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20/09/2022 | FRANCE | N°20/00932

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Ch. sociale -section a, 20 septembre 2022, 20/00932


C1



N° RG 20/00932



N° Portalis DBVM-V-B7E-KL4X



N° Minute :

















































































Copie exécutoire délivrée le :





la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE - CHAMBERY



Me Françoise BALDASSARRE



SELARL DAUPHIN

ET MIHAJLOVIC

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



Ch. Sociale -Section A

ARRÊT DU MARDI 20 SEPTEMBRE 2022





Appel d'une décision (N° RG F18/00117)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VIENNE

en date du 12 février 2020

suivant déclaration d'appel du 24 Février 2020



APPELANTE :



SAS ASC ASSISTANCE SECURITE CONSEIL, agi...

C1

N° RG 20/00932

N° Portalis DBVM-V-B7E-KL4X

N° Minute :

Copie exécutoire délivrée le :

la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE - CHAMBERY

Me Françoise BALDASSARRE

SELARL DAUPHIN ET MIHAJLOVIC

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

Ch. Sociale -Section A

ARRÊT DU MARDI 20 SEPTEMBRE 2022

Appel d'une décision (N° RG F18/00117)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VIENNE

en date du 12 février 2020

suivant déclaration d'appel du 24 Février 2020

APPELANTE :

SAS ASC ASSISTANCE SECURITE CONSEIL, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice, domiciliés en cette qualité audit siège,

[Adresse 3]

[Localité 2]

représentée par Me Alexis GRIMAUD de la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE - CHAMBERY, avocat postulant inscrit au barreau de GRENOBLE,

et par Me Pascal LAVISSE de la SCP LAVISSE BOUAMRIRENE GAFTONIUC, avocat plaidant inscxrit au barreau d'ORLEANS,

INTIMEES :

Madame [W] [T]

née le 04 Novembre 1961 à PORTUGAL

de nationalité Française

[Adresse 8]

[Localité 1]

représentée par Me Françoise BALDASSARRE, avocat au barreau de GRENOBLE,

S.A.R.L. GORON GSL, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège,

[Adresse 5]

[Localité 4]

représentée par Me Josette DAUPHIN de la SELARL DAUPHIN ET MIHAJLOVIC, avocat postulant inscrit au barreau de GRENOBLE,

et par Me Géraldine MOUGENOT, avocat plaidant inscrit au barreau de MACON/CHAROLLES,

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Valéry CHARBONNIER, Conseillère faisant fonction de Présidente,

Madame Gaëlle BARDOSSE, Conseillère,

Madame Magali DURAND-MULIN, Conseillère,

DÉBATS :

A l'audience publique du 31 Mai 2022,

Mme Gaëlle BARDOSSE, Conseillère chargée du rapport, assistée de Mme Mériem CASTE-BELKADI, Greffière, a entendu les parties en leurs conclusions et plaidoiries, les parties ne s'y étant pas opposées conformément aux dispositions de l'article 805 du code de procédure civile.

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 20 septembre 2022, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.

L'arrêt a été rendu le 20 Septembre 2022.

Exposé du litige :

Mme [T] a été engagée en qualité d'agent de surveillance dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée à compter du 25 avril 2022 par la Société AUTAN SECURITE.

Son contrat a été transféré à NOV'AP ' HAP SECURITE, puis à SAMSIC SECURITE.

Le 22 janvier 2007, à la suite d'un nouveau transfert de son contrat de travail, Mme [T] a signé un contrat à durée indéterminée en qualité d'agent de sécurité avec la SAS ASC ASSISTANCE SECURITE CONSEIL(ASC) et a été affectée exclusivement sur les sites de la Société PRYSMIAN situés à [Localité 7] et à [Localité 6].

La société PRYSMAN a décidé de confier le contrat de surveillance à la SARL GORON GSL. Mme [T] n'a pas signé le contrat de travail proposé par la SARL GORON GSL.

La SAS ASC ASSISTANCE SECURITE CONSEIL a affecté Mme [T], par courrier du 15 juin 2017, à un poste situé sur la commune de [Localité 9] dans le Loiret. Mme [T] a refusé le poste.

Le 11 juillet 2017, elle a été convoquée par la SAS ASC ASSISTANCE SECURITE CONSEIL à un entretien préalable au licenciement au 25 juillet 2017.

Le 31 juillet 2017, Mme [T] a été licenciée pour faute grave.

Mme [T] a saisi le conseil des prud'hommes de Vienne, en date du 28 mai 2018, aux fins de contester le bien-fondé de son licenciement et obtenir les indemnités afférentes.

Par jugement du 12 février 2020, le conseil des prud'hommes de Vienne a :

Dit et jugé que Mme [T] n'a jamais été salariée de la SARL GORON GSL.

Mis hors de cause la SARL GORON GSL.

Dit et jugé que les demandes de Mme [T] à l'encontre de la SAS ASC ASSISTANCE SECURITE CONSEIL sont recevables et bien-fondées.

Dit et jugé que le licenciement de Mme [T] est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Fixé le salaire mensuel moyen brut de Mme [T] à la somme de 2 186 euros.

