La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/09/2022 | FRANCE | N°20/01581

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Ch. sociale -section a, 06 septembre 2022, 20/01581


C1



N° RG 20/01581



N° Portalis DBVM-V-B7E-KNQY



N° Minute :

















































































Copie exécutoire délivrée le :





la SELARL MOUNIER DUDAR AVOCATS



Me Typhaine ROUSSELLET

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
r>

COUR D'APPEL DE GRENOBLE



Ch. Sociale -Section A

ARRÊT DU MARDI 06 SEPTEMBRE 2022





Appel d'une décision (N° RG 19/00164)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VIENNE

en date du 24 février 2020

suivant déclaration d'appel du 23 Mars 2020



APPELANTE :



S.A.R.L. AM2J, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié e...

C1

N° RG 20/01581

N° Portalis DBVM-V-B7E-KNQY

N° Minute :

Copie exécutoire délivrée le :

la SELARL MOUNIER DUDAR AVOCATS

Me Typhaine ROUSSELLET

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

Ch. Sociale -Section A

ARRÊT DU MARDI 06 SEPTEMBRE 2022

Appel d'une décision (N° RG 19/00164)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VIENNE

en date du 24 février 2020

suivant déclaration d'appel du 23 Mars 2020

APPELANTE :

S.A.R.L. AM2J, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège,

SIRET N° : 538 428 913 00015

[Adresse 6]

[Localité 2]

représentée par Me Laureen MOUNIER de la SELARL MOUNIER DUDAR AVOCATS, avocat postulant inscrit au barreau de LYON, substituée par Me Maïlys ROMAN, avocat au barreau de LYON,

INTIMEE :

Madame [R] [M]

née le 25 Septembre 1989 à [Localité 5]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Typhaine ROUSSELLET, avocat postulant inscrit au barreau de GRENOBLE,

et par Me Marion MORALY, avocat plaidant inscrit au barreau de LYON,

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/006444 du 23/07/2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de GRENOBLE),

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Valéry CHARBONNIER, conseillère faisant fonction de présidente,

Madame Gaëlle BARDOSSE, conseillère,

Madame Magali DURAND-MULIN, conseillère,

DÉBATS :

A l'audience publique du 10 Mai 2022,

Mme Gaëlle BARDOSSE, conseillère chargée du rapport, assistée de Mme Mériem CASTE-BELKADI, greffière, a entendu les parties en leurs conclusions et plaidoiries, les parties ne s'y étant pas opposées conformément aux dispositions de l'article 805 du code de procédure civile.

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 6 Septembre 2022, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la cour.

L'arrêt a été rendu le 6 Septembre 2022.

Exposé du litige':

Mme [M] a été engagée à compter du 18 juin 2016 en qualité de vendeuse dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée par la SARL AM2J. Elle a été affectée au sein d'un établissement situé dans la zone commerciale de [Localité 4], exerçant sous l'enseigne JENNYFER.

Le 24 août 2018, Mme [M] a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement.

Elle a été licenciée pour faute grave par courrier daté du 11 septembre 2018.

Mme [M] a saisi le conseil de prud'hommes de Vienne, en date du'13 mai 2019 aux fins de voir son licenciement requalifié en licenciement sans cause réelle et sérieuse et obtenir les indemnités afférentes.

Par jugement du'24 février 2020, le conseil des prud'hommes de Vienne'a':

- Dit et jugé le licenciement de Mme [M] dénué de cause réelle et sérieuse';

- Rejeté la qualification de faute grave ;

- Condamné la société AM2J à verser à Mme [M] les sommes suivantes':

- 1'095,40 € au titre de l'indemnité de licenciement';

- 3'755,66 € au titre de l'indemnité de préavis';

- 375, 56 € au titre des congés payés sur préavis ;

- 6'570 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- Ordonné la remise sous astreinte de 50 € par jour de retard des documents de fin de contrat rectifiés, à compter du délai d'un mois suivant la notification de la présente décision ;

- Rappelé que les intérêts courent de plein droit au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud'hommes, en ce qui concerne les créances de nature salariale et à compter du prononcé de la présente décision pour les autres sommes allouées ;

- Condamné la SARL AM2J à payer à Maître [V] [I] la somme de 1'500 € au titre des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 ;

- Débouté Mme [M] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamné la SARL AM2J aux entiers dépens de l'instance.

