C1
N° RG 20/01336
N° Portalis DBVM-V-B7E-KM6E
N° Minute :
Copie exécutoire délivrée le :
la SCP CABINET FORSTER
Me David HERPIN
SELARL FTN
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE GRENOBLE
Ch. Sociale -Section A
ARRÊT DU MARDI 05 JUILLET 2022
Appel d'une décision (N° RG 18/00167)
rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MONTELIMAR
en date du 17 février 2020
suivant déclaration d'appel du 17 Mars 2020
APPELANTE :
Madame [U] [J]
née le 10 Septembre 1955 à NANTES
de nationalité Française
Chez Madame [I] [L]
326, Chemin du Régage
13112 LA DESTROUSSE
représentée par Me Pierre-Yves FORSTER de la SCP CABINET FORSTER, avocat au barreau de VALENCE, substitué par Me Patricia MOUSSIER, avocat au barreau de VALENCE,
INTIMES :
Maître [X] [E], agissant en qualité de liquidateur de la SARL HOLDING RENAISSANCE,
350, Avenue Victor Hugo
26000 VALENCE
représenté par Me David HERPIN, avocat au barreau de VALENCE,
Association UNEDIC DÉLÉGATION AGS CGEA D'ANNECY,
86, Avenue d'Aix-les-Bains
BP 37 - Acropole
74602 SEYNOD
représentée par Me Florence NERI de la SELARL FTN, avocat au barreau de GRENOBLE,
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Madame Valéry CHARBONNIER, Conseillère faisant fonction de Présidente,
Madame Gaëlle BARDOSSE, Conseillère,
Madame Magali DURAND-MULIN, Conseillère,
DÉBATS :
A l'audience publique du 02 Mai 2022,
Mme Gaëlle BARDOSSE, Conseillère chargée du rapport, et Mme Valéry CHARBONNIER, Conseillère faisant fonction de Présidente, ont entendu les parties en leurs conclusions et observations, assistées de Mme Mériem CASTE-BELKADI, Greffière, conformément aux dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, les parties ne s'y étant pas opposées ;
Puis l'affaire a été mise en délibéré au 05 Juillet 2022, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.
L'arrêt a été rendu le 05 Juillet 2022.
Exposé du litige :
Mme [J] et M. [K] ont créé en 2011 la SARL HOLDING RENAISSANCE, Mme [J] étant associée minoritaire (30%).
La SARL HOLDING RENAISSANCE a acquis courant juillet 2013, la SAS HOSTELLERIE DES PINS, Mme [J] a été désignée présidente de la SAS HOSTELLERIE DES PINS le 1er juillet 2013.
Les sociétés HOLDING RENAISSANCE et HOSTELLERIE DES PINS ont conclu une convention de prestations de services à effet du 1er juillet 2013, par laquelle la seconde confiait à la première des missions d'assistance en matière de direction et de gestion, d'animation commerciale et technique, ainsi que dans le domaine administratif et comptable.
Mme [J] a signé un contrat de travail à durée indéterminée avec la SARL HOLDING RENAISSANCE le 1er août 2013, en qualité de directrice salariée de l'établissement.
Mme [J] a démissionné de son mandat social de présidente de la SAS HOSTELLERIE DES PINS le 16 avril 2018.
Mme [J] a pris acte de la rupture de son contrat aux torts de son employeur par courrier daté du 14 août 2018.
Elle a saisi le Conseil de Prud'hommes de Montélimar par requête du 08 décembre 2018 aux fins de voir juger qu'elle est liée à la SARL RENAISSANCE par un contrat de travail ; obtenir la condamnation de l'employeur au paiement de rappels d'heures supplémentaires et des dommages et intérêts pour travail dissimulé, pour le non-respect de la durée de travail, le non-respect des temps de repos et exécution déloyale du contrat de travail ; voir ordonner la requalification de la prise d'acte de aux torts de l'employeur en licenciement sans cause réelle et sérieuse et obtenir les indemnités afférentes.
