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23/06/2022 | FRANCE | N°20/01183

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Ch.secu-fiva-cdas, 23 juin 2022, 20/01183


C6



N° RG 20/01183



N° Portalis DBVM-V-B7E-KMUO



N° Minute :







































































Notifié le :



Copie exécutoire délivrée le :







La SELARL GERBI





AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE
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CHAMBRE SOCIALE - PROTECTION SOCIALE

ARRÊT DU JEUDI 23 JUIN 2022

Ch.secu-fiva-cdas





Appel d'une décision (N° RG 17/00858)

rendue par le pôle social du tribunal judiciaire de Grenoble

en date du 16 janvier 2020

suivant déclaration d'appel du 10 mars 2020





APPELANT :



M. [C] [U]

né le 28 mai 1977 à Toulouse (31000)

de nationalité Française

8 boulevard Joseph...

C6

N° RG 20/01183

N° Portalis DBVM-V-B7E-KMUO

N° Minute :

Notifié le :

Copie exécutoire délivrée le :

La SELARL GERBI

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE SOCIALE - PROTECTION SOCIALE

ARRÊT DU JEUDI 23 JUIN 2022

Ch.secu-fiva-cdas

Appel d'une décision (N° RG 17/00858)

rendue par le pôle social du tribunal judiciaire de Grenoble

en date du 16 janvier 2020

suivant déclaration d'appel du 10 mars 2020

APPELANT :

M. [C] [U]

né le 28 mai 1977 à Toulouse (31000)

de nationalité Française

8 boulevard Joseph Vallier

38000 GRENOBLE

représenté par Me Hervé GERBI de la SELARL GERBI, avocat au barreau de GRENOBLE substitué par Me Thibaut HEMOUR, avocat au barreau de GRENOBLE

INTIMEE :

La CPAM DE L'ISERE, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

Service Contentieux Général

02 rue des Alliés

38045 GRENOBLE CEDEX 09

comparante en la personne de Mme [E] [R], régulièrement munie d'un pouvoir

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Magali DURAND-MULIN, Conseiller faisant fonction de Président,

Mme Isabelle DEFARGE, Conseiller,

M. Frédéric Blanc, Conseiller,

DÉBATS :

A l'audience publique du 05 mai 2022

Mme Magali DURAND-MULIN, chargée du rapport, a entendu les représentants des parties en leurs conclusions et plaidoiries, assistée de M. Fabien OEUVRAY, Greffier, conformément aux dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, les parties ne s'y étant pas opposées ;

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 23 juin 2022, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.

L'arrêt a été rendu le 23 juin 2022.

M. [C] [U] a été embauché le 23 mai 2007 par la société SAGE en qualité de consultant chargé de projet PME, statut cadre.

Une déclaration d'accident du travail établie par M. [U] a été reçue par la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère le 20 février 2017.

Elle a été complétée par une seconde déclaration d'accident du travail établie le 02 mars 2017 par le salarié, mentionnant les éléments suivants':

«activité de la victime lors de l'accident': néant - nature de l'accident': syndrome anxio dépressif réactionnel à une situation professionnelle ( annonce du plan progrès) ' nature des lésions': psychique».

La caisse a diligenté une enquête administrative avant de notifier le 11 mai 2017 un refus de prise en charge au titre de la législation professionnelle de l'accident déclaré, survenu le 10 décembre 2015.

M. [U] a contesté la décision de refus de prise en charge devant la commission de recours amiable de la CPAM de l'Isère.

Par requête du 21 juillet 2017, M. [U] a saisi le tribunal des affaires de sécurité cociale de Grenoble d'un recours contre la décision implicite de rejet de la Commission de recours amiable de la caisse.

Lors de sa réunion du 06 novembre 2017, la commission de recours amiable de la caisse a confirmé la décision de refus de prise en charge, au titre de la législation professionnelle, des faits déclarés survenus le 10 décembre 2015.

Par jugement du 16 janvier 2020, le pôle social du tribunal judiciaire de Grenoble a :

- dit que c'est à bon droit que la caisse a refusé la prise en charge au titre de la législation professionnelle de l'accident déclaré par M. [C] [U] qui serait survenu le 10 décembre 2015,

- débouté M. [C] [U] de l'ensemble de ses demandes,'

- condamné M. [C] [U] aux dépens de la procédure nés postérieurement au 1er janvier 2019.

Par déclaration du 10 mars 2020, M. [U] a interjeté appel.

A l'audience, M. [C] [U] fait oralement soutenir ses conclusions pour demander à la cour de':

- réformer le jugement,

- dire que l'accident survenu le 10 décembre 2015 doit être pris en charge au titre de la législation professionnelle par la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère,

- condamner la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère aux dépens de première instance nés postérieurement au 1er janvier 2019 ainsi qu'aux dépens d'appel avec distraction de droit et au paiement d'une somme de 3000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère a soutenu oralement ses conclusions pour demander à la cour la confirmation du jugement et le rejet de la demande de M. [U] en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour un exposé complet des moyens et prétentions des parties, il convient au visa de l'article 455 du code de procédure civile de se reporter à leurs écritures susvisées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

En application des dispositions de l'article L. 411-1 du code la sécurité sociale, est considéré comme accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs.

