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07/07/2022 | FRANCE | N°20/01023

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Ch. sociale -section b, 07 juillet 2022, 20/01023


C9



N° RG 20/01023



N° Portalis DBVM-V-B7E-KMDU



N° Minute :













































































Copie exécutoire délivrée le :





Me Annette PAUL



Me Aurélie LEGEAY





AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APP

EL DE GRENOBLE



Ch. Sociale -Section B

ARRÊT DU JEUDI 07 JUILLET 2022





Appel d'une décision (N° RG 18/00514)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de GRENOBLE

en date du 04 février 2020

suivant déclaration d'appel du 28 février 2020



Jonction du RG 20/1044 au RG 20/1023 par ordonnance du 28 mai 2020



APPELANTE :



SARL AITA PEA, prise en la per...

C9

N° RG 20/01023

N° Portalis DBVM-V-B7E-KMDU

N° Minute :

Copie exécutoire délivrée le :

Me Annette PAUL

Me Aurélie LEGEAY

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

Ch. Sociale -Section B

ARRÊT DU JEUDI 07 JUILLET 2022

Appel d'une décision (N° RG 18/00514)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de GRENOBLE

en date du 04 février 2020

suivant déclaration d'appel du 28 février 2020

Jonction du RG 20/1044 au RG 20/1023 par ordonnance du 28 mai 2020

APPELANTE :

SARL AITA PEA, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

12 rue Irvoy

38000 GRENOBLE

représentée par Me Annette PAUL, avocat au barreau de GRENOBLE

INTIMEE :

Madame [B] [A]

née le 21 juin 1978 à TOURS (37000)

de nationalité Française

33 rue de Stalingrad

38100 GRENOBLE

représentée par Me Aurélie LEGEAY, avocat au barreau de GRENOBLE

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Blandine FRESSARD, Présidente,

M. Frédéric BLANC, Conseiller,

Mme Hélène BLONDEAU-PATISSIER, Conseillère,

Assistés lors des débats de M. Fabien OEUVRAY, Greffier,

DÉBATS :

A l'audience publique du 18 mai 2022,

Monsieur BLANC, Conseiller, chargé du rapport,

Les avocats ont été entendus en leurs observations.

Et l'affaire a été mise en délibéré à la date de ce jour à laquelle l'arrêt a été rendu.

EXPOSE DU LITIGE':

La SARL AITA PEA, est une entreprise holding dont le siège social est sis à Grenoble, 12 rue Irvoy et dont l'activité est la gestion administrative, comptable et financière de salles de sport. Pour cela, la SARL AITA PEA facture ses prestations à chacune des salles pour lesquelles elle effectue des diligences.

Mme [B] [A] a été embauchée par la SARL AITA PEA en contrat à durée indéterminée le 2 mai 2012, en qualité d'assistante de direction, niveau IV échelon 1 coefficient 220 de la convention collective des espaces de loisirs d'attractions culturelles.

Lors de l'engagement de Mme [B] [A], il a été convenu la reprise de son ancienneté acquise au sein de la société MARURU et ce, en date du 17 novembre 2008.

La rémunération mensuelle brute de Mme [B] [A] était de 2 000 euros bruts pour une durée de 35,5 heures hebdomadaires, outre une prime de résultat.

La SARL AITA PEA, par lettre remise en main propre le 16 janvier 2018, a convoqué Mme [B] [A] à un entretien préalable à licenciement pour motif économique fixé le 23 janvier 2018.

A cette occasion, la SARL AITA PEA a remis à Mme [B] [A] les documents concernant le contrat de sécurisation professionnelle.

Par lettre du 6 février 2018, la SARL AITA PEA a notifié son licenciement pour motif économique à Mme [B] [A].

Par courrier en date du 22 février 2018, Mme [B] [A] a sollicité auprès de la SARL AITA PEA la communication des critères retenus pour établir l'ordre des licenciements.

Le 23 février 2018, se prévalant d'erreurs sur ses documents de fin de contrat, Mme [B] [A] a formulé une demande de régularisation.

Après réception de ceux-ci, Mme [B] [A] a demandé le paiement de primes non versées sur les mois de janvier et février 2018, et ce par courrier en date du 27 mars 2018.

Par lettre du 23 avril 2018, la SARL AITA PEA a accepté un versement partiel de la somme de 183,47 euros bruts.