Par jugement du Tribunal de commerce de ROMANS du 06 janvier 2020, la SARL HOLDING RENAISSANCE et la SAS HOSTELLERIE DES PINS ont été placées en liquidation judiciaire dans le cadre de deux procédures distinctes.
Par jugement du 17 février 2020, le conseil des prud'hommes de Montélimar, a :
Dit et jugé que Mme [J] et la SARL HOLDNG RENAISSANCE sont liées par un contrat de travail.
S'est déclaré compétent pour statuer sur les demandes formulées par Mme [J] ;
Dit et jugé que la prise d'acte de Mme [J] ne s'apparente pas à un licenciement sans cause réelle et sérieuse et retenu la démission de la salariée ;
Débouté en conséquence Mme [J] de l'ensemble de ses demandes ;
Condamné Mme [J] à verser à la SARL HOLDING RENAISSANCE la somme de 12 000,00 € à titre d'indemnité de non-respect du préavis ;
Condamné Mme [J] à payer à la SARL HOLDING RENAISSANCE la somme indemnitaire de 500,00 au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamné Mme [J] aux dépens.
La décision a été notifiée aux parties et Mme [J] en a interjeté appel.
Par conclusions du 15 février 2021, Mme [J] demande à la cour d'appel de :
- Réformer le jugement du Conseil de prud'hommes de MONTELIMAR du 17 février 2020 en ce qu'il a :
Dit et jugé que la prise d'acte ne s'apparente pas à un licenciement sans cause réelle et sérieuse et retenu la démission de la salariée ;
Débouté en conséquence Mme [J] de l'ensemble de ses demandes ;
Condamné à titre reconventionnel Mme [J] à verser à la SARL HOLDING RENAISSANCE 12 000 € à titre d'indemnité de non-respect du préavis ;
Condamné Mme [J] à payer à la SARL HOLDING RENAISSANCE la somme indemnitaire de 500€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamné Mme [J] aux dépens.
Et, statuant à nouveau :
- Ordonner la requalification de la prise d'acte de la rupture aux torts de l'employeur, intervenue le 15 août 2018, en licenciement sans cause réelle ni sérieuse.
- Fixer le salaire moyen théorique à 4.000 € bruts.
-Fixer les créances de Mme [J] au passif de la SARL HOLDING RENAISSANCE aux sommes suivantes :
- 24 000 € nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse,
- 8 083,33 € bruts à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,
- 12 000 € bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre la somme de 1 200 € bruts à titre d'indemnité de congés payés sur préavis,
- 68 276,49 € bruts à titre de rappel de salaire de base contractuel pour la période du 15 août 2015 au 15 août 2018 outre le somme de 6827,65 € bruts à titre de congés payés sur rappel de salaire,
- 5 000 € nets à titre de dommages et intérêts pour retard dans le paiement du salaire,
- 353 171,36 € bruts à titre de rappel d'heures supplémentaires outre la somme de 35317,14 € bruts à titre de congés payés sur heures supplémentaires,
- 7 199,84 € à titre de rappel de congés payés,
- 5 000 € nets à titre de dommages et intérêts pour non-respect de la durée maximale du travail,
- 5 000 € nets à titre de dommages et intérêts pour non-respect de l'amplitude maximale journalière de travail,
- 5 000 € nets à titre de dommages et intérêts pour non-respect du repos hebdomadaire,
- 24 000 € nets à titre d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,
- 10 000 € nets à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail.
- Condamner Me [X] [E] ès qualités de liquidateur judiciaire de la SARL HOLDING RENAISSANCE à remettre à Mme [J] les documents suivants :
Bulletin de salaire récapitulatif, mentionnant les condamnations prononcées par l'arrêt à intervenir
Certificat de travail (modification de la date de sortie de l'entreprise : au 15 novembre 2018)
Solde de tout compte
- Le tout conforme à l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 € par jour de retard et par document, passé un délai de 8 jours suivant le prononcé de la décision à venir ;
- Imputer les dépens au passif de la liquidation de la SARL HOLDING RENAISSANCE ;
- Confirmer le jugement entrepris en ses autres dispositions ;
En tout état de cause :
- Débouter Me [E], es qualité de liquidateur judiciaire de la SARL HOLDING RENAISSANCE de l'intégralité de ses demandes ;
- Dire que l'arrêt est commun et opposable à Me [X] [E] es qualité de liquidateur judiciaire de la SARL HOLDING RENAISSANCE et au CGEA AGS d'ANNECY.