Condamné le SAS ASC ASSISTANCE SECURITE CONSEIL à verser à Mme [T] les sommes suivantes:

8 312 euros au titre de l'indemnité de licenciement

4 372 euros au titre de l'indemnité de préavis

437,20 euros au titre des congés payés afférents

13 200 à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

1 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile

Condamné Mme [T] à verser à la SARL GORON GSL la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Rappelé que les intérêts courent de plein droit au taux légal à compter de la saisine du Conseil de Prud'hommes, en ce qui concerne les créances de nature salariale et à compter du prononcé de la présente décision pour les autres sommes allouées.

Ordonné l'exécution provisoire totale au titre de l'article 515 du Code de procédure civile.

Débouté la SAS ASC ASSISTANCE SECURITE CONSEIL de ses demandes de dommages et intérêts pour procédure abusive et article 700 du Code de procédure civile.

Débouté la SARL GORON GSL de sa demande au titre de l'article 31-1 du Code de procédure civile.

Condamné la SAS ASC ASSISTANCE SECURITE CONSEIL aux entiers dépens de l'instance et aux éventuels frais d'exécution forcée du jugement à intervenir.

La décision a été notifiée aux parties et la SAS ASC ASSISTANCE SECURITE CONSEIL en a interjeté appel.

Par conclusions du 30 octobre 2020, la SAS ASC ASSISTANCE SECURITE CONSEIL demande à la cour d'appel de :

Dire et juger la société ASC ASSISTANCE SECURITE CONSEIL recevable et bien fondée en son appel ;

Dire et juger la société ASC ASSISTANCE SECURITE CONSEIL recevable et bien fondée en toutes ses demandes, fins et conclusions,

Dire et juger Mme [T] irrecevable et, en tout état de cause, mal fondée en son appel incident et en toutes ses demandes, fins et conclusions,

Ordonner le rejet des débats de la pièce C4 produite par Mme [T], en raison de son caractère d'ordre public strictement confidentiel entre avocats,

Infirmer le jugement prononcé par le Conseil de prud'hommes de Vienne, en date du 12 février 2020, en ce qu'il a :

Dit et jugé que Mme [T] n'a jamais été salariée de la SARL GORON GSL,

Mis hors de cause la SARL GORON GSL,

Dit et jugé que les demandes de Mme [T] à l'encontre de la SAS ASC ASSISTANCE SECURITE CONSEIL sont recevables et bien fondées,

Dit et jugé que le licenciement de Mme [T] est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

Fixé le salaire mensuel moyen brut de Mme [T] à la somme de 2 186 euros,

Condamné la SAS ASC à verser à Mme [T] les sommes de :

o 8 312 euros au titre de l'indemnité de licenciement,

o 4 372 euros au titre de l'indemnité de préavis,

o 437,20 euros au titre des congés payés afférents,

o 13 200 euros au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

o 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Rappelé que les intérêts courent de plein droit au taux légal à compter de la saisine du Conseil des Prud'hommes, en ce qui concerne les créances de nature salariale et à compter du prononcé de la présente décision pour les autres sommes allouées,

Ordonné l'exécution provisoire totale au titre de l'article 515 du code de procédure civile,

Débouté la SAS ASC de ses demandes de dommages et intérêts pour procédure abusive et article 700 du code de procédure civile,

Condamné la SAS ASC aux entiers dépens de l'instance et aux frais éventuels d'exécution forcée du jugement à intervenir.

Sur le transfert du contrat de travail

Constater le refus injustifié par la salariée du transfert de son contrat de travail à la société GORON GSL,

Dire et juger que la société ASC ASSISTANCE SECURITE CONSEIL ne saurait en aucun cas être tenue responsable de l'absence de transfert du contrat de travail de Mme [T] à la société GORON-GSL,

Débouter la société GORON-GSL de sa demande tendant à voir confirmer sa mise hors de cause,

Sur le licenciement

Au principal

Constater le caractère imprécis et confus de la requête déposée par Mme [T] relative au licenciement,

Constater le bien fondé du licenciement pour faute grave notifié le 31 juillet 2017 par la société ASC ASSISTANCE SECURITE CONSEIL à l'encontre de Mme [T],

Dire et juger irrecevables ou à tout le moins mal fondées les demandes formulées par Mme [T],

Débouter Mme [T] de l'intégralité de ses demandes dirigées contre la société ASC ASSISTANCE SECURITE CONSEIL,

A titre subsidiaire (si requalification du licenciement pour faute grave en licenciement pour cause réelle et sérieuse)

Fixer à la somme de 1 823,32 euros le salaire mensuel moyen de Mme [T],

Limiter à la somme de :

- 6 837 euros la demande formulée par Mme [T] au titre de l'indemnité de licenciement,

- 3 646,64 euros la demande formulée par Mme [T] au titre du préavis,

- 364,66 euros la demande formulée par Mme [T] au titre des congés payés afférant au préavis,

- Débouter Mme [T] de sa demande formulée au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

A titre infiniment subsidiaire (si licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse)

Fixer à la somme de 1 823,32 euros le salaire mensuel moyen de Mme [T],

- Limiter à la somme de :

