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13/09/2022 | FRANCE | N°20/01318

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Ch.secu-fiva-cdas, 13 septembre 2022, 20/01318


C9



N° RG 20/01318



N° Portalis DBVM-V-B7E-KM4W



N° Minute :







































































Notifié le :



Copie exécutoire délivrée le :







la SELARL CLEMENT-CUZIN LEYRAUD DESCHEEMAKER



la CARSAT RHONE ALPES






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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



CHAMBRE SOCIALE - PROTECTION SOCIALE

ARRÊT DU MARDI 13 SEPTEMBRE 2022

Ch.secu-fiva-cdas





Appel d'une décision (N° RG 18/01219)

rendue par le Pole social du Tribunal judiciare de GRENOBLE

en date du 23 janvier 2020

suivant déclaration d'appel du 11 mars 2020





APPELANT :



M. [E] [R]

né en 1951 à [Locali...

C9

N° RG 20/01318

N° Portalis DBVM-V-B7E-KM4W

N° Minute :

Notifié le :

Copie exécutoire délivrée le :

la SELARL CLEMENT-CUZIN LEYRAUD DESCHEEMAKER

la CARSAT RHONE ALPES

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE SOCIALE - PROTECTION SOCIALE

ARRÊT DU MARDI 13 SEPTEMBRE 2022

Ch.secu-fiva-cdas

Appel d'une décision (N° RG 18/01219)

rendue par le Pole social du Tribunal judiciare de GRENOBLE

en date du 23 janvier 2020

suivant déclaration d'appel du 11 mars 2020

APPELANT :

M. [E] [R]

né en 1951 à [Localité 5] (MAROC)

de nationalité Marocaine

[Adresse 1]

[Localité 3]

comparant en personne, assisté de Me Sabine LEYRAUD de la SELARL CLEMENT-CUZIN LEYRAUD DESCHEEMAKER, avocat au barreau de GRENOBLE

INTIMEE :

La CARSAT RHONE ALPES, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 4]

comparante en la personne de Mme [K] [G], régulièrement munie d'un pouvoir

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Magali DURAND-MULIN, Conseiller faisant fonction de Président,

Mme Isabelle DEFARGE, Conseiller,

M. Frédéric Blanc, Conseiller,

DÉBATS :

A l'audience publique du 24 mai 2022

Mme Magali DURAND-MULIN, chargée du rapport, a entendu les représentants des parties en leurs conclusions et plaidoiries, assistée de Mme Kristina YANCHEVA, Greffier, conformément aux dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, les parties ne s'y étant pas opposées ;

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 13 septembre 2022, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.

L'arrêt a été rendu le 13 septembre 2022.

EXPOSE DU LITIGE':

M. [E] [R] a été employé par le comité dauphinois d'action socio-éducative (CODASE) du 05 juin 1989 au 30 avril 2012.

Il a obtenu à effet du 1er mai 2012 le bénéfice de sa pension de retraite à taux plein de 50 % au titre de l'inaptitude sur la base de 137 trimestres validés au régime général par décision de la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail (CARSAT) Rhône Alpes du 14 mai 2012.

Il a travaillé avec le CODASE le 1er mai 2012 en cumulant l'emploi et sa pension de retraite.

Par courrier du 4 juin 2012, M. [E] [R] a saisi la commission de recours amiable de la CARSAT aux fins d'obtenir l'attribution de la majoration pour travailleurs handicapés.

M. [E] [R] s'est vu notifier son licenciement pour inaptitude par courrier du 28 septembre 2018.

Dans l'intervalle, par courrier du 24 juillet 2018, la CARSAT a informé M. [R] qu'en raison de la non-cessation de son activité professionnelle, il ne pouvait pas prétendre à bénéficier du paiement de sa pension de vieillesse à compter du 1er mai 2012 mais uniquement à compter du 1er octobre 2017 et lui a notifié un trop perçu de 67.914,89 euros pour la période comprise entre le 1er mai 2012 et le 30 septembre 2017.

M. [R] a saisi le 24 août 2018 la commission de recours amiable de la CARSAT pour contester l'indu.

Par courrier du 26 octobre 2018, M. [R] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Grenoble d'une requête à l'encontre de la décision implicite de rejet de la commission de recours amiable.