Par conclusions en réponse du 09 juillet 2020, Me [E] mandataire liquidateur de la SARL HOLDING RENAISSANCE demande à la cour d'appel de :
- A titre principal et in limine litis
- Infirmer le jugement rendu par le Conseil de Prud'hommes de MONTELIMAR en ce qu'il s'est déclaré matériellement compétent,
- Renvoyer le dossier par devant le Tribunal de Commerce de ROMANS SUR ISERE,
A titre subsidiaire
- Confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le Conseil de prud'hommes de MONTELIMAR et en conséquence,
- Dire que la prise d'acte produit les effets d'une démission,
- Débouter Mme [J] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,
- Condamner Mme [J] à verser à la Me [X] [E] ès qualités la somme de 12 000 € pour non-respect du préavis,
- Condamner Mme [J] à verser à la Me [X] [E] ès qualités à verser la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamner Mme [J] aux éventuels dépens.
Par conclusions du 16 mars 2022, l'UNEDIC Délégation AGS CGEA d'ANNECY demande à la cour :
A titre principal,
- Réformer le jugement rendu par le Conseil de Prud'hommes de MONTELIMAR en ce qu'il a reconnu l'existence d'un contrat de travail entre Mme [J] et la SARL HOLDING RENAISSANCE.
Statuant à nouveau,
- Dire et juger que Mme [J] n'était pas liée à la SARL HOLDING RENAISSANCE par un contrat de travail.
- En l'absence de tout contrat de travail, renvoyer le dossier par-devant le Tribunal de Commerce de ROMANS-SUR-ISERE.
- Débouter Mme [J] de l'intégralité de ses demandes.
A titre subsidiaire,
- Confirmer dans toutes ses dispositions le jugement rendu par le Conseil de Prud'hommes de MONTELIMAR le 17 février 2020.
En conséquence,
- Dire et juger que la prise d'acte produit les effets d'une démission.
- Débouter Mme M [J] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions.
A titre infiniment subsidiaire,
- Débouter Mme [J] s'agissant de ses demandes de rappel d'heures supplémentaires.
- Débouter Mme [J] quant à sa demande au titre de l'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé.
- Débouter Mme [J] de sa demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail.
- Minorer les dommages et intérêts sollicités par Mme [J] pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse, celle-ci n'établissant ni la réalité ni le quantum du préjudice prétendument subi au titre de la rupture de son contrat de travail.
En tout état de cause,
- Débouter la salariée de sa demande de condamnation à l'encontre de l'AGS, la décision à intervenir pouvant seulement lui être déclarée opposable celle-ci étant attraite en la cause sur le fondement de l'article L.625-3 du code de commerce.
- Débouter la salariée de toutes demandes de prise en charge par l'AGS excédant l'étendue de sa garantie, laquelle est plafonnée, toutes créances avancées pour le compte du salarié, à un des trois plafonds définis aux articles L. 3253-17 et D. 3253-5 du code du travail, lequel inclut les cotisations et contributions sociales et salariales d'origine légale ou d'origine conventionnelle imposée par la Loi ainsi que la retenue à la source prévue à l'article 204 A du code général des impôts.
- Débouter la salariée de toute demande directe à l'encontre de l'AGS, l'obligation de l'AGS de faire l'avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pouvant s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire (Art. L. 3253-20 du code du travail), les intérêts légaux étant arrêtés au jour du jugement déclaratif (Art. L.621-48 du code de commerce).
