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14/06/2022 | FRANCE | N°20/00135

France | France, Cour d'appel de Grenoble, Ch. sociale -section a, 14 juin 2022, 20/00135


C1



N° RG 20/00135



N° Portalis DBVM-V-B7E-KJPD



N° Minute :

















































































Copie exécutoire délivrée le :





Me Célia LAMY



la SELARL DAUPHIN ET MIHAJLOVIC

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


>COUR D'APPEL DE GRENOBLE



Ch. Sociale -Section A

ARRÊT DU MARDI 14 JUIN 2022





Appel d'une décision (N° RG 18/00080)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VIENNE

en date du 04 novembre 2019

suivant déclaration d'appel du 02 Janvier 2020



APPELANT :



Monsieur [K] [M]

324, Chemin du Marais

38121 CHONAS L'AMBALLAN



représenté par Me Célia LAMY,...

C1

N° RG 20/00135

N° Portalis DBVM-V-B7E-KJPD

N° Minute :

Copie exécutoire délivrée le :

Me Célia LAMY

la SELARL DAUPHIN ET MIHAJLOVIC

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

Ch. Sociale -Section A

ARRÊT DU MARDI 14 JUIN 2022

Appel d'une décision (N° RG 18/00080)

rendue par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VIENNE

en date du 04 novembre 2019

suivant déclaration d'appel du 02 Janvier 2020

APPELANT :

Monsieur [K] [M]

324, Chemin du Marais

38121 CHONAS L'AMBALLAN

représenté par Me Célia LAMY, avocat postulant inscrit au barreau de GRENOBLE,

et par Me Pierre LAMY de la SELARL CABINET PIERRE LAMY DE SAINT JULIEN ET ASSOCIÉS, avocat plaidant inscrit au barreau de LYON,

INTIMEE :

Madame [R] [V]

née le 29 Janvier 1971 à SALLANCHES (74) (74700)

de nationalité Française

4B, Chemin des Pautus

26600 PONT DE L'ISERE

représentée par Me Josette DAUPHIN de la SELARL DAUPHIN ET MIHAJLOVIC, avocat postulant inscrit au barreau de GRENOBLE,

et par Me Michel NICOLAS, avocat plaidant au barreau de LYON,

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Valéry CHARBONNIER, Conseillère faisant fonction de Présidente,

Madame Gaëlle BARDOSSE, Conseillère,

Madame Magali DURAND-MULIN, Conseillère,

DÉBATS :

A l'audience publique du 29 Mars 2022,

Mme Gaëlle BARDOSSE, Conseillère chargée du rapport, assistée de Mme Mériem CASTE-BELKADI, Greffière, a entendu les parties en leurs conclusions et observations, les parties ne s'y étant pas opposées conformément aux dispositions de l'article 805 du code de procédure civile.

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 14 Juin 2022, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.

L'arrêt a été rendu le 14 Juin 2022.

Exposé du litige :

M. [M] exerce en non individuel une activité de taxi.

Mme [R] [V] a été embauchée par M. [M] selon contrat de travail à durée indéterminée à compter du 8 décembre 2014 en qualité de chauffeur de taxi.

Mme [V] a fait l'objet d'un arrêt de travail pour maladie à compter du 9 janvier 2016.

Mme [V] a saisi le Conseil de prud'hommes de Vienne aux fins de voir prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail et d'obtenir la condamnation de M. [M] à lui payer un rappel de salaire, diverses indemnités afférentes à la rupture de la relation de travail, les dommages et intérêts au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse, outre une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 4 novembre 2019, le Conseil de prud'hommes de Vienne a :

Prononcé la résiliation judiciaire de Mme [V] aux torts de M. [M] à la date du 21 octobre 2019,

Dit et jugé que cette résiliation produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

En conséquence,

Condamné M. [M] à verser à Mme [V] les sommes suivantes :

8000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

3245,12 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

324,51 € au titre des congés payés afférents,

1009,23 €s au titre d'indemnité de licenciement,

8055,97 €s à titre de rappel de salaire sur supplémentaires,

805,59 € au titre des congés payés afférents,

2000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Rappelé que les intérêts courts de plein droit au taux légal à compter de la saisine du Conseil de prud'hommes, en ce qui concerne les créances de nature salariale et à compter du prononcé de la présente décision pour les autres sommes allouées,

Rappelé qu'aux termes des dispositions de l'article R. 1454-28 du code du travail, sont exécutoires de droit à titre provisoire les jugements ordonnant la délivrance de toutes pièces que l'employeur est tenu de remettre (bulletins de paie, certificat de travail'), ainsi que les jugements ordonnant le paiement des sommes au titre des rémunérations et indemnités visées à l'article R. 1454-1 du code du travail dans la limite de neuf mensualités, étant précisé que la moyenne des salaires des trois derniers mois doit être fixée à la somme de 1622,50 euros,

Condamné M. [M] à remettre à Mme [V] une attestation pôle emploi, un certificat de travail et les bulletins de salaire rectifiés en fonction des condamnations prononcées sous astreinte de 50 € par jour de retard et par document à partir du 15e jour suivant la notification de la présente décision,

Le conseil de prud'hommes de Vienne, en sa formation de jugement, se réserve expressément le droit de liquider ladite astreinte.

