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27/10/2022 | FRANCE | N°20/02175

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Ch.secu-fiva-cdas, 27 octobre 2022, 20/02175


C5



N° RG 20/02175



N° Portalis DBVM-V-B7E-KPM2



N° Minute :





































































Notifié le :



Copie exécutoire délivrée le :











AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



CHAMBRE SOCIALE - PROT

ECTION SOCIALE

ARRÊT DU JEUDI 27 OCTOBRE 2022





Appel d'une décision (N° RG 18/313)

rendue par le pôle social du tribunal judiciaire de VIENNE

en date du 10 juin 2020

suivant déclaration d'appel du 17 juillet 2020





APPELANTE :



SASU [5], prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 6]

[Adresse 6...

C5

N° RG 20/02175

N° Portalis DBVM-V-B7E-KPM2

N° Minute :

Notifié le :

Copie exécutoire délivrée le :

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE SOCIALE - PROTECTION SOCIALE

ARRÊT DU JEUDI 27 OCTOBRE 2022

Appel d'une décision (N° RG 18/313)

rendue par le pôle social du tribunal judiciaire de VIENNE

en date du 10 juin 2020

suivant déclaration d'appel du 17 juillet 2020

APPELANTE :

SASU [5], prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 6]

[Adresse 6]

[Localité 3]

représentée par Me Xavier BONTOUX de la SELARL FAYAN-ROUX, BONTOUX ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON substitué par Me Domitille CREMASCHI, avocat au barreau de LYON

INTIMEE :

La CPAM DE L'ISERE, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

Service Contentieux Général

[Adresse 1]

[Localité 2]

comparante en la personne de Mme [X] [G], régulièrement munie d'un pouvoir

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DEBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

M. Jean-Pierre DELAVENAY, Président,

Mme Isabelle DEFARGE, Conseiller,

M. Pascal VERGUCHT, Conseiller,

Assistés lors des débats de M. Fabien OEUVRAY, Greffier,

DÉBATS :

A l'audience publique du 1er septembre 2022,

M. Pascal VERGUCHT, chargé du rapport, M. Jean-Pierre DELAVENAY, Président et Mme Isabelle DEFARGE, Conseiller ont entendu les représentants des parties en leurs conclusions et plaidoirie,

Et l'affaire a été mise en délibéré à la date de ce jour à laquelle l'arrêt a été rendu.

EXPOSÉ DU LITIGE

La CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE L'ISÈRE a pris en charge par courrier du 18 avril 2018 un accident du travail de M. [N] [T] du 22 janvier 2020. La commission de recours amiable de la caisse n'a pas statué sur un recours du 8 juin 2018 formé par l'employeur de l'assuré, la SASU [5].

Par jugement en date du 10 juin 2020 dans le litige opposant la SASU [5], demanderesse, et la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE L'ISÈRE, défenderesse, le pôle social du tribunal judiciaire de Vienne a :

- rejeté l'ensemble des demandes de la SASU [5] (qui comprenaient une demande d'inopposabilité et subsidiairement d'expertise),

- déclaré opposable à la société la prise en charge de l'accident du travail,

- rappelé que la procédure est sans dépens.

Par déclaration du 17 juillet 2020, la SASU [5] a relevé appel de ce jugement en ce qu'il a rejeté l'ensemble de ses demandes et lui a déclaré opposable la prise en charge de l'accident du travail de M. [T].

Par conclusions du 21 février 2022 reprises oralement à l'audience de la cour, l'appelante demande :

- l'infirmation du jugement en ce qu'il a rejeté ses demandes et lui a déclaré la prise en charge opposable,

- que la prise en charge lui soit déclarée inopposable,

- subsidiairement la commission d'un expert médecin avec obligation de rédiger un prérapport, et renvoi de l'affaire à une audience ultérieure.