- Débouter la salariée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile, cette créance ne constituant pas une créance découlant du contrat de travail et, partant, se situe hors le champ de garantie de l'AGS ce conformément aux dispositions de l'article L.3253-6 du code du travail.
- Débouter la salariée de sa demande de condamnation de l'AGS aux dépens
L'ordonnance de clôture a été rendue le 29 mars 2022.
Pour un exposé complet des moyens et prétentions des parties, il convient au visa de l'article 455 du code de procédure civile de se reporter à leurs écritures susvisées.
SUR QUOI :
Sur l'existence du contrat de travail :
Moyens des parties :
Me [E] ès qualités de mandataire liquidateur de la SARL HOLDING RENAISSANCE soulève l'incompétence de la juridiction prud'homale, le contrat de travail de Mme [J] présentant un caractère fictif. Il expose que :
Mme [J] a été nommée présidente de la SAS HOSTELLERIE DES PINS avant de conclure un contrat de travail comme directrice le 1er août 2013 avec l'établissement. Elle n'a jamais cotisé au régime de l'assurance chômage car elle n'a jamais exercé d'autres fonctions que celles exercées dans le cadre de son mandat social.
La SARL HOLDING RENNAISSANCE n'avait pour objet que des activités de « holding » et notamment l'acquisition, la prise de participation et la gestion de valeurs mobilières, ainsi que l'assistance et la réalisation de toutes prestations de services d'ordre comptable, financier, commercial, informatique, administratif, juridique, au profit de sociétés filiales ou s'urs.
La SARL HOLDING RENNAISSANCE a signé au profit de la SAS HOSTELLERIE DES PINS une convention de prestation de services et le contrat du 1er août 2013 qui indiquait que Mme [J] était engagée en qualité de « Directrice de l'établissement », sachant que la Holding RENAISSANCE n'avait pas elle-même d'établissement et qu'il s'agit de l'hôtel-restaurant exploité par la SAS HOSTELLERIE DES PINS.
Les missions exercées par Mme [J], en toute indépendance, démontrent que son activité n'était pas celle d'une salariée subordonnée et elle ne sollicitait ni ne recevait la moindre directive de quiconque, et ne rendait pas compte de ses activités.
L'UNEDIC Délégation AGS CGEA d'ANNECY fait valoir que Mme [J] n'exerçait pas de fonctions techniques distinctes de son mandat social dans un lien de subordination.
Mme [J] expose être liée à la SARL HOLDING RENNAISSANCE par un contrat de travail non fictif par lequel elle exerçait les fonctions de directrice ainsi que d'autres tâches en fonction des besoins de l'hôtel restaurant et notamment celle de réceptionniste indiquée dans l'avis du site internet TRIPADVISOR. Elle ne disposait pas du statut de cadre dirigeant autonome, recevait des directives de l'employeur. Elle a démissionné de son mandat de présidente le 16 janvier 2018 et a continué d'exercer l'ensemble des tâches après cette date.
Sur ce,
En application de l'article L. 1411-1 du code du travail, le conseil de prud'hommes est compétent pour statuer sur les différends qui peuvent s'élever entre les employeurs et les salariés qu'ils emploient à l'occasion de tout contrat de travail.
Il résulte des dispositions de l'article 1779 du code civil que le contrat de travail est une convention par laquelle une personne s'engage à travailler pour le compte d'une autre et sous sa subordination moyennant une rémunération.
En application de l'article L. 1221-1 du code du travail, ce lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner le manquement de son subordonné. L'existence d'un contrat de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties, ni de la dénomination de leurs conventions, mais se caractérise par les conditions de faits dans lesquelles s'exerce l'activité professionnelle. Par ailleurs, il appartient à la partie qui entend se prévaloir de l'existence d'un contrat de travail de rapporter la preuve de l'existence d'un lien de subordination.
