La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/11/2022 | FRANCE | N°20/02242

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Ch.secu-fiva-cdas, 04 novembre 2022, 20/02242


C3



N° RG 20/02242



N° Portalis DBVM-V-B7E-KPSD



N° Minute :





































































Notifié le :



Copie exécutoire délivrée le :





La CPAM DE HAUTE SAVOIE









AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBL

E



CHAMBRE SOCIALE - PROTECTION SOCIALE

ARRÊT DU VENDREDI 04 NOVEMBRE 2022





Appel d'une décision (N° RG 16/1597)

rendue par le pôle social du tribunal judiciaire d'ANNECY

en date du 15 juin 2020

suivant déclaration d'appel du 17 juillet 2020





APPELANTE :



La CPAM DE HAUTE SAVOIE, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cett...

C3

N° RG 20/02242

N° Portalis DBVM-V-B7E-KPSD

N° Minute :

Notifié le :

Copie exécutoire délivrée le :

La CPAM DE HAUTE SAVOIE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE SOCIALE - PROTECTION SOCIALE

ARRÊT DU VENDREDI 04 NOVEMBRE 2022

Appel d'une décision (N° RG 16/1597)

rendue par le pôle social du tribunal judiciaire d'ANNECY

en date du 15 juin 2020

suivant déclaration d'appel du 17 juillet 2020

APPELANTE :

La CPAM DE HAUTE SAVOIE, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

Service Contentieux

[Adresse 1]

[Localité 3]

comparante en la personne de Mme [F] [Z], régulièrement munie d'un pouvoir

INTIMEE :

Société [5], prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 2]

représentée par Me Fabien DUFFIT-DALLOZ, avocat au barreau de LYON substitué par Me Charlotte FOURNET, avocat au barreau de LYON

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DEBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

M. Jean-Pierre DELAVENAY, Président,

Mme Isabelle DEFARGE, Conseiller,

M. Pascal VERGUCHT, Conseiller,

Assistés lors des débats de M. Fabien OEUVRAY, Greffier,

DÉBATS :

A l'audience publique du 08 septembre 2022,

M. Jean-Pierre DELAVENAY chargé du rapport, Mme Isabelle DEFARGE, Conseiller et M. Pascal VERGUCHT, Conseiller ont entendu les représentants des parties en leurs conclusions et plaidoiries,

Et l'affaire a été mise en délibéré à la date de ce jour à laquelle l'arrêt a été rendu.

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Le 18 août 2016, la Caisse Primaire d'Assurance Maladie (CPAM) de Haute-Savoie a notifié à la Société [5] (ci-après dénommée [5]) sa décision de prendre en charge, au titre de la législation professionnelle, l'accident du travail dont a été victime Mme [N] [G], agent d'exploitation, au réfectoire Séraussaix le 14 août 2016.

Il ressort de la déclaration d'accident établie par l'employeur que : «selon les dires de la salariée, elle s'est assise sur un transat. Le crochet de fixation était mal positionné et la chaise s'est écrasée. Le doigt de notre salariée est resté coincé».

Le certificat médical initial établi le jour des faits mentionne une plaie avec perte de substance pulpe P3 main gauche.

Par courrier du 17 août 2016, l'employeur a adressé une lettre de réserves à la caisse primaire relevant notamment que «ce transat ne fait pas partie des meubles qui équipent le réfectoire».

Le 07 décembre 2016, la [5] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale d'Annecy, désormais le pôle social du tribunal judiciaire d'Annecy, d'un recours à l'encontre du rejet implicite par la commission de recours amiable de la CPAM de Haute-Savoie saisie le 17 octobre 2016 de sa contestation de la décision de prise en charge.

Par décision notifiée le 26 décembre 2016, la commission de recours amiable a expressément rejeté le recours de l'employeur.

Par jugement du 15 juin 2020, le pôle social du tribunal judiciaire d'Annecy a :

- déclaré inopposable à la [5] la décision du 18 août 2016 de la CPAM de Haute-Savoie de prendre en charge, au titre de la législation professionnelle, l'accident du travail subi par Mme [N] [G] le 14 août 2016,

- condamné la CPAM de Haute-Savoie aux dépens,

- rejeté les demandes plus amples ou contraires.

Le 17 juillet 2020, la CPAM de Haute-Savoie a interjeté appel de cette décision.

Les débats ont eu lieu à l'audience du 8 septembre 2022 et les parties avisées de la mise à disposition au greffe de la présente décision le 4 novembre 2022.

EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Selon ses conclusions parvenues au greffe le 28 juin 2022 et reprises oralement à l'audience, la caisse primaire d'assurance maladie de Haute-Savoie demande à la cour de :

- infirmer le jugement rendu par le pôle social du tribunal judiciaire d'Annecy,

- juger que la décision de prise en charge du 18 juin 2016 est opposable à la [5].

La CPAM de Haute-Savoie fait valoir qu'elle a pris en charge d'emblée, sans qu'aucune instruction ne soit nécessaire, les faits survenus le 14 août 2016 au titre de la législation professionnelle dès lors que le certificat médical initial et la déclaration d'accident du travail transmise sans réserves à ce stade par l'employeur ont permis d'établir la matérialité de l'accident du travail.

Elle relève que la déclaration d'accident du travail fait état de circonstances précises, de la présence d'un témoin et que le certificat médical initial datant du jour de l'accident corrobore les éléments notés dans cette déclaration.