Par conclusions du 13 juillet 2022 reprises oralement à l'audience de la cour, la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE L'ISÈRE demande :

- la confirmation du jugement en tous points,

- le débouté de la demande d'expertise.

MOTIVATION

L'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale prévoit qu'est considéré comme accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise. Il en découle que l'accident subi pendant le temps et sur le lieu de travail de la victime est présumé être un accident du travail, et qu'il appartient dans ce cas à l'employeur qui conteste la décision de prise en charge par la caisse de détruire cette présomption d'imputabilité en apportant la preuve que la lésion a une cause totalement étrangère au travail. L'article 9 du code de procédure civile rappelle qu'il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

Sur l'absence invoquée d'imputabilité de l'accident au travail

1 . - L'employeur prétend qu'un fait accidentel n'est pas démontré et que la présomption d'imputabilité ne saurait être invoquée, parce que l'employé se déplaçait en marchant lors du malaise, a ressenti un malaise qui n'est pas à proprement parler un fait accidentel, qu'il n'avait aucune activité physique particulière, ne travaillait pas sur son poste, n'effectuait aucun effort physique et avait débuté son activité depuis 1h15 seulement ; la société ajoute que la caisse a pris parti en faveur du salarié en retenant ses seules réponses au questionnaire, par ailleurs inexactes, et non les informations données par courriel par l'employeur.

La caisse fait valoir en réponse que la reconnaissance de l'accident du travail dépend d'un fait accidentel, d'une lésion et d'un lien de causalité qui entraînent une présomption d'imputabilité qu'aucun élément ne remet en cause en l'espèce. Elle relève que le salarié jetait des blocs de plastique, a ressenti une douleur dans la poitrine, l'épaule et le côté gauche, a été emmené par les pompiers puis hospitalisé, qu'un syndrome coronarien aigu a été diagnostiqué et que la déclaration d'accident du travail comporte des mentions concordantes avec le certificat médical initial, l'employeur ayant eu connaissance de l'accident le jour des faits et une enquête ayant mis en exergue la réalité du fait accidentel pendant le temps de travail et sur le lieu du travail.

Il convient de revenir aux éléments versés au débat qui font ressortir que :

- la déclaration d'accident du travail du 24 janvier 2018 a décrit que, le 22 janvier 2018, à 9h15, la prise de poste étant à 8h00, sur le lieu de travail habituel, M. [T] s'est senti mal tout à coup, le torse le serrait et il avait mal dans le bras gauche avec des fourmillements, alors qu'il se déplaçait en marchant dans l'entreprise ;

- un certificat médical initial du 24 janvier 2018 a constaté un syndrome coronarien aigu et prescrit un arrêt de travail jusqu'au 31 mars 2018 ;

- un questionnaire rempli le 21 février 2018 par le salarié rapporte que le salarié était en train de jeter en les lançant des blocs plastiques de 15 à 20 kg dans un déchiqueteur, les bras tendus en hauteur, de façon brutale et à un rythme très rapide, et qu'entre 8h45 et 9h00 il a ressenti une douleur dans la poitrine, l'épaule et le dos du côté gauche, étant précisé que son travail ne présentait pas de particularité ce jour-là, qu'il n'avait pas dû faire face à un stress particulier et n'avait pas été victime de malaises similaires dans le passé ;

- un courriel de l'employeur en date du 2 mars 2018 rapporte que le salarié a dû subir la pose d'un stent, car ses artères étaient en train de se boucher d'après ce qu'il a fait savoir à l'entreprise, que ses conditions de travail étaient normales, qu'il est ignoré ce que la victime faisait juste avant le malaise, et que le levage des blocs se fait par fenwick, le salarié faisant glisser la pièce dans le déchiqueteur depuis une passerelle à la hauteur de ce dernier ;

- un rapport d'enquête de la CPAM du 5 mars 2018 relève sur la base du questionnaire et du courriel que la victime exerçait la fonction d'agent de production, a été transportée et hospitalisée à l'hôpital cardiologique de [Localité 4], et que la réalité d'un malaise survenu au temps et au lieu du travail est confirmée.

