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04/10/2022 | FRANCE | N°20/01346

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Ch. sociale -section a, 04 octobre 2022, 20/01346


C4



N° RG 20/01346



N° Portalis DBVM-V-B7E-KM6Y



N° Minute :

















































































Copie exécutoire délivrée le :





la SCP ALPAVOCAT



Me Priscillia BOTREL

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'

APPEL DE GRENOBLE



Ch. Sociale -Section A

ARRÊT DU MARDI 04 OCTOBRE 2022





Appel d'une décision (N° RG F18/00058)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de GAP

en date du 24 février 2020

suivant déclaration d'appel du 17 mars 2020





APPELANT :



Monsieur [D] [J]

né le 29 Février 1964 à [Localité 6]

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité ...

C4

N° RG 20/01346

N° Portalis DBVM-V-B7E-KM6Y

N° Minute :

Copie exécutoire délivrée le :

la SCP ALPAVOCAT

Me Priscillia BOTREL

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

Ch. Sociale -Section A

ARRÊT DU MARDI 04 OCTOBRE 2022

Appel d'une décision (N° RG F18/00058)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de GAP

en date du 24 février 2020

suivant déclaration d'appel du 17 mars 2020

APPELANT :

Monsieur [D] [J]

né le 29 Février 1964 à [Localité 6]

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 5]

représenté par Me Elisabeth LECLERC MAYET de la SCP ALPAVOCAT, avocat au barreau de HAUTES-ALPES,

INTIMEE :

S.A.R.L. DEPANNAGE AUTOS 1326, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié es qualité audit siège,

[Adresse 3]

[Localité 1]

représentée par Me Priscillia BOTREL, avocat postulant inscrit au barreau de HAUTES-ALPES,

et par Me Thierry Laurent GIRAUD de la SCP LUCCIARDI BELLEMANIERE WATRIN GIRAUD, avocat plaidant inscrit au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Valéry CHARBONNIER, Conseillère faisant fonction de Présidente,

Madame Gaëlle BARDOSSE, Conseillère,

Madame Isabelle DEFARGE, Conseillère,

DÉBATS :

Mme Valéry CHARBONNIER, Conseillère faisant fonction de Présidente, chargée du rapport, assistée de Mme Mériem CASTE-BELKADI, Greffière, en présence de M. Victor BAILLY, Juriste assistant près la Cour d'appel de GRENOBLE, a entendu les parties en leurs conclusions et observations, les parties ne s'y étant pas opposées conformément aux dispositions de l'article 805 du code de procédure civile.

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 04 octobre 2022, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.

L'arrêt a été rendu le 04 octobre 2022.

Exposé du litige :

M. [D] [J] a été engagé en qualité de dépanneur dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée à compter du 10 juillet 2015 par la SARL DEPANNAGE AUTO 1326.

A la suite de problèmes de santé, M. [J] a fait l'objet de divers arrêts de travail du 22 mars 2017 au 21 janvier 2018.

Le 22 décembre 2017, M. [J] a démissionné de l'entreprise à effet du 22 janvier 2018.

M. [J] a saisi le Conseil des prud'hommes de Gap, en date du 31 mai 2018, afin d'obtenir la condamnation de la SARL DEPANNAGE AUTO 1326 à lui payer des rappels de salaire au titre des heures supplémentaires et de la majoration d'heures de travail pour exercice de l'activité professionnelle les dimanches et au cours de la nuit, outre une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 24 février 2020, le Conseil des prud'hommes de Gap a :

- Écarté les pièces adverses numéro 13 et 14,

- Débouté M. [J] de l'ensemble de ses demandes,

- Débouté la SARL DEPANNAGE AUTO 1326 de l'ensemble de ses demandes,

- Dit que chaque partie supportera la charge de ses propres dépens,

- Débouté les parties de leurs plus amples demandes ou contraires.

La décision a été notifiée aux parties et M. [J] en a interjeté appel.

