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07/07/2022 | FRANCE | N°20/03255

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Ch. sociale -section b, 07 juillet 2022, 20/03255


C9



N° RG 20/03255



N° Portalis DBVM-V-B7E-KST4



N° Minute :













































































Copie exécutoire délivrée le :





la SCP GERMAIN-PHION JACQUEMET



Me Célia LAMY





AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


>COUR D'APPEL DE GRENOBLE



Ch. Sociale -Section B

ARRÊT DU JEUDI 07 JUILLET 2022





Appel d'une décision (N° RG 18/00381)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de GRENOBLE

en date du 18 septembre 2020

suivant déclaration d'appel du 21 octobre 2020





APPELANTE :



Madame [U] [A]

née le 18 mai 1989 à VOIRON (38500)

de nationalité Française

35 rue de...

C9

N° RG 20/03255

N° Portalis DBVM-V-B7E-KST4

N° Minute :

Copie exécutoire délivrée le :

la SCP GERMAIN-PHION JACQUEMET

Me Célia LAMY

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

Ch. Sociale -Section B

ARRÊT DU JEUDI 07 JUILLET 2022

Appel d'une décision (N° RG 18/00381)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de GRENOBLE

en date du 18 septembre 2020

suivant déclaration d'appel du 21 octobre 2020

APPELANTE :

Madame [U] [A]

née le 18 mai 1989 à VOIRON (38500)

de nationalité Française

35 rue des Ecoles

38140 RENAGE

représentée par Me Laure GERMAIN-PHION de la SCP GERMAIN-PHION JACQUEMET, avocat au barreau de GRENOBLE

INTIMEE :

EURL BEC RIVES, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

Rue Louis Néel Quartier du Levatel

38140 RIVES

représentée par Me Célia LAMY, avocat postulant au barreau de GRENOBLE substituée par Me Wilfried SAMBA-SAMBELIGUE, avocat au barreau de GRENOBLE,

et par Me Diane GRELLET MALLET de la SELARL LIVELY, avocat plaidant au barreau d'AVIGNON

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Blandine FRESSARD, Présidente,

M. Frédéric BLANC, Conseiller,

Mme Hélène BLONDEAU-PATISSIER, Conseillère,

Assistés lors des débats de M. Fabien OEUVRAY, Greffier,

DÉBATS :

A l'audience publique du 25 mai 2022,

Monsieur BLANC, Conseiller, chargé du rapport,

Les avocats ont été entendus en leurs observations.

Et l'affaire a été mise en délibéré à la date de ce jour à laquelle l'arrêt a été rendu.

EXPOSE DU LITIGE':

Selon contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel en date du 15 mai 2017, Mme [U] [A] a été embauchée par la SARL Bec Rives en qualité de vendeuse coefficient 155 de la convention collective nationale de la boulangerie-pâtisserie (entreprises artisanales).

Les horaires hebdomadaires ont été fixés à 24 heures rémunérées à 9,81€ bruts de l'heure.

Selon avenant du 03 juillet 2017, le volume horaire hebdomadaire a été porté à 34 heures de présence par semaine selon le planning affiché dans l'entreprise et ce jusqu'au 8 juillet 2017.

Par avenant du 24 juillet 2017, le volume horaire a été augmenté à 34 heures hebdomadaires et ce, jusqu'au 29 juillet 2017, la rémunération horaire étant portée à 9,94 € bruts.

Selon un troisième avenant du 31 juillet 2017, la durée du travail a été maintenue à 34 heures hebdomadaires jusqu'au 02 septembre 2017.

Au terme d'un avenant du 21 août 2017, les parties ont convenu de porter la durée du travail à 35 heures hebdomadaires, soit selon un temps plein.

Le 27 septembre 2017, Mme [A] a été placée en arrêt suite à un accident aux lieu et temps de travail et ce, jusqu'au 02 novembre 2017.

Le 25 octobre 2017, l'arrêt a été prolongé jusqu'au 29 novembre 2017.

Le 1er décembre 2017, Mme [A] a passé une visite de reprise.

Le médecin l'a déclarée «apte en limitant pendant 2 mois les accroupissements, semelles orthopédiques recommandées».