A la suite d'un nouvel examen de sa situation, la CARSAT a attribué à l'assuré par décision du 7 juin 2019 la majoration de pension vieillesse au titre du handicap à compter du 1er octobre 2017, opérant une compensation avec l'indu.

Par jugement en date du 23 janvier 2020, le pôle social du tribunal judiciaire de Grenoble a':

-dit que M. [E] [R] est sans droit au paiement de sa retraite personnelle pour la période du 1er mai 2012 au 30 septembre 2017,

-dit que M. [E] [R] a bénéficié indûment du service de son avantage vieillesse du 1er mai 2012 au 30 septembre 2017 par fraude,

-condamné M. [E] [R] à régler à la CARSAT Rhône Alpes la somme actualisée de 58.159,76 euros au titre de l'indu,

-dit que les droits de M. [E] [R] à bénéficier d'une pension de retraite doivent être ouverts à compter du 1er octobre 2017,

-dit que le montant de la pension de retraite et de la majoration de pension au titre du handicap devront être recalculés par la CARSAT Rhône Alpes en tenant compte des trimestres cotisés entre le 1er mai 2012 et le 30 septembre 2017,

-débouté M. [E] [R] du surplus de ses demandes,

-ordonné l'exécution provisoire,

-condamné M. [E] [R] aux dépens.

La décision a été notifiée par le greffe par lettres recommandées dont l'accusé de réception a été signé le 19 février 2020 par M. [E] [R] et tamponné le même jour par la CARSAT.

Par déclaration en date du 11 mars 2020, M. [E] [R] a interjeté appel à l'encontre du jugement.

M. [E] [R] s'en est rapporté à des conclusions déposées le 23 décembre 2021 et entend voir':

Infirmer le jugement du 23 janvier 2020 en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a dit que le montant de la pension de retraite et le montant de la majoration de pension au titre du handicap de M. [R] devaient être recalculés par la CARSAT RHONE-ALPES en tenant compte des trimestres cotisés entre le 1er mai 2012 et le 30 septembre 2017 ;

En conséquence,

A titre principal,

Constater l'existence de la rupture du lien professionnel à la date du 30 avril 2012 ;

Constater qu'il est de bonne foi ;

Constater son droit à l'erreur ;

En conséquence,

Dire qu'il pouvait bénéficier du mécanisme de cumul emploi-retraite

Débouter la CARSAT de sa demande de restitution de trop-perçu

Condamner la CARSAT à lui restituer les sommes déjà retenues sur sa retraite

A titre subsidiaire,

Constater que la demande de la CARSAT est pour partie prescrite,

En conséquence,

Réévaluer le montant de sa dette à plus juste valeur, à savoir 13.766,55 euros ;

Fixer le montant de sa pension retraite à plus juste valeur ;

En tout état de cause,

Confirmer qu'il remplit les conditions pour bénéficier de la majoration pour travailleur handicapé ;

Fixer le montant de sa pension retraite à plus juste valeur ;

En conséquence,

Condamner la CARSAT Rhône-Alpes à lui verser les sommes dues à ce titre

En tout état de cause,

Enjoindre la CARSAT à le retirer de la BNSF

Condamner la CARSAT Rhône-Alpes à lui verser la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La CARSAT s'en est rapportée oralement à des conclusions transmises le 10 mars 2021 et demande à la cour de':

-dire et juger que la liquidation des droits de l'assuré au 1er mai 2012 est intervenu conformément à sa demande à la législation en vigueur,

-dire et juger que compte tenu de sa poursuite d'activité, M. [R] est sans droit au paiement de sa retraite personnelle pour la période du 1er mai 2012 au 30 septembre 2017, et partant de la majoration de sa pension de retraite au titre du handicap sur cette période,

-dire et juger que le montant de la majoration au titre du handicap a été justement déterminée par la caisse au 1er mai 2012, et donner acte de ce qu'elle est régulièrement service à l'assuré depuis le 1er octobre 2017,

-dire et juger que c'est par fraude que le demandeur, qui n'avait pas cessé son activité, a bénéficié indûment du service de son avantage vieillesse du 1er mai 2012 au 30 septembre 2017, et qu'un indu à ce titre de 67.914,89 euros a été déterminé ;

En conséquence,

-le débouter de son appel et de l'ensemble de ses prétentions,

-faisant droit à l'appel incident de la CARSAT, réformer la décision rendue en son 5ème chef,