Par requête en date du 8 juin 2018, Mme [B] [A] a saisi le conseil de prud'hommes de Grenoble, section commerce, aux fins d'obtenir un rappel de prime et voir juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse, outre la réparation d'un préjudice moral.

La SARL AITA PEA s'est opposée aux prétentions adverses et a demandé à ce que soient écartées les pièces n°22 et 30 de Mme [A].

Par jugement en date du 4 février 2020, le conseil de prud'hommes de Grenoble a':

Avant dire droit, écarté les pièces 22 et 30 de Mme [B] [A]

- dit que le licenciement de Mme [B] [A] est sans cause réelle et sérieuse,

- condamné la SARL AITA PEA à payer à Mme [B] [A] les sommes suivantes':

-379,82 € (trois cent soixante-dix-neuf euros et quatre-vingt-deux cts) à titre de primes non versées,

-37,98 € (trente-sept euros et quatre-vingt-dix-huit cts) à titre de congés payés afférents,

-5818,20 € brut (cinq mille huit cent dix-huit euros et vingt cts) à titre d'indemnité de préavis,

-581,82 € brut (cinq cent quatre-vingt-un euros et quatre-vingt-deux cts) à titre de congés payés afférents,

-17 454,60 € (dix-sept mille quatre cent cinquante-quatre euros et soixante cts) à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-1 200,00 € (mille deux cents euros) au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

Lesdites sommes avec intérêts de droit à compter du prononcé du présent jugement

- rappelé que les sommes à caractère salarial bénéficient de l'exécution provisoire de droit, nonobstant appel et sans caution en application de l'article R 1454-28 du code du travail dans la limite de 9 mois de salaire, la moyenne mensuelle brute des trois derniers mois de salaire étant de 2 871,60 euros.

- débouté Mme [B] [A] du surplus de ses demandes,

Débouté la SARL AITA PEA de sa demande reconventionnelle et la condamne aux dépens.

La décision a été notifiée par le greffe par lettres recommandées avec accusé de réception signé le 5 février 2020 pour Mme [B] [A] et le 6 février 2020 pour la SARL AITA PEA.

Par déclarations en date des 28 février et 2 mars 2020, la SARL AITA PEA a interjeté appel à l'encontre dudit jugement.

Les procédures d'appel ont été jointes par ordonnance du conseiller de la mise en état du 28 mai 2020.

La SARL AITA PEA s'en est rapportée à des conclusions transmises le 9 mars 2020 et demande à la cour d'appel de':

Recevoir l'Appel interjeté par la Société AITA PEA

CONSTATER que Mme [B] [A] a bien perçu une prime au titre de l'activité de 2018

CONSATER que les critères d'attribution ne prévoient pas de prorata temporis

CONSTATER que la société justifie que le bulletin d'acceptation du CSP a été remis à l'employeur postérieurement à la réception de la lettre de licenciement

CONSTATER que la Société produit les éléments économiques qui étayent sa situation économique au 31.12.2017

CONSTATER la réalité de la suppression du poste.

CONSTATER que les critères d'ordre ont été respectés par la société.

CONSTATER l'absence de possibilité sérieuse de reclassement

CONSTATER que Mme [B] [A] n'apporte aucun élément permettant d'étayer ses demandes.

Par conséquent,

Ecarter des débats les pièces 22 et 30 adverses des débats

Réformer le jugement dont appel

DIRE ET JUGER que Mme [A] a perçu le montant de la prime due pour janvier 2018

DIRE ET JUGER qu'aucune prime n'est due pour février 2018.

DIRE ET JUGER que le licenciement pour motif économique est justifié

Dire et Juger que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse.

DEBOUTER Mme [A] de sa demande au titre de la prime de février 2018

DEBOUTER Madame [B] [A] de ses demandes afférentes au licenciement sans cause réelle et sérieuse

DEBOUTER Madame [B] [A] de l'intégralité de ses demandes afférentes à la rupture de son contrat de travail et préjudice moral.

A TITRE SUBSIDIAIRE

INFIRMER le jugement des chefs suivants :

- Indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 17 454,60 euros

REDUIRE le montant des dommages et intérêt alloués à de plus juste proportion en tenant compte de la réalité du préjudice financier démontré et de la situation économique de l'appelante, au minimum du barème applicable soit 2 mois de salaire correspondant à 5818,20 euros.