Le 1er février 2018, par lettre remise en main propre, Mme [A] a été convoquée à un entretien préalable fixé au vendredi 09 février 2018 à 11 h 30, au siège social de l'entreprise, et informée qu'elle était mise à pied à titre conservatoire, dans l'attente de la décision à son encontre.

Le 12 février 2018, Mme [A] a passé une visite médicale, à sa demande et à celle de l'inspecteur du travail. Le médecin a déclaré Mme [A] inapte temporairement et demandé des aménagements du poste en limitant les accroupissements, les efforts du bras droit en hauteur et le stress. Il était précisé « un risque d'inaptitude dans les conditions actuelles de l'organisation du travail'».

Le 15 février 2018, par lettre recommandée, l'EURL Bec Rives a notifié à Mme [A] son licenciement pour faute grave.

Par requête en date du 17 avril 2018, Mme [A] a saisi le conseil de prud'hommes de Grenoble d'une demande de requalification de son temps partiel en temps plein, de prétentions de rappels de salaire afférentes, d'une demande indemnitaire au titre du manquement à l'obligation de sécurité, d'une demande à raison d'une discrimination prohibée du fait de son état de santé et pour contester son licenciement, entendant le voir déclarer nul et à tout le moins sans cause réelle et sérieuse.

Par décision en date du 25 mai 2018, le bureau d'orientation et de conciliation a ordonné une mesure d'instruction visant à procéder, par deux conseillers rapporteurs, au visionnage des enregistrements du dispositif de vidéo-surveillance de l'employeur et d'entendre toute personne susceptible d'apporter des éléments complémentaires.

Les conseillers rapporteurs ont déposé leur rapport le 15 octobre 2018.

La société Bec Rives s'est opposée aux prétentions adverses.

Par jugement en date du 18 septembre 2020, le conseil de prud'hommes de Grenoble a':

- requalifié le contrat de travail à temps partiel de Mme [U] [A] en contrat à temps plein,

- condamné l'EURL Bec Rives à verser à Mme [U] [A] les sommes de':

- 1 071,96 € brut à titre de rappel de salaire,

- 107,19 € brut à titre de congés payés afférents,

- 2 000,00 € net à titre de dommages et intérêts pour non-respect de l'obligation de prévention et sécurité,

- 1 200,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

- ordonné l'exécution provisoire de la totalité de la présente décision.

- débouté Mme [U] [A] de ses autres demandes.

- débouté l'EURL Bec Rives de sa demande reconventionnelle.

- condamné l'EURL Bec Rives aux dépens.

La décision a été notifiée par le greffe par lettres recommandées dont l'accusé de réception a été signé le 30 septembre 2020 pour l'EURL Bec Rives et le 01 octobre 2020 pour Mme [A].

Par déclaration en date du 21 octobre 2020, Mme [U] [A] a interjeté appel à l'encontre dudit jugement.

Mme [U] [A] s'en est remise à des conclusions transmises le 15 juillet 2021 et entend voir':

Vu les dispositions de l'article L 1471-1 du code du travail,

Vu les dispositions de l'article L 4121-1 du code du travail,

CONFIRMER le jugement entrepris en ce qu'il a :

- Requalifié la relation de travail à temps partiel entre le 15 mai et le 20 août 2017 en contrat de travail à temps plein et condamné la société Bec Rives à verser à Mme [A] la somme de 1 071,96€ bruts à titre de rappels de salaire, outre 107,19 € bruts au titre des congés payés afférents,

- retenu le manquement de la société Bec Rives à ses obligations de prévention et de sécurité et l'a condamnée à verser à Mme [A] la somme de 2 000 € nets à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi,

- condamné la société BEC RIVES à verser à Mme [A] la somme de 1 200 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

INFIRMER le jugement entrepris pour le surplus et, statuant à nouveau,

DIRE ET JUGER que Mme [A] a fait l'objet de discrimination liée à son état de santé et CONDAMNER la société Bec Rives à verser à Mme [A] la somme de 8 000 € nets à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi.