Selon ses conclusions parvenues au greffe le 21 juillet 2022 et reprises oralement à l'audience, la société [5] demande à la cour de :

- constater la précipitation fautive avec laquelle la CPAM de Haute-Savoie a agi en notifiant une décision de prise en charge 48 heures seulement après la déclaration de l'accident par l'employeur,

- constater le caractère motivé de ses réserves émises dès le 17 août 2016,

En conséquence,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé inopposable à son encontre la décision de la CPAM de Haute-Savoie du 18 août 2016.

La [5] soutient que, malgré l'absence de matérialité de l'accident, la CPAM de Haute-Savoie a notifié une décision de prise en charge des faits déclarés survenus le 14 août 2016.

Elle observe que l'accident est survenu, en l'absence de témoin, par l'intermédiaire d'un objet (transat) ne lui appartenant pas, hors de l'enceinte de l'entreprise et alors que la salariée vaquait à ses occupations personnelles.

Elle estime que l'accident s'est produit en dehors du temps et du lieu du travail en ce qu'il serait survenu après le repas à l'extérieur du réfectoire et sur un transat n'appartenant pas à l'employeur.

Elle reproche à la CPAM d'avoir pris dans un délai trop court sa décision de prise en charge ne lui permettant pas d'émettre des réserves formulées dès le lendemain de la déclaration.

Pour le surplus de l'exposé des moyens des parties au soutien de leurs prétentions il est renvoyé à leurs conclusions visées ci-dessus par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIVATION

L'article R. 441-10 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction antérieure au décret n° 2019-356 du 23 avril 2019 prévoyait que la caisse dispose d'un délai de trente jours à compter de la date à laquelle elle a reçu la déclaration d'accident et le certificat médical pour statuer sur le caractère professionnel de l'accident.

L'article R. 441-11 du même code disposait que la déclaration d'accident du travail peut être assortie de réserves motivées de la part de l'employeur et, dans ce cas, la caisse envoie à l'employeur et à la victime de l'accident un questionnaire portant sur la cause et les circonstances de l'accident ou procède à une enquête.

L'accident survenu à Mme [G] le 14 août 2016 a été déclaré sans réserves par la [5] à la caisse le 16 août, laquelle a pris sa décision de prise en charge d'emblée le 18 août 2016 et l'a notifiée le même jour à l'employeur.

La [5] a émis des réserves sur le caractère professionnel de la lésion par courrier recommandé du 17 août 2016 dont il n'a pas été justifié qu'il serait parvenu à la caisse avant l'expédition le 18 août de la décision de prise en charge d'emblée.

Il ne ressort pas des dispositions des articles R. 441-10 et R. 441-11 du code de la sécurité sociale précitées dans leur rédaction applicable au litige que la caisse en l'absence de réserves de l'employeur concomitantes à la déclaration d'accident du travail devrait observer un délai minimal à l'intérieur du délai de trente jours pour statuer sur le caractère professionnel de l'accident déclaré.

En conséquence, le moyen tiré d'une précipitation fautive de la caisse n'ayant pas permis à l'employeur de formuler des réserves au soutien de la demande d'inopposabilité de la décision de prise en charge de l'accident au titre de la législation professionnelle est inopérant.

En second lieu est considéré d'après l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale comme accident du travail quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chef d'entreprise.

Il en découle une présomption d'imputabilité des lésions au travail.

La [5] entend contester la matérialité d'un accident survenu au temps et lieu du travail et spécialement en l'absence de témoin.

La [5] est la société [5] où Mme [G] est employée comme agent d'exploitation. Ses horaires de travail le jour de l'accident (14 août 2016) étaient de 8 h 40 à 11 heures puis de 12 heures à 17 heures, soit une heure de pause déjeuner.

Selon l'attestation de son directeur général adjoint (pièce [5] n° 5), l'entreprise dispose de différents réfectoires pour les pauses déjeuner de ses employés et notamment celui du télésiège du Prallu où l'accident serait survenu, ce dont elle doute.

Le certificat médical initial descriptif des lésions soit une plaie avec perte de substance de la pulpe d'un doigt de la main gauche a été établi le jour de l'accident par un médecin du cabinet médical d'Avoriaz, sur le domaine desdites remontées mécaniques.

Dès lors c'est sans renverser la charge de la preuve que la caisse primaire d'assurance maladie de Haute Savoie a pu déclarer la lésion constatée le jour même imputable au travail.

À titre surabondant la prise en charge de l'accident à titre professionnel pouvait aussi être envisagée en tant qu'accident de trajet par application des dispositions de l'article L. 411-2 du code de la sécurité sociale, considérant que l'heure dont disposait la salariée pour sa pause déjeuner en altitude ne lui laissait pas le temps d'interrompre son parcours à l'extérieur de son lieu de travail pour un motif dicté par l'intérêt personnel étranger aux nécessités essentielles de la vie courante.

Le jugement sera donc infirmé et l'accident déclaré opposable à la [5].

La [5] qui succombe supportera les dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Infirme le jugement RG n° 16/01597 rendu le 15 juin 2020 par le pôle social du tribunal judiciaire d'Annecy.

Statuant à nouveau,

Déclare opposable à la SAS [5] - société [5] la décision du 18 août 2016 de la caisse primaire d'assurance maladie de Haute-Savoie de prise en charge au titre de la législation professionnelle, de l'accident du travail subi par Mme [N] [G] le 14 août 2016 ;

Condamne la SAS [5] aux dépens y compris d'appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par M. Jean-Pierre Delavenay, président et par Mme Chrystel Rohrer, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Ch.secu-fiva-cdas
Numéro d'arrêt : 20/02242
Date de la décision : 04/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-04;20.02242 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award