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30/06/2022 | FRANCE | N°20/01442

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Ch.secu-fiva-cdas, 30 juin 2022, 20/01442


C8



N° RG 20/01442



N° Portalis DBVM-V-B7E-KNGC



N° Minute :







































































Notifié le :



Copie exécutoire délivrée le :







AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



CHAMBRE SOCIALE - PROTECTION S

OCIALE

ARRÊT DU JEUDI 30 JUIN 2022

Ch.secu-fiva-cdas





Appel d'une décision (N° RG 17/00276)

rendue par le pôle social du tribunal judiciaire de CHAMBERY

en date du 13 janvier 2020

suivant déclaration d'appel du 25 mars 2020





APPELANTE :



S.A.S. ARC FUSED ALUMINA DEVENUE NICHE FUSED ALUMINA, prise en la personne de son représentant légal en exercice d...

C8

N° RG 20/01442

N° Portalis DBVM-V-B7E-KNGC

N° Minute :

Notifié le :

Copie exécutoire délivrée le :

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE SOCIALE - PROTECTION SOCIALE

ARRÊT DU JEUDI 30 JUIN 2022

Ch.secu-fiva-cdas

Appel d'une décision (N° RG 17/00276)

rendue par le pôle social du tribunal judiciaire de CHAMBERY

en date du 13 janvier 2020

suivant déclaration d'appel du 25 mars 2020

APPELANTE :

S.A.S. ARC FUSED ALUMINA DEVENUE NICHE FUSED ALUMINA, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

38 rue des Fondeurs

73540 LA BATHIE

représentée par Me Marie ALBERTINI de la SCP P D G B, avocat au barreau de PARIS substituée par Me Héléna CLET, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE :

La CPAM DE LA SAVOIE, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

5 avenue Jean Jaurès - CS 40015

73015 CHAMBERY CEDEX

comparante en la personne de Mme [C] [G], régulièrement munie d'un pouvoir

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Magali DURAND-MULIN, Conseiller faisant fonction de Président,

Mme Isabelle DEFARGE, Conseiller,

Mme Gaëlle BARDOSSE, Conseiller,

DÉBATS :

A l'audience publique du 12 mai 2022

Mme Isabelle DEFARGE, chargée du rapport, a entendu les représentants des parties en leurs conclusions et plaidoirie, assistée de M. Fabien OEUVRAY, Greffier, conformément aux dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, les parties ne s'y étant pas opposées ;

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 30 juin 2022, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.

L'arrêt a été rendu le 30 juin 2022.

Le 04 août 2016 M. [N] [J], salarié en qualité d'agent de fabrication entre 1995 et le 09 août 1993 de la SAS ALTEO ARC, devenu ARC FUSED ALUMINA le 1er janvier 2017 a demandé à la CPAM de Savoie la prise en charge au titre de la législation professionnelle de la maladie 'MP 30 A Asbestose pulmonaire avec fibrose'.

Le 02 février 2017, après enquête, la CPAM a notifié sa décision de prise en charge de cette maladie au titre de la législation professionnelle.

Le 02 juin 2017, la SAS ARC FUSED ALUMINA a saisi la juridiction de sécurité sociale de Chambéry en contestation de la décision implicite de rejet, par la commission de recours amiable de cette caisse, de son recours concernant l'opposabilité à son égard de cette décision de prise en charge.

Par jugement du 13 janvier 2020, cette juridiction :

- a débouté la SAS ARC FUSED ALUMINA devenue NICHE FUSED ALUMINA de sa demande tendant à ce que la décision de reconnaissance de la maladie déclarée le 04 août 2016 par M. [N] [J] prise en charge par la CPAM de la Savoie par décision du 02 février 2017 lui soit déclarée inopposable,

- l'a condamnée aux dépens.

Le 1er avril 2020 la SAS NICHE FUSED ALUMINA a interjeté appel de cette décision qui lui a été notifiée le 13 mars 2020 et au terme de ses conclusions déposées le 19 novembre 2021 reprises oralement à l'audience, elle demande à la cour :

- de la dire recevable et bien fondée en son appel,

- d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions,

et statuant à nouveau

- de constater que M. [J] n'a pas été exposé de façon habituelle au risque d'inhalation de poussières d'amiante en son sein,

En conséquence

- de lui dire et juger inopposable la décision de prise en charge de la maladie de M. [J] au titre de la législation AT/MP ainsi que toute décision subséquente.