EN TOUT ETAT DE CAUSE :

CONDAMNER Madame [B] [A] à verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

LA CONDAMNER aux dépens.

Mme [B] [A] s'est en rapportée à des conclusions transmises le 23 décembre 2021 et demande à la cour d'appel de':

CONFIRMER le jugement entrepris en ce qu'il a :

- DIT que le licenciement de Mme [A] est sans cause réelle et sérieuse

- CONDAMNE la société AITA PEA à payer à Mme [A] les sommes suivantes :

- 5.818,20 € bruts à titre d'indemnité de préavis

- 581,82 € bruts à titre de congés payés afférents

- 1.200 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Lesdites sommes avec intérêts de droit à compter du prononcé du jugement

CONDAMNE la société AITA PEA à payer à Mme [A] :

- Un rappel de prime et les congés payés afférents

- Une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

DEBOUTE la SARL AITA PEA de sa demande reconventionnelle et l'a condamnée aux dépens

REFORMER le jugement entrepris en ce qu'il a :

ECARTE les pièces 22 et 30 versées par Mme [A]

CONDAMNE la société AITA PEA à payer à Madame [A] les sommes suivantes :

- 379,82 € à titre de primes non versées

- 37,98 € à titre de congés payés afférents

- 17.454,60 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

DEBOUTE Mme [A] de sa demande tendant à voir condamner la société AITA PEA à lui payer la somme de 10.000 € nets à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral

Et statuant à nouveau,

DIRE et JUGER que Mme [A] n'a pas été remplie de ses droits concernant sa prime,

DIRE et JUGER que le licenciement de Mme [A] est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

En conséquence,

CONDAMNER la société AITA PEA à payer à Mme [F] les sommes suivantes :

A titre principal :

- Indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 26.181,90 € nets

- Indemnité de préavis : 5.818,20 € bruts

- Congés payés afférents : 581,82 € bruts

A titre subsidiaire :

- Dommages-intérêts pour non-respect des critères d'ordre des licenciements : 26.181,90€ nets

En tout état de cause :

- Rappel de prime : 359,46 € bruts

- Congés payés afférents : 35,94 € bruts

- Dommages-intérêts pour préjudice moral : 10.000 € nets

- Article 700 du CPC : 3.000 € nets

CONDAMNER la société AITA PEA aux entiers dépens.

Pour un exposé complet des moyens et prétentions des parties, il convient au visa de l'article 455 du code de procédure civile de se reporter à leurs écritures sus-visées.

La clôture a été prononcée le 24 mars 2022.

EXPOSE DES MOTIFS':

Sur la demande de la SARL AITA PEA tendant à voir écarter des débats les pièces n°22 et 30 de Mme [A]':

Un salarié ne peut s'approprier des documents appartenant à l'entreprise que s'ils sont strictement nécessaires à l'exercice des droits de sa défense dans un litige l'opposant à son employeur, ce qu'il lui appartient de démontrer.

En l'espèce, d'une première part, la pièce n°22 ne saurait être écartée des débats dès lors qu'il s'agit d'un tableau récapitulant les règlements en espèces allégués qui n'auraient pas été, selon Mme [A], intégrés à la comptabilité de la société.

Or, la SARL AITA PEA reste taisante sur le moyen de défense pertinent développé par Mme [A] qui indique que cette pièce, qui ne comporte aucune entête ou mention de la société employeur, a été établie par elle à partir des informations figurant dans les pièces n°19 à 21, pour lesquelles aucune demande d'irrecevabilité n'est présentée dans le dispositif des conclusions de l'appelante.

Mme [A] établit de manière suffisante que la pièce litigieuse n'est pas un document de l'entreprise, peu important, en l'espèce, qu'elle ait été établie à partir d'autres éléments appartenant à la société, puisqu'il n'est pas demandé à ce que ceux-ci soient écartés des débats.

Il s'ensuit qu'il convient d'infirmer le jugement entrepris et de rejeter la demande de la SARL AITA PEA tendant à voir écarter des débats la pièce n°22 du bordereau de Mme [A].

