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13/09/2022 | FRANCE | N°20/01458

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Ch.secu-fiva-cdas, 13 septembre 2022, 20/01458


C6



N° RG 20/01458



N° Portalis DBVM-V-B7E-KNHM



N° Minute :







































































Notifié le :



Copie exécutoire délivrée le :





M. [B] [E]



la SELARL GALLIZIA DUMOULIN ALVINERIE





AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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COUR D'APPEL DE GRENOBLE



CHAMBRE SOCIALE - PROTECTION SOCIALE

ARRÊT DU MARDI 13 SEPTEMBRE 2022

Ch.secu-fiva-cdas





Appel d'une décision (N° RG 18/00729)

rendue par le Pole social du Tribunal judiciaire de VALENCE

en date du 10 mars 2020

suivant déclaration d'appel du 03 avril 2020





APPELANTE :



SOCIALE AGRICOLE ARDECHE DROME LOIRE - MSA, ayant son siè...

C6

N° RG 20/01458

N° Portalis DBVM-V-B7E-KNHM

N° Minute :

Notifié le :

Copie exécutoire délivrée le :

M. [B] [E]

la SELARL GALLIZIA DUMOULIN ALVINERIE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE SOCIALE - PROTECTION SOCIALE

ARRÊT DU MARDI 13 SEPTEMBRE 2022

Ch.secu-fiva-cdas

Appel d'une décision (N° RG 18/00729)

rendue par le Pole social du Tribunal judiciaire de VALENCE

en date du 10 mars 2020

suivant déclaration d'appel du 03 avril 2020

APPELANTE :

SOCIALE AGRICOLE ARDECHE DROME LOIRE - MSA, ayant son siège social [Adresse 3], représentée par son Directeur en exercice, domicilié en cette qualité audit siège.

[Adresse 3]

[Localité 1]

représentée par Me Delphine DUMOULIN de la SELARL GALLIZIA DUMOULIN ALVINERIE, avocat au barreau de GRENOBLE, substituée par Me Hélène MASSAL, avocat au barreau de GRENOBLE

INTIME :

M. [B] [E]

[Adresse 4]

[Localité 2]

comparant en personne

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Magali DURAND-MULIN, Conseiller faisant fonction de Président,

Mme Isabelle DEFARGE, Conseiller,

M. Frédéric Blanc, Conseiller,

DÉBATS :

A l'audience publique du 24 mai 2022

Mme Magali DURAND-MULIN, chargée du rapport, a entendu le représentant de l'appelant et l'intimé en leurs conclusions et plaidoiries, assistée de Mme Kristina YANCHEVA, Greffier, conformément aux dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, les parties ne s'y étant pas opposées ;

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 13 septembre 2022, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.

L'arrêt a été rendu le 13 septembre 2022.

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 30 novembre 2017, la caisse de Mutualité Sociale Agricole (MSA) Ardèche Drôme Loire a informé M. [B] [E] que des prestations familiales pour un montant de 6 970,99 € lui avaient été versées à tort sur la période du 1er novembre 2015 au 31 octobre 2017.

Le 12 février 2018, une mise en demeure d'avoir à régler la somme de 7 629,95 € lui a été adressée par la MSA Ardèche Drôme Loire.

Le 29 octobre 2018, M. [E] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Valence d'un recours à l'encontre de la décision de la commission de recours amiable de la MSA Ardèche Drôme Loire prise lors de sa séance du 18 juillet 2018 et notifiée le 29 août 2018 rejetant sa demande de remise gracieuse du trop-perçu visé par courrier du 30 novembre 2017.

Par jugement du 10 mars 2020, le pôle social du tribunal judiciaire de Valence a :

- écarté la note en délibéré produite par M. [E],

- reçu M. [E] en son recours et l'a déclaré bien fondé,

- dit que la MSA Ardèche Drôme Loire a commis une faute de nature à engager sa responsabilité,

en conséquence,

- infirmé la décision de la commission de recours amiable en date du 18 juillet 2018 notifiée le 29 août 2018,

- condamné la MSA Ardèche Drôme Loire à payer à M. [E] la somme de 3 800 €,

- dit que M. [E] est redevable de la somme de 6 936,34 € en principal outre les majorations de retard,

- ordonné la compensation de cette somme avec les sommes indues au titre des prestations familiales,

- condamné M. [E] à payer à la MSA Ardèche Drôme Loire la somme de 3 136,34 € en principal outre les majorations de retard,

- débouté les parties de leurs fins et demandes plus amples ou contraires,

- laissé à chacune des parties la charge des dépens qu'elle a exposés.

Le 3 avril 2020, la MSA Ardèche Drôme Loire a interjeté appel de cette décision.

