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27/10/2022 | FRANCE | N°20/02215

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Ch.secu-fiva-cdas, 27 octobre 2022, 20/02215


C3



N° RG 20/02215



N° Portalis DBVM-V-B7E-KPQE



N° Minute :







































































Notifié le :



Copie exécutoire délivrée le :







La [6]





AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



CHAMBRE SOCIALE - PROTECTION SOCIALE

ARRÊT DU JEUDI 27 OCTOBRE 2022

Ch.secu-fiva-cdas





Appel d'une décision (N° RG 18/5)

rendue par le pôle social du tribunal judiciaire de VALENCE

en date du 24 avril 2020

suivant déclaration d'appel du 10 juillet 2020





APPELANTE :



La [6], prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siè...

C3

N° RG 20/02215

N° Portalis DBVM-V-B7E-KPQE

N° Minute :

Notifié le :

Copie exécutoire délivrée le :

La [6]

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE SOCIALE - PROTECTION SOCIALE

ARRÊT DU JEUDI 27 OCTOBRE 2022

Ch.secu-fiva-cdas

Appel d'une décision (N° RG 18/5)

rendue par le pôle social du tribunal judiciaire de VALENCE

en date du 24 avril 2020

suivant déclaration d'appel du 10 juillet 2020

APPELANTE :

La [6], prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 2]

comparante en la personne de Mme [C] [L], régulièrement munie d'un pouvoir

INTIMEE :

SASU [7], prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Gabriel RIGAL de la SELARL ONELAW, avocat au barreau de LYON substitué par Me Bénédicte BOUBEE, avocat au barreau de LYON

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DÉLIBÉRÉ :

M. Jean-Pierre DELAVENAY, Président,

Mme Isabelle DEFARGE, Conseiller,

Mme Magali DURAND-MULIN, Conseiller,

DÉBATS :

A l'audience publique du 1er septembre 2022

M. Jean-Pierre DELAVENAY chargé du rapport et Mme Isabelle DEFARGE, Conseiller ont entendu les représentants des parties en leurs conclusions et plaidoiries, assistés de M. Fabien OEUVRAY, Greffier, conformément aux dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, les parties ne s'y étant pas opposées ;

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 27 octobre 2022, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.

L'arrêt a été rendu le 27 octobre 2022.

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Le 15 janvier 2018, Mme [W] [V], ouvrière polyvalente depuis le 1er avril 2001 au sein de la société [7], a déposé auprès de la [5] ([6]) de la Drôme une déclaration de maladie professionnelle mentionnant une date de première constatation le 7 octobre 2017 accompagnée d'un certificat médical initial du 22 décembre 2017 relatif à une épicondylite latérale du coude droit.

Le 26 avril 2018, la [6] a notifié à la société [7] sa décision de prendre en charge, au titre du tableau 57 des maladies professionnelles la pathologie déclarée par sa salariée.

Le 21 septembre 2018, la société [7] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Valence d'un recours à l'encontre du rejet implicite de sa demande d'inopposabilité de la décision de prise en charge par la commission de recours amiable de la caisse primaire saisie le 26 juin 2018.

Lors de sa séance du 26 novembre 2018, la commission de recours amiable a maintenu la décision prise par la caisse primaire.

Par jugement du 24 avril 2020, le pôle social du tribunal judiciaire de Valence a :

- déclaré inopposable à la société [7] la décision de la [6] de prendre en charge, au titre de la législation professionnelle, la maladie de Mme [W] [V] fondée sur le certificat médical initial du 22 décembre 2017,

- condamné la [6] aux éventuels dépens à compter du 1er janvier 2019.

Le 10 juillet 2020, la [6] a interjeté appel de cette décision.

Les débats ont eu lieu à l'audience du 1er septembre 2022 et les parties avisées de la mise à disposition au greffe de la présente décision le 27 octobre 2022.

EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Selon ses conclusions transmises au greffe le 26 avril 2022 et développées oralement à l'audience, la [6] demande à la Cour de :

- juger qu'elle est recevable et bien fondée en toutes ses demandes, fins et prétentions,

Y faisant droit,

- constater que la maladie de Mme [V] a été prise en charge conformément aux exigences du tableau 57 des maladies professionnelles,

En conséquence,

- annuler le jugement du tribunal judiciaire de Valence du 24 avril 2020,

- juger que la décision de prise en charge de la maladie déclarée par Mme [V] est opposable à la société [7],

- maintenir sa décision qui a été confirmée par la commission de recours amiable,

- statuer ce que de droit sur les dépens.

La caisse a précisé à l'audience qu'elle demandait l'infirmation du jugement.

La [6] soutient que la condition relative au délai de prise en charge de 14 jours est remplie dès lors que :

- il n'est pas contesté que le 6 décembre 2017 correspond au dernier jour de travail effectif de Mme [V],

- la date de première constatation médicale à retenir est celle fixée par le médecin-conseil soit le 7 décembre 2017 (et non le 22 décembre 2017, mentionnée sur le certificat médical initial).

Selon ses conclusions transmises au greffe le 26 juillet 2022 et développées oralement à l'audience, la société [7] demande à la Cour de :

- la déclarer recevable et bien fondée en toutes ses demandes, fins et prétentions,

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 24 avril 2020 par le pôle social du tribunal judiciaire de Valence,

En tout état de cause,

- débouter la [6] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

- condamner la [6] aux entiers dépens.

La société [7] soutient que la caisse primaire ne rapporte pas la preuve que la maladie prise en charge ait été médicalement constatée à la date qu'elle a retenue comme date de première constatation médicale soit le 7 décembre 2017.

De son côté, elle estime que Mme [V] étant en arrêt depuis le 7 décembre 2017 et le certificat médical initial mentionnant le 22 décembre 2017 comme date de première constatation médicale, le délai de prise en charge de 14 jours visé au tableau est donc dépassé de sorte que la [6] était tenue de saisir le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles.

Pour le surplus de l'exposé des moyens des parties au soutien de leurs prétentions il est renvoyé à leurs conclusions visées ci-dessus par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIVATION

La désignation de la maladie déclarée par la salariée au tableau 57 B des maladies professionnelles comme son exposition aux travaux susceptibles de provoquer cette maladie ne sont pas remises en cause par l'intimée qui conteste seulement que la date du 7 décembre 2017 puisse être prise en compte comme date de première constatation de la maladie aux motifs :

- que la caisse doit être en mesure de produire au contradictoire de l'employeur les éléments médicaux sur lesquels elle se fonde ;

- qu'au cas où la date retenue de première constatation de la maladie est antérieure à celle du certificat médical, si le document ayant permis de la retenir n'a pas à être mis à la disposition de l'employeur lors de la consultation des pièces avant la décision de prise en charge, néanmoins cette information lui faisant grief, l'employeur doit être informé de la nature du document sur lequel le médecin conseil s'est fondé et cette précision doit figurer dans le dossier constitué par la caisse et mis à disposition de l'employeur avant la décision de prise en charge, sous peine de ne pas respecter le principe du contradictoire ;

- qu'en cause d'appel la caisse produit le certificat du 7 décembre 2017 sans mention des lésions et le seul avis de son médecin conseil ne suffit pas à établir la cause de ce certificat médical qui serait en relation avec la maladie professionnelle déclarée ;

- qu'ainsi la [5] ne pouvait décider de prendre en charge la maladie à titre professionnel sans saisir préalablement un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles.

Au cas d'espèce la [5] a notifié à l'employeur sa décision de prise en charge après enquête le 26 avril 2018.

La date de première constatation médicale de la maladie est celle à laquelle les premières manifestations de la maladie ont été constatées par un médecin, avant même que le diagnostic ne soit établi. Elle correspond au document médical le plus ancien attestant des débuts de la maladie, tel qu'un certificat médical ou un examen médical ou un arrêt de travail en lien avec les premiers symptômes et peut donc différer de celle du certificat médical initial constatant la lésion.

