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23/06/2022 | FRANCE | N°20/01162

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Ch.secu-fiva-cdas, 23 juin 2022, 20/01162


C6



N° RG 20/01162



N° Portalis DBVM-V-B7E-KMSR



N° Minute :







































































Notifié le :



Copie exécutoire délivrée le :





la SELARL ACO

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE GRENOBLE



CHAMBRE SOCIALE -

PROTECTION SOCIALE

ARRÊT DU JEUDI 23 JUIN 2022

Ch.secu-fiva-cdas





Appel d'une décision (N° RG 18/00591)

rendue par le pôle social du tribunal judiciaire de VALENCE

en date du 17 janvier 2020

suivant déclaration d'appel du 06 mars 2020





APPELANT :



M. [K] [N]

né le 30 décembre 1974 à TASSIN LA DEMI-LUNE (69160)

de nationalité Française

30B rue Sai...

C6

N° RG 20/01162

N° Portalis DBVM-V-B7E-KMSR

N° Minute :

Notifié le :

Copie exécutoire délivrée le :

la SELARL ACO

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE SOCIALE - PROTECTION SOCIALE

ARRÊT DU JEUDI 23 JUIN 2022

Ch.secu-fiva-cdas

Appel d'une décision (N° RG 18/00591)

rendue par le pôle social du tribunal judiciaire de VALENCE

en date du 17 janvier 2020

suivant déclaration d'appel du 06 mars 2020

APPELANT :

M. [K] [N]

né le 30 décembre 1974 à TASSIN LA DEMI-LUNE (69160)

de nationalité Française

30B rue Saint-Martin

26740 MONTBOUCHER SUR JABRON

comparant en personne

INTIMEE :

L'URSSAF RHONE-ALPES, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

TSA 61021

69833 SAINT-PRIESTCEDEX 9

représentée par Me Pierre-Luc NISOL de la SELARL ACO, avocat au barreau de VIENNE, substitué par Me Emmanuelle CLEMENT, avocat au barreau de LYON

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Magali DURAND-MULIN, Conseiller faisant fonction de Président,

Mme Isabelle DEFARGE, Conseiller,

M. Frédéric Blanc, Conseiller,

DÉBATS :

A l'audience publique du 05 mai 2022

Mme Magali DURAND-MULIN, chargée du rapport, a entendu l'appelant et le représentant de la partie intimée en leurs conclusions et plaidoiries, assistée de M. Fabien OEUVRAY, Greffier, conformément aux dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, les parties ne s'y étant pas opposées ;

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 23 juin 2022, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.

L'arrêt a été rendu le 23 juin 2022.

EXPOSÉ DU LITIGE

Les 24 juillet 2018 et 31 août 2018, M. [K] [S] [N] [B], chirurgien dentiste, a formé opposition devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de Valence à trois contraintes décernées par l'URSSAF Rhône-Alpes :

- la première du 12 juillet 2018, signifiée le 18 juillet 2018, pour avoir paiement de la somme de 945 € se rapportant au 1er trimestre 2016,

- la deuxième du 23 août 2018, signifiée le 29 août 2018, pour avoir paiement de la somme de 14 839 € se rapportant aux cotisations et majorations de février à juillet 2018,

- la troisième du 26 juillet 2018, signifiée le 1er août 2018, pour avoir paiement de la somme de 463 € se rapportant aux cotisations et majorations de février 2018.

Par jugement du 17 janvier 2020, le pôle social du tribunal judiciaire de Valence a :

- ordonné la jonction des recours,

- écarté des débats les conclusions de M. [S] [N] [B] déposées et reçues le 12 novembre 2019,

- débouté M. [S] [N] [B] de toutes ses demandes,

- déclaré forclose l'opposition de M. [S] [N] [B] à la contrainte délivrée par l'URSSAF Rhône-Alpes le 26 juillet 2018 pour un montant de 463 €,

- validé la contrainte délivrée à M. [S] [N] [B] par l'URSSAF Rhône-Alpes le 12 juillet 2018 à hauteur de 945 € au titre des cotisations et majorations du 1er trimestre 2016 et condamné, en tant que de besoin, M. [S] [N] [B], au paiement de cette somme,