Débouté M. [M] de sa demande de consignation des sommes auxquelles il est condamné ainsi que de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamné M. [M] aux entiers dépens de l'instance.

La décision ainsi rendue a été notifiée aux parties par lettres recommandées avec avis de réception.

M. [M] en a relevé appel par déclaration de son conseil au greffe de la présente juridiction le 2 janvier 2020.

A l'issue de ses conclusions notifiées par voie électronique le 4 juin 2021, M. [M] demande à la cour de :

Confirmer le jugement ce qu'il a fixé le salaire moyen de Mme [V] à la somme de 1622,56 € bruts,

Infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamné à régler un rappel de salaire au titre des heures supplémentaires,

Infirmer le jugement en ce qu'il a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur,

Débouter Mme [V] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

A titre subsidiaire,

Infirmer le jugement est cantonné le montant de l'indemnité pour licenciement sans cause et sérieuse à une somme équivalente à un mois de salaire soit 1 622,56 € en application des dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail dans sa rédaction actuelle qui s'applique au litige,

Infirmer le jugement dans son appréciation de l'ancienneté de Mme [V] et limiter le montant de l'indemnité de licenciement à 439,64 € nets,

Infirmer le jugement ce qu'il l'a condamné à régler à Mme [V] la somme de 2000 € s au titre de l'article 700 du code de procédure civile et, au contraire, la condamnée à lui payer sur ce fondement la somme de 2 000 €,

La débouter de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

La condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel.

A l'issue de ses conclusions notifiées par voie électronique le 2 février 2022, Mme [V] demande à la cour de :

Confirmer le jugement rendu le 4 novembre 2019 par le conseil de prud'hommes de Vienne en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

Rejeter les demandes, fins et conclusions de M. [M],

Condamner M. [M] lui payer une somme de 3 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamner M. [M] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 15 mars 2022.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère à la décision attaquée et aux dernières conclusions déposées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur les heures supplémentaires :

Moyens des parties

Mme [V] fait valoir qu'elle a demandé par un courrier en date du 2 février 2016 la régularisation d'heures supplémentaires effectuées et non payées. Elle n'avait pas l'obligation de demander mensuellement le paiement des heures supplémentaires.En conséquence, il ne peut lui être reproché le caractère tardif de sa demande. Dans son courrier en réponse en date du 7 février 2016, l'employeur reconnaît sans aucune ambiguïté la réalisation d'heures supplémentaires et indique avoir rémunéré lesdites heures par des primes, ce qui n'est pas autorisé. Elle fournit un décompte détaillé hebdomadaire et journalier ainsi qu'un agenda de l'année 2015 qu'elle remplissait au fur et à mesure de l'exécution de son contrat de travail pour établir la réalité des heures supplémentaires qu'elle a effectuées. Elle estime que ces éléments sont suffisamment précis pour permettre à l'employeur d'y répondre et que les calculs produits par l'employeur sont erronés notamment en ce qu'ils ne prennent pas en compte le temps d'attente entre deux courses, qui constitue du temps de travail effectif, puisqu'elle ne pouvait pas vaquer librement à ses occupations. Contrairement aux allégations d'employeur, elle n'a pas bénéficié de repos compensateurs en remplacement du paiement de ses heures supplémentaires. En outre, elle n'a jamais bénéficié de contrepartie en repos obligatoires pour les heures supplémentaires qu'elle a effectuées au-delà du contingent annuel.

M. [M] fait valoir pour sa part, que la salariée lui a présenté de manière tardive sa demande de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires, et que celle-ci ne pouvait en conséquence qu'être rejetée.

Les pièces versées aux débats par la salariée pour établir l'existence d'heures supplémentaires n'ont pas de valeur probante. Dans tous les cas les calculs produits comportent de nombreuses incohérences. Il indique verser des éléments permettant d'établir de manière précise le temps de travail effectif de la salariée de la salariée et démontrer avoir payé la salariée des heures supplémentaires effectuées. En outre, la salariée a bénéficié de repos compensateurs en contrepartie de certaines heures supplémentaires et elle était libre de vaquer à ses occupations pendant les temps d'attente, ceci ne constituant pas du temps de travail effectif.

Sur ce,

Aux termes de l'article L. 3121-1 du code du travail, la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles.

Selon l'article L. 3121-27 du même code, la durée légale de travail effectif des salariés à temps complet est fixée à trente-cinq heures par semaine.

La durée légale du travail constitue le seuil de déclenchement des heures supplémentaires payées à un taux majoré dans les conditions de l'article L. 3121-28 du code du travail, les heures supplémentaires devant se décompter par semaine civile selon l'article L. 3121-29.

Selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

M. [M] fait tout d'abord valoir que la salariée a présenté sa demande de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires de manière tardive, en ce qu'elle a attendu un mois après le début de son arrêt maladie pour formuler une réclamation au titre des heures supplémentaires fondée sur une appréciation erronée et injustifiée de son temps de travail.

Toutefois, M. [M] ne tire aucune conséquence juridique particulière de cette allégation, et ne soulève aucune fin de non-recevoir tirée de la prescription de sa demande, reprise au dispositif de ses conclusions.

En conséquence, la cour n'est saisie d'aucune demande à ce titre.

Sur le fond, pour établir qu'elle a effectué des heures supplémentaires non rémunérées, la salariée verse aux débats les éléments suivants :

Un agenda de l'année 2015 indiquant, pour chaque journée travaillée, l'ensemble des courses réalisées et, pour chacune d'entre elles, l'horaire de départ, la salariée ayant en outre indiqué l'horaire de début et de fin de sa journée de travail ;

Un tableau établi à partir des données de l'agenda, décomptant l'ensemble des heures travaillées par jour calculées à partir de l'horaire de départ et l'horaire de retour, la salariée déduisant toutefois certaines périodes en cours de journée lorsque celles-ci sont mentionnées comme « pauses » dans l'agenda ;

Un tableau manuscrit indiquant l'ensemble des heures supplémentaires réalisées selon le taux de majoration, pour chacune des semaines de l'année 2015 ;

Un tableau informatique reprenant l'ensemble de ces informations (horaires de début et de fin de journée, nombre d'heures supplémentaires réalisées par semaine), et proposant un calcul de la somme due par l'employeur au titre du rappel de salaire pour les heures supplémentaires effectuées et non payées.

Les éléments détaillés contenus dans l'agenda, dont l'examen fait ressortir qu'il a bien été rempli au fur et à mesure de ses journées de travail, et non a posteriori, constituent un ensemble d'éléments suffisamment précis permettant à l'employeur, qui doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.

Après examen de l'ensemble de ces pièces, la cour relève que la salariée a parfois commis des erreurs en reportant les horaires de départ et d'arrivée indiqués dans son agenda dans le tableau décomptant ses heures travaillées par jour, et que le tableau manuscrit dans lequel elle calcule les heures supplémentaires qu'elle prétend avoir effectuées en fonction de leur taux de majoration fait état de calculs différents de ceux contenus dans le tableau informatique, la salariée indiquant elle-même dans ses écritures qu'elle n'a pas retenu les mêmes bases de calcul (prenant en compte le trajet domicile lieu de travail dans un cas, mais pas dans l'autre ; incluant dans son calcul une contrepartie en repos compensateur pour les heures supplémentaires dépassant le contingent annuel dans un cas et pas dans l'autre). Il existe ainsi des incohérences entre ces différents éléments, empêchant la cour de tenir les différents calculs produits par la salariée comme une retranscription fidèle des éléments contenus dans l'agenda.

M. [M] fait valoir d'une part, que le temps d'attente entre deux courses ne constitue pas du temps de travail effectif, et que ce temps aurait donc dû être déduit du calcul du temps de travail réalisé par la salariée, d'autre part, que le temps de trajet entre le domicile et le lieu de travail ne constitue pas du temps de travail effectif, enfin que la salariée n'a pas déduit de ses calculs les heures supplémentaires dont le paiement a été remplacé par une contrepartie en repos.

L'employeur verse également aux débats un certain nombre de SMS de la salariée dans lesquels celle-ci lui transmet ses heures de travail, la cour constatant que ces SMS reprennent les horaires de début et de fin de journée mentionnés par la salariée dans son agenda, en tenant compte des éventuelles pauses également indiquées dans l'agenda.

M. [M] verse également un tableau contenant l'ensemble des courses réalisées par la salariée avec pour chacune d'entre elles, le nom du client, l'horaire de départ et l'horaire de fin de la course, le lieu d'arrivée et le lieu de départ, le montant de la course, le numéro de facture, ainsi que d'autres informations comptables, ces tableaux ayant manifestement été réalisés, pour des besoins comptables, au fur et à mesure de la relation contractuelle.

Enfin, M. [M] produit deux tableaux établis dans le cadre de la présente procédure, calculant le temps de travail effectif de la salariée, en tenant compte exclusivement de l'horaire de départ et de fin de chaque course, excluant ainsi les temps d'attente entre chacune des courses, et le temps de trajet entre le domicile de la salariée et le lieu de prise en charge du premier client.

Il ressort de l'ensemble de ces éléments que les parties s'opposent, d'une part, sur le point de savoir si les temps d'attente entre deux clients doivent ou non être considérés comme du temps de travail effectif, et en conséquence, être pris en compte dans le calcul de la durée effective de travail, ainsi que sur le point de savoir si le paiement de certaines des heures supplémentaires pouvait être remplacé par des repos compensateurs, et si, dans le cas d'espèce, la salariée a bien bénéficié de tels repos.