Par conclusions du 16 décembre 2020, M. [J] demande à la cour d'appel de :

- Dire et juger sa demande recevable et le dire bien fondé en son appel et par conséquent :

- Réformer le jugement entrepris en ce qu'il l'a débouté de ses demandes au titre des heures supplémentaires, majorations de dimanche, majorations d'heures de nuit et indemnité au titre du travail dissimulé, et jugeant à nouveau:

- Condamner la SARL DEPANNAGE AUTOS 1326 à lui régler :

Des heures supplémentaires d'un montant de 389,28 euros bruts, outre 38,92 euros bruts à titre de congés payés correspondants,

Des majorations de dimanche d'un montant de 449,80 euros bruts, outre 44,98 euros bruts à titre de congés payés,

Des majorations d'heures de nuit d'un montant de 72,66 euros bruts, outre 7,26 euros bruts à titre de congés payés,

Le paiement d'une indemnité au titre du travail dissimulé d'un montant de 12 594 euros,

A titre subsidiaire, avant-dire droit, condamner l'employeur à communiquer au concluant, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la notification de la décision :

Toutes les factures d'assistance-dépannage correspondants aux jours travaillés par lui sur toute la période de son emploi, ainsi qu'aux jours d'astreinte,

Le livre journal des ventes de prestations par l'entreprise sur les années 2015 à 2017,

Les relevés des appels entrants du téléphone portable dont le numéro est [XXXXXXXX02] qui avait été attribué au salarié du temps de son emploi et sur lequel il recevait directement des demandes de dépannages,

Réformer la décision entreprise en ce qu'elle a débouté l'appelant de sa demande de communication d'une attestation pôle emploi en bonne et due forme et, jugeant de nouveau, condamner la SARL DEPANNAGE AUTOS 1326 à lui délivrer une attestation pôle emploi, portant son caché et signée, sous astreinte de 20 euros par jour à compter de la notification de la décision à intervenir,

Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté des débats les pièces numéro 13 et 14 de l'intimé.

En tout état de cause

- Débouter l'intimée de ses demandes incidentes au titre d'un paiement d'un indu, d'une procédure prétendument abusive et au titre de l'article 700 du Code de procédure civile :

- Condamner la SARL DEPANNAGE AUTOS 1326 à lui payer :

La somme de 2000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile de première instance, réformant en cela la décision de première instance sur ce point,

La somme de 2000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile en appel,

- Condamner la SARL DEPANNAGE AUTOS 1326 aux entiers dépens.

Par conclusions en réponse du 19 septembre 2020, la SARL DEPANNAGE AUTOS 1326 demande à la cour d'appel de :

Confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a débouté le salarié de toutes ses demandes,

L'infirmer pour le surplus,

Recevoir l'appel incident de l'employeur,

Condamner M. [J] à lui payer les sommes de :

1 463,71 euros brut au titre de l'indu,

3 000 euros au titre de la procédure abusive,

4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamner M. [J] en tous dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 10 mai 2022.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère à la décision attaquée et aux dernières conclusions déposées.

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur la demande au titre des heures supplémentaires :

Moyens des parties :

Le salarié fait valoir que l'employeur lui est redevable d'heures supplémentaires sur la période d'aménagement du temps de travail entre juillet 2015 et juillet 2016.

Il soutient que sur cette période, il a, à de nombreuses reprises, travaillé plus de 46 heures par semaine. Or, la convention collective prévoit que lorsqu'une journée de travail dépasse 10 heures ou lorsque le salarié a travaillé plus de 46 heures au cours d'une semaine, les heures de dépassement doivent être payées avec une majoration de 25% s'ajoutant au salaire lissé du mois considéré.

De plus, le salarié allègue que l'employeur ne rapporte pas la preuve de l'absence d'heures supplémentaires et que le document produit par l'employeur ne précise pas les horaires des jours travaillés. En outre, l'employeur ne peut valablement prétendre que son salarié réalisait des horaires de bureau (8h-12h / 14h-18h) puisque ce dernier avait accepté de réaliser des astreintes en dehors de son temps de travail.

