C8
N° RG 20/02252
N° Portalis DBVM-V-B7E-KPTL
N° Minute :
Notifié le :
Copie exécutoire délivrée le :
Me Christophe KOLE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE SOCIALE - PROTECTION SOCIALE
ARRÊT DU VENDREDI 04 NOVEMBRE 2022
Appel d'une décision (N° RG 19/395)
rendue par le pôle social du tribunal judiciaire de GRENOBLE
en date du 22 mai 2020
suivant déclaration d'appel du 17 juillet 2020
APPELANTE :
Madame [H] [K]
née le 12 avril 2000 à [Localité 5]
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Me Christophe KOLE, avocat au barreau de LYON
INTIMEE :
La CPAM DE L'ISERE, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
Service Contentieux Général
[Adresse 1]
[Localité 3]
comparante en la personne de Mme [W] [T], régulièrement munie d'un pouvoir
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DES DEBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
M. Jean-Pierre DELAVENAY, Président,
Mme Isabelle DEFARGE, Conseiller,
M. Pascal VERGUCHT, Conseiller,
Assistés lors des débats de M. Fabien OEUVRAY, Greffier,
DÉBATS :
A l'audience publique du 08 septembre 2022,
Mme Isabelle DEFARGE, chargée du rapport, M. Jean-Pierre DELAVENAY, Président et M. Pascal VERGUCHT, Conseiller ont entendu les représentants des parties en leurs observations,
Et l'affaire a été mise en délibéré à la date de ce jour à laquelle l'arrêt a été rendu.
Mme [H] [K], née le 12 avril 2000, salariée de la SA [6] en qualité d'agent de production, a été mise le 28 mai 2018 à la disposition de la SA [7].
Le 28 mai 2018, elle a déclaré avoir été victime d'un accident du travail, survenu dans les circonstances suivantes : 'en voulant débloquer une pièce, sa main a été happée et s'est coincée dans la machine : entorse index, majeur et auriculaire'.
Le 20 novembre 2018, la CPAM de l'Isère a attribué à Mme [K] une indemnité en capital de 1 977,76€ sur la base d'un taux d'incapacité permanente partielle de 5% pour 'douleurs et gênes fonctionnelles légères de la main gauche après écrasement des 2ème et 3ème doigts gauches chez une droitière '.
Mme [K] a ensuite été déclarée inapte et licenciée pour ce motif.
Le 1er février 2019, elle a contesté la décision de la CPAM de l'Isère devant le tribunal du contentieux de l'incapacité de Villeurbanne, qui s'est dessaisi au profit du tribunal de grande instance de Grenoble et par jugement du 22 mai 2020 le pôle social de cette juridiction, après consultation médicale à l'audience :
- l'a déboutée de sa demande de réévaluation de son taux d'incapacité fixé à 5%
- a laissé à chaque partie la charge de ses propres dépens.
Le 22 juillet 2020, Mme [K] a interjeté appel de cette décision qui lui a été notifiée le 26 mai 2022 et au terme de ses conclusions déposées le 29 août 2022 reprises oralement à l'audience, elle demande à la cour :
- d'infirmer le jugement,
Statuant à nouveau
- de fixer un taux médical de 10% minimum compte tenu de la dégradation de son état de santé postérieurement à sa consolidation,
- de fixer un taux de 5% au titre de l'incidence professionnelle,
- de condamner la CPAM à prendre à sa charge l'intégralité des frais d'expertise,
- de condamner la CPAM aux entiers dépens de l'instance.
Au terme de ses conclusions déposées le 29 août 2022, reprises oralement à l'audience, la CPAM de l'Isère demande à la cour de confirmer le jugement en toutes ses dispositions.
En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément référé aux dernières écritures des parties pour plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.
SUR CE :
Selon les articles L.434-2 et R.434-32 du code de la sécurité sociale, le taux de l'incapacité permanente de la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle est déterminé d'après la nature de son infirmité, de son état général, de son âge, de ses facultés physiques et mentales ainsi que d'après ses aptitudes et sa qualification professionnelle, compte tenu d'un barème indicatif d'invalidité annexé au livre I de ce code.
Sur le taux médical, concernant les lésions de la main, le barème prévoit
1.2 LA MAIN
L'examen soigné et complet d'une main doit comporter d'abord un bilan des lésions anatomiques
L'addition des invalidités partielles ne suffit pas à établir l'invalidité globale de la main.
Une correction doit être effectuée grâce à une étude dynamique fonctionnelle. En effet, la main n'est pas seulement un segment de membre, lui-même additionné de segments digitaux, mais un organe global unique, organe de la préhension et du tact.
(...)