D'une seconde part, le jugement entrepris est, en revanche, confirmé en ce qu'il a écarté la pièce n°30 de Mme [A] qui correspond à un échange de courriels entre la gérance de la société et une salariée de la salle ALOHA, dès lors que Mme [A] n'en est ni l'expéditrice, ni la destinataire et qu'elle ne développe aucun moyen expliquant la manière dont elle est entrée en possession de cette pièce et en quoi elle pourrait être strictement nécessaire à l'exercice de sa défense dans le cadre du présent procès, alors même qu'elle ne la vise pas même dans ses conclusions.

Sur les rappels de prime':

Il résulte de l'article 1353 du code civil que celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

Lorsque le calcul de la rémunération dépend d'éléments détenus par l'employeur, celui-ci est tenu de les produire en vue d'une discussion contradictoire.

Lorsqu'une prime constitue la partie variable de la rémunération versée au salarié en contrepartie de son activité, elle s'acquiert au prorata du temps de présence du salarié dans l'entreprise au cours de l'exercice.

En l'espèce, le contrat de travail prévoit le versement de deux primes de résultat, l'une dite de performance commerciale et l'autre de qualité de travail, lesdites primes étant versées mensuellement.

La société AITA PEA affirme tout d'abord à tort que Mme [A] n'aurait pas droit aux primes litigieuses le dernier mois au motif qu'elle aurait quitté l'entreprise au cours du mois de février 2018, alors même que les primes litigieuses s'analysent comme une partie de rémunération variable en fonction de l'activité de la salariée, selon divers critères de performance, de sorte que le principe de la prime est acquis au prorata du temps de présence dans l'entreprise sans que la clause n'ait à le prévoir.

Ensuite, la société AITA PEA oppose de manière infondée la clause contractuelle selon laquelle «'si aucune évaluation n'est effectuée au cours d'un mois quelconque, le montant de la prime attribuée pour ce mois est de 100 euros'» alors que Mme [A] indique, à juste titre, qu'une telle clause est manifestement potestative, puisque dépendant de la seule volonté de l'employeur d'évaluer ou non la salariée, et, dès lors, réputée non écrite.

Enfin, l'employeur a versé un rappel de prime de 183,47 euros bruts, indemnité compensatrice de congés payés incluse, sur un bulletin de salaire de mars 2018.

Le détail du calcul n'est pas précisé et l'employeur, qui est seul à les détenir, ne verse pas, aux débats, les éléments permettant de justifier ce montant au regard des critères contractuels de versement des primes.

Il s'ensuit qu'il convient de calculer les primes de résultat selon la moyenne des douze derniers mois de salaire.

Infirmant le jugement entrepris, qui a accordé un montant supérieur à celui solliciter à hauteur d'appel par Mme [A] et tenant compte de la somme d'ores et déjà versée par l'employeur, il convient de condamner la société AITA PEA à payer à Mme [A] la somme de 359,46 euros bruts à titre de rappel de primes de résultat de janvier et février 2018, outre 35,94 euros bruts au titre des congés payés afférents.

Sur le licenciement':

Premièrement, il résulte de la combinaison des articles L 1233-3, L.1233-16 et L.1233-67 du code du travail que la rupture du contrat de travail résultant de l'acceptation, par le salarié, d'un contrat de sécurisation professionnelle doit avoir une cause économique réelle et sérieuse. L'employeur est, en conséquence, tenu d'énoncer la cause économique de la rupture du contrat dans un écrit remis ou adressé au salarié au cours de la procédure de licenciement et au plus tard au moment de l'acceptation du contrat de sécurisation professionnelle par le salarié, afin qu'il soit informé des raisons de la rupture lors de son acceptation.

Deuxièmement, l'article L 1233-4 du code du travail énonce que le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré sur les emplois disponibles, situés sur le territoire national dans l'entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l'entreprise fait partie et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel.

Pour l'application du présent article, la notion de groupe désigne le groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu'elle contrôle dans les conditions définies à l'article L. 233-1, aux I et II de l'article L. 233-3 et à l'article L. 233-16 du code de commerce.

Le reclassement du salarié s'effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent assorti d'une rémunération équivalente. A défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, le reclassement s'effectue sur un emploi d'une catégorie inférieure.

L'employeur adresse de manière personnalisée les offres de reclassement à chaque salarié ou diffuse par tout moyen une liste des postes disponibles à l'ensemble des salariés, dans des conditions précisées par décret.

Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises.

L'article D 1233-2-1 du code du travail détaille le contenu de l'offre de reclassement.