Selon ses conclusions déposées au greffe le 6 mai 2022 et reprises oralement à l'audience, la MSA Ardèche Drôme Loire demande à la cour de :

- déclarer recevable et bien fondé son appel,

- infirmer et réformer le jugement rendu par le pôle social du tribunal judiciaire de Valence,

Statuant à nouveau,

- confirmer la décision de la commission de recours amiable rendue en séance le 18 juillet 2018 laquelle avait rejeté la demande de remise d'indu d'un montant de 7 629,95 €,

- condamner M. [E] à lui payer la somme de 7 629,95 €,

- constater qu'elle n'a commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité,

- constater que M. [E] n'a subi aucun préjudice,

en conséquence,

- dire n'y avoir lieu à l'octroi de dommages-intérêts au bénéfice de M. [E],

- rejeter l'ensemble des demandes de M. [E],

- condamner M. [E] à lui verser la somme de 1 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

Selon ses conclusions, déposées au greffe le 4 avril 2022 et reprises oralement à l'audience, M. [E] demande à la cour de :

En principal,

- confirmer la décision du pôle social du tribunal judiciaire de Valence du 10 mars 2020 qui infirme la décision de la commission de recours amiable du 18 juillet 2018 notifiée le 29 août 2018,

- confirmer la décision du pôle social du tribunal judiciaire de Valence du 10 mars 2020 et dire que la MSA Ardèche Drôme Loire a commis une faute de nature à engager sa responsabilité,

- condamner la MSA Ardèche Drôme Loire à lui verser la somme de 32 854 € au titre de dommages et intérêts pour préjudice financier,

- condamner la MSA Ardèche Drôme Loire à lui verser la somme de 6 936 € au titre de dommages et intérêts pour préjudice moral et psychologique,

- dire que la majoration de 10 % sur le montant de l'indu n'est pas applicable,

- rejeter l'ensemble des demandes de la MSA Ardèche Drôme Loire,

- condamner la MSA Ardèche Drôme Loire à lui verser la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance,

En subsidiaire,

- dire à la MSA Ardèche Drôme Loire d'accorder une remise partielle de la dette,

En très subsidiaire,

- dire à la MSA Ardèche Drôme Loire de proposer un échéancier de paiement adapté à sa capacité de remboursement.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'indu

Il résulte de l'application combinée des articles 1302 et 1302-1 du code civil que tout paiement suppose une dette ; ce qui a été reçu sans être dû est sujet à restitution.

Celui qui reçoit par erreur ou sciemment ce qui ne lui est pas dû doit le restituer à celui de qui il l'a indûment reçu.

La bonne foi d'un assuré ne saurait privé une caisse de son droit à répéter les prestations qu'elle lui a indûment versées.

En l'espèce, la MSA Ardèche Drôme Loire sollicite auprès de M. [E] la restitution d'un indu d'un montant de 7 629,95 € correspondant à des prestations familiales versées à tort du 1er novembre 2015 au 31 octobre 2017.

Il ressort du courriel échangé entre la MSA et les services de la CAF le 21 novembre 2017 et du courrier du 30 novembre 2017 adressé à l'allocataire, et que l'ex-conjointe de ce dernier ayant déjà perçu des prestations familiales pour leur fille [N], celle-ci ne pouvait être considérée comme étant à charge de M. [E] au sens de la réglementation relative aux prestations familiales.

En prenant en compte la charge de cet enfant, la MSA a ainsi versé à M. [E], sur la période litigieuse, des prestations auxquelles il ne pouvait prétendre, ce qui n'est d'ailleurs pas contesté par ce dernier.

Sur le fondement des dispositions des articles 1302 et 1302-1 du code civil précités, la MSA Ardèche Drôme Loire est dès lors bien fondée à obtenir la restitution des sommes indûment versées soit 6936,34 € outre majorations de retard que la caisse est fondée à réclamer soit la somme de 7 629,95 €.

Sur la responsabilité de la MSA

Dès lors que M. [E] recherche la responsabilité de la MSA Ardèche Drôme Loire, il lui incombe d'apporter la preuve de la faute qu'il lui impute et du préjudice qu'il prétend en avoir subi.

M. [E] a déclaré, le 28 août 2014, sa situation auprès de la caisse en indiquant dans le formulaire : vivre en couple avec Mme [L] depuis le 1er juin 2013, avec deux enfants à charge prénommés [M] et [F] [D].

En outre, par courrier du 26 janvier 2015, sa compagne, Mme [L] faisant suite à une demande d'aide au logement, a expressément indiqué à la MSA Ardèche Drôme Loire l'existence d'erreurs commises s'agissant des enfants à charge, expliquant que M. [E] a deux enfants, [N] et [W] « dont il n'a pas la charge » tandis qu'elle même a deux enfants à charge, [M] et [F].

L'indu réclamé par la MSA Ardèche Drôme Loire résulte de l'erreur commise par cette dernière qui a considéré à tort que [N] était à la charge de M. [E] ce qui a entraîné un trop perçu relatif à la période du 1er novembre 2015 au 31 octobre 2017.

Alors que la caisse disposait de toutes les informations nécessaires pour le calcul des droits de M. [E], son erreur est constitutive d'une faute de nature à engager sa responsabilité.