- 6 837 euros la demande formulée par Mme [T] au titre de l'indemnité de licenciement,

- 3 646,64 euros la demande formulée par Mme [T] au titre du préavis,

- 364,66 euros la demande formulée par Mme [T] au titre des congés payés afférant au préavis,

- 10 939,92 euros la demande formulée par Mme [T] au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

En toute hypothèse

Constater que l'appel formé par la société ASC SECUITE CONSEIL n'est ni abusif ni dilatoire,

Débouter en conséquence Mme [T] de sa demande dommages et intérêts dirigées contre la société ASC SECURITE CONSEIL au titre d'un appel prétendument abusif et dilatoire,

Condamner Mme [T] à verser à la société ASC ASSISTANCE SECURITE CONSEIL une somme de 1 000 euros au titre des dommages et intérêts pour procédure abusive,

Condamner Mme [T] à verser à la société ASC ASSISTANCE SECURITE CONSEIL la somme de 4 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel,

Condamner Mme [T] aux entiers dépens de première instance et d'appel,

Débouter Mme [T] et la société GORON-GSL de toutes demandes plus amples ou contraire dirigées contre la société ASC ASSISTANCE SECURITE CONSEIL,

Par conclusions du 29 avril 2022, Mme [T] demande à la cour d'appel de :

Débouter la société ASC SECURITE de l'intégralité de ses demandes.

Condamner la société ASC SECURITE à payer à Mme [T] les sommes suivantes:

8 312 euros au titre de l'indemnité de licenciement

4 414 euros au titre de l'indemnité de préavis

441,40 euros au titre des congés payés sur préavis

21 244,71 euros au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

5 000 euros au titre des dommages et intérêts pour appel abusif

4 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, en première instance et appel

Ordonner la capitalisation des intérêts en application de l'article 1154 du Code civil passé le délai d'un an à compter du jugement du 12 février 2020

Condamner la société ASC SECURITE aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Par conclusions du 17 août 2020, la société GORON GSL demande à la cour d'appel de :

A titre principal

Confirmer le jugement du 12 février 2020

Mettre hors de cause la société GORON-GSL.

A titre incident,

Dire et juger l'appel incident de la société GORON-GSL recevable et bien fondé,

Condamner Mme [T] à 1 000 euros au titre de l'article 32-1 du Code de procédure civile ;

Condamner Mme [T] à 2 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile d'appel.

En tout état de cause,

Constater qu'aucune prétention n'est formulée à l'encontre de GORON-GSL.

A titre subsidiaire, en cas de réformation du jugement du 12 février 2020 sur la mise hors de cause de GORON-GLS ;

Dire et juger le licenciement pour faute grave bien-fondé

Débouter Mme [T] de l'intégralité de ses demandes

A titre encore plus subsidiaire

Requalifier le licenciement pour faute grave en licenciement pour cause réelle et sérieuse,

Débouter Mme [T] de sa demande à titre de dommages et intérêts fondée sur l'article L.1235-3 ancien du code du travail,

Fixer le salaire moyen de Mme [T] à la somme de 1823,32 euros bruts,

Limiter, par conséquent, les montants des indemnités de rupture aux sommes de :

o 6 837 euros nets au titre de I 'indemnité de licenciement,

o 3 646,64 euros bruts au titre de I 'indemnité compensatrice de préavis

o 364,66 euros bruts au titre des congés payés afférents.

A titre infiniment subsidiaire,

Fixer le salaire moyen de Mme [T] à la somme de 1 823,32 euros bruts,

Limiter, par conséquent, les montants des indemnités de rupture aux sommes de:

o 6 837 euros nets au titre de l'indemnité de licenciement,

o 3 646,64 euros bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis

o 364,66 euros bruts au titre des congés payés afférents.

Limiter le montant des dommages et intérêts alloués à Mme [T] au titre de l'article L.1235-3 du code du travail ancien, au strict minimum légal, soit six mois de salaire, soit 10 939,92 euros.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 17 mai 2022.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère à la décision attaquée et aux dernières conclusions déposées.

SUR QUOI :

Sur la recevabilité de la requête de Mme [T] :

Moyens des parties :

La société ASC SECURITE CONSEIL fait valoir que les demandes de Mme [T] sont irrecevables et mal fondées. Elle expose que :

Mme [T] a introduit une procédure prud'homale sur la base d'une requête imprécise et confuse concernant notamment l'avenant au contrat et le licenciement pour faute grave de cette dernière. Or, la requête fixe les limites du litige.

Le Conseil de prud'hommes s'est abstenu de se prononcer et de statuer sur les incohérences et confusions contenues dans la requête initiale et dans les conclusions de Mme [T], lesquelles rendent pourtant les demandes de cette dernière irrecevables et mal fondées.

Mme [T] impute à la société ASC SECURITE CONSEIL l'avenant du 1er juillet 2017 qui lui a été proposé par la société GORON-GLS. Cette société ne pouvait conditionner le transfert du contrat de travail à la signature d'un avenant comportant des modifications dudit contrat.

La faute grave invoquée à l'appui du licenciement n'est pas le refus de Mme [T] de signer l'avenant en question avec la société Goron mais son refus de la nouvelle affectation proposée par la société ASC qui ne disposait d'aucun poste dans le département.

