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04/11/2022 | FRANCE | N°20/02425

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Ch.secu-fiva-cdas, 04 novembre 2022, 20/02425


C3



N° RG 20/02425



N° Portalis DBVM-V-B7E-KQBY



N° Minute :





































































Notifié le :



Copie exécutoire délivrée le :









AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



CHAMBRE SOCIALE - PROTECTION S

OCIALE

ARRÊT DU VENDREDI 04 NOVEMBRE 2022





Appel d'une décision (N° RG 18/328)

rendue par le pôle social du tribunal judiciaire de VIENNE

en date du 1er juillet 2020

suivant déclaration d'appel du 03 août 2020





APPELANTE :



SAS [4], prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localit...

C3

N° RG 20/02425

N° Portalis DBVM-V-B7E-KQBY

N° Minute :

Notifié le :

Copie exécutoire délivrée le :

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE SOCIALE - PROTECTION SOCIALE

ARRÊT DU VENDREDI 04 NOVEMBRE 2022

Appel d'une décision (N° RG 18/328)

rendue par le pôle social du tribunal judiciaire de VIENNE

en date du 1er juillet 2020

suivant déclaration d'appel du 03 août 2020

APPELANTE :

SAS [4], prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Xavier BONTOUX, avocat au barreau de LYON substitué par Me Pauline BAZIRE, avocat au barreau de LYON

INTIMEE :

La CPAM DE L'ISERE, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 2]

comparante en la personne de Mme [C] [I], régulièrement munie d'un pouvoir

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DEBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

M. Jean-Pierre DELAVENAY, Président,

Mme Isabelle DEFARGE, Conseiller,

M. Pascal VERGUCHT, Conseiller,

Assistés lors des débats de M. Fabien OEUVRAY, Greffier,

DÉBATS :

A l'audience publique du 08 septembre 2022,

M. Jean-Pierre DELAVENAY chargé du rapport, Mme Isabelle DEFARGE, Conseiller et M. Pascal VERGUCHT, Conseiller ont entendu les représentants des parties en leurs conclusions et plaidoiries,

Et l'affaire a été mise en délibéré à la date de ce jour à laquelle l'arrêt a été rendu.

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Le 14 novembre 2017, Mme [O] [E], ouvrière de montage depuis le 16 mai 2005 au sein de la société [4], a souscrit auprès de la caisse primaire d'assurance-maladie (CPAM) de l'Isère une déclaration de maladie professionnelle au titre d'une tendinopathie de l'épaule gauche suivant certificat médical initial du 17 octobre 2017.

Le 02 mai 2018, la CPAM de l'Isère a notifié à l'assurée et à l'employeur sa décision de prendre en charge, au titre du tableau 57 des maladies professionnelles, la pathologie déclarée.

Le 07 septembre 2018, la société [4] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Vienne d'un recours à l'encontre du rejet implicite par la commission de recours amiable de la CPAM de l'Isère saisie le 2 juillet 2018 de sa demande tendant à l'inopposabilité à son encontre de la décision de prise en charge de la maladie déclarée par Mme [E].

Suivant décision du 24 octobre 2018, la commission de recours amiable a maintenu la décision de prise en charge.

L'état de santé de Mme [E] a été déclaré consolidé à la date du 31 juillet 2019 par le médecin conseil de la caisse primaire.

Par jugement du 1er juillet 2020, le pôle social du tribunal judiciaire de Vienne a :

- déclaré opposable à la société [4] la décision en date du 2 mai 2018 de prise en charge, au titre de la législation professionnelle, de la maladie déclarée par Mme [E],

- rappelé que la procédure, initiée avant le 1er janvier 2019, est exempte de dépens.

Le 3 août 2020, la société [4] a interjeté appel de cette décision.

Les débats ont eu lieu à l'audience du 8 septembre 2022 et les parties avisées de la mise à disposition au greffe de la présente décision le 4 novembre 2022.

EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Au terme de ses conclusions parvenues au greffe le 12 avril 2022 et reprises oralement à l'audience, la SAS [4] demande à la cour :

- d'infirmer le jugement rendu par le pôle social du tribunal judiciaire de Vienne le 1er juillet 2020 en ce qu'il lui a déclaré opposable la décision de prise en charge, au titre de la législation professionnelle, de la maladie du 17 octobre 2017 déclarée par Mme [E],

Statuant à nouveau,

- de juger inopposable à son encontre la décision de prise en charge de la maladie du 17 octobre 2017 déclarée par Mme [E].

La société [4] soutient que la caisse primaire ne démontre pas que la condition tenant à l'exposition au risque est remplie et lui reproche, en conséquence, de ne pas avoir saisi le Comité Régional de Reconnaissance des Maladies Professionnelles (CRRMP).

Elle estime que la CPAM de l'Isère ne pouvait se contenter d'études de postes réalisées pour d'autres salariés pour fonder sa décision.

Elle relève également que la salariée dans son questionnaire décrit des gestes qui l'obligeaient à se baisser et des conditions de travail concernant l'entrée du tunnel de repassage et non la sortie.

Au terme de ses conclusions parvenues au greffe le 1er août 2022 et reprises oralement à l'audience, la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère demande à la cour :

- de confirmer en tous points le jugement rendu par le pôle social du tribunal judiciaire de Vienne le 1er juillet 2020 en ce qu'il a déclaré opposable à la société [4] la décision de prise en charge, au titre de la législation professionnelle, de la maladie du 17 octobre 2017 de Mme [E] et l'ensemble des conséquences y afférent.

La CPAM de l'Isère soutient que sa décision de prise en charge est justifiée dès lors que toutes les conditions visées au tableau 57 A sont réunies :

- la pathologie déclarée par Mme [E] appartient bien à l'un des tableaux du code de la sécurité sociale et elle a été objectivée par IRM le 10 octobre 2017,

- le délai de prise en charge de 6 mois a été respecté (date de première constatation de la maladie fixée au 10 novembre 2015) ;

- la condition relative aux travaux est remplie car il ressort d'une étude récente du poste occupé par la salariée de repassage une exposition à des mouvements d'élévation des bras des deux épaules sans soutien en abduction à un angle supérieur de 60 °.

MOTIVATION

L'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale dispose : ' est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau '.

La désignation de la maladie soit une tendinopathie chronique non rompue et non calcifiante de la coiffe des rotateurs objectivée par IRM de l'épaule gauche du 10 octobre 2017 n'est plus contestée par la SASU [4], étant précisé que la caisse a également instruit une pathologie similaire de l'épaule droite de Mme [E].

Le respect du délai de prise en charge de six mois est aussi admis par l'employeur.

L'appelante conteste uniquement l'exposition à la liste limitative des travaux susceptibles de provoquer cette maladie soit ' les travaux comportant des mouvements ou le maintien de l'épaule sans soutien en abduction avec un angle supérieur ou égal à 60 degrés pendant au moins deux heures par jour en cumulé ou avec un angle supérieur ou égal à 90 degrés pendant au moins une heure par jour en cumulé', estimant que la caisse n'a pas rapporté la preuve de cette exposition au risque qui lui incombait pour prendre en charge la maladie de la salariée à titre professionnel.

Mme [E] est ouvrière de montage depuis 2005 de la société [4] ayant pour activité la fabrication de sièges automobiles et rehausseurs.

Elle a été affectée au montage de housses sur sièges auto et ponctuellement au montage de harnais depuis son embauche, sauf de 2015 à 2017 où elle a effectué du repassage selon le questionnaire employeur rempli par la SASU [4] à l'occasion de l'enquête réalisée par la caisse, et plus exactement du 15 septembre 2014 au 26 septembre 2016 d'après la réponse du 12 mars 2018 de la responsable des ressources humaines à l'enquêteur (cf pièce [4] n° 18).

La date de première constatation de la maladie retenue correspond à une échographie pratiquée le 10 novembre 2015 et le dernier jour travaillé de la salariée est le 22 septembre 2017 selon la pièce n° 18 précitée.