En revanche, il ressort des écritures de la salariée que celle-ci ne considère pas que le temps de trajet entre son domicile et le lieu de prise en charge du premier client constitue du temps de travail effectif, conformément aux dispositions de l'article L. 3121-4 du code du travail, dans sa version en vigueur à l'époque, la salariée ayant déduit cette durée dans son dernier tableau établissant la durée de travail effectif à partir duquel elle a calculé le rappel de salaire qui lui est dû, la cour relevant en outre que la salariée ne soutient pas que ces temps de trajet auraient dû, lorsqu'ils dépassaient le temps normal de trajet, faire l'objet d'une contrepartie soit sous forme de repos, soit financière, conformément aux dispositions de ce même article.

S'agissant du temps le temps d'attente entre deux courses, aux termes de l'article L. 3121-1 du code du travail, dans sa version en vigueur à l'époque des faits, la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles.

En outre, selon l'article 2, I, du décret n°2003-1242 du 22 décembre 2003 relatif à la durée du travail dans les entreprises de transport routier de personnes, applicable au litige, la durée du travail effectif définie au premier alinéa de l'article L. 212-4 du code du travail est égale à l'amplitude de la journée de travail, définie au I de l'article 7, diminuée de la durée totale des coupures et du temps consacré aux repas, à l'habillage et au casse-croûte, dans le respect des dispositions de l'article L. 212-4 du code du travail selon lesquelles le temps nécessaire à la restauration ainsi que les temps consacrés aux coupures sont considérés comme du temps de travail effectif lorsque les critères définis au premier alinéa du même article sont réunis.

Les modalités selon lesquelles les temps de coupure et les temps de restauration sont considérés comme du temps de travail effectif en application des dispositions de l'article L. 212-4 du code du travail peuvent être déterminées, pour la branche, par accord collectif de branche ou, pour l'entreprise ou l'établissement, par accord d'entreprise ou d'établissement. Les accords conclus à l'issue des négociations engagées dans le cadre du présent alinéa peuvent également déterminer les contreparties qui sont, le cas échéant, attribuées aux personnels roulants pour ces temps de coupures ou de restauration, auxquels ces salariés sont assujettis, et que ces accords ne considéreraient pas comme du temps de travail effectif.

Il est constant que durant les temps d'attente entre deux courses, la salariée n'était pas tenue de se rendre aux locaux de l'entreprise, et pouvait parfois, se rendre à son domicile. Toutefois, il n'est pas non plus contestable que la salariée n'avait pas cette possibilité entre chacune de ses courses, compte tenu des lieux dispersés de prise en charge et d'accompagnement des clients.

Par ailleurs, M. [M] ne fournit aucune explication et ne verse aux débats aucun élément permettant de contredire les allégations de la salariée selon lesquelles elle devait, durant ces périodes, se tenir à la disposition de son employeur, qui pouvait lui communiquer à n'importe quel moment une nouvelle course à effectuer.

L'employeur ne contredit pas non plus la salariée, lorsque celle-ci soutient que, s'agissant des rendez-vous médicaux, elle était tenue d'attendre sur place, afin de raccompagner le client après son intervention médicale.

Enfin, la cour relève que la salariée a parfois déduit de la comptabilisation de la durée effective de travail, certaines périodes particulièrement longues entre deux courses.

En conséquence, il y a lieu de retenir que le temps d'attente entre deux courses constitue bien du travail effectif, et ne constitue pas une période de coupure au sens des dispositions susvisées de l'article 2, I, du décret n°2003-1242 du 22 décembre 2003, la salariée restant à la disposition de son employeur durant cette période et ne pouvant vaquer librement à ses occupations, dès lors qu'elle n'avait aucune connaissance de l'horaire de fin de la période d'attente.

En conséquence, c'est à tort que l'employeur a déduit ces temps d'attente entre chacune des courses du calcul du temps de travail effectif accompli par la salariée durant l'année 2015.

Sur la possibilité de prévoir une contrepartie sous forme de repos au titre des heures supplémentaires, selon l'article L. 3121-22 du code du travail, dans sa version en vigueur applicable au litige, les heures supplémentaires accomplies au-delà de la durée légale hebdomadaire fixée par l'article L. 3121-10, ou de la durée considérée comme équivalente, donnent lieu à une majoration de salaire de 25 % pour chacune des huit premières heures supplémentaires. Les heures suivantes donnent lieu à une majoration de 50 %.

Une convention ou un accord de branche étendu ou une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement peut prévoir un taux de majoration différent. Ce taux ne peut être inférieur à 10 %.

Toutefois, selon l'article L. 3121-24 du même code, dans sa rédaction en vigueur à l'époque du litige, une convention ou un accord collectif d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, une convention ou un accord de branche peut prévoir le remplacement de tout ou partie du paiement des heures supplémentaires, ainsi que des majorations prévues à l'article L. 3121-22, par un repos compensateur équivalent.