La décision a été notifiée aux parties et la SARL AM2J en a interjeté appel.

Par conclusions du'24 mars 2022, la SARL AM2J demande à la cour d'appel de':

- Déclarer recevable et bien fondé l'appel formé

- Infirmer le jugement du Conseil de prud'hommes de Vienne

A titre principal,

- Déclarer le licenciement de Mme [M] pour faute grave parfaitement fondé

En conséquence,

- Débouter Mme [M] de l'ensemble de ses demandes

A titre subsidiaire,

- Déclarer le licenciement de Mme [M] fondé sur une cause réelle et sérieuse

- Réduire le montant sollicité par Mme [M] aux seules sommes suivantes':

- 1'033, 62 € au titre de l'indemnité de licenciement';

- 3'548, 90 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis ;

- 354, 89 € de congés payés sur préavis.

En tout état de cause,

- Condamner Mme [M] au paiement à la société AM2J de la somme de 2'500€ au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

- Condamner Mme [M] aux entiers dépens

Par conclusions en réponse du 21 mars 2022, Mme [M] demande à la cour d'appel de':

A titre principal,

De confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Vienne rendu le 24 février 2020 en ce qu'il a':

- Dit et jugé le licenciement dénué de cause réelle et sérieuse,

- Condamné la SARL AM2J à lui verser les sommes suivantes :

-1 095,40 € au titre de l'indemnité de licenciement ;

- 3 755.66 € au titre de l'indemnité de préavis ;

- 375.56 € au titre des congés payés dur préavis ;

- 6 570€ au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

- Ordonné la remise sous astreinte de 50 € par jour de retard des documents de fin de contrat (attestation Pôle Emploi, solde de tout compte, certificat de travail et bulletins de paie) rectifiés à compter du délai de 1 mois suivant la notification de la présente décision. Le conseil se réservant expressément le pouvoir de liquider sur simple requête de Mme [M].

- Rappelé que les intérêts courent de plein droit au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud'hommes, en ce qui concerne les créances de nature salariale et à compter du prononcé de la présente décision pour les autres sommes allouées.

- Dit et jugé qu'il n'y a pas lieu d'ordonner la capitalisation des intérêts.

- Condamné la SARL AM2J à payer à Maître [V] [I] la somme de 1 500 € au titre des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991.

- Donné acte à Maître [V] [I] de ce qu'elle s'engage à renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle, si dans les 12 mois où la décision à intervenir est passée en force de chose jugée, elle parvient à recouvrer auprès de la SARL AM2J la somme allouée, et si cette somme est supérieure à l'indemnité qui aurait été versée au titre de l'aide juridictionnelle.

- Débouté Mme [M] de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

- Dit et jugé qu'il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article L. 1235-4 du Code du travail.

- Débouté la SARL AM2J de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

- Condamné la SARL AM2J aux entiers dépens de l'instance.

A titre subsidiaire,

- Ecarter la faute grave et dire et juger que le licenciement de Mme [M] repose sur une cause réelle et sérieuse,

En tout état de cause,

- Ordonner la remise sous astreinte de 50€ par jour de retard des documents de fin de contrat (attestation Pôle Emploi, solde de tout compte, certificat de travail) et bulletins de paie rectificatifs.

- Fixer le point de départ des intérêts au taux légal sur l'intégralité des demandes à compter de la saisine du conseil de prud'hommes, avec capitalisation.

- Condamner la société AM2J aux entiers dépens de l'instance.

- Prendre acte que Mme [M] bénéficie de l'aide juridictionnelle totale selon décision n° 38185/002/2020/006444 du 23 juillet 2020.