Il est constant que lorsqu'un salarié est nommé mandataire social, son contrat de travail est suspendu pendant l'exécution du mandat social. Toutefois, le cumul d'un mandat social et d'un contrat de travail, que celui-ci ait été conclu avant ou après le début du mandat, est admis à la condition que l'intéressé exerce des fonctions techniques distinctes du mandat, dans le cadre d'un lien de subordination à l'égard de la société, et que l'intéressé, perçoive une rémunération distincte de celle pouvant lui être allouée comme mandataire social. En outre, s'il appartient au mandataire social qui prétend avoir eu des fonctions salariées d'en rapporter la preuve, quand il dispose d'un contrat de travail apparent, c'est à celui qui en invoque le caractère fictif d'en apporter la preuve ou de rapporter la preuve de l'absence de cumul de fonctions.
En l'espèce, il n'est pas contesté que la SARL HOLDING RENNAISSANCE dont Mme [J] détenait 30% de part et dont son compagnon M. [K] était le gérant, a acquis la SAS HOSTELLERIE DES PINS, la SARL devenant ainsi l'associée unique de la SAS.
Mme [J] est devenue, par décision de l'associée unique du 1er juillet 2013, présidente de la SAS HOSTELLERIE DES PINS et investie à ce titre « des pouvoirs nécessaires pour agir en toutes circonstances au nom de la société ». Aucune rémunération n'a été fixée pour Mme [J] dans le cadre de ce mandat social.
Il est enfin admis que Mme [J] a signé un contrat de travail à durée indéterminée écrit avec la SARL HOLDING RENAISSANCE le 1er août 2013. Les fonctions mentionnées sont celles de directrice, la rémunération est fixée à 4 000€. Elle produit par ailleurs des bulletins de salaires du 1er août 2013 à août 2018 qui mentionnent qu'elle exerce la fonction de directrice et une base horaire de 151h67.
Au vu de ce qui précède, il convient de considérer que Mme [J] présente des éléments suffisants pour considérer qu'il existe un contrat de travail apparent et il appartient en conséquence à la SARL HOLDING RENAISSANCE d'en démontrer le caractère fictif.
La SARL HOLDING RENAISSANCE qui soulève le caractère fictif du contrat du 1er août 2013 au regard de l'absence de fonctions techniques distinctes occupées par la salariée de celles conférées par le mandat social, mais encore en l'absence de lien de subordination, fait tout d'abord observer l'absence de cotisation à l'assurance chômage de Mme [J]. Cette dernière n'apporte sur ce point aucune contradiction.
S'agissant du contrat de travail litigieux, il mentionne que Mme [J] exercera ses fonctions « tant au niveau de la société que de sa filiale la SAS HOSTELLERIE DES PINS » en qualité de « directrice de l'établissement » sans indiquer le nom de l'établissement en question.
La SARL HOLDING RENAISSANCE, associée unique de la SAS HOSTELLERIE DES PINS verse la convention de service conclue avec cette même SAS, le 1er juillet 2013, comportant différentes missions d'assistance de l'établissement en matière de direction et de gestion, d'animation commerciale ou encore des tâches administratives et notamment : « direction générale, secrétariat courant, facturation, relances clients, gestion du personnel' ».
Ces missions sont soit identiques, soit sont très proches de celles décrites sur le CV de Mme [J] pour le poste de « directrice Hostellerie des pins » à savoir : « accueil téléphonique, facturation, suivi des clients, gestion du personnel, devis ».
S'agissant des comptes rendus par mails portant sur la comptabilité de l'hôtel restaurant adressés par Mme [J] à la SARL HOLDING, cette transmission peut non seulement se justifier par sa qualité de Présidente de la SAS HOSTELLERIE DES PINS dont la SARL HOLDING RENAISSANCE était l'associée unique mais encore par la convention de service conclue entre ces deux sociétés, cet élément ne permettant donc pas de relever l'existence d'instructions faite à Mme [J] pour y procéder.
S'agissant des tâches de ménage ou d'accueil que Mme [J] allègue avoir accomplies, la réalité des tâches n'est pas contestée par M. [K] qui indique à Mme [J], dans un mail postérieur à la prise d'acte, que son départ va le contraindre au recrutement de 2 personnes pour s'occuper du service et des chambres.