M. [J] ajoute que sur les fiches horaires qu'il a signées figurent le nombre et les dates des astreintes. En revanche, aucune fiche ne fait état de la moindre heure de travail effectif durant les astreintes, ni de nuit, ni le dimanche, heures qu'il a pourtant réalisées selon divers témoignages.

L'employeur soutient que jusqu'à l'introduction de la présente procédure, aucune demande en paiement des heures supplémentaires, aujourd'hui réclamées, n'avait été portée à sa connaissance ni fait l'objet de la moindre réclamation.

De plus, l'employeur le salarié n'a pas contesté immédiatement le reçu pour solde de tout compte qui lui a été remis le 22 janvier 2018 tandis que la contestation a eu lieu le 31 mai 2018.

Ainsi, l'employeur déclare qu'aucune heure supplémentaire n'a été effectuée par le salarié sur la période du 1er juillet 2015 au 30 juin 2016. Il ajoute que le salarié ne produit que son agenda à l'appui de sa demande.

L'employeur fait valoir qu'il verse aux débats l'intégralité des feuilles de temps de travail sur la période considérée signées par le salarié à la fin de chaque mois et que l'agenda du salarié ne saurait avoir la même force probante que des feuilles de temps remplies et signées par le salarié. Le salarié se constituant ainsi une preuve à lui-même.

En outre, l'employeur fait valoir que les heures supplémentaires ne peuvent être effectuées qu'à la demande ou après autorisation de l'employeur et ne peuvent résulter en tout état de cause de la seule initiative du salarié.

Enfin, l'employeur soutient qu'il avait intérêt à effectuer lui-même les dépannages tardifs, nocturnes ou dominicaux, car dans l'hypothèse inverse, ces dépannages auraient entraîné un coût de revient important uniquement en raison des charges de salaire.

Sur ce,

Aux termes de l'article L. 3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés. Selon l'article L. 3171-3 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, l'employeur tient à la disposition de l'inspecteur ou du contrôleur du travail les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie réglementaire.

Enfin, selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

A l'appui de sa demande, M. [J] produit des photocopies de plannings figurant dans son agenda personnel pour les années 2015 et 2016 mentionnant de manière manuscrite pour chaque jour le nombre d'heures travaillées. Ces éléments sont suffisamment précis quant aux heures non rémunérées alléguées par le salarié pour permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement.

La SARL DEPANNAGE AUTO 1326, en réponse, verse aux débats des feuilles d'heures travaillées pour les années 2015, 2016 et 2017, portant la signature de la direction et celle du salarié. Ces feuilles font mention d'un horaire de travail de 8h00 à 12h00 et de 14h00 à 18h00, soit 8 heures de travail par jour, et indiquent, pour chaque jour travaillé, la présence du salarié (« P ») ou la raison de son absence (« CP » ou « RTT »), outre les jours où des astreintes ont été effectuées.

Il ressort de ces éléments produits par l'employeur que le salarié a effectué des horaires de travail identiques chaque jour, et qu'ainsi sa durée de travail ne variait pas d'un jour sur l'autre.

Le salarié, ne conteste pas avoir signé ces feuilles d'heures et ne soutient ni ne démontre qu'il aurait reçu l'ordre de signer ces feuilles contre son gré ou avant qu'elles ne soient remplies. Les seuls horaires de travail mentionnés dans son agenda personnel et non corroborés par des éléments extérieurs ne permettent pas de contredire les feuillets d'horaires signés par le salarié lui-même.

La cour d'appel n'ayant pas à suppléer la carence probatoire du salarié, il n'y a pas lieu d'ordonner à la SARL DEPANNAGE AUTO 1326 de produire les factures d'assistance-dépannage correspondant aux jours travaillés, le livre journal des ventes de prestations sur les années 2015 à 2016 et les relevés des appels du téléphone portable attribué au salarié du temps de son emploi.