Au terme de conclusions déposées et reprises oralement à l'audience la CPAM de la Savoie demande à la cour :

- de confirmer le jugement rendu le 13 janvier 2020,

- de dire opposable à la société ARC FUSED ALUMINA la maladie professionnelle de M. [N] [J] constatée le 16 février 2016.

En application de l'article 455 du code de procédure civile il est expressément référé aux dernières écritures des parties pour plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

SUR CE :

En application de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale dans sa version ici applicable est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau.

Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée dans un tableau de maladies professionnelles peut être reconnue d'origine professionnelle lorsqu'il est établi qu'elle est directement causée par le travail habituel de la victime.

Dans ce cas, la caisse primaire reconnaît l'origine professionnelle de la maladie après avis motivé d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles dont la composition, le fonctionnement et le ressort territorial de ce comité ainsi que les éléments du dossier au vu duquel il rend son avis sont fixés par décret et dont l'avis s'impose à la caisse.

Le tableau 30 A ici applicable prévoit

DÉSIGNATION DES MALADIES

DÉLAI de prise en charge

LISTE INDICATIVE DES PRINCIPAUX TRAVAUX susceptibles de provoquer ces maladies

A. - Asbestose : fibrose pulmonaire diagnostiquée sur des signes radiologiques spécifiques, qu'il y ait ou non des modifications des explorations fonctionnelles respiratoires. Complications : insuffisance respiratoire aiguë, insuffisance ventriculaire droite.

35 ans

(sous réserve d'une durée d'exposition de 2 ans)

Travaux exposant à l'inhalation de poussières d'amiante, notamment : - extraction, manipulation et traitement de minerais et roches amiantifères.

Manipulation et utilisation de l'amiante brut dans les opérations de fabrication suivantes : amiante-ciment ; amiante-plastique ; amiante-textile ; amiante-caoutchouc ; carton, papier et feutre d'amiante enduit ; feuilles et joints en amiante ; garnitures de friction contenant de l'amiante ; produits moulés ou en matériaux à base d'amiante et isolants.

Travaux de cardage, filage, tissage d'amiante et confection de produits contenant de l'amiante.

Application, destruction et élimination de produits à base d'amiante : - amiante projeté ; calorifugeage au moyen de produits contenant de l'amiante ; démolition d'appareils et de matériaux contenant de l'amiante, déflocage.

Travaux de pose et de dépose de calorifugeage contenant de l'amiante.

Travaux d'équipement, d'entretien ou de maintenance effectués sur des matériels ou dans des locaux et annexes revêtus ou contenant des matériaux à base d'amiante.

Conduite de four.

Travaux nécessitant le port habituel de vêtements contenant de l'amiante.

Il appartient à la caisse, pour bénéficier de la présomption instituée par l'alinéa 1er de cet article, de démontrer que la maladie a été contractée dans les conditions posées par le tableau applicable.

L'exposition habituelle à un risque nocif décrit à un tableau de maladies professionnelles doit être caractérisée exclusivement par rapport au poste de travail de l'assuré et aux conditions d'exécution de ce travail, sur la base de constatations objectives.

En l'espèce il n'est pas contesté que M. [J] a été embauché dans l'établissement de La Bathie de la SAS ARC FUSED ALUMINA le 4 octobre 1955 et employé en qualité d'agent de fabrication jusqu'au 11 juin 1993.

L'employeur soutient qu'il travaillait au conditionnement du corindon blanc (ou oxyde d'aluminium) dans une zone où l'amiante n'était pas utilisée, que ses équipements de travail et protections individuelles ne contenaient pas d'amiante et qu'il n'a donc pas été exposé au risque d'inhalation de poussières contenant de l'amiante durant son activité professionnelle en son sein.

M. [J] a cependant déclaré plus précisément au questionnaire d'enquête avoir successivement été employé :

- en qualité de conducteur de broyeur éclair puis de tamis à l'atelier Cristalba,

- en qualité de conducteur de broyeur éclair à l'atelier Arbina,

- en qualité de conducteur d'ensacheuse dans la zone industrielle,

- ainsi qu'à la manutention d'outils, au démontage de pièces d'usine sur les broyeurs, dans des ateliers ouverts dans lesquelles toutes les machines (broyeurs, tamis, séchoirs rotatifs, séchoirs à palette, laveurs, chaudières à vapeur) étaient proches les unes des autres.