Dans les entreprises dépourvues de délégué syndical non assujetties à l'obligation annuelle de négocier prévue à l'article L. 2242-1, ce remplacement peut être mis en place par l'employeur à condition que le comité d'entreprise ou les délégués du personnel, s'ils existent, ne s'y opposent pas.

La convention ou l'accord d'entreprise ou le texte soumis à l'avis du comité d'entreprise ou des délégués du personnel peut adapter les conditions et les modalités d'attribution et de prise du repos compensateur de remplacement à l'entreprise.

Et selon l'article L. 3121-25 du même code, dans sa version applicable au litige, les heures supplémentaires donnant lieu à un repos compensateur équivalent ne s'imputent pas sur le contingent annuel d'heures supplémentaires.

Il est constant que ni M. [M] ni Mme [V] n'allèguent que la relation de travail serait soumise à des dispositions conventionnelles particulières, le contrat de travail ne visant par ailleurs aucune convention collective, de même que les bulletins de salaire de la salariée.

Il ressort de l'article 4 du contrat de travail du 8 décembre 2014, que les parties ont convenu que la salariée pourrait, dans le cadre des nécessités du service, être amenée à effectuer des heures supplémentaires, dans la limite du contingent annuel, que ces heures seront « en priorité, récupérées », et qu'à défaut, « elles seront rémunérées (à la salariée) au taux en vigueur ».

Toutefois, M. [M] ne verse aux débats aucun élément permettant à la cour de constater qu'il avait prévu le remplacement de tout ou partie du paiement des heures supplémentaires, ainsi que des majorations prévues à l'article L. 3121-22, par un repos compensateur équivalent, selon les modalités prévues par les dispositions susvisées de l'article L. 3121-24 du code du travail, sans sa version applicable à l'époque des faits.

Ainsi, la cour relève que ni le contrat de travail ni aucun document versé aux débats ne prévoit le nombre d'heures supplémentaires dont le paiement peut être remplacé par un repos compensateur.

Il en résulte que M. [M] n'avait pas la possibilité de remplacer le paiement des heures supplémentaires réalisées par la salariée par des repos compensateurs.

Au surplus, si M. [M] allègue que le paiement d'un nombre important d'heures supplémentaires aurait été remplacé par des repos compensateurs, il n'en fait nullement la démonstration, la cour constatant ainsi qu'aucun des bulletins de paie versés aux débats par les parties portant sur la période litigieuse, soit l'année 2015, ne fait mention de repos compensateurs pris par la salariée.

En outre, l'employeur n'ayant pas la possibilité de remplacer le paiement des heures supplémentaires par des repos compensateurs, il ne peut être retenu que les journées indiquées comme non travaillées dans l'agenda qui n'apparaissent pas en tant que congés payés sur les bulletins de paie seraient des repos compensateurs.

Il n'y a donc pas lieu de déduire ces journées non travaillées des heures supplémentaires effectuées et non payés en ce qu'elles seraient des repos compensateurs.

En revanche, il ressort de ces mêmes bulletins de paie qu'ils font systématiquement mention d'un nombre d'heures supplémentaires réalisées identique, soit 10 heures par mois.

M. [M] n'apporte aucune explication sur la manière dont il a calculé ces heures supplémentaires, alors qu'il n'est pas contestable que la salariée réalisait des horaires de travail variables, rendant de fait impossible, toute régularité dans l'accomplissement d'heures supplémentaires.

Ces heures ayant été payées, elles doivent cependant être déduites du nombre des heures supplémentaires dues à la salariée.

Eu égard à l'ensemble de ces constatations et des éléments produits par les parties, la cour retient que la salariée a réalisé des heures supplémentaires qui ne lui ont pas été payées par son employeur, la cour fixant, sur le fondement de ces différents éléments, la somme due à ce titre par M. [M] à la somme de 7 000 euros, au paiement de laquelle l'employeur doit être condamné, outre 700 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés y afférents, par réformation du jugement déféré sur le quantum de la condamnation de ce chef.

S'agissant des primes d'assiduité et d'entretien versées à la salariée par l'employeur, celui-ci indique dans son courrier en date du 16 février 2016 qu'elles ont été payées en contrepartie de la variation des horaires de la salariée et non en paiement des heures supplémentaires.

La salariée ne verse aux débats aucun élément permettant d'accréditer son allégation selon laquelle ces primes auraient permis à l'employeur de lui rémunérer un certain nombre d'heures supplémentaires réalisées par elle, en lieu et place de les déclarer comme telles sur ses bulletins de paie, l'employeur ayant retenu un mode de calcul du travail effectif réalisé par la salariée erroné en omettant de tenir compte des temps d'attente, aboutissant à un calcul des heures supplémentaires minoré par rapport au nombre d'heures réel effectué par la salariée.