- Dire qu'il serait inéquitable que le Trésor public et le conseil de Mme [M], d'autre part, finance tous deux sa défense alors que la société AM2J est parfaitement en capacité de faire face aux frais que la concluante devrait supporter si elle n'avait pas eu le bénéfice de l'aide juridictionnelle.

En conséquence, vu les articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991, et les diligences effectuées par Me [I], condamner la société AM2J au versement de 2 000 € à titre d'indemnité qualifiée de frais et honoraires auprès de Me [I], conseil de Mme [M] qui pourra directement les recouvrer au titre de la présente instance.

Vu l'article 700 du code de procédure civile et les frais non répétables exposés par Mme [M], condamner la société AM2J à lui verser la somme de 2'000 €.

Donner acte, à Maître [V] [I] de ce qu'elle s'engage à renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle, si dans les 12 mois où la décision à intervenir est passée en force de chose jugée, elle parvient à recouvrer auprès de la SARL AM2J la somme allouée, et si cette somme est supérieure à l'indemnité qui aurait été versée au titre de l'aide juridictionnelle.

L'ordonnance de clôture a été rendue le'3 mai 2022.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère à la décision attaquée et aux dernières conclusions déposées.

SUR QUOI':

Sur le bien-fondé du licenciement':

Moyens des parties :

La SARL AM2J fait valoir que la relation de travail avec Mme [M] ne s'est pas toujours déroulée sans difficulté et qu'elle a notamment délibérément inversé les deux deuxièmes pages des deux récapitulatifs de ses entretiens annuels (correspondant à ses pièces 13 et 14) afin de tromper la cour sur la qualité de son travail. Mme [M] a commis divers manquements contractuels':

- Elle a communiqué le code du coffre du magasin à une salariée en contrat à durée déterminée, présente depuis seulement quelques semaines au sein de l'enseigne manquant ainsi à son obligation de discrétion et de confidentialité';

- Des clients se sont plaints de son comportement et plus particulièrement de la mauvaise qualité de son accueil': froideur, absence de conseil, attitude méprisante et moqueuse vis-à-vis de certains clients, reproches faits à ses responsables en présence de clients';

- Mme [M] ne remplissait pas certains documents afférents à sa mission'(guides incontournables, cahiers efficom, Jenny Business, Jenny info') malgré les rappels à l'ordre de son employeur';

- Le ménage et le rangement effectués dans l'entreprise étaient insuffisants. Or, la fiche de poste signée par Mme [M] prévoit que la salariée doit «'maintenir un magasin propre et rangé'» et «'s'assurer de la propreté et du respect du magasin'»';

- Mme [M] s'est absentée de son poste sans autorisation le 4 août 2018, provoquant ainsi une désorganisation de l'entreprise alors que sa demande de jour de congé avait été refusée par l'employeur puisque le 4 août 2018 était un samedi en période de solde';

- Elle a pris une pause non autorisée le 23 août 2018, et ce seulement 38 minutes après avoir pris son poste';

Mme [M] expose que les faits qui lui sont reprochés ne constituent pas une faute grave'et que s'il y a eu une inversion de pages dans les récapitulatifs d'entretien annuel, cette inversion n'était pas volontaire et ne procède d'aucune volonté de tromperie sa part. En effet, lesdits documents n'étaient pas datés de sorte qu'il était impossible de s'assurer de la correspondance des pages 1 et 2. Les remarques présentes dans ces récapitulatifs annuels ne sont pas reprises dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige. Concernant les griefs énoncés, elle fait valoir que':

- S'agissant de la communication du code du coffre, le gérant lui a demandé de former une nouvelle salariée pour l'aider à ouvrir et fermer les caisses et le magasin en raison de l'absence prolongée de l'une de ses collaboratrices. Son choix s'est porté sur Mme [O] et a été validé par M. [H], responsable du magasin, lequel ne l'a à aucun moment informée de l'interdiction de communiquer le code du coffre à la salariée nouvellement formée. L'ouverture et la fermeture des caisses impliquant l'accès au coffre, il était légitime de communiquer le code d'accès au coffre à Mme [O] afin que cette dernière puisse accomplir sa mission en toute autonomie';