En conséquence, sans qu'il soit nécessaire de statuer sur la recevabilité des pièces 13 et 14 produites par la SARL DEPANNAGE AUTO 1326, il y a lieu de retenir que l'employeur, tenu de décompter le temps de travail du salarié, démontre par la production de ces feuilles d'heures, la réalité des horaires effectués par le salarié.

La demande de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires est rejetée et le jugement entrepris confirmé de ce chef.

Sur la majoration des heures de nuit et les heures travaillées les dimanches :

Moyens des parties :

Le salarié fait valoir que son contrat stipule qu'est considéré comme travail de nuit, tout travail effectué dans la période de 21 heures à 6 heures du matin. Or, le salarié soutient avoir effectué un certain nombre d'heures de nuit de sorte que l'employeur lui était redevable d'une majoration à ce titre. Or, l'employeur ne lui a jamais versé une quelconque majoration.

De plus, le salarié fait valoir que la fourniture par l'employeur de fiches de temps ne faisant apparaître aucune heure de nuit n'est pas un élément suffisant pour le débouter de sa demande.

Le salarié soutient également avoir travaillé plusieurs dimanches et que le contrat de travail prévoyait une majoration pour les heures travaillés un dimanche.

L'employeur soutient que l'examen des feuilles de présence montre que le salarié ne travaillait à aucune des dates indiquées. Il ajoute que le salarié ne rapporte pas la preuve de l'exigence par l'employeur que les fiches horaires portent les temps contractuels et non les heures effectivement réalisées.

Sur ce,

Aux termes de l'article 8 du contrat de travail du 10 juillet 2015 (« Interventions de nuit »), il est prévu que « dans le cadre de ses fonctions (le salarié) peut être amené à travailler exceptionnellement la nuit. Est considéré comme travail de nuit, tout travail effectué dans la période de 21 heures à 6 heures du matin. Pour chaque heure travaillée de nuit sera versée une majoration de 50 % du salaire horaire brut de base, conformément à la convention collective ».

En outre, aux termes de l'article 9 du même contrat (« Jour férié et dimanche »), il est stipulé que « dans le cadre de ses fonctions (le salarié) peut être amené à travailler exceptionnellement certains jours fériés et certains dimanches. Pour chaque heure travaillée les dimanches, une majoration de 100 % du salaire horaire brut de base sera versée, conformément à la convention collective ».

Enfin, aux termes de l'article 10 (« Astreintes »), il est prévu qu'en « dehors de ses horaires de travail, (le salarié) sera, sans être à la disposition permanente et immédiate de l'employeur, amené à accomplir, à la demande de la SARL Dépannage Auto 1326, des périodes d'astreintes de jour comme de nuit, conformément à l'article 1.10 e) 1 de la convention collective de l'automobile ».

Pour établir qu'il a effectué des interventions la nuit et qu'il a été amené à travailler certains dimanches, M. [J] verse aux débats des photocopies de ses agendas des années 2015, 2016 et 2017 indiquant les horaires de début et de fin de journée de travail, ainsi que les horaires de pause, outre les mentions des interventions effectuées.

Ces éléments sont suffisamment précis pour permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre.

La SARL DEPANNAGE AUTO 1326 verse aux débats les feuilles d'heures de travail pour les années 2015 à 2017, signées par la direction et par le salarié.

Comme la cour l'a relevé précédemment, le salarié ne conteste pas avoir signé ces feuilles d'heures et ne soutient ni ne démontre qu'il aurait reçu l'ordre de signer ces feuilles contre son gré.

S'il est constant que le travail de nuit et le dimanche a été explicitement prévu par le contrat de travail, il doit être relevé que les feuilles d'heures produites par l'employeur ne font mention d'aucune heure travaillée la nuit ou le dimanche, ni d'aucune heure travaillée durant les périodes d'astreinte indiquées sur ces fiches, ce qui est confirmé par l'examen des bulletins de paie produits aux débats.