Il a soutenu que de l'amiante était contenue dans les séchoirs, la chaudière à vapeur, ainsi que dans les protections des fours et que plusieurs opérations de désamiantage s'étaient déroulées depuis son départ de l'entreprise, ce qui est confirmé par l'inventaire des matériels 'pouvant contenir de l'amiante' établi au sein de l'usine de La Bathie en novembre 1998 comportant pages 5 et 6 la liste des matériels contenant de l'amiante (dont les fours, séchoirs, ponts roulants, systèmes de ventilation cités par les secrétaires du CHSCT) et précisant au titre du personnel concerné, non seulement le personnel de conduite des fours, mais également le personnel de l'atelier, les magasiniers, et toute personne évoluant dans une atmosphère polluée par des fibres issues de matériaux amiantés non confinés.

La SAS NICHE FUSED ALUMINA soutient que M. [J] n'a pas travaillé dans l'atelier Cristalba.

Cependant, elle n'a pas contredit la déclaration de son salarié à cet égard, s'étant contentée de répondre à la demande de renseignements adressée par la caisse que celui-ci 'travaillait au conditionnement du corindon blanc dans une zone où l'amiante n'était pas utilisée' sans préciser dans quelle zone ce matériau était conditionné.

Et la CPAM de Savoie produit à bon escient, compte-tenu des conclusions du rapport d'inventaire précité réalisé en 1998 :

- un courrier du secrétaire du CHSCT de l'usine de La Bathie en date du 9 septembre 2004 exposant que la partie broyage de l'atelier Cristalba était nettoyée entre chaque campagne de fabrication de produits différents et qu'après le nettoyage un colmatage des fentes dans les trémies était effectué avec du cordon d'amiante, que les mâchoires de freins du pont roulant de cet atelier contenaient de l'amiante, que du cordon d'amiante était utilisé comme joint d'étanchéïté sur les conduits d'aspiration, que les joints et l'isolation des conduits vapeur contenaient également de l'amiante, que les agents de fabrication procédaient à la réfection des séchoirs rotatifs qui contenaient des joints à base de cordon d'amiante, et ce jusqu'au milieu des années 1980 ;

- un courrier du secrétaire du même CHSCT en date du 5 avril 2006 exposant que l'ensemble des ateliers de l'usine utilisaient l'amiante sous différentes formes (plaquettes de freins sur ponts roulants et poutres roulantes, cordons des joints sur tuyauterie d'aspiration et vapeur ainsi que sur les séchoirs électriques, isolation des tuyauteries) et que les agents de fabrication étaient soumis aux émanations de poussières d'amiante dues à l'usure des matériaux.

L'enquêteur pouvait dès lors déduire de précédentes enquêtes ayant permis d'établir la présence d'amiante sur de nombreuses installations de l'usine (plaques sur les fours, joints sur les broyeurs et séchoirs, isolation des flexibles et de la tuyauterie, garniture des freins des ponts roulants) jusqu'en 1999 au moins, que les travaux effectués par M. [J] de 1955 à 1993 correspondaient au tableau 30 A.

Et les affirmations du médecin du travail de l'entreprise effectuées en 2016, selon lesquelles la prime de poussière de M. [J] était justifiée par le fait qu'il avait été exposé toute sa carrière aux poussières de corindon blanc, mais qu'il ne ressortait de son dossier médical aucune notion d'exposition à l'amiante, postérieures aux campagnes de désamiantage relatées ne sont pas de nature à exclure l'exposition habituelle aux poussières d'amiante de celui-ci dans le cadre de son activité professionnelle ainsi démontrée.

Le jugement sera en conséquence confirmé.

La SAS NICHE FUSED ALUMINA devra supporter les dépens de l'instance en application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt rendu contradictoirement, publiquement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme le jugement.

Y ajoutant,

Condamne la SAS NICHE FUSED ALUMINA venant aux droits de la SAS ARC FUSED ALUMINA aux dépens.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Mme Magali DURAND-MULIN, Conseiller faisant fonction de président et par Mme Chrystel ROHRER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GreffierLe Conseiller


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Ch.secu-fiva-cdas
Numéro d'arrêt : 20/01442
Date de la décision : 30/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-30;20.01442 ?
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