- Concernant les plaintes des clients, elle n'a jamais fait l'objet de sanction à ce titre puisqu'il s'agit d'accusations mensongères. De plus, la société ne produit aucune pièce permettant d'attester des faits reprochés';

- Au regard du compte rendu d'entretien du 23 février 2018, elle donnait pleinement satisfaction concernant l'accueil des clients. En effet, ce document stipule notamment qu'elle assure un accueil enthousiaste et sincère à toutes les clientes'; assure un encaissement sécurisé, rapide et de qualité';

- Concernant les documents non complétés, ils ne l'ont jamais été ni par elle-même ni par ses collègues de travail et ceci n'a jamais donné lieu à des rappels à l'ordre de la part de la société. Ni sa fiche de poste ni son contrat de travail ne font état de ces documents et en l'absence d'avertissement préalable, le fait de ne pas avoir complété de tels documents ne saurait être fautif';

- Concernant le rangement et le ménage de la société, elle devait assumer les fonctions de responsable de magasin et ne pouvait donc pas assumer le ménage et un tel manquement ne saurait caractériser une faute grave rendant impossible le maintien du contrat de travail';

- Concernant l'absence du 4 août 2018, M. [H], responsable du magasin, avait encadré la prise de congés payés par les salariés de manière totalement abusive. Elle avait demandé à son employeur de pouvoir débuter ses congés le 4 août 2018 et ce dernier a refusé et fixé la date de manière arbitraire au 6 août. Cette décision ne reposait sur aucun élément objectif puisque la période de soldes touchait à sa fin et l'activité du magasin au début du mois d'août était largement ralentie, la société n'établit pas en quoi son absence a désorganisé le fonctionnement du magasin. Le refus du gérant avait pour seul but de la pousser à la faute. En effet, elle était victime depuis quelques semaines de menaces incessantes de la part de son employeur.

Réponse de la cour':

La faute grave, qui peut seule justifier une mise à pied conservatoire, est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise. La preuve de la faute grave incombe à l'employeur, conformément aux dispositions des articles 1353 du code civil et 9 du code de procédure civile.

Si elle ne retient pas la faute grave, il appartient à la juridiction saisie d'apprécier le caractère réel et sérieux des motifs de licenciement invoqués par l'employeur, conformément aux dispositions de l'article L. 1232-1 du code du travail.

En l'espèce, la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige est libellée comme suit':

« ('.) Il vous est reproché d'avoir communiqué à une personne non-habilitée le code permettant d'ouvrir le coffre de l'entreprise. En effet, nous avons appris en août 2018 que vous aviez divulgué ce code à Madame [K] [O], salariée en contrat de travail à durée déterminée embauchée cet été 2018.

En effet, nous vous rappelons que tous les salariés sont soumis à une obligation générale de discrétion et de confidentialité à l'égard des informations auxquelles ils ont accès au sein de l'entreprise et dans le cadre de leur fonction. Cette obligation implique une interdiction absolue de révéler des informations à caractère confidentiel.

Or, le code du coffre de l'entreprise constituait une information confidentielle qui, pour des raisons de sécurité, ne serait être révélé sans l'autorisation préalable de l'employeur. Madame [K] [O], tenu du caractère temporaire de son contrat et de son niveau de qualification, n'était en effet pas autorisée à avoir accès à cette information. Ainsi, le fait de communiquer une telle information constitue un manquement grave à votre obligation de discrétion.

Par ailleurs, par le passé, nous avions déjà eu à regretter de votre part plusieurs exécutions défectueuses de vos missions, dont notamment les faits suivants :

- Nous avons reçu des plaintes de clients, dont la dernière est en date du 1er septembre 2018, où il vous a notamment été reproché la mauvaise qualité de votre accueil : froideur, absence de conseil, attitude méprisante et moqueuse vis-à-vis de certains clients, bavardage avec des collègues au lieu de s'occuper de la clientèle, reproches faits à vos responsables en présence de clients'..