- validé la contrainte délivrée à M. [S] [N] [B] par l'URSSAF Rhône-Alpes le 23 août 2018 à hauteur de 14 839 € au titre des cotisations et majorations de février à juillet 2018 et condamné, en tant que de besoin, M. [S] [N] [B], au paiement de cette somme,

- dit que les frais de signification des contraintes, ainsi que les frais nécessaires à leur exécution, sont à la charge de M. [S] [N] [B] et condamné, en tant que de besoin, M. [S] [N] [B] au paiement de ces frais,

- condamné M. [S] [N] [B] à payer à l'URSSAF Rhône-Alpes la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [S] [N] [B] à une amende civile de 10 000 €,

- ordonné l'exécution provisoire de la décision,

- condamné M. [S] [N] [B] aux éventuels dépens à compter du 1er janvier 2019.

Le 6 mars 2020, M. [S] [N] [B] a interjeté appel de cette décision.

Suivant conclusions, parvenues au greffe le 12 avril 2022 et reprises oralement à l'audience, M. [S] [N] [B] demande à la cour de :

- déclarer son appel recevable et bien fondé,

- infirmer le jugement rendu le 17 janvier 2020,

- constater l'absence de conformité à la jurisprudence de la contrainte délivrée le 18 juillet 2018, 1er août 2018 et 29 août 2018,

- dire que les contraintes des 18 juillet 2018, 1er août 2018 et 29 août 2018 sont frappées de nullité,

- dire que les significations des contraintes sont frappées de nullité,

En conséquence,

- débouter l'URSSAF Rhône-Alpes de ses prétentions,

- condamner l'URSSAF Rhône-Alpes à lui payer la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Suivant conclusions, parvenues au greffe le 5 avril 2022 et reprises oralement à l'audience, l'URSSAF Rhône-Alpes demande à la cour de :

- confirmer le jugement déféré dans toutes ses dispositions,

- débouter M. [S] [N] [B] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- condamner M. [S] [N] [B] à lui payer la somme de 2 000 € à titre de dommages-intérêts pour recours abusif et dilatoire,

- condamner M. [S] [N] [B] à lui payer la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité de l'opposition à contrainte décernée le 26 juillet 2018 :

L'article R.133-3 alinéa 3 du code de la sécurité sociale prévoit que le débiteur peut former opposition à une contrainte par inscription au secrétariat du tribunal compétent dans le ressort duquel il est domicilié ou pour les débiteurs domiciliés à l'étranger, au secrétariat du tribunal compétent dans le ressort de l'organisme créancier par lettre recommandée avec demande d'avis de réception adressée au secrétariat dudit tribunal dans les quinze jours à compter de la notification ou de la signification. L'opposition doit être motivée ; une copie de la contrainte contestée doit lui être jointe. Le secrétariat du tribunal informe l'organisme créancier dans les huit jours de la réception de l'opposition.

L'URSSAF Rhône-Alpes soulève l'irrecevabilité de l'opposition à contrainte décernée à M. [S] [N] [B] le 26 juillet 2018.

Il ressort du courrier de recours de M. [S] [N] [B], produit par l'intimée, que ce dernier a formé opposition le 31 août 2018 à la contrainte délivrée le 26 juillet 2018, signifiée par acte d'huissier de justice le 1er août 2018.

Faute pour M. [S] [N] [B] d'avoir respecté le délai légal de quinze jours à compter de la signification prévu à l'article R.133-3 alinéa 3 du code de la sécurité sociale, il doit donc être déclaré irrecevable en son opposition pour cause de forclusion.

Le jugement déféré sera confirmé.

Sur la nullité des contraintes décernées les 18 juillet 2018 et 23 août 2018 et des actes de signification afférents :

Il résulte des dispositions de l'article L.244-2 du code de la sécurité sociale dans sa version applicable au litige que toute action aux fins de recouvrement de cotisations de sécurité sociale doit être précédée, à peine de nullité, de l'envoi d'une mise en demeure adressée au débiteur.

Le contenu de l'avertissement ou de la mise en demeure doit être précis et motivé.

La mise en demeure, constituant une invitation impérative adressée au débiteur d'avoir à régulariser sa situation dans le délai imparti, doit permettre à l'intéressé d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation.