En conséquence, il y a lieu de retenir que l'employeur, tenu de décompter le temps de travail du salarié, démontre, par la production de ces feuilles d'heures, que le salarié n'a pas travaillé de nuit ou le dimanche, et qu'ainsi aucune majoration au titre des heures de nuit et le dimanche n'est due au salarié.

La demande de rappel de salaire au titre des heures de nuit et effectuées le dimanche est rejetée et le jugement entrepris confirmé de ce chef.

Sur le travail dissimulé :

Moyens des parties :

Le salarié soutient que son employeur ne lui a pas réglé les sommes qui lui étaient dues au titre d'heures supplémentaires, de majoration d'heures de nuit ou de dimanche. Ainsi, le salarié prétend que les heures réglées ne correspondent pas au travail effectué.

Il ajoute que la demande de l'employeur de signer des fiches horaires correspondant aux horaires contractuels et seulement à ceux-ci, sans noter la moindre heure de travail effectif pendant les périodes d'astreintes, révèle une volonté de l'employeur de ne pas régler le temps effectivement réalisé par le salarié et caractérise une intention de travail dissimulé.

L'employeur soutient qu'il ne s'est pas rendu coupable de travail dissimulé. En effet, il fait valoir que les bulletins de salaire mentionnent exactement le montant des heures travaillées par le salarié.

Sur ce,

Il résulte des dispositions de l'article L. 8221-5 du code du travail qu'est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :

1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;

2° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 3243-2, relatif à la délivrance d'un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;

3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales.

L'article L. 8223-1 du code du travail dispose qu'en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire. Pour allouer une indemnité pour travail dissimulé, les juges du fond doivent rechercher le caractère intentionnel de la dissimulation. Mais ce caractère intentionnel ne peut résulter du seul défaut de mention des heures supplémentaires sur les bulletins de paie.

Cette indemnité forfaitaire n'est exigible qu'en cas de rupture de la relation de travail. Elle est due quelle que soit la qualification de la rupture, y compris en cas de rupture d'un commun accord

Cette indemnité est cumulable avec les indemnités de toute nature auxquelles le salarié a droit en cas de rupture du contrat de travail, y compris l'indemnité légale ou conventionnelle de licenciement ou l'indemnité de mise à la retraite.

Il a été précédemment retenu qu'aucun rappel de salaire n'était dû au salarié au titre des heures supplémentaires et au titre de la majoration pour les heures effectuées la nuit et le dimanche.

En conséquence, il ne peut être valablement soutenu par le salarié que son employeur aurait intentionnellement mentionné sur les bulletins de paie de M. [J] un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli par lui.

La demande d'indemnité forfaitaire au titre du travail dissimulé formulée par M. [J] n'est pas fondée.

Dès lors, il y a lieu de rejeter cette demande, par confirmation du jugement déféré de ce chef.

Sur la demande reconventionnelle en restitution de l'indu versé par l'employeur au titre des heures supplémentaires :

Moyens des parties :

L'employeur soutient qu'après vérification, il s'est aperçu que le salarié n'avait en réalité effectué aucune heure supplémentaire de sorte qu'aucun paiement ne lui était dû à ce titre.

Le salarié fait valoir qu'il est impensable qu'un employeur demande à son comptable de faire figurer sur un bulletin de paie des heures supplémentaires si aucune heure supplémentaire n'a jamais été effectuée.

Il ajoute qu'il est également inimaginable que le comptable n'ait pas fait valider le bulletin de paie par l'employeur lors de son établissement, comme le font tous les comptables.

De plus, le salarié déclare que la SARL DEPANNAGE AUTOS n'embauche qu'un seul et unique salarié de sorte que l'employeur savait que son salarié effectuait des heures supplémentaires.