- Vous ne remplissez pas convenablement certains documents afférents à votre mission (absence de signature pour les guides incontournables, cahier Efficom, Jenny Business, Jenny info.)

- Nous vous avions également reproché la qualité du ménage et du rangement que vous effectuez dans l'entreprise, celui-ci étant insuffisant.

Notamment le 7 septembre 2018, nous avons constaté que des pochettes cadeaux manquaient au niveau des caisses, de nombreuses étiquettes prix étaient restées sur le sol, les portants et muraux étaient mal rangés et que le ménage d'une manière générale n'avait pas été fait convenablement.

- Vous vous êtes absentée de votre poste sans prévenir et sans fournir de justificatif le 4 août 2018, provoquant ainsi une désorganisation de l'entreprise, afin de réussir à compenser cette absence en urgence par vos collègues, le jour-même ;

- Le 23 août 2018, vous avez pris votre poste à 16h puis, dès 16h38, vous vous êtes octroyée une pause pour manger, et cela sans autorisation.

Ces faits mettent en cause la bonne marche de l'entreprise. En conséquence, au regard de tous ces motifs, nous ne pouvons poursuivre notre collaboration et nous vous informons que nous sommes contraints de procéder à votre licenciement pour faute grave. »

Il convient tout d'abord de relever que la SARL AM2J ne produit aucune pièce pour étayer le grief de la prise par la salariée d'une pause non autorisée le 23 août 2018 ou s'agissant de plaintes de clients concernant la salariée. Il en est de même concernant le fait que la salariée ne remplissait pas certains documents. Ces griefs ne sont donc pas établis.

S'agissant de la communication «'à une personne non-habilitée'» du code permettant d'ouvrir le coffre de l'entreprise, il est constant que le contrat de travail de la salariée précise qu'elle'est soumise, comme tous salariés, à une obligation générale de discrétion et de confidentialité à l'égard des informations auxquelles elle a accès au sein de l'entreprise et dans le cadre de sa fonction.

La SARL AM2J argue que seules les premières vendeuses ou les responsables de magasin disposent du code du coffre et des clés du magasin. Cependant, il est acquis que le magasin de [Localité 4], dans lequel exerçait la salariée, en qualité de vendeuse, a rencontré des difficultés s'agissant du personnel encadrant et que Mme [M] a alors «'fait office de première vendeuse et, à ce titre, il lui a été confié le code du coffre et les clés du magasin pour ouvrir et fermer ponctuellement le magasin, avec Mme [T], une autre vendeuse en CDI'».

Mme [M] qui reconnaît avoir communiqué le code du coffre à une salariée en contrat à durée déterminée,'Mme [O], fait cependant valoir que cela ne lui était pas interdit, que son responsable (M. [H]) en était informé, ce dernier lui ayant demandé de former une autre salariée pour accomplir ses tâches en l'absence de responsable.

Il n'est produit par l'employeur aucune consigne ou réglementation écrite communiquées aux salariés s'agissant des conditions de communications des codes du coffre. La fiche de poste de «'première vendeuse'» n'est ainsi pas versée et il n'est dès lors pas possible de savoir si des instructions existaient quant à la communication du code.

En outre, s'il ne peut être contesté que le code d'un coffre contenant de l'argent est une donnée a priori confidentielle, Mme [M] argue sans être contredite que l'accès au coffre était indispensable à l'ouverture et à la fermeture du magasin pour y déposer les fonds de caisse. Il n'est pas contesté que le responsable du magasin ou la personne faisant fonction avait cette mission et que Mme [M] en était parfois la responsable.

La SARL AM2J, qui fait valoir qu'en l'absence de Mme [M], M. [H] procédait à l'ouverture et à la fermeture du magasin et qu'en conséquence il n'y avait pas lieu à confier cette mission à une autre salariée, ne produit aucun planning de Mme [M] ou de M. [H] permettant de confirmer que l'un ou l'autre était forcément présent pour procéder à cette mission.