L'article D. 461-1-1 du code de la sécurité sociale issu du décret n° 2016-756 du 7 juin 2016 applicable au litige prévoit que : 'Pour l'application du dernier alinéa de l'article L. 461-2, la date de la première constatation médicale est la date à laquelle les premières manifestations de la maladie ont été constatées par un médecin avant même que le diagnostic ne soit établi. Elle est fixée par le médecin conseil'.

Dans sa version en vigueur du 1er janvier 2010 au 1er décembre 2019, l'alinéa 3 de l'article R. 441-14 du code de la sécurité sociale dispose que 'Dans les cas prévus au dernier alinéa de l'article R. 441-11 (ndr : enquête ou réserves), la caisse communique à la victime ou à ses ayants droit et à l'employeur au moins dix jours francs avant de prendre sa décision, par tout moyen permettant d'en déterminer la date de réception, l'information sur les éléments recueillis et susceptible de leur faire grief, ainsi que sur la possibilité de consulter le dossier mentionné à l'article R. 441-13".

Ledit article R. 441-13 dans sa version en vigueur du 10 juin 2016 au 1er décembre 2019 indique que le dossier constitué par la caisse primaire doit comprendre :

- la déclaration d'accident ;

- les divers certificats médicaux détenus par la caisse ;

- les constats faits par la caisse primaire ;

- les informations parvenues à la caisse de chacune des parties ;

- les éléments communiqués par la caisse régionale.

En application de ce texte, la pièce caractérisant la première constatation médicale d'une maladie professionnelle dont la date est antérieure à celle du certificat médical initial n'est pas soumise aux mêmes exigences de forme que celui-ci et n'est pas au nombre des documents constituant le dossier qui doit être mis à la disposition de la victime ou de ses ayants droit et de l'employeur.

Il doit être seulement vérifié, en cas de contestation, si les pièces du dossier constitué par la caisse ont permis à l'employeur d'être suffisamment informé sur les conditions dans lesquelles cette date a été retenue et si l'employeur a pu avoir connaissance de la date et de la nature de l'événement ayant permis de retenir une date de première constatation médicale antérieure au certificat médical initial.

En l'occurrence, la date du 7 décembre 2017 reprise au colloque médico administratif qui a été communiqué à l'employeur correspond, d'après les mentions de ce document, à un certificat d'arrêt de travail en maladie simple, non communiqué à l'employeur car couvert par le secret médical.

De plus elle est aussi le dernier jour travaillé par la salariée invoqué par la SASU [7].

En conséquence, la SASU [7] a été suffisamment informée des éléments ayant permis de déterminer comme date de première constatation de la maladie le 7 décembre 2017.

La SASU [7] ne peut donc se prévaloir au soutien de sa demande d'inopposabilité de la maladie d'un manquement de la [5] au principe de la contradiction et du non respect des dispositions des articles R. 441-13 et R. 441-14 du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction applicable au litige.

Toutes les conditions du tableau 57 étant réunies, y compris le délai de prise en charge de 14 jours (date de cessation d'exposition au risque : 6 décembre 2017 / date de première constatation médicale : 7 décembre 2017), la caisse par application des dispositions de l'alinéa 1 de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale n'avait donc pas à saisir un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles préalablement à sa décision de prise en charge de la maladie à titre professionnel du 26 avril 2018.

Le jugement sera réformé en toutes ses dispositions, y compris en ce qu'il avait condamné la caisse aux dépens de première instance et, statuant à nouveau, la maladie de Mme [W] [V] décrite au certificat médical initial du 22 décembre 2017 sera déclarée opposable à l'employeur.

Les dépens d'appel seront supportés par la SASU [7] qui succombe.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant publiquement et contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Infirme le jugement RG 18/00005 du 24 avril 2020 du pôle social du tribunal judiciaire de Valence.

Statuant à nouveau,

Déclare opposable à la SASU [7] la maladie professionnelle de Mme [W] [V] décrite au certificat médical initial du 22 décembre 2017.

Condamne la SASU [7] aux dépens de première instance et d'appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par M. Jean-Pierre Delavenay, président et par Mme Chrystel Rohrer, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GreffierLe Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Ch.secu-fiva-cdas
Numéro d'arrêt : 20/02215
Date de la décision : 27/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-27;20.02215 ?
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