A l'appui de sa demande de dommages-intérêts, M. [E] prétend avoir subi un préjudice financier en ce qu'il a dû renoncer à l'achat d'une maison, préjudice qu'il évalue à 45 mois de loyer soit 32 854 €.

Mais si M. [E] justifie qu'une simulation de crédit a été établie avec le [5] le 9 février 2018, ni ce document ni le courriel de l'étude notariale confirmant la signature d'un compromis de vente au 13 mars 2018 ne suffisent à établir un lien entre la demande de restitution de l'indu d'un montant de 7 629,95 € dont M. [E] a été informé dès le 30 novembre 2017 et la non réalisation postérieure de son projet immobilier.

Faute de justifier de son préjudice et d'un lien de causalité, sa demande de dommages et intérêts formée au titre d'un préjudice financier doit être rejetée.

S'agissant de sa demande formée au titre d'un préjudice moral, M. [E] fait valoir l'impact psychologique qu'a eu cet indu notamment sur sa compagne.

Cependant, outre le fait que ce chef de préjudice est indirect dès lors que Mme [L] n'est pas dans la cause et qu'aucune pièce ne concerne M. [E], rien ne démontre le lien de causalité entre l'état de santé de celle-ci et son hospitalisation en clinique psychiatrique, dès lors que M. [E] évoque une période difficile pour sa compagne sur le plan personnel et professionnel et qu'il résulte du certificat médical établi par le psychiatre le 16 mars 2022 que Mme [L] est accompagnée en entretien psychiatrique depuis 2015.

La demande de dommages et intérêts au titre du préjudice moral sera également rejetée.

Le jugement déféré sera ainsi infirmé en ce que la MSA Ardèche Drôme Loire a été condamnée à verser à M. [E] des dommages-intérêts d'un montant de 3 800 €.

Sur la demande de remise partielle

L'article L.256-4 du code de la sécurité sociale prévoit qu'à l'exception des cotisations et majorations de retard, les créances des caisses nées de l'application de la législation de sécurité sociale, notamment dans des cas mentionnés aux articles L. 244-8, L. 374-1, L. 376-1 à L. 376-3, L. 452-2 à L. 452-5, L. 454-1 et L. 811-6, peuvent être réduites en cas de précarité de la situation du débiteur par décision motivée par la caisse, sauf en cas de man'uvre frauduleuse ou de fausses déclarations.

Dès lors qu'il est régulièrement saisi d'un recours contre la décision administrative ayant rejeté en totalité ou en partie une demande de remise gracieuse d'une dette née de l'application de la législation de sécurité sociale au sens de l'article L.256-4 du code de la sécurité sociale, il entre dans l'office du juge d'apprécier si la situation de précarité du débiteur justifie une remise totale ou partielle de la somme litigieuse.

En l'espèce, M. [E] sollicite subsidiairement qu'il soit ordonné à la MSA Ardèche Drôme Loire de lui accorder une remise partielle de dette.

M. [E] verse aux débats son avis d'imposition 2018 sur les revenus de l'année 2017 faisant apparaître un revenu imposable de 29000 € le concernant et de 1900 € concernant sa compagne alors que le couple a 4 enfants et paie un loyer dont le montant de 720 € par mois déclaré n'est pas contesté. Il produit également des notifications d'attributions de bourse pour les enfants de sa compagne, Mme [L], au titre de l'année universitaire 2021-2022.

Au vu de ces éléments, il apparaît justifié d'accorder à M. [E] une remise partielle de dette à hauteur de 3 800 € comprenant la remise de la majoration de retard.

En revanche, la demande de délai de paiement sera rejetée, l'article 1343-5 du code civil n'étant pas applicable aux juridictions de sécurité sociale.

Sur les mesures accessoires

Il n'est pas inéquitable de laisser à chaque partie la charge de ses frais irrépétibles exposés en appel.

En application de l'article 696 du code de procédure civile, la MSA sera condamné aux dépens.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement et contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Infirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a infirmé la décision de la commission de recours amiable en date du 18 juillet 2018 notifiée le 29 août 2018 et laissé à chacune des parties la charge des dépens qu'elle a exposés,

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

Déboute M. [B] [E] de ses demandes de dommages et intérêts,

Accorde à M. [B] [E] une remise partielle de dette à hauteur de 3 800 €,

Condamne M. [B] [E] à payer à la MSA Ardèche Drôme Loire la somme de 3 829,95 € en principal et majorations de retard,

Rejette la demande de délais de paiement,

Déboute les parties de leur demande en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la MSA Ardèche Drôme Loire aux dépens d'appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Mme Magali DURAND-MULIN, Conseiller faisant fonction de Président et par Mme Kristina YANCHEVA, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GreffierLe Conseiller


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Ch.secu-fiva-cdas
Numéro d'arrêt : 20/01458
Date de la décision : 13/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-13;20.01458 ?
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