La salariée ne sollicite pas la condamnation de l'employeur au titre du travail dissimulé. En conséquence, il n'y a pas lieu de statuer sur ce point.

Par ailleurs, la salariée ne demande pas non plus la condamnation de l'employeur à lui verser des dommages et intérêts pour manquement à son obligation de respecter un délai de carence en cas de modification des horaires de travail de la salariée. En conséquence, il n'y a pas lieu de statuer sur le point de savoir si l'employeur était habilité à verser des primes à la salariée pour l'un ou l'autre des motifs invoqués par les parties.

Sur la résiliation judiciaire du contrat de travail :

Moyens des parties

Pour justifier la résiliation judiciaire de son contrat de travail, Mme [V] invoque les griefs suivants à l'encontre de son employeur :

Elle n'a jamais passé de visite médicale auprès de la médecine du travail, alors qu'elle souffrait de problèmes de santé importants,

La législation en matière de durée du travail n'a pas été respectée : non-respect de la durée maximale quotidienne hebdomadaire de travail ;

Ses heures de travail variaient régulièrement de la veille pour le lendemain, ce qui la plaçait à la disposition permanente de son employeur,

La législation en matière d'heures supplémentaires n'a pas été respectée : non-paiement de ses heures et absence de repos compensateurs ; pas de contrepartie en repos obligatoire ; paiement d'une partie des heures supplémentaires effectué par le versement d'une prime.

M. [M] fait valoir que l'absence de visite médicale d'embauche au mois de décembre 2014 ne constitue pas un manquement à l'obligation de sécurité et dans tous les cas ne peut justifier une demande de résiliation judiciaire du contrat de travail lorsque que cette absence ne résulte pas d'un refus de l'employeur mais d'une simple négligence de sa part. La salariée n'établit pas l'existence d'un lien entre l'absence de visite médicale d'embauche et ses problèmes de santé survenus au mois de mai 2016.

Les manquements à la législation en matière de durée maximale de temps de travail et d'heures supplémentaires ne sont pas établis.

La salariée a bénéficié de la flexibilité de ses horaires de travail, qui lui a permis de faire face à des contraintes personnelles, et elle ne peut aujourd'hui en faire le reproche à son employeur, alors qu'elle a régulièrement sollicité pour qu'il modifie ses plannings de travail.

La salariée confond la durée effective de travail et l'amplitude de l'horaire de travail, lesquelles ne se confondent pas pour les chauffeurs, car les temps d'attente ne doivent pas être pris en compte dans le calcul de la durée effective de travail.

Enfin, M. [M] fait valoir que la Cour de cassation a jugé que le non-paiement d'heures supplémentaires sur une durée d'environ un an ne constitue pas un manquement suffisamment grave pour justifier une demande de résiliation judiciaire du contrat de travail.

Sur ce,

En application des dispositions de l'article 1224 du code civil, en cas d'inexécution de ses obligations par l'une des parties, l'autre partie peut demander au juge de prononcer la résiliation du contrat.

La résiliation judiciaire à la demande du salarié n'est justifiée qu'en cas de manquements de l'employeur d'une gravité suffisante pour empêcher la poursuite de la relation de travail.

Aux termes de l'article R. 4624-10 du code du travail, dans sa version en vigueur applicable au litige, le salarié bénéficie d'un examen médical avant l'embauche ou au plus tard avant l'expiration de la période d'essai par le médecin du travail.

Les salariés soumis à une surveillance médicale renforcée en application des dispositions de l'article R. 4624-18 ainsi que ceux qui exercent l'une des fonctions mentionnées à l'article L. 6511-1 du code des transports bénéficient de cet examen avant leur embauche.

Aux termes de l'article R. 4624-16 du même code, dans sa rédaction applicable au litige, le salarié bénéficie d'examens médicaux périodiques, au moins tous les vingt-quatre mois, par le médecin du travail. Ces examens médicaux ont pour finalité de s'assurer du maintien de l'aptitude médicale du salarié au poste de travail occupé et de l'informer sur les conséquences médicales des expositions au poste de travail et du suivi médical nécessaire.

Sous réserve d'assurer un suivi adéquat de la santé du salarié, l'agrément du service de santé au travail peut prévoir une périodicité excédant vingt-quatre mois lorsque sont mis en place des entretiens infirmiers et des actions pluridisciplinaires annuelles, et, lorsqu'elles existent, en tenant compte des recommandations de bonnes pratiques existantes.

En l'espèce, il ressort du courrier de l'employeur à la salariée en date du 16 février 2016, que celui-ci reconnaît ne pas lui avoir fait bénéficier d'un examen médical avant son embauche, arguant que la salariée avait passé un tel examen chez son précédent employeur l'année précédente, et qu'il n'était pas tenu en conséquence par cette obligation, mais indique dans ce même courrier qu'il planifiera un examen dès le retour de la salariée d'arrêt de travail.