Il appartient au salarié d'établir, autrement que par ses seules affirmations, la matérialité de l'accident dont il se dit victime, ce qui suppose la preuve d'un événement survenu à une date certaine d'une part et de la lésion qui en est résulté d'autre part.

S'agissant du fait accidentel, M. [U] invoque la réception le 10 décembre 2015 d'un courriel émanant de sa manager, Mme [O] ayant pour objet la mise en place d'un plan individuel de progrès au regard d'une tenue de poste qualifiée d'insuffisante.

M. [U] produit ce mail daté du 10 décembre 2015 à 7h02 ainsi que son propre courriel qu'il a adressé à Mme [T] [F] déléguée syndicale le même jour à 8h25 au terme duquel il indique être à bout et se sentir au bord de la dépression. Il est ainsi démontré la réception effective de ce courriel professionnel le 10 décembre 2015, ce que du reste la caisse ne conteste pas, de sorte qu'il est rapporté la preuve d'un événement soudain à savoir la réception d'un courriel, survenu à une date certaine.

S'agissant de la lésion, le salarié produit un arrêt de travail à compter du 11 décembre 2015 prescrit au titre de la maladie de droit commun pour dépression réactionnelle, lequel a été renouvelé à compter du 15 janvier 2016 pour dépression. Il a fait l'objet d'une prise en charge psychiatrique à compter du 3 février 2016 ainsi qu'en atteste le Dr [J] le 15 juin 2016 qui certifie suivre M. [U] pour état dépressif réactionnel avec effondrement psychique déclenché brutalement le 10 décembre 2015 dans les suites immédiates de l'annonce de son plan de progrès.

Il résulte de ces éléments que la constatation médicale de la lésion psychique est intervenue dès le lendemain du fait accidentel.

Le fait que la déclaration d'accident du travail n'ait été effectuée que le 20 février 2017 par la victime est sans incidence dès lors que le délai de deux ans prévu par l'article L. 441-2 du code de la sécurité sociale a été respecté.

Par ailleurs, l'absence de la date de l'accident du travail dans le certificat médical initial rectificatif daté du 11 décembre 2015 établi par le médecin traitant ne constitue qu'une simple omission matérielle qui n'emporte pas de conséquence dès lors qu'il est justifié de la survenance d'un fait accidentel précisément daté.

Ces éléments sont suffisants pour établir l'existence d'une soudaine altération de l'état psychique du salarié en relation avec la réception du courriel professionnel portant sur la mise en place d'un plan de progrès, les affirmations de la caisse selon lesquelles la teneur des échanges serait acceptable dans un environnement professionnel et les lésions constatées seraient disproportionnées avec le fait accidentel décrit, étant inopérantes pour combattre l'existence du lien de causalité.

Il en résulte que la présomption d'imputabilité de l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale est applicable.

La caisse qui conteste le caractère professionnel de l'accident peut combattre cette présomption en démontrant que l'accident résulte d'une cause totalement étrangère au travail.

Or, en l'espèce l'enquêteur de la caisse relève lui-même qu'une souffrance engendrée par le contexte professionnel du salarié ne peut être exclue ce qui est de nature à établir que la relation de travail n'était pas étrangère à l'état psychique du salarié constaté le 11 décembre 2015.

En l'absence de preuve d'une cause totalement étrangère au travail, il convient de retenir le caractère professionnel de l'accident subi par M. [U] le 10 décembre 2015.

Le jugement sera en conséquence infirmé.

La caisse qui succombe sra condamnée aux dépens en application de l'article 696 du code de procédure civile. La demande de distraction des dépens sera rejetée dès lors que le ministère d'avocat n'est pas obligatoire.

En application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, il est équitable que la caisse contribue aux frais irrépétibles exposés par M. [U].

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement et contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Infirme le jugement déféré.

Statuant à nouveau,

Dit que l'accident survenu à M. [C] [U] le 10 décembre 2015 doit être pris en charge au titre de la législation professionnelle par la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère.

Condamne la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère aux dépens de première instance nés postérieurement au 1er janvier 2019 ainsi qu'aux dépens d'appel.

Rejette la demande de distraction des dépens.

Condamne la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère à payer à M. [C] [U] la somme de 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Mme Magali DURAND-MULIN, Conseiller faisant fonction de président et par Mme Chrystel ROHRER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GreffierLe Conseiller


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Ch.secu-fiva-cdas
Numéro d'arrêt : 20/01183
Date de la décision : 23/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-23;20.01183 ?
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