Dès lors qu'il s'agit de déterminer les circonstances de l'accident et de déterminer si le malaise s'est produit sur le temps et sur le lieu du travail, force est de constater qu'il n'est pas contestable que tel a bien été le cas.

Il est dès lors indifférent que :

- le travail du salarié ait commencé depuis environ une heure ;

- le salarié soit en train de se déplacer au sein de l'établissement ou à son poste particulier, le fait qu'il était bien en situation de travail n'étant pas contesté ;

- le travail ait consisté en la projection ou le fait de faire glisser des blocs dans une déchiqueteuse, avec ou sans effort ou stress particuliers.

Il n'y a pas lieu de considérer que la CPAM aurait retenu une version plutôt qu'une autre sur ces points qui, de toutes façons, sont sans conséquence sur la prise en charge qui dépendait de la réalisation d'une activité à l'occasion du travail, sans qu'un caractère d'anormalité soit exigé par le texte visé ci-dessus. Au surplus, l'employeur n'apporte aucun élément confirmant sa description des tâches de son employé.

Le malaise est survenu au temps et au lieu du travail, il constitue donc un fait accidentel soudain survenu à l'occasion du travail et ayant causé la lésion décrite de manière concordante par la déclaration d'accident du travail et le certificat médical initial : c'est à juste titre que la CPAM a retenu une présomption d'imputabilité de l'accident au travail.

2 . - L'employeur prétend ensuite, pour renverser cette présomption, que le malaise procédait d'une cause totalement étrangère au travail puisque son salarié, qui avait subi la pose d'un stent, présentait un état pathologique antérieur.

La CPAM réplique que la pose d'un stent ne repose que sur les seules affirmations de l'employeur qui ne verse aucun élément pour étayer son allégation.

La cour constate effectivement qu'aucun élément n'est apporté au soutien de l'allégation, si ce n'est la propre déclaration de la responsable des ressources humaines de la société dans le courriel cité du 2 mars 2018, ce qui n'est pas suffisant pour renverser la présomption d'imputabilité du malaise au travail.

Sur la demande d'expertise

L'employeur demande subsidiairement que soit ordonnée une expertise médicale fondée sur les articles 146 et 232 du Code de procédure civile et R. 142-16 du Code de la sécurité sociale, et 6-1 de la convention européenne des droits de l'homme, en s'appuyant sur les mêmes éléments de fait.

La caisse réplique qu'aucun élément ne tend à constituer un commencement de preuve qui justifierait une telle mesure d'instruction, qui par ailleurs ne saurait pallier la carence de l'employeur.

La cour considère que les arguments présentés ci-dessus ne constituent pas un commencement de preuve de nature à faire douter du lien de causalité entre le travail et la lésion de la victime à défaut d'élément probant objectif. Enfin, il n'y a pas lieu de considérer que la mesure d'expertise serait le seul moyen permettant d'imputer ou non le malaise au travail en l'absence d'accès de l'employeur au dossier médical du salarié, comme cela a été soulevé à l'audience, et l'employeur ne peut se prévaloir de sa carence dans la preuve de ses moyens de fait pour justifier sa demande d'expertise. Cette demande est donc bien infondée.

La cour estime au final qu'il convient de confirmer la décision déférée en toutes ses dispositions.

L'appelante sera condamnée aux dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant contradictoirement et publiquemet, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement du pôle social du tribunal judiciaire de Vienne en date du 10 juin 2020,

Y ajoutant,

Condamne la SASU [5] aux dépens de la procédure d'appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par M. Jean-Pierre Delavenay, président et par Mme Chrystel Rohrer, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GreffierLe Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Ch.secu-fiva-cdas
Numéro d'arrêt : 20/02175
Date de la décision : 27/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-27;20.02175 ?
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