DIRE ET JUGER que le licenciement de Mme [A] est nul, à titre principal, et sans cause réelle et sérieuse, à titre subsidiaire.

CONDAMNER la société Bec Rives à verser à Mme [A] les sommes suivantes :

- 269,61 € net à titre d'indemnité de licenciement,

- 1 617,68 € bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 161,77 € bruts au titre des congés payés afférents,

- 10 000 € nets de CSG-CRDS au titre de la nullité du licenciement, et subsidiairement à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

CONDAMNER la société Bec Rives à verser à Mme [A] la somme 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que les dépens.

La société Bec Rives s'en est rapportée à des conclusions transmises le 17 avril 2021 et demande à la cour d'appel de':

CONFIRMER le jugement du conseil de prud'hommes de Grenoble du 18 septembre 2020 en ce qu'il a débouté Mme [A] de sa demande de dommages et intérêts au titre d'une discrimination

CONFIRMER le jugement en ce qu'il a constaté l'existence d'une faute grave commise par Mme [A]

En conséquence :

DEBOUTER Mme [A] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions.

CONDAMNER Mme [A] à payer à la société Bec Rives la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

CONDAMNER Mme [A] aux entiers dépens.

Pour un exposé complet des moyens et prétentions des parties, il convient au visa de l'article 455 du code de procédure civile de se reporter à leurs écritures sus-visées.

La clôture a été prononcée le 25 mai 2022.

EXPOSE DES MOTIFS':

Sur le périmètre de l'appel':

Mme [A] demande la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a requalifié son contrat de travail à temps partiel en temps plein et lui a alloué la somme de 2000 euros de dommages et intérêts au titre du manquement de l'employeur à son obligation de sécurité.

Au visa de l'article 954 du code de procédure civile, la SARL Bec Rives n'a pas interjeté d'appel incident de ces chefs de condamnation au principal, de sorte que la cour d'appel n'est saisie d'aucune contestation à ce titre si bien que la juridiction n'a pas à statuer sur ces dispositions de ce jugement, qui sont définitives.

Sur la discrimination prohibée à raison de l'état de santé'et le licenciement :

l'article L 1132-1 du code du travail tel que modifié par la loi n°2014-173 du 21 février 2014, puis par la loi n°2016-832 du 24 juin 2016 prévoit qu'aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L. 3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses moeurs, de son orientation ou identité sexuelle, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille, de son lieu de résidence ou en raison de son état de santé ou de son handicap.

L'article L 1134-1 du code du travail tel qu'issu de la loi n°2008-496 du 27 mai 2008 prévoit que lorsque survient un litige en raison d'une méconnaissance des dispositions du chapitre II, le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, qu'au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination et que le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Mme [A] n'établit pas la matérialité des éléments de fait suivants':

- elle a été la seule salariée non conviée au pot de fin d'année, après son retour d'arrêt de travail pour accident du travail. Le seul fait que l'employeur reste taisant à ce titre ne saurait objectiver, en l'absence de toute pièce à ce titre produite par Mme [A], la matérialité de l'élément de fait. En effet, le défaut de réponse de la société Bec Rives ne peut pas ipso facto s'interpréter comme un aveu judiciaire

- aucun pièce ne vient objectiver une mise à l'écart de Mme [A] à la suite de la reprise de son travail

Mme [A] établit la matérialité des éléments de fait suivants':

- elle a été victime d'un accident du travail le 27 septembre 2017 ayant donné lieu à un arrêt de travail jusqu'au 29 novembre 2017

- le médecin du travail, lors de la visite de reprise du 1er décembre 2017, l'a déclarée apte avec comme réserves celles de limiter pendant deux mois les accroupissements et le port recommandé de semelles orthopédiques'; préconisations dont elle dit qu'elles n'ont pas été suivies

- dans une attestation datée du 20 août 2019 mais non conforme à l'article 202 du code de procédure civile (pas de mention sur la peine encourue en cas de faux témoignage), M. [L] [P], qui déclare habiter le même quartier que Mme [A], indique que courant janvier 2018, alors qu'il était venu se servir à la boulangerie et avait brièvement discuté avec Mme [A], un homme assez jeune a interrompu leur conversation sur un ton agressif en disant devant les clients «'vous avez autre chose à foutre qu'à discuter. Je vous paie pas pour ça''», Mme [A] s'étant ensuite excusée auprès de cette personne et du témoin