La mise en demeure comme la contrainte doivent préciser, à peine de nullité, outre la nature et le montant des cotisations réclamées, la période à laquelle elles se rapportent sans que soit exigée la preuve d'un prejudice.

L'apposition sur la contrainte d'une image numérisée d'une signature manuscrite ne permet pas, à elle seule, de retenir que son signataire était dépourvu de la qualité requise pour décerner cet acte.

Au premier soutien de sa demande tendant à l'annulation des deux contraintes litigieuses, M. [S] [N] [B] prétend qu'elles ne satisfont pas aux exigences de motivation puisque la nature des différentes cotisations sollicitées ne sont pas mentionnées, mais seulement la nature du cotisant.

Mais il ressort des contraintes litigieuses, ainsi que des mises en demeure préalables adressées, chacune, par lettre recommandée avec accusé de réception, que :

- la contrainte du 12 juillet 2018 se réfère expressément à la mise en demeure n° 0081484151 datée du 18 juillet 2016 émise pour avoir paiement des cotisations dues au titre du 1er trimestre 2016 en l'absence de versement du cotisant.

M. [S] [N] [B] restait redevable de la somme totale de 945 € dont 897 € au titre des cotisations : maladie Praticiens Auxiliaires Médicaux et 12 € au titre des majorations de retard. La somme portée sur la mise en demeure et la contrainte est identique.

- la contrainte du 23 août 2018 a été précédée de l'envoi de 5 mises en demeure auxquelles elle se réfère en indiquant leurs numéros respectifs et émises pour insuffisance de versement au titre des cotisations : allocations familiales et contributions travailleur indépendant :

la mise en demeure n° 0082984897 du 15 février 2018 porte sur la somme totale de 4 142 €, majorations de retard incluses, au titre des cotisations du mois de février 2018,

la mise en demeure n° 0083035803 du 13 mars 2018 porte sur la somme totale de 2 019 €, majorations de retard incluses, au titre des cotisations du mois de mars 2018,

la mise en demeure n° 0083094112 du 13 avril 2018 porte sur la somme totale de 2 019 €, majorations de retard incluses, au titre des cotisations du mois d'avril 2018,

la mise en demeure n° 0083216472 du 25 juin 2018 porte sur la somme totale de 4 274 €, majorations de retard incluses, au titre des cotisations des mois de mai et juin 2018,

la mise en demeure n° 0083251278 du 16 juillet 2018 porte sur la somme totale de 2 385 €, majorations de retard incluses, au titre des cotisations du mois de juillet 2018.

Le total des sommes dues au titre de ces 5 mises en demeure correspond à celui réclamé au titre de la contrainte, à savoir 14 839 €.

Dès lors que sont mentionnées sur chaque mise en demeure la nature et le montant des cotisations réclamées, ainsi que les périodes auxquelles ces cotisations se rapportent, de sorte que ces mises en demeure sont régulières, et que chaque contrainte délivrée ultérieurement se réfère expressément à ces mises en demeure, il en résulte que l'URSSAF Rhône-Alpes a respecté les exigences légales de motivation.

M. [S] [N] [B] a ainsi pu avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation.

L'appelant est dès lors mal fondé en son premier grief.

Au second soutien de sa demande d'annulation, M. [S] [N] [B] fait valoir que la signature portée sur la contrainte est une signature électronique ne répondant pas aux exigences de l'article 1367 alinéa 2 du code civil.

Mais la signature portée sur les deux contraintes litigieuses n'est pas électronique comme le soutient à tort M. [S] [N] [B] puisqu'il s'agit en réalité de la signature manuscrite, puis scannée, du directeur de l'URSSAF Rhône-Alpes. Les dispositions de l'article 1367 alinéa 2 du code civil ne sont pas applicables.

Au demeurant, l'apposition sur la contrainte d'une image numérisée d'une signature manuscrite ne permet pas, à elle seule, de retenir que son signataire était dépourvu de la qualité requise pour décerner cet acte.

L'appelant est également mal fondé en son deuxième grief.