La SARL HOLDING RENAISSANCE verse sur ce point plusieurs justificatifs de recours par la SAS HOSTELLERIE DES PINS à un organisme (Adequat) pour des prestations de ménage courant 2016, 2017 et 2018, du recours à Pôle emploi pour un poste de réceptionniste en 2013. Il est encore versé les comptes de résultats de la SAS HOSTELLERIE DES PINS pour la période de septembre 2016 à août 2017 faisant état de sommes versées pour des salaires.
S'agissant de l'autonomie dont pouvait disposer Mme [J] ou l'existence d'un lien de subordination, il ressort de l'échange de mail du 12 juillet 2017 entre Mme [J] et M. [K], qu'en réponse au grief formulé par Mme [J] portant sur le fait qu'elle travaille depuis 4 ans sans interruption ni contrepartie financière et sollicite un ré-aménagement de son temps de travail, que M. [K] lui réplique qu'il en est de même pour lui. Il lui indique encore qu'elle peut, en tant que présidente de la SAS HOSTELLERIE DES PINS gérer son temps de travail comme elle l'entend, lui-même travaillant depuis 4 ans sans rémunération.
Il convient au surplus de relever que Mme [J], qui argue avoir agi dans le cadre d'un lien de subordination, ne produit aucune des pièces qui viendrait démontrer qu'elle rendait des comptes ou recevait des instructions. En effet, la seule attestation produite par Mme [J], émane d'une personne qui n'exerçait pas dans l'établissement et est donc non probante.
Dès lors, force est de constater que ces éléments font foi de l'autonomie dont jouissait Mme [J] dans l'exercice de ses fonctions prétendument salariées et qu'il est ainsi suffisamment établi qu'elle n'était placée sous aucun lien de subordination.
Il convient dès lors de considérer que le contrat detravail litigieux était fictif.
Mme [J] ne peut au surplus prétendre que son contrat de travail aurait à tout le moins perduré au-delà de sa démission de ses fonctions de présidente le 16 avril 2018 dans la mesure où son contrat de travail est fictif dès son origine et n'a donc aucun effet ni avant ni après la cessation du mandat social.
Il convient dès lors, par voie d'infirmation de la décision déférée de dire qu'au regard du caractère fictif de son contrat de travail, Mme [J] ne peut revendiquer le statut de salariée.
La juridiction prud'homale est en conséquence incompétente pour statuer sur ses demandes et il convient de rejeter l'intégralité des demandes formulées par Mme [J] et de la SARL HOLDING RENAISSANCE au titre de l'exécution et de la rupture du contrat de travail.
L'AGS CGEA d'Annecy est dès lors mise hors de cause.
Sur les demandes accessoires :
Il convient de condamner Mme [J], partie perdante, aux entiers dépens et à la somme de 1 500€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant contradictoirement après en avoir délibéré conformément à la loi,
DECLARE Mme [J] recevable en son appel,
INFIRME le jugement déféré,
Statuant à nouveau,
DIT que le contrat de travail de Mme [J] est un contrat de travail fictif,
DIT qu'il n'existe pas de relation de travail entre les parties,
DIT que la juridiction prud'homale est incompétente pour statuer sur les demandes des parties portant sur l'exécution et la rupture d'un contrat de travail,
DIT que l'UNEDIC Délégation AGS CGEA d'ANNECY dit être mise hors de cause,
Y ajoutant,
DIT que Mme [J] est condamnée à verser à Me [E] en sa qualité de mandataire liquidateur de la SARL HOLDING RENAISSANCE, la somme de 1 500 Euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
DIT que Mme [J] doit être condamnée aux dépens de l'instance.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Valéry CHARBONNIER, Conseillère faisant fonction de Présidente, et par Madame Mériem CASTE-BELKADI, Greffière, à qui la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.
La Greffière, La Présidente,