- Mme [E] [Z] témoigne du fait que lorsque Mme [A] a déposé son arrêt faisant suite à son accident du travail, elle a été reçue avec froideur par sa collègue lui ayant dit que son accident était dû à son surpoids, que sa remplaçante faisait mieux l'affaire, qu'elle allait être licenciée et qu'elle devait ramener ses tabliers de travail

- elle a fait l'objet d'un licenciement pour faute grave notifié le 15 février 2018, précédé d'une mise à pied à titre conservatoire à compter du 1er février 2018, soit environ deux mois après la fin de son arrêt de travail en suite de son accident du travail, qu'elle considère comme non fondé, pour en déduire qu'il s'agit d'une mesure de rétorsion.

L'ensemble de ces éléments, pris dans leur globalité, permet de présumer l'existence d'une discrimination prohibée à raison de l'état de santé, dans la mesure où ils sont de nature à objectiver un changement d'attitude de son employeur à la suite de son arrêt pour accident du travail, peu de temps après son retour, à un licenciement pour faute grave, sans préavis, ni indemnité, dont la salariée conteste les motifs.

La société Bec Rives n'apporte pas les justifications suffisantes permettant d'écarter toute discrimination prohibée en ce que':

- elle ne prétend pas et encore moins ne démontre, alors qu'il lui appartient de respecter les préconisations du médecin du travail, qu'elle a mis en 'uvre les réserves énoncées dans l'avis du 1er décembre 2017, l'employeur ne développant aucun moyen de ce chef dans ses conclusions d'appel

- elle avance, certes à juste titre, que l'attestation de Mme [Z] doit être prise avec précaution puisque celle-ci mentionne une absence de tout lien avec Mme [A] mais ni cette dernière ni le témoin n'expliquent à quel titre Mme [Z] l'a accompagnée dans les locaux de l'entreprise pour déposer son arrêt de travail, et permettant d'en déduire des liens d'amitié. Pour autant, l'employeur reste taisant relativement au témoignage sur courrier simple de M. [P]

- la preuve d'une faute, encore moins grave, motivant le licenciement notifié le 15 février 2018 n'est pas rapportée par l'employeur. En effet, le rapport des conseillers rapporteurs du 15 octobre 2018 ne confirme pas les affirmations très précises de M. [S], responsable du magasin et celle de M. [N] [J], salarié de l'entreprise. En particulier, les conseillers rapporteurs qui ont visionné l'enregistrement du système de vidéo-surveillance, étant relevé que le moyen développé par la salariée à raison de son caractère illicite avérée à défaut d'information individuelle préalable de la salariée n'est pas fondée dès lors qu'il n'est pas allégué de son caractère déloyal et qu'il est considéré que son utilisation est, en l'espèce, proportionnée et nécessaire à l'établissement, par l'employeur, des preuves lui incombant, n'ont absolument pas indiqué dans leur rapport que Mme [A] avait pu donner de la marchandise à des clients, dont ses parents, sans la facturer. Le rapport précise au contraire que Mme [A] a servi de la marchandise, dans une quantité non précisée, à ses parents qu'elle leur a facturée, étant relevé que les parties, en particulier l'employeur assisté de son avocat, n'ont pas fait d'observations notées au procès-verbal pour que les faits observés lors du visionnage soient détaillés de manière plus précise. La société Bec Rives développe un moyen inopérant tenant au fait que Mme [A] n'a pas produit le ticket d'achat de ses parents alors qu'il appartient exclusivement à l'employeur de rapporter la preuve de la faute grave qu'il allègue. Le journal de caisse, produit en pièce n°13 par l'employeur, est inexploitable dans ses conditions puisque les conseillers rapporteurs n'ont pas été en mesure ou n'ont pas précisé, sans objection des parties, les marchandises remises par Mme [A] lors du visionnage de la vidéo-surveillance. Par ailleurs, s'agissant de la gestion des invendus, l'employeur ne fait qu'affirmer, sans aucunement le prouver, que Mme [A] s'est vu remettre, lors de son embauche, un book vendeuse et qu'il est particulièrement significatif que M. [S] n'ai pas répondu à l'affirmation de Mme [A], lors de l'enquête menée par les conseillers rapporteurs, selon laquelle celui-ci, responsable du magasin, lui a donné son accord pour qu'elle récupère une baguette par jour et des invendus. S'agissant du non-respect des horaires de travail, s'il ressort du rapport des conseillers rapporteurs que Mme [A] est partie à 19h45 du magasin, aucun élément utile produit par l'employeur, à savoir un planning affiché ou remis à la salariée, ne vient confirmer que ses horaires de travail prévoyaient qu'elle finît à 20h00.