-la confirmer dans toutes ses autres dispositions,

-ordonner le rétablissement de la liquidation des droits de M. [R] au 1er mai 2012 avec toutes les conséquences de droit,

-condamner l'assuré au remboursement, en deniers ou quittance, du solde de l'indu ramené à ce jour à 52.159,76 euros en raison des retenues sur prestations effectuées,

-dire et juger qu'un nouvel indu sera déterminé à son encontre au titre des sommes servies à tort depuis mars 2021, compte tenu de la liquidation de ses droits au 1er octobre 2017,

-condamner le demander aux entiers dépens.

Pour un exposé complet des moyens et prétentions des parties, il convient au visa de l'article 455 du code de procédure civile de se reporter à leurs écritures sus-visées.

EXPOSE DES MOTIFS

Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription de la demande de la CARSAT au titre du trop-perçu':

L'article L. 355-3 du code de la sécurité sociale dans sa version en vigueur du 23 décembre 2011 au 01 janvier 2020 énonce que':

Toute demande de remboursement de trop-perçu en matière de prestations de vieillesse et d'invalidité est prescrite par un délai de deux ans à compter du paiement desdites prestations dans les mains du bénéficiaire, sauf en cas de fraude ou de fausse déclaration.

En l'espèce, la CARSAT se prévaut du fait que sur le formulaire de demande de cessation d'activité en date du 26 avril 2012, M. [R] a effectivement coché la case selon laquelle il a déclaré sur l'honneur cesser son activité salariée chez son employeur et être radié des effectifs à la date du 01 mai 2012.

Par ailleurs, la CARSAT produit aux débats les comptes-rendus d'entretiens téléphoniques des 27 avril 2018 et 3 mai 2018 qu'elle a eus avec respectivement, M. [M], ancien directeur général du CODASE, et Mme [Y], ancienne secrétaire au sein de cette structure, aux termes desquels d'une part, le premier exprime sa difficulté à se souvenir si M. [R] a ou non cessé son activité lors de son départ en retraite avant de retravailler immédiatement pour la structure mais confirmant qu'il y a eu une discussion au sujet de la cessation d'activité et de sa reprise, exprimant sa surprise que ne figure pas l'entête de l'entreprise sur le contrat de travail et le certificat de travail, indiquant qu'il est normal que le nouveau contrait ait repris l'ancienneté, répondant que peut-être les documents ont pu se perdre entre le service du personnel et la paie et finissant en précisant que 'M. [R] est quelqu'un de plutôt honnête' et d'autre part, la seconde, ne se souvient plus, précisant que normalement, les documents sont édités sur du papier à entête.

Il apparaît également que le bulletin de salaire du mois d'avril 2012 ne fait pas mention d'une sortie des effectifs, ni du paiement des indemnités de rupture, notamment s'agissant du solde des congés payés non pris et que le bulletin de mai 2012 fait état d'une entrée dans l'entreprise le 06 juillet 1989 et non le 01 mai 2012, outre le fait que le cumul imposable sur le bulletin de salaire 2012 concerne la totalité de l'année et non à compter de mai 2012.

Toutefois, la CARSAT, qui supporte la charge de la preuve de la fraude qu'elle allègue ayant consisté pour M. [R] à n'avoir pas effectivement cessé son activité au sein du CODASE au 30 avril 2012 pour la reprendre immédiatement le 1er mai 2012, date de sa demande concomitante de cessation d'activité, ne la démontre pas de manière suffisante dès lors que M. [R] produit aux débats un certificat de travail daté du 3 mai 2012 signé de M. [M] faisant état d'un emploi au sein du CODASE du 5 juin 1989 au 30 avril 2012, un contrat de travail à durée indéterminée avec le CODASE en date du 03 mai 2012 à effet du 1er mai 2012, signé là encore par M. [M] et des attestations sur l'honneur de M. [M] et Mme [Y] en date des 19 juin 2018 confirmant de manière expresse l'authenticité desdits documents, étant rappelé que la seule remise par un employeur d'un certificat de travail à un salarié constitue la volonté non équivoque de rompre ledit contrat, M. [R] ne pouvant se voir opposer les erreurs commises ultérieurement par son employeur dans le cadre de l'établissement des bulletins de paie ou des dysfonctionnements internes à l'entreprise.

