009 et le relevé de compte du notaire devant qui l'acte d'acquisition a été passé (pièces intimés n° 265 et 266), le prix du bien était de 375.000 euros, s'agissant d'un appartement de trois pièces de 60,90 m², et non 700.000 euros comme allégué par Mme [M].
Si ce bien a pu prendre de la valeur, des biens similaires ayant été vendus entre fin 2016 à fin 2019 à des prix allant de 392.500 euros à 745.000 euros (pièce 27 appelante), ce n'est pas en raison d'une dissimulation du prix au moment de l'achat, mais du fait de la hausse des prix de l'immobilier intervenue dans l'intervalle.
Il a été acquis au moyen d'un prêt de 240.000 euros et d'un apport de 135.000 euros, la banque HSBC ayant versé le 28/10/2008 un capital décès de 159.859,42 euros.
En conséquence, la preuve d'une donation faite par [D] [B] à son fils n'est pas rapportée.
Par ailleurs, l'appelante expose que des avoirs appartenant au défunt sur des comptes bancaires ouverts à l'Ile Maurice n'auraient pas été déclarés.
Ont été versés aux débats la convention d'ouverture de compte auprès de The Mauritius Commercial Bank Ltd, du 05/04/2005 et les relevés de compte afférents. Leur examen montre que des sommes minimes ont été déposées, pour permettre aux époux [B] d'utiliser une carte de crédit, dans la limite de 20.000 roupies par jour, sans jamais dépasser 3.015 euros et il n'existe aucun mouvement de fonds de ce compte à destination d'autres bénéficiaires que les titulaires du compte, le solde au décès de [D] [B] ayant été transmis à Maître [T], notaire à [Localité 16], qui l'a elle-même adressé au notaire commis.
Dans ces conditions, la demande de rapport formée par l'appelante sera rejetée.
Sur le recel successoral
L'appelante fait valoir que M. [O] [B] s'est rendu coupable du recel de la somme de 486.666 euros.
Faute de démonstration d'avoirs dissimulés à l'Ile Maurice, cette demande sera rejetée, étant observé que M. [B] n'a commis aucune manoeuvre quant aux libéralités reçues de son père à hauteur de 20.000 euros.
L'appelante sera déboutée de ce chef de demande.
Sur la demande reconventionnelle en dommages intérêts et les autres demandes
Les intimés font valoir qu'en raison de la durée de la procédure de partage, les droits en usufruit vont être affectés, la valeur de l'usufruit passant de 50% à 40% lorsque l'usufruitier aura 71 ans révolus.
Cette demande ne peut prospérer puisque :
- Mme [H] n'a pas encore atteint l'âge de 71 ans;
- ses droits en usufruit ont été déterminés dès l'option prise suite au décès, soit les trois quarts de l'actif successoral en usufruit et ils ne peuvent plus être remis en cause ;
- l'application du barème fiscal n'a en tout état de cause d'incidence qu'en cas de vente d'un bien, ce que ne déclare pas envisager d'ores et déjà Mme [H]. Le préjudice allégué est ainsi hypothétique.
Au surplus, compte tenu du sort partagé du litige la durée de la procédure ne peut être imputée à la seule appelante .
Les intimés seront donc déboutés également de leur demande de dommages-intérêts pour procédure abusive.
De même, l'équité ne commande pas l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés par les parties.
Enfin, les dépens seront employés en frais privilégiés de partage.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement et contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Confirme le jugement déféré en ce qu'il a débouté Mme [Y] [M] de sa demande portant sur le recel successoral ;
Le réforme pour le surplus des chefs d'appel ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Dit que Mme [M] doit rapporter à la succession de [D] [B] la somme de 40.414 euros ;
Déboute les parties du surplus de leur demande ;
Dit que les dépens de première instance et d'appel seront employés en frais privilégiés de partage;
Autorise les avocats qui en ont fait la demande à recouvrer directement les dépens dont ils ont fait l'avance sans avoir reçu provision ;
PRONONCE par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.
SIGNE par la présidente, Anne Barruol, et par la greffière, MC. Ollierou, à laquelle la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.
La greffière La Présidente
MC Ollierou A. BARRUOL