Ainsi, le salarié soutient que c'est sciemment que l'employeur a réglé des heures supplémentaires, dont il savait qu'elles avaient été effectuées ; s'il a réglé des heures supplémentaires alors que les décomptes qu'il avait demandé à son salarié de signer n'en faisaient apparaître aucune, c'est qu'il savait que ces fiches de temps ne correspondaient pas à la réalité.

Sur ce,

Aux termes de l'article 1302 du code civil, tout paiement suppose une dette ; ce qui a été reçu sans être dû est sujet à restitution. La restitution n'est pas admise à l'égard des obligations naturelles qui ont été volontairement acquittées.

Aux termes de l'article 1302-1 du code civil, celui qui reçoit pas erreur ou sciemment ce qui ne lui est pas dû doit le restituer à celui de qui l'a indûment reçu

Au cas d'espèce, il est constant que dans son courrier de démission du 22 décembre 2017, M. [J] a informé la SARL DEPANNAGE AUTO 1326 qu'elle lui était encore redevable de « 59 heures supplémentaires non récupérées et 4 jours travaillés » effectués durant l'année 2016 et 2017 jusqu'à son arrêt maladie du 22 mars 2017, et que la SARL DEPANNAGE AUTO 1326 a versé au salarié la somme de 1020,79 euros au titre des 59 heures supplémentaires alléguées par M. [J], comme en fait mention le reçu pour solde de tout compte produit par la SARL DEPANNAGE AUTO 1326.

Pour démontrer qu'elle a versé par erreur cette somme, la SARL DEPANNAGE AUTO 1326 produit des feuilles d'heures travaillées pour l'année 2016 et pour les dix premières semaines de l'année 2017, desquelles il ressort que le salarié n'a pas effectué d'heures supplémentaires durant cette période.

Toutefois, la SARL DEPANNAGE AUTO 1326 ne verse aux débats aucun élément permettant de constater qu'elle aurait effectivement versé par erreur cette somme, alors qu'il ressort de ses écritures qu'elle a réglé la somme demandée par le salarié dans son courrier de démission du 22 décembre 2017 en transmettant les informations à son comptable, ce dont il résulte qu'elle s'est volontairement acquitté du paiement de cette somme en parfaite connaissance de cause.

La demande de restitution est dès lors infondée et la SARL DEPANNAGE AUTO 1326 doit en être déboutée, par confirmation du jugement déféré de ce chef.

Sur les demandes accessoires :

Selon l'article 32-1 du code de procédure civile, celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10 000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés.

La SARL DEPANNAGE AUTO 1326 ne caractérise aucune faute de M. [J] dans l'exercice de son droit d'appel.

En conséquence, il y a lieu de débouter la SARL DEPANNAGE AUTO 1326 de sa de demande de condamnation de M. [J] à lui payer une amende civile d'un montant de 3000 euros.

Le jugement dont appel est confirmé de ce chef.

Le jugement entrepris est confirmé sur les frais irrépétibles et les dépens.

M. [J], partie perdante, est condamné aux dépens d'appel.

Il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR, statuant publiquement et contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

DIT qu'il n'y a pas lieu de se prononcer sur la demande de rejet des pièces 13 et 14 produites par M. [J],

REJETTE la demande d'injonction à la SARL DEPANNAGE AUTO 1326 de produire les factures d'assistance-dépannage correspondant aux jours travaillés, le livre journal des ventes de prestations sur les années 2015 à 2016 et les relevés des appels du téléphone portable attribué au salarié du temps de son emploi,

CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

DEBOUTE les parties du surplus de leurs demandes,

DIT qu'il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

CONDAMNE M. [J] aux dépens d'appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Valéry CHARBONNIER, Conseillère faisant fonction de Présidente, et par Madame Mériem CASTE-BELKADI, Greffière, à qui la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.

La Greffière, La Conseillère faisant fonction de Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Ch. sociale -section a
Numéro d'arrêt : 20/01346
Date de la décision : 04/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-04;20.01346 ?
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