Par ailleurs, le non-respect opposé par la CARSAT à M. [R] du délai de 6 mois pour retravailler au service du même employeur en application de l'article L. 161-22 du code de la sécurité sociale dans sa version issue de l'ordonnance n°2010-462 du 6 mai 2010 ne saurait en l'espèce procéder d'une fraude avérée mais constitue tout au plus de la part de l'assuré une erreur commise de bonne foi sur l'étendue de ses droits dans la mesure où':

-la CARSAT verse aux débats une copie écran de son logiciel mettant en évidence que M. [R] l'a explicitement informée qu'il envisageait un cumul emploi/retraite,

-la CARSAT produit une attestation de Mme [C], technicien-conseil retraite, qui atteste le 16 juin 2019 des échanges qu'elle a eus avec M. [R] le 14 mai 2012, soit 7 ans auparavant de manière relativement précise nonobstant l'écoulement du temps, aux termes de laquelle celle-ci admet à tout le moins avoir évoqué avec M. [R] la question du cumul emploi/retraite. Le témoin affirme avoir indiqué à M. [R] qu'il ne bénéficiait pas du nombre de trimestres suffisants pour pouvoir retravailler immédiatement auprès de son employeur et bénéficier ainsi des dispositions de l'alinéa 1 de l'article L. 161-22 précité, de sorte qu'il devait respecter un délai de 6 mois, énoncé à l'alinéa 2 dudit article. Toutefois, la cour observe que le conseil allégué comme donné par le témoin de travailler dans le cadre du bénévolat pendant ce laps de temps de 6 mois était susceptible d'être particulièrement inadapté et de caractériser un contournement dudit délai. Surtout, alors qu'il apparaît qu'il avait été envisagé dans un premier temps que M. [R] fasse une demande de retraite anticipée pour travailleur handicapé au visa de l'article L. 351-3-1 du code de la sécurité sociale dès lors qu'il cumulait à tout le moins 113 trimestres et qu'il a en définitive demandé une cessation d'activité pour inaptitude avec 137 trimestres puisqu'il avait atteint l'âge légal de 60 ans et 4 mois, les informations au titre du cumul emploi/retraite sur la déclaration sur l'honneur de cessation d'activité salariée au régime général datée du 26 avril 2012, pour être exactes sont pour le moins très générales et ne sont pas de nature à éviter une erreur de bonne foi pour un assuré comme M. [R] qui pouvait partir, du fait de sa situation de handicap ou d'inaptitude dès 60 ans avec un niveau de pension de 50 % de son salaire moyen des 25 meilleurs années, soit au même taux qu'un assuré avec une retraite à taux plein.

Si la CARSAT conclut à juste titre que dans l'hypothèse d'un cumul emploi/retraite anticipée sans le nombre de trimestres requis de 163, s'appliquaient les dispositions alors en vigueur de l'alinéa 2 de l'article L. 161-22 du code de la sécurité sociale, soit avec la condition d'un délai de 6 mois pour une reprise d'activité chez l'ancien employeur, l'information donnée pour les assurés inaptes ou handicapés est insuffisamment précise': «cumul emploi retraite': depuis le 1er janvier 2009, je peux cumuler totalement ma retraite du régime général et une activité salariée si je remplis les conditions suivantes':

-A partir de 60 ans dès lors que je justifie de la durée d'assurance pour le taux plein ou à partir de 65 ans

-j'ai obtenu la totalité de mes retraites personnelles de bases et complémentaires, dont les conditions d'attribution sont remplies, de tous les régimes auprès desquels j'ai été affilié (français, étrangers, organisations internationales)

Je peux reprendre dès la date d'effet de ma retraite, une activité salariée chez mon dernier employeur. Du fait de l'obligation de cessation d'activité, mon employeur devra établir un nouveau contrat de travail.

Si je ne remplis pas les deux conditions indiquées dans le paragraphe ci-dessous':

-je peux reprendre une activité au régime général et/ou à un régime spécial chez le même employeur ou chez un autre employeur.

J'ai noté que la reprise d'activité chez mon dernier employeur ne peut intervenir que 6 mois après le point de départ de ma retraite, sinon ma retraite n'est plus payée.