Au cas d'espèce, la société AITA PEA développe un moyen inopérant sur la date à laquelle Mme [A] lui a remis le bulletin d'adhésion au contrat de sécurisation professionnelle alors que la date déterminante est celle de l'adhésion de la salariée au contrat de sécurisation professionnelle.

Les dispositions des articles 1118 et 1121 du code civil ne sauraient trouver lieu à s'appliquer s'agissant d'un contrat de sécurisation professionnelle dès lors que l'article L 1233-66 du code du travail impose à l'employeur de proposer un contrat de sécurisation professionnelle de sorte qu'en définitive, si le dispositif présente certes une nature contractuelle, l'acceptation par l'employeur est présumée irréfragable par la loi puisque le contrat est proposé au salarié, la seule condition à la pleine efficacité du contrat étant l'adhésion de ce dernier au dispositif.

Ces caractéristiques particulières du contrat de sécurisation professionnelle se reflètent d'ailleurs dans le formulaire type qui ne comporte aucun encadré ou mention de la date à laquelle l'employeur s'est vu remettre et/ou a eu connaissance dudit contrat de sécurisation professionnelle.

La mention «'reçu ce jour le 8 février 2018'» avec la signature de l'employeur et le cachet de l'entreprise sur le volet n°3 du contrat de sécurisation professionnelle est dès lors dépourvue de tout effet juridique.

Il s'ensuit que le contrat de sécurisation professionnelle remis par l'employeur à la salariée le 23 janvier 2018, à l'occasion de l'entretien préalable, a été accepté par elle le 24 janvier 2018, l'employeur ne prouvant aucunement que Mme [A] aurait pu anti-dater la date de son acceptation à ce dispositif, étant relevé que le fait que Mme [A] ait informé son employeur, par courriel du 25 janvier 2018, du fait qu'elle assistait à une réunion d'information sur le dispositif CSP organisé par Pôle Emploi, ne permet aucunement n'en déduire qu'elle n'avait pas d'ores et déjà adhéré la veille audit contrat puisqu'il est également parfaitement possible que la salariée se soit, au contraire, d'ores et déjà inscrite dans la perspective de la mise en 'uvre concrète dudit contrat.

L'employeur ne prouve aucunement, par sa pièce n°23 b, que Mme [A] a été informée préalablement à son adhésion au contrat de sécurisation professionnelle lors de l'entretien préalable des motifs présidant à son licenciement économique dès lors que si le compte-rendu d'entretien qu'elle verse aux débats évoque, certes, un tableau qui lui a été présenté par l'employeur, mais ne fait aucunement mention d'une remise du document écrit «'M. [S] se lance dans l'exposé de la situation économique de la société, qui a connu un écroulement entre 2014 et 2017 (il montre un tableau de résultats)'».

De manière superfétatoire, ledit tableau ne saurait être considéré comme la preuve suffisante incombant à l'employeur de l'information à la salariée sur les motifs économiques de son licenciement puisqu'il n'est pas fait état de l'élément matériel du licenciement, à savoir la suppression de son poste.

Il s'en déduit que l'employeur ne justifie pas avoir remis un écrit à Mme [A], préalablement à son adhésion au contrat de sécurisation professionnelle, énonçant la cause économique de son licenciement.

D'une seconde part, et de manière superfétatoire, sans même qu'il soit nécessaire d'analyser les autres moyens développés par les parties portant sur l'élément matériel et l'élément causal du motif économique, l'employeur ne rapporte pas la preuve suffisante qu'il a sérieusement et loyalement rempli son obligation de reclassement.

En effet, l'employeur reconnait, dans ses écritures, qu'il existait un poste de responsable de salle disponible dans la SARL OUKAFE, que Mme [A] avait précédemment occupé.

La société se prévaut, de manière non fondée, que ce poste lui a été proposé et a été refusé avec véhémence par la salariée, en se prévalant de l'attestation de Mme [V] [O], une salariée de l'entreprise'; ce que Mme [A] conteste.

Outre que l'attestation de cette salariée doit être prise avec précaution, il n'en demeure pas moins que l'employeur ne justifie aucunement avoir adressé, par tout moyen ayant date certaine, cette proposition de poste avec les informations requises par l'article D 1233-2-1 du code du travail, de sorte que le refus hypothétique du poste par la salariée ne dispensait pas l'employeur de poursuivre ses efforts de reclassement en formulant une offre permettant à Mme [A] de se positionner utilement et en connaissance de cause sur ledit poste.