Pour son poste de travail initial, la salariée indique dans son questionnaire qu'elle emboîtait des têtières sur les rehausseurs, collait des étiquettes et installait la notice sur la têtière puis montait les housses sur les rehausseurs, installait les harnais et emballait le tout dans des housses plastiques.

Cette description des tâches effectuée par la salariée dans ce poste n'a pas été contredite par l'appelante qui s'est contentée dans son questionnaire comme repris précédemment d'indiquer que celle-ci montait des housses et des harnais sauf de 2015 à 2017 où elle a fait du repassage pour en tirer la conclusion, sans aucune analyse de ses gestes de travail pour y parvenir, qu'elle n'effectuait pas de mouvement d'abduction à 60 degrés durant plus de deux heures ou à 90 degrés durant une heure.

L'enquêteur a mentionné dans son rapport que les études de postes pour d'autres salariés ont toujours mis en évidence des mouvements répétés en élévation à plus de 60 degrés pour ces postes de montage de housse et de harnais, ce qui découle au demeurant de la nature même des tâches accomplies manuellement par la salariée sur une table de travail devant elle.

Durant son affectation au repassage des housses, la responsable des ressources humaines de l'entreprise sur question précise de l'enquêteur a répondu par le courriel du 12 mars 2018 précité que Mme [E] avait occupé, du 15 septembre 2014 au 26 septembre 2016, le même poste qu'une autre salariée pour laquelle l'enquêteur de la caisse s'était rendu dans l'entreprise le 11 janvier 2018 et avait décrit comme suit les tâches de celle-ci accomplies en alternance :

- ' pendant une semaine la salariée est en entrée du tunnel de repassage. Elle travaille en station debout sur une estrade de 20 cm afin de soulager les efforts des bras (...) La visualisation du poste ne met pas en évidence d'élévation significative du bras droit supérieure à 60 degrés. Le bras droit reste majoritairement proche du corps. En revanche la répétitivité est importante à ce poste, les paniers circulant en continu, sachant que ce poste est occupé 7 heures par jour.

- La semaine suivante elle est affectée en sortie de tunnel. Elle travaille également debout sur une estrade et est chargée de sortir les housses repassées des paniers suspendus. Les housses sont placées manuellement à plat dans des rolls. À savoir que deux opératrices sont placées l'une en face de l'autre pour évacuer les housses. La visualisation du poste met en évidence une élévation des deux bras par rapport au corps à une amplitude comprise entre 60 et 90 degrés pour extraire la housse du panier et lors de la dépose dans le roll. Cette gestuelle est répétée constamment sur la journée de travail, les paniers circulant en continu '.

La SASU [4] ne peut soutenir, après avoir reconnu le 12 mars 2018 après cette visite sur les lieux de l'enquêteur le 11 janvier 2018 que Mme [E] avait été affectée au même poste que cette salariée, qu'en réalité elle n'aurait été affectée qu'en entrée de tunnel alors que, de plus, cette alternance hebdomadaire des postes est d'évidence vu la description des tâches dictée par le souci d'alterner les contraintes sur le dos et les bras chez les salariés.

Enfin du 26 septembre 2016 au 22 septembre 2017, date de son dernier jour de travail effectif, Mme [E] a repris son poste de travail antérieur.

Dès lors il a bien été justifié par la caisse d'une durée d'exposition quotidienne d'au moins deux heures de la salariée concernée à des mouvements d'abduction supérieurs à 60 degrés durant plus de six mois.

Toutes les conditions du tableau étant réunies la présomption d'imputabilité de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale s'applique et la SASU [4] ne rapportant pas la preuve d'une cause totalement étrangère au travail à la pathologie de sa salariée, le jugement ne peut qu'être confirmé.

L'appelante succombante supportera les dépens de la présente instance.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme le jugement RG n° 18/00328 rendu le 1er juillet 2020 par le pôle social du tribunal judiciaire de Vienne.

Y ajoutant,

Condamne la SASU [4] aux dépens d'appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par M. Jean-Pierre Delavenay, président et par Mme Chrystel Rohrer, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Ch.secu-fiva-cdas
Numéro d'arrêt : 20/02425
Date de la décision : 04/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-04;20.02425 ?
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