Il s'ensuit qu'infirmant le jugement entrepris, il convient de dire que Mme [A] a été victime d'une discrimination prohibée à raison de son état de santé et que son licenciement procède de cette discrimination, de sorte que celui-ci doit être déclaré nul.

Il convient également d'allouer à Mme [A] la somme de 3 000 euros nets à titre de dommages et intérêts au titre de la discrimination prohibée eu égard à la durée limitée pendant laquelle elle a été victime desdits faits.

Mme [A] a également droit à l'indemnité compensatrice de préavis de 1 617,68 euros bruts, outre 161,77 euros bruts au titre des congés payés afférents ainsi qu'à l'indemnité de licenciement à hauteur de 269,61 euros.

Au visa de l'article L 1235-3-1 du code du travail, sans qu'il ne soit tenu compte de la moindre faute dans la réparation du préjudice en vertu de l'article L 1235-2-1 du code du travail, dont la réalité n'est pas établie, Mme [A], qui justifie de la perception d'indemnités ARE du 4 juin 2018 au 2 juin 2019, tout en ayant exercé des emplois en intérim et en contrat à durée déterminée, se voit allouer la somme de 10 000 euros bruts à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul.

Sur les demandes accessoires':

L'équité commande de confirmer l'indemnité de procédure de 1200 euros allouée par les premiers juges à Mme [A] et de lui accorder une indemnité complémentaire de procédure de 800 euros.

Le surplus des prétentions au titre de l'article 700 du code de procédure civile est rejeté.

Au visa de l'article 696 du code de procédure civile, confirmant le jugement entrepris et y ajoutant, il convient de condamner l'EURL Bec Rives, partie perdante, aux dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS':

La Cour, statuant, publiquement, contradictoirement, dans les limites de l'appel et après en avoir délibéré conformément à la loi';

INFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Mme [A] de sa demande indemnitaire au titre de la discrimination prohibée et de nullité du licenciement

STATUANT à nouveau,

DIT que Mme [U] [A] a fait l'objet d'une discrimination prohibée à raison de son état de santé

DÉCLARE nul le licenciement notifié par l'EURL Bec Rives par courrier du 15 février 2018 à Mme [U] [A]

CONDAMNE l'EURL Bec Rives à payer à Mme [U] [A] les sommes suivantes':

- 269,61 euros (deux cent soixante-neuf euros et soixante-et-un centimes) à titre d'indemnité de licenciement

- 1 617,68 euros (mille six cent dix-sept euros et soixante-huit centimes) bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis

- 161,77 euros (cent soixante-et-un euros et soixante-dix-sept centimes) bruts au titre des congés payés afférents

- 3 000 euros (trois mille euros) au titre de la discrimination à raison de l'état de santé

- 10 000 euros (dix mille euros) bruts à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul

CONDAMNE l'EURL Bec Rives à payer à Mme [U] [A] une indemnité complémentaire de procédure de 800 euros

REJETTE le surplus des prétentions au titre de l'article 700 du code de procédure civile

CONDAMNE l'EURL Bec Rives aux dépens d'appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Mme Blandine FRESSARD, Présidente et par Mme Carole COLAS, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Ch. sociale -section b
Numéro d'arrêt : 20/03255
Date de la décision : 07/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-07;20.03255 ?
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