Au troisième soutien de sa demande d'annulation, M. [S] [N] [B] prétend que les actes de signification ne comportent pas plus de précisions sur la nature des cotisations réclamées de sorte qu'ils sont aussi entachés de nullité.

Il considère en outre que le fait que le document indique qu'il comporte 3 pages alors que 5 pages ont été remises constituerait un vice de nullité.

Mais l'examen des actes de signification des deux contraintes des 12 juillet 2018 et 23 août 2018 permet d'établir leur régularité au regard des dispositions des articles 655 à 658 du code de procédure civile applicables en la matière.

S'agissant du nombre de pages remises, il sera observé que M. [S] [N] [B] ne justifie d'aucune pièce à l'appui de ses assertions et ne démontre pas plus l'existence d'un grief résultant de cette différence du nombre de pages alléguée. En tout cas, cette seule affirmation ne suffit pas à remettre en cause la validité de ces actes.

S'agissant de l'absence de précisions alléguée, il ressort au contraire des pièces produites que chaque acte de signification comporte le détail des créances litigieuses ainsi que les délai et voie de recours.

Il est clairement mentionné, qu'à la demande du directeur de l'URSSAF Rhône-Alpes, une contrainte a été signifiée à M. [S] [N] [B], le 26 juillet 2018 pour avoir paiement de la somme de 897 € au titre des cotisations impayées et 45 € au titre des majorations de retard se rapportant au 1er trimestre 2016 tandis que l'autre contrainte, signifiée le 29 août 2018, se rapporte aux cotisations des mois de février à juillet 2018 pour un montant de 14 110 € au titre des cotisations impayées et 729 € au titre des majorations de retard.

Dans ces conditions, M. [S] [N] [B] a été dûment informé de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation et ce d'autant que la copie de la contrainte litigieuse était annexée à l'acte de signification.

Aucun des moyens soulevés par l'appelant n'étant de nature à entacher de nullité les actes de signification et les contraintes qui lui ont été décernées les 12 juillet 2018 et 23 août 2018, elles seront donc validées pour leurs montants respectifs de 945 € et 14 839 €, non contestés en leur quantum par M. [S] [N] [B].

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur la demande de dommages-intérêts de l'URSSAF Rhône-Alpes et l'amende civile :

Au soutien de sa demande de dommages-intérêts, l'URSSAF Rhône-Alpes fait valoir à juste titre qu'en maintenant sa contestation dans le but de se soustraire à ses obligations, résultant de son affiliation au régime de sécurité sociale, M. [S] [N] [B] démontre sa mauvaise foi, ce qui cause à l'organisme social un préjudice financier spécifique distinct des frais irrépétibles engagés.

Il convient d'allouer à l'URSSAF Rhône-Alpes la somme de 2 000 € à titre de dommages-intérêts.

En revanche il n'y a pas lieu de prononcer une amende civile. Le jugement déféré sera réformé sur ce point.

Sur les mesures accessoires :

Pour des raisons d'équité, M. [S] [N] [B] sera condamné à payer à l'URSSAF Rhône-Alpes la somme de 3 000 € au titre des frais irrépétibles que l'intimée a été contrainte d'exposer pour la présente procédure.

En application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile, M. [S] [N] [B], qui succombe, sera condamné aux dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Infirme le jugement déféré en ce qu'il a condamné M. [K] [S] [N] [B] à une amende civile de 10 000 € ;

Statuant à nouveau sur le chef infirmé,

Dit n'y avoir lieu à amende civile ;

Confirme le jugement déféré pour le surplus ;

Y ajoutant,

Déboute M. [K] [S] [N] [B] de toutes ses demandes ;

Condamne M. [K] [S] [N] [B] à payer à l'URSSAF Rhône-Alpes la somme de 2 000 € à titre de dommages-intérêts ;

Condamne M. [K] [S] [N] [B] à payer à l'URSSAF Rhône-Alpes la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [K] [S] [N] [B] aux dépens.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Mme Magali DURAND-MULIN, Conseiller faisant fonction de Président et par Mme Kristina YANCHEVA, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GreffierLe Conseiller


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Ch.secu-fiva-cdas
Numéro d'arrêt : 20/01162
Date de la décision : 23/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-23;20.01162 ?
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