Doigts :
Les séquelles seront appréciées selon le degré de limitation de l'enroulement du doigt ( dont la pulpe normalement atteint la paume ) ou de l'extension de celui-ci et le taux d'incapacité sera déterminé selon l'importance de la raideur, selon le doigt et son caractère dominant ou non.
Le médecin chargé de l'évaluation garde lorsqu'il se trouve devant un cas dont le caractère lui paraît particulier l'entière liberté de s'écarter des chiffres du barème : il doit alors exposer clairement les raisons qui l'y ont conduit.
Mme [K] soutient qu'en matière de révision du taux il est indiqué que pour l'estimation du nouveau taux on se référera au taux fixé lors de l'examen précédent et on modifiera ce taux dans la mesure où les séquelles elles-mêmes auront évolué de façon tangible, de sorte que lorsque, comme en l'espèce, les séquelles présentées postérieurement à la consolidation sont plus importantes que celles présentées auparavant, le taux doit nécessairement être réévalué à la hausse.
Elle expose ensuite qu'elle ne présentait aucun état antérieur, qu'à la date de consolidation elle présentait une limitation des amplitudes de l'index et de l'annulaire de la main gauche avec 'une flexion enroulement incomplète avec distance pulpe paume à 3 cm ' justifiant selon elle, compte tenu de la dégradation de son état de santé postérieurement à la consolidation, un taux minimum de 10%.
Mais le taux d'incapacité permanente est apprécié au jour de la consolidation.
Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a attribué à Mme [K] au titre de la composante médicale de son incapacité un taux de 5% attribué par le médecin-conseil de la caisse et confirmé par le médecin-consultant présent à l'audience.
Sur le taux d'incidence professionnelle
Mme [K] soutient que le seul fait qu'elle a été licenciée pour inaptitude avec impossibilité de reclassement suffit à justifier l'attribution d'un tel taux.
Au terme des dispositions précitées, l'élement du taux d'incapacité concernant les aptitudes et la qualification professionnelle est un élément médico-social ; il appartient au médecin chargé de l'évaluation, lorsque les séquelles de l'accident ou de la maladie professionnelle lui paraissent devoir entraîner une modification dans la situation professionnelle de l'intéressé, ou un changement d'emploi, de bien mettre en relief ce point susceptible d'influer sur l'estimation globale.
La notion de qualification professionnelle se rapporte aux possibilités d'exercice d'une profession déterminée.
Quant aux aptitudes, il s'agit des facultés que peut avoir une victime d'accident du travail ou de maladie professionnelle de se reclasser ou de réapprendre un métier compatible avec son état de santé.
Lorsqu'un accident du travail ou une maladie professionnelle paraît avoir des répercussions particulières sur la pratique du métier, et, à plus forte raison, lorsque l'assuré ne paraît pas en mesure de reprendre son activité professionnelle antérieure, le médecin conseil peut demander, en accord avec l'intéressé, des renseignements complémentaires au médecin du travail.
La possibilité pour l'assuré de continuer à occuper son poste de travail - au besoin en se réadaptant - ou au contraire, l'obligation d'un changement d'emploi ou de profession et les facultés que peut avoir la victime de se reclasser ou de réapprendre un métier, devront être précisées en particulier du fait de dispositions de la réglementation, comme celles concernant l'aptitude médicale aux divers permis de conduire.
Pour solliciter à ce titre l'attribution d'un taux de 5%, Mme [K] soutient que l'accident a entraîné non seulement la fin de son contrat d'intérim mais surtout la fin de son cursus scolaire, l'a contrainte à revoir totalement sa carrière professionnelle et envisager une entrée précoce dans le monde professionnel.
Elle justifie qu'elle était inscrite en CAP esthétique-cosmétique-parfumerie pour l'année scolaire 2017/2018 mais n'a pu passer les examens de juin 2018 en raison de la survenance de l'accident.
Compte-tenu du caractère manuel et pratique des épreuves d'un tel examen, la preuve de cette impossibilité est suffisamment rapportée par la gravité de l'accident survenu à une droitière le 28 mai 2018 et il lui sera attribué un taux de 1% à ce titre.
La CPAM de l'Isère devra supporter les dépens de l'instance en application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant par arrêt rendu contradictoirement, publiquement, après en avoir délibéré conformément à la loi.
Confirme le jugement sauf en ce qu'il a débouté Mme [K] de sa demande d'attribution d'un taux d'incapacité permanente partielle socio-professionnelle.
Statuant à nouveau,
Fixe à 1% le taux de la composante socio-professionnelle de l'incapacité permanente partielle de Mme [H] [K] résultant de l'accident du travail dont elle a été victime le 28 mai 2018.
Condamne la CPAM aux dépens de l'entière instance.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par M. Jean-Pierre Delavenay, président et par Mme Kristina Yancheva, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier Le président