Mme [V], qui soutient qu'elle rencontrait des problèmes de santé et que cette visite était nécessaire afin de vérifier ses aptitudes à exercer les fonctions de chauffeur de taxi, ne verse aux débats aucun élément permettant de démontrer que M. [M] avait connaissance de ses problèmes de santé et que ce manquement à son obligation de faire bénéficier la salariée d'un examen médical avant son embauche lui aurait été préjudiciable.

Aux termes de l'article L. 3121-18 du code du travail, la durée quotidienne de travail effectif par salarié ne peut excéder dix heures, sauf :

1° En cas de dérogation accordée par l'inspecteur du travail dans des conditions déterminées par décret ;

2° En cas d'urgence, dans des conditions déterminées par décret ;

3° Dans les cas prévus à l'article L. 3121-19.

Et aux termes de l'article L. 3121-20 du même code, au cours d'une même semaine, la durée maximale hebdomadaire de travail est de quarante-huit heures.

Il ressort de l'agenda de l'année 2015 produit par la salariée que celle-ci a régulièrement effectué des journées de travail dont la durée de travail effectif était supérieur à dix heures, ainsi que plusieurs semaines au cours desquelles la durée maximale de travail a été supérieure à quarante-huit heures.

Le seul dépassement de la durée maximale de travail effectif cause un préjudice au salarié, en ce qu'il prive le salarié de son droit au repos, et porte ainsi atteinte à sa santé et à sa sécurité. Ces manquements sont établis.

Il a été retenu précédemment que M. [M] n'avait pas rigoureusement décompté le temps de travail de la salariée, et avait manqué de lui payer des heures supplémentaires qui lui étaient dues.

Il en résulte que M. [M] n'a pas non plus décompté rigoureusement les heures supplémentaires, permettant de déterminer précisément le dépassement du contingent annuel d'heures supplémentaires, ouvrant droit à la salariée, outre le paiement des heures supplémentaires effectuées au-delà de ce contingent, à une contrepartie obligatoire sous forme de repos, conformément aux dispositions de l'article L. 3121-30 du code du travail.

Il ressort en outre des éléments produits par la salariée que celle-ci a effectué un nombre d'heures supplémentaires très largement supérieur au contingent annuel fixé à 220 heures par l'article D. 3121-14-1 du code du travail, dans sa rédaction applicable à l'époque des faits. Ce manquement est établi.

En outre, il ressort de l'agenda versé aux débats par la salariée que ses horaires de travail quotidien variaient régulièrement d'un jour sur l'autre. M. [M] ne verse aux débats aucun élément, tel qu'emplois du temps communiqués à la salariée, permettant à la cour de constater que la salariée était informée suffisamment tôt de ses horaires de travail, qu'elle pouvait ainsi prévoir son rythme de travail, et qu'elle n'était en conséquence pas placée à la disposition permanente de son employeur.

Il est, sur ce point, sans incidence que le contrat de travail ait prévu, en son article 4, que « compte tenu de la nature de l'activité de l'entreprise et dans le cadre de l'organisation générale du travail, la répartition des horaires de travail dans la journée et sur les jours de la semaine ne peut pas être définie à l'avance », l'employeur ne pouvant se fonder sur cette disposition pour s'exonérer de son obligation d'informer sa salariée suffisamment tôt de son rythme de travail, impliquant qu'il communique au salarié dans un délai raisonnable par tout moyen ses horaires de travail.

Ce manquement est établi.

Enfin, aux termes de l'article L. 3132-1 du code du travail, il est interdit de faire travailler un même salarié plus de six jours par semaine. Aux termes de l'article L. 3132-2 du même code, le repos hebdomadaire a une durée minimale de vingt-quatre heures consécutives auxquelles s'ajoutent les heures consécutives de repos quotidien prévu au chapitre Ier.

La cour constate que la salariée a, à plusieurs reprises, travaillé plus de six jours par semaine d'affilée, l'empêchant ainsi de bénéficier d'un repos hebdomadaire, conformément aux dispositions susvisées de l'article L. 3132-2 du même code.

Il est sans incidence que la salariée ait pu, comme le soutient l'employeur, demander à faire un grand nombre d'heures de travail, afin de pouvoir bénéficier d'heures de récupération par la suite, l'employeur étant responsable du respect des principes posés par le droit du travail, ayant pour finalité de garantir la santé et la sécurité du travailleur. Ce manquement est établi.

Si l'omission de M. [M] de faire bénéficier la salariée d'une visite préalable à l'embauche, qui résulte manifestement d'une négligence de sa part, ne constitue pas un manquement d'une gravité telle qu'il justifierait la résiliation judiciaire du contrat de travail, les autres manquements établis par la salariée, susceptibles de porter atteinte à la santé et à la sécurité de la salariée, en l'empêchant notamment de bénéficier de périodes de repos suffisantes, sont d'une gravité telle qu'ils empêchent la poursuite de la relation de travail.