Si je reprends une activité chez le même employeur après ce délai de 6 mois ou je reprends une activité chez un autre employeur dès le point de départ de ma retraite':

-le paiement de ma retraite sera suspendu si le montant mensuel de mes nouveaux revenus d'activité et mes retraites personnelles de base et complémentaires dépasse une limite égale à la moyenne mensuelle de mes salaires pour le moins civil de ma cessation d'activité salariée et les 2 mois précédents. Cette limite ne peut être inférieur à 1,6 fois le SMIC

-le paiement de ma retraite sera rétabli lorsque je vous informerai de':

-ma cessation d'activité

-ou de la baisse de mon salaire, qui ajouté à mes retraites, ne dépasse pas la limite du cumul.

(')

Important':

Si je reprends une activité au régime général et/ ou au régime des salariés agricoles et/ou au régime spécial, je m'engage à le signaler par écrit à ma caisse de retraite

(')'»

En effet, dès lors qu'à l'instar de M. [R] des assurés peuvent bénéficier d'un taux plein à raison de leur inaptitude ou de leur handicap sans pour autant remplir la condition du nombre de trimestres, son attention aurait dû être plus particulièrement attirée sur le fait que ceci ne lui donnait pas également droit par assimilation à un cumul immédiat chez le même employeur d'une pension de retraite et d'un salaire, l'attestation 7 ans après les faits de Mme [C] n'apparaissant pas suffisamment probante à ce titre.

Par ailleurs, si M. [R] ne verse pas aux débats, l'information écrite faite à la CARSAT qu'il avait repris une activité salariée en cumul de sa retraite, il appert qu'en suite de sa demande formée dès le 04 juin 2012 faisant référence à un entretien téléphonique du 25 mai 2012 avec Mme [C], sur lequel celle-ci reste taisante dans son attestation, portant sur le bénéfice de la majoration pour travailleurs handicapés, la CARSAT, par courrier du 29 septembre 2016, a sollicité de M. [R] les justificatifs de ses salaires depuis son départ en retraite afin de vérifier s'il avait bien respecté le délai de 6 mois en 2012'; ce qui implique qu'à tout le moins, la caisse a été tenue informée, à une date qu'elle ne précise pas, de la reprise d'activité de l'assuré.

Il s'ensuit que la CARSAT, qui a notifié un indu par lettre recommandée avec accusé de réception le 24 juillet 2018 pour la période comprise entre le 1er mai et le 30 septembre 2017, à défaut d'établir la fraude de M. [R], est prescrite en ses prétentions de remboursement d'un trop perçu antérieures au 24 juillet 2016.

Sur le bien-fondé du trop-perçu':

Au visa de l'article L. 161-22 alinéa 2 du code de la sécurité sociale, si M. [R] ne pouvait cumuler le bénéfice d'un emploi et d'une retraite sur une période atteinte par la prescription entre le 1er mai 2012 et 1er novembre 2012, de sorte qu'ayant définitivement liquidé ses droits à retraite le 1er mai 2012 en application de l'article R. 351-10 du code de la sécurité sociale, le paiement devait en être suspendu jusqu'à ce terme, il pouvait en principe bénéficier de ce cumul pour la période non prescrite sous réserve cependant du plafond énoncé à l'article L. 161-22 du code de la sécurité sociale de sorte qu'il convient d'enjoindre à la CARSAT d'opérer une régularisation à compter du 24 juillet 2016 jusqu'au 30 septembre 2017 du montant de la pension mensuelle servie à M. [R] en tenant compte de ses revenus salariés sur cette période, du plafond légal et des sommes déjà retenues par elle.

Sur la prise en compte des trimestres cotisés après le 1er mai 2012':

Au visa de l'article R. 351-10 du code de la sécurité sociale, dès lors que M. [R] a sollicité sa cessation d'activité auprès de la CARSAT au 1er mai 2012, il ne saurait obtenir une revalorisation de ses droits au titre des cotisations afférentes dans le cadre de sa reprise d'emploi postérieure si bien qu'infirmant le jugement entrepris, la demande de ce chef est rejetée.