Mme [T] confond les termes d'avenant et d'accord et confond ses relations avec la société GORON et la société ASC et ne formule aucune demande contre la société GORON alors qu'en première instance elle formulait des griefs à son égard

Madame [T], qui fait grief à ASC de ne pas lui avoir proposé de modification de contrat, invoque de manière erronée les dispositions de l'article L 1222-6 du code du travail, applicables aux propositions de modification du contrat de travail pour motif économique et le Conseil des prud'hommes ne pouvait juger que ce texte s'appliquait au cas d'espèce

Aucune déloyauté de la société ASC ne pouvait être relevée contrairement à ce qu'a décidé le conseil de prud'hommes.

Mme [T] soutient que les moyens soulevés par la société ASC SECURITE ne sont pas de nature à rendre irrecevables la saisine du conseil de prud'hommes. Les arguments développés par la société ASC SECURITE CONSEIL sont des moyens de défense au fond et qu'ils n'affectent en rien la recevabilité de la requête. Le conseil de prud'hommes est amené à statuer sur la base des dernières écritures et non sur la base de la requête de saisine du conseil de prud'hommes.

Réponse de la cour,

Il résulte des dispositions de l'article 954 du Code de procédure civile que « Les conclusions doivent formuler expressément les prétentions des parties ainsi que les moyens en fait et en droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et de leur numérotation. Un bordereau énumérant les pièces justifiant ces prétentions est annexé aux conclusions.

Les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu'un dispositif récapitulant les prétentions. Les moyens qui n'auraient pas été formulés dans les conclusions précédentes doivent être présentés de manière formellement distincte. Le tribunal ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.
Les parties doivent reprendre dans leurs dernières conclusions les prétentions et moyens présentés ou invoqués dans leurs conclusions antérieures. A défaut, elles sont réputées les avoir abandonnés et le tribunal ne statue que sur les dernières conclusions déposées ».

Les « dire et juger » et les « constater » ne sont pas des prétentions en ce que ces demandes ne confèrent pas de droit à la partie qui les requiert hormis les cas prévus par la loi.

En l'espèce, il est constant que le conseil de prud'hommes se prononce au vu des dernières demandes des parties et qu'en conséquence les parties peuvent préciser leurs demandes jusqu'à l'audience du conseil de prud'hommes. La décision déférée, qui reprend l'état des dernières demandes n'a pas été saisie de l'irrecevabilité de celles-ci.

Il convient de rappeler que le manque de précision ou des erreurs de plumes dans les conclusions des conseils ne suffisent pas pour considérer que les demandes sont irrecevables.

En l'espèce, à l'appui de l'exception d'irrecevabilité qu'elle soulève, la SAS ASC SECURITE ne formule aucun moyen de droit mais uniquement des moyens de défenses au fond.

En application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile, il convient dès lors de rejeter l'exception d'irrecevabilité soulevée par la SAS ASC SECURITE.

Sur la demande de voir écarter la pièce C4 :

Moyens des parties :

La SAS ASC ASSISTANCE SECURITE CONSEIL demande à la cour d'appel d'écarter la pièce C4 en ce qu'elle constitue une correspondance entre avocat et revêt un caractère confidentiel.

Mme [T] ne conclut pas sur ce point.

Réponse de la cour,

Aux termes de l'article 66-5 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 modifiée, en toutes matières, que ce soit dans le domaine du conseil ou dans celui de la défense, les consultations adressées par un avocat à son client ou destinées à celui-ci, les correspondances échangées entre le client et son avocat, entre l'avocat et ses confrères à l'exception pour ces dernières de celles portant la mention "officielle", les notes d'entretien et, plus généralement, toutes les pièces du dossier sont couvertes par le secret professionnel.

En l'espèce la pièce C4 constituée d'échanges de mails entre les conseils, qui ne comportent pas la mention officielle, est donc couverte par le secret.

Il convient en conséquence d'écarter des débats la pièce C4 produite par Mme [T].

Sur le bien-fondé du licenciement :

Moyens des parties,

La société ASC SECURITE CONSEIL fait valoir que la faute grave est établie et expose que :

Suite à son refus de transfert de son contrat de travail à la société GORON-GSL, Mme [T] a fait le choix de rester salariée de la société ASC alors qu'elle avait été avisée de ce que la société ne disposait d'aucun poste disponible autre que situé dans le Loiret, de rester salariée de la société ASC.

Il lui a donc été notifié son affectation dans le Loiret par courrier du 15 juin 2017, reçu le 16 par la salariée, pour une prise de poste prévue au 3 juillet 2017 soit un délai de plus de 15 jours entre la proposition d'affectation et la prise de poste.

La société ASC n'avait pas à attendre la fin du délai calendaire existant uniquement dans les rapports entre Mme [T] et la société GORON GSL lors de la proposition de signature du contrat par cette dernière et non dans ceux entre Mme [T] et la société ASC.

Son contrat de travail comportait une clause de mobilité et la proposition d'affectation ne constituait pas une modification du contrat de travail mais simplement des conditions de travail, la mobilité étant inhérente à la fonction d'agent d'exploitation comme cela ressort encore de la convention collective.