Mme [G], responsable de magasin, atteste n'avoir jamais vu d'apprentie vendeuse en alternance en possession des clés. Cependant, ainsi que conclu par l'employeur, Mme [G] étant déjà en poste dans un autre magasin, ne se rendait que 2 fois par semaine au magasin de [Localité 4] et ne peut dès lors apporter des éléments sur les modalités d'accès au coffre en son absence ou durant l'absence de Mme [M].

Il convient donc de relever que si la communication du code par la salariée à une autre salariée est établie, l'employeur ne démontre pas que la salariée était informée de la confidentialité du code d'ouverture du coffre ou de conditions restrictives de communication de code. Au surplus, il n'est justifié d'aucune conséquence dommageable pour l'entreprise. Ce grief n'est pas établi.

S'agissant des négligences dans le ménage, il n'est pas contesté que la salariée devait notamment dans le cadre de ses missions assurer du ménage ou rangement. L'entretien d'évaluation du 6 octobre 2016 indique dans les points à améliorer «'propreté du magasin'» et celui du 23 février 2018 mentionne que la salariée doit être plus attentive au ménage et au rangement. Il n'est pour autant pas produit par l'employeur de pièces permettant de caractériser ce grief ou de le dater plus précisément. Le mail de Mme [G] du 19 juillet 2018 produit, dans lequel elle demande aux salariés du magasin de « maintenir propre et rangé les armoires access + chaussettes soldes et new co », n'est pas adressé exclusivement à Mme [M]. Ce grief n'est dès lors pas établi.

Concernant l'absence du 4 août 2018, la salariée ne conteste pas avoir pris ce congé, sans autorisation, arguant du refus de sa demande qu'elle estimait injustifié. L'employeur, qui ne verse aucun élément portant sur la notification de ce refus à la salariée, argue que ce congé ne pouvait lui être accordé s'agissant d'une période de solde. Mme [M] produit une copie de la demande de congés sur laquelle figure les conditions posées par l'employeur s'agissant des règles d'attribution des congés qui permet de relever que la date du 4 août ne se situe pas dans une période exclue de principe par l'employeur. Il est cependant acquis que la salariée a pris un congé sans y avoir été autorisée. Ce grief est établi.

S'agissant des antécédents de la salariée, il est exact que l'entretien d'évaluation du 23 février 2018 relève des points à améliorer concernant notamment le ménage et que la note de la salariée passe à 14 sur 25'contre 22 sur 25 en 2016.

L'employeur ne produit pas l'entretien d'évaluation de l'année 2017 et ne justifie pas d'autres rappels à l'ordre à la salariée dans quelque domaine que ce soit, autres que les constats effectués lors des deux entretiens produits. Aucun reproche n'est fait par exemple dans cet entretien s'agissant des relations avec les clients. De même la cour relève que le fait de demander à la salariée de «'faire fonction'» de première vendeuse tend à contredire l'existence d'une insatisfaction de son employeur concernant son travail.

Au vu de ce qui précède, le seul grief établi consistant pour la salariée à prendre un congé sans autorisation sans que la société ne justifie d'un préjudice en découlant ne constitue pas une faute d'une importance telle qu'elle rendait impossible le maintien de l'intéressée au sein de l'entreprise même pendant la durée du préavis.

Par ailleurs, le licenciement pour cause réelle et sérieuse de Mme [J] ne constitue pas une sanction proportionnée à la faute commise, la salariée n'ayant au surplus reçu au préalable aucun avertissement ou autre sanction.

Il convient par conséquent de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a dit que le licenciement de Mme [J] ne reposait pas ni sur une faute grave ni sur une cause réelle et sérieuse. La salariée est donc fondée à obtenir paiement d'une indemnité compensatrice de préavis, d'une indemnité compensatrice de congés payés afférente, d'une indemnité de licenciement et d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Compte tenu de l'ancienneté de la salariée, la décision des premiers juges est en outre confirmée en ce qu'elle a condamné la société AM2J à verser à Mme [M] les sommes suivantes':

- 1'095,40 € au titre de l'indemnité de licenciement.