Il s'ensuit qu'il convient de confirmer le jugement entrepris, par substitution de motifs, en ce qu'il a dit que le licenciement de Mme [A] est sans cause réelle et sérieuse.

Sur les prétentions afférentes à la rupture du contrat de travail':

D'une première part, dès lors que le licenciement est jugé sans cause réelle et sérieuse, peu important l'adhésion de Mme [A] au contrat de sécurisation professionnelle, cette dernière a droit à une indemnité compensatrice de préavis, incluant la rémunération variable, outre les congés payés afférents, de sorte que le jugement entrepris est confirmé de ces chefs.

D'une seconde part, au jour de son licenciement injustifié, Mme [A] avait une ancienneté de 9 ans et 3 mois, outre préavis.

Mme [A] justifie avoir retrouvé un emploi à temps partiel (108,33 heures mensuels) à partir du 21 octobre 2019, pour un salaire de 1 309 euros, puis avoir démissionné pour être intégrée dans un emploi à temps plein le 22 octobre 2020, pour un salaire de 1 971,71 euros.

Les premiers juges ont fait une juste appréciation du préjudice tenant compte de l'ensemble de ces éléments, sans que la situation économique de l'employeur ne puisse être prise en compte pour réduire le montant accordé, en lui allouant la somme de 17 454,60 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de sorte que le jugement entrepris doit être confirmé et le surplus de la demande rejeté.

Sur la demande au titre du préjudice moral':

Le jugement entrepris est confirmé en ce qu'il a débouté Mme [A] de sa demande pour préjudice moral en ce qu'elle se prévaut de conditions de travail dégradées, sans autre précision ni preuve, alors qu'il lui incombe de faire la démonstration d'une exécution fautive du contrat de travail par son employeur, en méconnaissance de l'article L 1222-1 du code du travail, et de pratiques frauduleuses ayant concouru aux difficultés économiques alléguées alors même qu'à supposer établie, le moyen n'ayant pas été étudié par la cour d'appel, cette faute alléguée de l'employeur serait réparée par l'allocation de dommages et intérêts au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse et ne saurait constituer des circonstances vexatoires du licenciement, Mme [A] ne prétendant pas, et encore moins ne justifiant, que la société AITA PEA se serait volontairement livrée à des pratiques frauduleuses alléguées ayant eu pour conséquences non pas seulement de créer des difficultés économiques mais encore, avec pour objectif voulu, d'aboutir à son licenciement pour motif économique'; ce qui caractériserait effectivement un préjudice moral distinct, dont la preuve n'est pas rapportée.

Sur les demandes accessoires':

L'équité commande de confirmer l'indemnité de procédure de 1 200 euros allouée par les premiers juges à Mme [A] et de lui accorder une indemnité complémentaire de procédure de 1 500 euros à hauteur d'appel.

Le surplus des prétentions des parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile est rejeté.

Au visa de l'article 696 du code de procédure civile, confirmant le jugement entrepris et y ajoutant, il convient de condamner la SARL AITA PEA, partie perdante aux dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS':

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi,

CONFIRME le jugement entrepris, sauf s'agissant des chefs de jugements relatifs aux primes de résultat et en ce qu'il a déclaré irrecevable la pièce n°22 produite par Mme [A]

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

REJETTE la demande d'irrecevabilité de la pièce n°22 de Mme [B] [A]

CONDAMNE la SARL AITA PEA à payer à Mme [B] [A] à payer les sommes de':

- 359,46 euros (trois cent cinquante-neuf euros et quarante-six centimes) bruts à titre de rappel de primes de résultat de janvier et février 2018

- 35,94 euros (trente-cinq euros et quatre-vingt-quatorze centimes) bruts au titre des congés payés afférents

CONDAMNE la SARL AITA PEA à payer à Mme [B] [A] une indemnité complémentaire de procédure de 1 500 euros

REJETTE le surplus des prétentions des parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile

CONDAMNE la SARL AITA PEA aux dépens d'appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Mme Blandine FRESSARD, Présidente et par Mme Carole COLAS, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Ch. sociale -section b
Numéro d'arrêt : 20/01023
Date de la décision : 07/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-07;20.01023 ?
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