Cette modification était inévitable et nécessaire du fait de la perte du marché PRYSMIAN et la salariée aurait pu poursuivre ses prestations dans le département de l'Isère si elle avait accepté le transfert de son contrat de travail auprès de la société GORON.

Mme [T] qui savait que la société ASC, en cas de refus de sa part d'accepter la modification proposée, n'aurait d'autre choix que de la licencier, ne s'est pas présentée sur le lieu de son affectation les 3, 4 et 5 juillet 2017 et ce sans avoir préalablement prévenu son responsable et sans justificatif ce qui caractérise une insubordination.

En ne se présentant pas sur le lieu de sa nouvelle affectation, aux jours et heures prévus, Mme [T] non seulement manquait à ses obligations contractuelles, elle désorganisait de façon très importante le service de sécurité mis en place sur le site client Base Intermarché de [Localité 9].

Mme [T] conteste l'existence d'une faute grave et fait que :

Le contrat de travail à durée indéterminée signé le 22 janvier 2007 avec la société ASC SECURITE, contenait une clause de mobilité géographique limitée au département de l'Isère et aux départements limitrophes.

Elle a été reçue par la société GORON dans le cadre de la reprise de son contrat de travail et les dirigeants lui ont fait part de leur souhait qu'elle travaille de nuit, elle leur a fait part de son désaccord lors de l'entretien. La société GORON lui a transmis une proposition d'avenant à son contrat de travail qui était erronée et a tenté de lui imposer une modification de la clause de mobilité géographique qui n'avait fait l'objet d'aucune discussion entre les parties, elle n'a donc pas signé l'avenant au contrat de travail et est restée salariée de la société ASC SECURITE CONSEIL.

Par courrier daté du 15 juin 2017, avant l'expiration du délai calendaire, la société ASC SECURITE CONSEIL lui a adressé un courrier lui faisant part de sa nouvelle affectation dans le Loiret. Elle a fait valoir en réponse que lieu d'exercice de son activité professionnelle entraînait une modification considérable de ses conditions de vie et qu'elle ne pouvait l'accepter.

S'agissant d'une modification substantielle de son contrat de travail, alors même qu'elle n'y a pas consentie, cela constitue une violation de la clause de mobilité géographique et l'employeur n'a pas respecté les dispositions de l'article L1222-6 du Code du travail qui n'implique pas qu'en l'absence de circonstance économique, l'employeur a la possibilité de modifier unilatéralement le contrat de travail de la salariée, sans aucune restriction et de la licencier par la suite.

Le fait qu'elle n'ait pas respecté une nouvelle affectation contraire à la clause de mobilité géographique ne peut être considéré comme fautif. L'équilibre du contrat de travail a été modifié puisque les frais de trajet sont indemnisés à hauteur de 80 euros par mois entier travaillé alors que le coût d'un seul trajet s'élève à 82 euros.

La société GORON expose que Mme [T] est demeurée salariée de la société ASC et fait valoir qu'aucun manquement ne peut lui être imputé :

Mme [T] a refusé de signer l'avenant proposé alors que la société s'était engagée à reprendre 100% du personnel ayant plus de 4 ans d'ancienneté.

La clause figurant dans l'avenant en question, relative aux horaires, n'était que la poursuite de la relation de travail et ne constituait donc pas une modification du contrat de travail de Mme [T]. Cette clause figurait déjà dans le contrat de travail initial de Mme [T] avec la société ASC SECURITE CONSEIL et est encore prévue à l'article 7.01 de la CCNEPS (convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité).

La clause de mobilité géographique était elle aussi déjà présente dans le contrat de travail initial de Mme [T] avec la société ASC SECURITE CONSEIL. Chaque société de sécurité détermine la limitation géographique de la clause de mobilité imposée à ses salariés en fonction de la localisation de ses établissements et des clients dont il dispose à la date de l'établissement du contrat. L'article 6.6 de la CCNEPS dispose que « le salarié est embauché pour un emploi à tenir dans un ensemble de lieux et de services correspondant à la nature des prestations requises. (...) » de sorte que la mobilité est inhérente à la fonction d'agent d'exploitation.

Il était enfin peu probable qu'une application de la clause de mobilité pour muter la salariée soit opérée, celle-ci connaissant les chantiers de [Localité 6] et [Localité 7] depuis des années et le client PRYSMAN, sur un autre chantier.

Réponse de la cour,

Sur le transfert du contrat de travail :

L'article L. 1224-1 du code du travail dispose que lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise.

Il est de principe que les dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail ne s'appliquent pas à la seule perte d'un marché. Dans ce cas, le transfert des contrats obéit aux dispositions de l'accord collectif relatives aux garanties d'emploi. Il est de jurisprudence constante qu'en cas de transfert conventionnel, le transfert du contrat de travail n'est pas d'ordre public et ne s'impose donc pas aux salariés dont l'accord express doit être recueilli et qu'en cas de refus, ils demeurent dans l'entreprise d'origine.