Le contrat de travail doit en conséquence être résilié aux torts de l'employeur, par confirmation du jugement déféré, à la date du 21 octobre 2019. La résiliation judiciaire emporte les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La salariée est ainsi bien fondée à prétendre à l'indemnité légale de licenciement, à une indemnité compensatrice de préavis, et à des dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Selon l'article L. 1234-9 du code du travail, le salarié titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminée, licencié alors qu'il compte 8 mois d'ancienneté ininterrompus au service du même employeur, a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité de licenciement. Les modalités de calcul de cette indemnité sont fonction de la rémunération brute dont le salarié bénéficiait antérieurement à la rupture du contrat de travail. Ce taux et ces modalités sont déterminés par voie réglementaire.

Le jugement de première instance, qui a condamné M. [M] à payer à Mme [V] la somme de 1 009,23 € à ce titre, est confirmé de ce chef, le calcul de cette somme n'étant pas contesté par l'employeur.

Selon l'article L. 1234-5 du code du travail, lorsque le salarié n'exécute pas le préavis, il a droit, sauf s'il a commis une faute grave, à une indemnité compensatrice. L'inexécution du préavis, notamment en cas de dispense par l'employeur, n'entraîne aucune diminution des salaires et avantages que le salarié aurait perçus s'il avait accompli son travail jusqu'à l'expiration du préavis, indemnité de congés payés comprise. L'indemnité compensatrice de préavis se cumule avec l'indemnité de licenciement et avec l'indemnité prévue à l'article L. 1235-2.

Le jugement entrepris est confirmé en ce qu'il a condamné l'employeur à payer à Mme [V] la somme de 3 245,12 euros à ce titre, outre 324,51 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés y afférents, les calculs de ces sommes n'étant pas non plus contestés par l'employeur.

Enfin, au titre de l'article L. 1235-3 du code du travail, si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis. Si l'une ou l'autre des parties refuse la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur, dont le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux que cet article prévoit. En cas de licenciement opéré dans une entreprise employant habituellement moins de onze salariés, les montants minimaux fixés par cet article, par dérogation aux montants minimaux et maximaux fixés par l'alinéa précédent.

Il n'est pas contestable que ces dispositions sont applicables aux licenciements prononcés après le 23 septembre 2017, et par conséquent, s'appliquent au cas d'espèce.

A la date de la résiliation judiciaire, la salariée avait cinq ans d'ancienneté et peut donc bénéficier d'une indemnité minimale de 1,5 mois de salaire brut.

La salariée soutient qu'elle est aujourd'hui sans emploi, mais ne produit aucun élément permettant à la cour de constater quelle est sa situation professionnelle et personnelle, et ainsi, de déterminer l'étendue de son préjudice.

Eu égard à son ancienneté au moment de son licenciement, des circonstances dans lesquelles la relation de travail a pris fin, et de la rémunération que percevait la salariée durant la relation de travail, la cour fait sienne l'évaluation du préjudice par les premiers juges, et condamne M. [M] à payer à Mme [V] la somme de 8 000 €s à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Le jugement entrepris est confirmé de ce chef.

Sur les demandes accessoires :

Il y a lieu d'ordonner l'employeur à remettre à Mme [V] les documents de fin de contrats, conformes au présent arrêt, sans qu'il soit nécessaire d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Le jugement déféré est confirmé sur les frais irrépétibles et les dépens.

M. [M], partie perdante, est condamné aux dépens d'appel et à payer à Mme [V] la somme de 2 500 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, cette condamnation emportant nécessairement rejet de sa demande à ce titre.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR, statuant publiquement et contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

CONFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a :

Prononcé la résiliation judiciaire de Mme [V] aux torts de M. [M] à la date du 21 octobre 2019,

Dit et jugé que cette résiliation produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

En conséquence,

Condamné M. [M] à verser à Mme [V] les sommes suivantes :

3 245,12 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

324,51 € au titre des congés payés afférents,

1 009,23 € au titre d'indemnité de licenciement,

8 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

805,59 € au titre des congés payés afférents,

2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamné M. [M] aux entiers dépens de l'instance.

L'INFIRME pour le surplus,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

CONDAMNE M. [M] à payer à Mme [V] les sommes suivantes :

7 000 € à titre de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires outre 700 € de congés payés afférents

2 500 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

ORDONNE à M. [M] à remettre à Mme [V] une attestation pôle emploi, un certificat de travail et les bulletins de salaire rectifiés en fonction des condamnations prononcées dans le présent arrêt sans qu'il y ait lieu d'ordonner une astreinte à ce titre,

DEBOUTE les parties du surplus de leurs demandes,

CONDAMNE M. [M] aux dépens d'appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Valéry CHARBONNIER, Conseillère faisant fonction de Présidente, et par Madame Mériem CASTE-BELKADI, Greffière, à qui la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.

La Greffière, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Grenoble
Formation : Ch. sociale -section a
Numéro d'arrêt : 20/00135
Date de la décision : 14/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-14;20.00135 ?
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