- 3'755,66 € au titre de l'indemnité de préavis'outre la somme de 375, 56 € au titre des congés payés sur préavis.

- 6'570 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur le remboursement des allocations chômage :

Il conviendra, conformément aux dispositions de l'article L. 1235-4 du code du travail, (dans version applicable au 1er mai 2008, issue de la loi du 8 août 2016 et applicable au 10 août 2016, issue de la loi du 5 septembre 2018 et applicable au 1er janvier 2019) d'ordonner d'office à l'employeur le remboursement des allocations chômages perçues par le salarié du jour de son licenciement au jour de la présente décision dans la limite de six mois, les organismes intéressés n'étant pas intervenus à l'audience et n'ayant pas fait connaître le montant des indemnités versés.

Une copie de la présente décision sera adressée à Pôle Emploi à la diligence du greffe de la présente juridiction.

Sur la remise d'une attestation POLE EMPLOI et d'un bulletin de salaire rectifiés :

Il convient d'ordonner à la société AM2J de remettre à Mme [M] un bulletin de salaire et une attestation Pôle emploi conformes au présent arrêt dans le mois de la notification ou de l'éventuel acquiescement à la présente décision.

La demande d'astreinte sera rejetée car elle n'est pas utile à l'exécution dans la présente décision.

Sur les demandes accessoires':

Le jugement déféré sera infirmé en ses dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles de première instance.

La Société AM2J succombant à l'instance est condamnée au paiement de, à verser à Mme [M], bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, la somme de 1 500 € au titre de la loi 91-647 du 10 juillet 1991 qui pourront être recouvrés par Maître [V] [I] qui s'engage à renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle, si dans les 12 mois où la décision à intervenir est passée en force de chose jugée, elle parvient à recouvrer auprès de la SARL AM2J la somme allouée, et si cette somme est supérieure à l'indemnité qui aurait été versée au titre de l'aide juridictionnelle.

La société AM2J est condamnée aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS':

La cour, statuant contradictoirement après en avoir délibéré conformément à la loi,

DECLARE'la société AM2J recevable en son appel,

CONFIRME le jugement déféré en toutes ces dispositions,

Y ajoutant,

CONDAMNE la société AM2J à verser à Mme [M], bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, la somme de 1 500 euros au titre de la loi 91-647 du 10 juillet 1991 à titre d'indemnité qualifiée de frais et honoraires auprès de Maître [V] [I], conseil de Mme [M] qui pourra directement les recouvrer au titre de la présente instance,

DONNE ACTE à Maître [V] [I] de ce qu'elle s'engage à renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle, si dans les 12 mois où la décision à intervenir est passée en force de chose jugée, elle parvient à recouvrer auprès de la SARL AM2J la somme allouée, et si cette somme est supérieure à l'indemnité qui aurait été versée au titre de l'aide juridictionnelle,

ORDONNE à la société AM2J de remettre à Mme [M] un bulletin de salaire et une attestation Pôle emploi et les documents de rupture conformes au présent arrêt dans le mois de la signification ou de l'éventuel acquiescement à la présente décision,

REJETTE la demande d'astreinte.

ORDONNE à l'employeur le remboursement des allocations chômages perçues par la salariée du jour de son licenciement au jour de la présente décision dans la limite de six mois, les organismes intéressés n'étant pas intervenus à l'audience et n'ayant pas fait connaître le montant des indemnités versés.

DIT qu'une copie de la présente décision sera adressée à Pôle Emploi à la diligence du greffe de la présente juridiction,

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Valéry CHARBONNIER, conseillère faisant fonction de présidente, et par Madame Mériem CASTE-BELKADI, greffière, à qui la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Ch. sociale -section a
Numéro d'arrêt : 20/01581
Date de la décision : 06/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-06;20.01581 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award