En l'espèce, il est constant que Mme [T] a signé un contrat de travail avec la société ASC SECURITE le 14 février 2007 et exerçait ses fonctions d'agent de prévention et de sécurité sur les sites de [Localité 6] et [Localité 7] en Isère, d'un des clients de la société à savoir PRYSMAN.

Le Groupe PRYSIAN a résilié ce marché de gardiennage à la société ASC SECURITE pour l'attribuer à la société GORON. En application de la Convention Collective Nationale des Entreprises de Prévention et de Sécurité (CCNEPS) et en application de l'accord professionnel du 5 mars 2002 modifié par avenant du 28 janvier 2011 et relatif à la reprise du personnel des sociétés de sécurité, la société GORON a demandé à la société ASC SECURITE de lui transmettre la liste des salariés dont le contrat était transférable.

En application de la CCNEPS et de l'accord professionnel sus-visés le dossier de Mme [T], ainsi que celui de plusieurs autres salariés, ont été transmis le 15 mai 2017 par la société sortante à la société entrante. Suite à deux entretiens de la salariée avec la société GORON une proposition d'avenant à son contrat lui a été faite le 08 juin 2017.

Mme [T] a immédiatement adressé une lettre recommandée à la société Goron par laquelle elle indiquait son souhait de « rester auprès de la société GORON dans le cadre d'une reprise du personnel ASC auprès du client PRYSMIAN [Localité 6]-[Localité 7] ». Elle ajoutait cependant que l'avenant du contrat proposé ne lui convenait pas et indiquait souhaiter «conserver le même rythme de travail à savoir : en semaine et horaire de journée et sur le même lieu ».

Le 09 juin 2017, par mail adressé à la société ASC, Mme [T] indique qu'elle ne peut pas accepter les propositions qui lui ont été faites par la société Goron de modification de contrat qui lui ont été communiquées lors d'entretiens oraux portant sur les horaires et le lieu. Le directeur d'ASC lui répond, par mail du même jour, qu'elle dispose du droit de refuser ce transfert et qu'elle demeure leur salariée.

Il est donc établi que les dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail ne s'appliquaient pas, que la société Goron a respecté la procédure conventionnelle de transfert de contrat et enfin que Mme Goron disposait, en tout état de cause, du droit de refuser le transfert de son contrat de travail sans qu'il ne puisse lui en être fait grief ou encore argué par la société ASC de la mauvaise foi de Mme [T] dans son refus du transfert de son contrat de travail à la société entrante.

Il convient donc de confirmer la décision des premiers juges mettant hors de cause la société GORON.

Sur le licenciement :

Selon les dispositions des articles L.1232-1 et L.1232-6 du code du travail, tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse, énoncée dans une lettre notifiée au salarié. Cette lettre, qui fixe les limites du litige doit exposer des motifs précis et matériellement vérifiables, permettant au juge d'en apprécier la réalité et le sérieux.

Il est de principe que la faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien de l'intéressé au sein de l'entreprise même pendant la durée du préavis. La mise en 'uvre de la procédure de licenciement doit intervenir dans un délai restreint après que l'employeur a eu connaissance des faits fautifs mais le maintien du salarié dans l'entreprise est possible pendant le temps nécessaire pour apprécier le degré de gravité des fautes commises. L'employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en rapporter la preuve.

La gravité de la faute s'apprécie en tenant compte du contexte des faits, de l'ancienneté du salarié et des conséquences que peuvent avoir les agissements du salarié et de l'existence ou de l'absence de précédents disciplinaires.

En l'espèce, la lettre de licenciement du 31 juillet 2017 qui fixe les limites du litige énonce que « Par lettre recommandée avec AR du 22juin 2017, nous prenions acte de votre décision de refuser la proposition de transfert de votre contrat de travail au sein de l'entreprise GORON GSL entrante sur le marché de la sécurité/sûreté de site PRYSMIAN Câbles et systèmes à compter du 1er juillet 2017. GORON-GSL, par lettre du 22 juin 2017 nous a confirmé que vous avez opposé un refus catégorique de reprise de votre contrat de travail conclu le 22janvier 2007 avec la société ASC alors que vous remplissiez toutes les conditions de transférabilité.

En conséquence, toujours sous contrat de travail avec notre entreprise, dans notre courrier recommandé avec AR du 15 juin 2017 réceptionné par vos soins le 16 juin 2017, nous avions informée d'une affectation sur le site de la base INTERMARCHE, située sur la commune de [Localité 9], choisi au plus proche de votre domicile, compte tenu des sites clients de l'entreprise ASC au 1erjuillet 2017. Nous vous indiquions dans ce courrier que nous ne disposions d'aucun site clients situé dans le département de l'Isère, ni dans aucun autre département plus proche de votre domicile, limitrophes à l'Isère.