Sur la majoration de la retraite au titre du handicap':

Au visa des articles L. 351-1-3 et D. 351-1-1 et suivants du code de la sécurité sociale, il y a lieu de dire que M. [R] est fondé en sa demande de majoration de sa pension de retraite au titre du handicap sur la base de celle liquidée au 1er mai 2012 et qu'il est fondé, sous réserve du respect du plafond légal dans le cadre du cumul emploi/retraite, à en obtenir le paiement à compter du 1er novembre 2012, date à laquelle la condition de 6 mois visée à l'article L. 161-22 alinéa 2 du code de la sécurité sociale pour le cumul emploi/ retraite était remplie.

Il convient en conséquence d'enjoindre à la CARSAT de recalculer la majoration de la pension de retraite au titre du handicap de M. [R] à compter du 1er novembre 2012, sur la base de la retraite liquidée le 1er mai 2012, en tenant compte des plafonds au titre du cumul pension de retraite/emploi salarié dans le cadre du versement de la pension de base avec le cas échéant des périodes de suspension en cas de dépassement.

Sur la demande de radiation de la base de nationale de signalement des fraudes':

Au visa de l'article 51 de la loi n°78-17 du 6 janvier 1978, M. [R] ne peut qu'être déclaré irrecevable, pour défaut de pouvoir de la cour d'appel, en sa demande d'effacement de son inscription dans la base de données nationale de signalement des fraudes régie par le décret n°2012-1200 du 29 octobre 2012 dès lors que la demande doit être adressée à l'autorité indépendante de la Commission informatique et libertés en cas de refus abusif de la CARSAT de procéder au retrait de son nom du fichier au vu du présent arrêt ne retenant aucune fraude de sa part.

Sur le compte entre les parties et les demandes accessoires':

Afin de faire le compte entre les parties et de statuer sur leurs demandes respectives de condamnations au titre du trop-perçu pour la période non-prescrite et de remboursement de sommes prélevées après que la CARSAT aura recalculé les droits à pension de M. [R] selon les points tranchés par la présente décision, il convient d'ordonner la réouverture des débats, de réserver les autres prétentions au principal ainsi que les demandes accessoires.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et contradictoirement après en avoir délibéré conformément à la loi,

Infime le jugement entrepris.

Statuant à nouveau,

Dit que la preuve de la fraude de M. [R] dans le cadre du cumul emploi/retraite n'est pas rapportée,

Déclare prescrite l'action en répétition de l'indu de la CARSAT Rhône-Alpes pour la période antérieure au 24 juillet 2016,

Enjoint à la CARSAT à Rhône-Alpes de':

-opérer une régularisation à compter du 24 juillet 2016 jusqu'au 30 septembre 2017 du montant de la pension mensuelle servie à M. [E] [R] en tenant compte de ses revenus salariés sur cette période, du plafond légal et des sommes déjà retenues par elle,

-recalculer la majoration de la pension de retraite au titre du handicap de M. [E] [R] à compter du 1er novembre 2012, sur la base de la retraite liquidée le 1er mai 2012, en tenant compte des plafonds au titre du cumul pension de retraite/emploi salarié dans le cadre du versement de la pension de base avec le cas échéant des périodes de suspension en cas de dépassement,

Déboute M. [E] [R] de sa demande tendant à voir prendre en compte ses cotisations retraite postérieurement à sa demande de cessation d'activité du 1er mai 2012,

Déclare M. [E] [R] irrecevable en sa demande d'effacement de son inscription dans la base de données nationale de signalement des fraudes régie par le décret n°2012-1200 du 29 octobre 2012,

Ordonne la réouverture des débats à l'audience du 9 mars 2023 à 9h00 afin qu'il soit fait le compte entre les parties après que la CARSAT Rhône-Alpes aura procédé au calcul de la pension de vieillesse de M. [R] selon les points tranchés par le présent arrêt,

Dit que la notification du présent arrêt vaut convocation des parties à cette audience,

Dit que':

-la CARSAT Rhône-Alpes devra déposer et notifier ses conclusions pour le 12 décembre 2022,

-M. [E] [R] devra déposer et notifier ses conclusions pour le 9 février 2023,

Réserve les autres demandes au principal ainsi qu'accessoires.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Mme Magali DURAND-MULIN, Conseiller faisant fonction de président et par Mme Chrystel ROHRER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GreffierLe Conseiller


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Ch.secu-fiva-cdas
Numéro d'arrêt : 20/01318
Date de la décision : 13/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-13;20.01318 ?
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