Par courrier recommandé avec AR du 15 juin 2017 reçu le 19 juin 2017, vous avez refusé catégoriquement l'affectation qui nous a pourtant été adressée dans le cadre de l'exécution de votre contrat de travail dans la mesure ou vous restez salariée de l'entreprise ASC. Ce refus d'affectation n'a pas manqué d'entraîner une désorganisation très importante du service de sécurité mis en place de notre client de la base Intermarché de [Localité 9], dans la mesure où nous avons été contraints d'organiser votre remplacement à un poste requis dans le cahier des charges auquel nous sommes soumis dans le cadre de notre prestation.Il s'agissait là de votre part d'un acte d'insubordination caractérisé qui constitue une faute dont la gravité ne peut être acceptée dans la mesure où la mutation que vous contestez vous a été adressée de bonne foi à l'issue de la procédure de reprise du personnel encadré par l'avenant du 28 janvier 2011, à l'accord du 5 mars 2002 dont vous n 'avez pas voulu bénéficier pour les motifs qui vous appartiennent. Nous nous vous rappelons que cet accord a été conclu en vue de conserver les effectifs qualifiés et de préserver l'emploi des salariés dans la profession à l'occasion d'un changement de prestataire. Nous ne pouvons tolérer un tel acte d'insubordination qui constitue un manquement grave à vos obligations découlant du contrat de travail. Les faits énumérés dans la présente notification vous sont incontestablement imputables et constituent une violation grave de vos obligations professionnelles, telle qu'elle rend impossible votre maintien même temporaire dans l'entreprise ASC. Compte tenu de la gravité des faits qui vous sont reprochés dans /a présente lettre votre licenciement est effectif à compter de la date d'envoi de ce courrier, sans préavis ni indemnité de rupture ».

Il est constant que Mme [T] ne s'est pas présentée sur son nouveau lieu de travail et a fait l'objet d'un rappel à l'ordre le 06 juillet 2017 puis d'un licenciement pour insubordination le 31 juillet 2017. Mme [T] fait valoir quant à elle que ce refus de se rendre sur ce poste était légitime, la clause de mobilité ayant été étendue unilatéralement pas son employeur.

Sur la clause de mobilité, il est constant que la convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité comporte une clause de générale de mobilité en son article 6.6 intitulé « emploi » qui dispose que « Le salarié est embauché pour un emploi à tenir dans un ensemble de lieux et de services correspondant à la nature des prestations requises. (...) » . Il découle de cette convention que la mobilité géographique est inhérente à la fonction.

Le contrat de travail de la salariée signé avec la société ASC contient une clause mobilité, précise et non contestée, portant sur le périmètre régional suivant : "Isère et départements limitrophes soit l'Ain (01), la Loire (42), Hautes Alpes (05), Rhône (69) l'Ardèche (07), la Drôme (26), la Savoie (73)".

Il est établi qu'en réponse au mail de la salariée du 09 juin 2017 par lequel Mme [T] informait le directeur du personnel de la société ASC qu'elle n'entendait pas accepter le transfert de son contrat de travail à la société GORON, le directeur d'ASC lui répond le même jour pour l'aviser qu'elle dispose du droit de refuser ce transfert mais encore l'alerter sur le fait que l'entreprise ASC ne peut lui proposer qu'un poste se trouvant dans le Loiret45, soit à 400 kms de son domicile.

Le 15 juin 2018, la société ASC notifie à Mme [T] son affectation à compter du 1er juillet 2018 au magasin Intermarché à [Localité 9] (Loiret 45) « sans modification d'un élément essentiel de votre contrat de travail  dans la mesure où la rémunération reste inchangée ». L'employeur lui précise encore que ses frais de transport seront pris en charge à hauteur de 80 euros.

Il n'est pas contesté que Mme [T] a, par courrier du 15 juin 2017, notifié à son employeur son refus non équivoque du poste proposé au motif que cette affectation l'obligerait à déménager.

Il convient de rappeler que la mutation d'un salarié en présence d'une clause de mobilité stipulée dans son contrat de travail est licite et s'analyse en un changement de ses conditions de travail relevant du pouvoir d'administration et de direction de l'employeur. Il est cependant de jurisprudence constante que l'employeur ne peut étendre unilatéralement la portée d'une clause de mobilité en cours de contrat, et ce même si cette extension est prévue dans clause initiale. Ainsi, un employeur qui souhaite étendre le champ géographique d'une clause de mobilité doit obtenir l'accord express du salarié.

En l'espèce, non seulement aucune possibilité d'extension de la clause de mobilité n'était mentionnée au contrat de travail de la salariée, mais l'employeur ne lui a pas proposé la signature d'un avenant en ce sens.

Sans remettre en cause l'incidence de la perte du marché Prysmian et l'absence de poste à offrir à Mme [T] dans la zone géographique prévue au contrat de travail, cette décision de l'affecter la salariée à 400 km de son domicile, qui plus est, à bref délai, constituait une modification substantielle de son contrat de travail. Il ne peut en effet être contesté des déplacements de plus de 6 heures par jour induisaient de fait un changement majeur dans la situation de la salariée qui ne pouvait raisonnablement accomplir ces trajets chaque jour. Pour procéder à cette extension du périmètre de la clause de mobilité l'employeur devait donc recueillir l'assentiment de la salariée ce qui n'a pas été le cas en l'espèce.

Par conséquent, le refus de Mme [T] de rejoindre ce poste de travail ne saurait constituer une faute grave mais encore ne constitue pas une cause réelle et sérieuse de licenciement en présence d'une modification unilatérale du contrat de travail par l'employeur.

Il convient de confirmer la décision des premiers juges en ce qu'ils ont fixé le salaire mensuel moyen brut de Mme [T] à la somme de 2 186 euros, somme correspondant à la moyenne des 12 derniers mois de salaires brut perçus et condamné la SAS ASC ASSISTANCE SECURITE CONSEIL à verser à Mme [T] les sommes suivantes :

8 312 euros au titre de l'indemnité de licenciement

4 372 euros au titre de l'indemnité de préavis outre la somme de 437,20 euros au titre des congés payés afférents

S'agissant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, au moment du licenciement Mme [T] avait 59 ans, n'avait aucune qualification et justifie dans la présente instance des recherches d'emploi et de sa situation précaire au regard de l'emploi.

Compte tenu des reprises d'ancienneté lors des précédents transferts de son contrat de travail, elle présentait une ancienneté non contestée de 15 ans et 3 mois.

Il convient, par voie de réformation de la décision déférée sur le quantum de l'indemnité de condamner la SAS ASC ASSISTANCE SECURITE CONSEIL à payer à Mme [T] la somme de 21 244 euros au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Il est ordonné la capitalisation des intérêts en application de l'article 1154 du code civil passé le délai d'un an à compter du jugement du 12 février 2020.

Sur la demande de dommages et intérêts pour appel abusif :

Moyens des parties:

Mme [T] fait valoir que l'appel est « manifestement » abusif, le licenciement ne reposant sur aucune cause réelle et sérieuse.

La SAS ASC ASSISTANCE SECURITE CONSEIL expose que Mme [T] a décidé en toute connaissance de cause de rester salariée de l'entreprise, n'a pas formulé en appel de demandes contre la société GORON et formule des demandes exorbitantes.

La société GORON soulève la mauvaise foi de Mme [T] dans l'exercice de son action.

Réponse de la cour,

Il convient de rappeler que l'exercice d'une action en justice ne peut dégénérer en un abus du droit d'ester en justice que si une faute est démontrée.

Il convient de relever que chacune des parties se limite à exercer son action faisant valoir des moyens et demandes.

Faute pour les parties de démontrer l'existence d'une telle faute, les demandes formulées de ce chef par Mme [T], la SAS ASC ASSISTANCE SECURITE CONSEIL et la société GORON sont rejetées.

Sur le remboursement des allocations chômage :

Il conviendra, conformément aux dispositions de l'article L. 1235-4 du code du travail, dans version applicable au 1er mai 2008, issue de la loi du 8 août 2016 et applicable au 10 août 2016, d'ordonner d'office à l'employeur le remboursement des allocations chômages perçues par le salarié du jour de son licenciement au jour de la présente décision dans la limite de 3 mois, les organismes intéressés n'étant pas intervenus à l'audience et n'ayant pas fait connaître le montant des indemnités versés.

Une copie de la présente décision sera adressée à Pôle Emploi à la diligence du greffe de la présente juridiction.

Sur les demandes accessoires :

Il convient de confirmer la décision de première instance s'agissant des dépens et des frais irrépétibles.

La SAS ASC ASSISTANCE SECURITE CONSEIL, partie perdante qui sera condamnée aux dépens et déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile, devra payer à Mme [T] la somme de 1 500 euros au titre de ses frais irrépétibles en cause d'appel.

La demande de la société GORON formulée à ce titre à l'encontre de Mme [T] est rejetée, la société GORON supportant la charge de ses frais et dépens.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant contradictoirement après en avoir délibéré conformément à la loi,

DECLARE la SAS ASC ASSISTANCE SECURITE CONSEIL recevable en son appel, Mme [T] et la société GORON recevables en leurs appels incidents,

ECARTE des débats la pièce C4 produite par Mme [T],

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions excepté dans le quantum de l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse,

STATUANT à nouveau sur le chef d'infirmation,

CONDAMNE la SAS ASC ASSISTANCE SECURITE CONSEIL à payer à Mme [T] la somme de 21 244 euros au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Y ajoutant,

REJETTE la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive de la SAS ASC ASSISTANCE SECURITE CONSEIL, de la société GORON et de Mme [T],

CONDAMNE la SAS ASC ASSISTANCE SECURITE CONSEIL à payer la somme de 1 500 € à sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

REJETTE la demande de la société GORON formulée en application de l'article 700 du code de procédure civile,

DIT que la société GORON supportera la charge des frais et dépens qu'elle a engagé en appel,

ORDONNE le remboursement des allocations chômages perçues par le salarié du jour de son licenciement au jour de la présente décision dans la limite de 3 mois,

DIT qu'une copie de la présente décision sera adressée à Pôle Emploi à la diligence du greffe de la présente juridiction.

ORDONNE la capitalisation des intérêts en application de l'article 1154 du Code civil passé le délai d'un an à compter du jugement du 12 février 2020,

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Valéry CHARBONNIER, Conseillère faisant fonction de Présidente, et par Madame Mériem CASTE-BELKADI, Greffière, à qui la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.

La Greffière, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Ch. sociale -section a
Numéro d'arrêt : 20/00932
Date de la décision : 20/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-20;20.00932 ?
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